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Dessine-moi un monstre...
Les quant-�-soi
Le capital d�serteur
Ne tuez pas Georges W. Bush !
Dessine-moi un monstre

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Sauver l'Afrique
Pour l'amour de Gaia
S�curit�: la police et l'arm�e
La gouvernance �clat�e


PRODUCTION : LE SECTEUR PRIMAIRE

Préambule

 

Avant de présenter ce texte, je tiens à réitérer une mise en garde importante. Il faut se souvenir que le programme pour une Nouvelle Société, tel que conçu, l'est à l'usage de pays développés ou d'une Nouvelle Société, à échelle planétaire, qui se donne pour mission de rehausser d'abord le niveau de vie des pays sous-développés pour qu'on puisse justement leur appliquer les principes NS. Encore faut-il rappeler qu'un pays développé, ou même un ensemble de pays développés, ne peut appliquer ce programme avec une certitude raisonnable de succès que s'il constitue un espace autarcique. Si une Nouvelle Société ne peut satisfaire à tous ses besoins, elle est dépendante d'autres sociétés néo-libérales et donc du gouvernement actuel de banquiers sous contrôle de shylocks dont le moins qu'on puisse dire est que leur bonne volonté n'est pas acquise au changement.

Pourquoi répéter cette mise en garde ici ? Parce que c'est lorsqu'on parle de production que la tentation est la plus grande, pour un petit pays ou un pays sous-développé, de vouloir appliquer hors contexte une mesure NS, sans égard aux autres mesures dans tous les domaines qui sont là pour l'étayer et dont la somme constitue seule un tout cohérent. Ceci ne veut pas dire qu'il soit impossible d'appliquer seule l'une des propositions de ce site; seulement qu'il faut alors le faire avec une extrême prudence et ne pas s'étonner d'un résultat décevant. Si un joueur déplace ses pièces avec étourderie, ce n'est pas la théorie des Échecs qui est à blâmer

 

0. Introduction

On divise traditionnellement le système de production en trois (3) secteurs: primaire, secondaire, tertiaire. Nous avons cru opportun de ne nous écarter que légèrement de cette classification de base. Le secteur primaire, que nous traitons dans ce texte, recouvre donc d'abord sans exception la transformation initiale des matières premières et l'exploitation des ressources naturelles. Selon les ressources qu'on en exploite, on peut diviser le secteur primaire en sept (7) sous-secteurs: agriculture, élevage, foresterie, extraction, pêche, chasse, production d'énergie. Nous y ajoutons, toutefois, deux volets qui ne correspondent pas à la transformation d'une matière première mais seulement à son utilisation : l'aménagement du territoire et son usage à des fins ludiques. Nous les y avons joints parce qu'il semblait approprié de les traiter ici, compte tenu des liens qui les unissent aux activités du secteur primaire.

Dans une Nouvelle Société, la responsabilité générale du contrôle des activités du secteur primaire, de l'aménagement du territoire et de son usage à des fins ludiques est confiée à un Ministère des ressources naturelles et de l'environnement (MRNE). Dans une Nouvelle Société globale, à échelle planétaire, ce Ministère peut comporter, en plus de ces structures d'administration et de planification qu'on retrouve dans tous les ministères, jusqu'à dix (10) directions générales (DG) opérationnelles, correspondant aux sept (7) sous-secteurs primaires que nous venons d'identifier, à l'aménagement du territoire, à l'usage de celui-ci à des fins ludiques et, enfin, à l'environnement avec ses études, ses politiques, et ses mesures de contrôle.

Ce Ministère à dix (10) directions générales est le modèle théorique, celui qui prévaudrait dans une Nouvelle Société globale. En pratique, dans le contexte d'une NS uniquement nationale, ce sont les besoins de chaque pays qui déterminent la structure du MRNE. On a certes besoin d'une direction générale responsable des industries extractives en Belgique, mais sans doute pas aux Pays-Bas. Besoin d'une direction générale de la foresterie en Finlande, mais pas au Yémen. Quand une direction générale ne s'impose pas, les pouvoirs qui seraient les siens sont simplement joints à ceux d'une autre structure dont le mandat est alors élargi. On peut ainsi regrouper agriculture et élevage, chasse et pêche, etc.

Lorsqu'on souhaite qu'une direction générale achète et vende sur les marchés, qu'elle soit responsable de ses transactions et qu'elle garde indéfiniment une autonomie financière distincte des fonds consolidés de l'État, on lui accorder l'autonomie requise et on en change la désignation. Elle devient un « Office »dans une Nouvelle société globale ou un « Office National » dans une NS à la dimension d'un État. Pour éviter les redondances, nous parlerons toujours par la suite d'« Office National » ; il faut se souvenir que ses pouvoirs resteront les mêmes dans une NS globale, seule changeant sa désignation et, naturellement, le territoire où ceux-ci s'appliqueront.

Comme nous l'avons dit ailleurs(Texte 710), le rôle de l'État en production, dans une Nouvelle Société, n'est pas sauf exceptions de produire, mais d'AIDER à produire. L'État veille à maintenir, entre producteurs, une concurrence qui est la meilleure garantie de leur motivation et d'un sain dynamisme économique; il met donc en place, pour le plus grand bien de la collectivité, des règles du jeu équitables et transparentes ainsi que des mesures de contrôle qui assurent ce dynamisme. Dans le secteur primaire, la responsabilité de l'État est que l'on produise plus, mais dans le respect de l'environnement et en tenant compte de l'évanescence des ressources non-renouvelables. C'est aussi de veiller aussi à ce que l'on produise mieux ; en matière de production, la productivité est la condition de la richesse et l'ultime critère du développement.

Chacun des sous-secteurs du primaire a sa spécificité qui suggère qu'on le gère à sa façon. Nous verrons donc plus loin, pour chacun de ces sous-secteurs, le rôle que doit y jouer l'État et les mesures qu'il doit y mettre en place, dans cette optique d'aider et non de se substituer à l'initiative privée. Tous les sous-secteurs, cependant, ont ceci en commun de correspondre à une utilisation spécifique du territoire. Même les énergies solaire et éolienne exigent, pour être captées efficacement, une utilisation de la surface du sol. Il peut y avoir chevauchement ­ chasser dans une exploitation forestière, ou pêcher dans la rivière qui alimente un barrage ­ mais ils ne sont pas significatifs. La Terre, incluant air, mers, rivières et océans, est la première ressource naturelle et celle dont dépend notre accès à toutes les autres ressources naturelles. Le sol doit avoir une destination première. C'est donc de celle-ci que nous parlerons d'abord.

 

 

1. AMÉNAGEMENT DU TERITOIRE ET REPRISE DES SOLS (DGAT)

 

1.1 Fonctions et pouvoirs de la DGAT

 

Au sein d'un Ministère des ressources naturelles et de l'environnement, la première direction générale (DG) est celle responsable de l'aménagement du territoire (DGAT), en ce sens qu'elle détermine en quelque sorte le champ d'activité de toutes les autres, sauf de l'Environnement qui, de par sa nature, recoupe en transversale toutes les activités du Ministère et de l'État lui-même.

C'est la DGAT qui détermine en dernier ressort de l'utilisation première optimale que l'on peut faire du sol et donc du type d'exploitation qu'on veut y promouvoir. Elle constitue d'abord à cette fin un plan maître qui tient compte des données physiques; elle y ajoute ensuite, les modifiant périodiquement ainsi que leurs paramètres, les variables économiques et sociales qui suggèrent d'y apporter des accommodements. Le respect des droits acquis étant l'un des principes directeurs d'une NS (Texte 710), la DGAT n'imposera pas par contrainte l'utilisation des sols qu'elle juge la meilleure; par ses conseils et en profitant des conditions où son intervention est nécessaire, cependant, elle exercera une influence constante qui, à terme, aura pour résultat que prévale cette utilisation optimale.

La DGAT, sous réserves des droits acquis, déterminera l'affectation des sols en en privilégiant la rentabilité maximale dans le respect du patrimoine culturel et de l'environnement. Ce critère de rentabilité maximale aura pour conséquence qu'on puisse parfois transformer en lieu d'extraction d'un minerai rare un site d'exploitation forestière, qu'on fore des puits de pétrole là où paissaient des troupeaux ou qu'on inonde de bonnes terres pour construire un barrage. La DGAT en décidera. Il appartiendra aussi à la DGAT de gérer le problème épineux de la transformation exceptionnelle des terres à vocation agricole en terrains constructibles. Elle le fera avec discernement.

C'est la DGAT qui recommandera le choix des sites d'enfouissement des déchets, sous réserve de l'accord des autorités locales et donc de la compensation qu'exigeront indubitablement ces autorités locales pour donner cet accord. Afin que la négociation de cette compensation de devienne pas simple extorsion, la DGAT veillera à proposer plusieurs sites, indiquant impartialement les mérites et désavantages de chacun. Elle fera le même genre de recommandations chaque fois qu'il sera nécessaire de choisir un site en particulier pour un projet d'intérêt général dont la réalisation pourra signifier un dommage ou même un désagrément pour une collectivité locale ou des particuliers.

Le cadastre, les relevés cartographiques, l'établissement du tracé des routes, lignes de transmission électrique, oléoducs et autres travaux d'infrastructures sont aussi sous l'autorité de la DGAT. Celle-ci doit tenir compte des études environnementales et des recommandations faites par la Direction générale de l'Environnement, mais elle conserve la décision administrative finale, sous réserve, naturellement, des droits de gérance du Ministre et du Premier Ministre, ou, en ultime recours, du veto qui résulterait d'une consultation populaire (Texte 6 et seq.)

L'émission de permis de construction est une fonction des autorités locales là où il en existe, mais les critères que celles-ci utilisent sont déterminés par la DGAT et celle-ci doit aussi approuver les plans d'urbanisme que chaque autorité locale est tenue de préparer et de faire respecter. Là où il n'existe pas d'autorité locale, c'est la DGAT qui en exerce directement ces fonctions.

En plus de ces pouvoirs et fonctions courantes, la DGAT a aussi la responsabilité énorme, dès qu'une Nouvelle Société est mise en place, de planifier et de mener à bon terme l'une des opérations fondamentales qui en marquent l'établissement : la reprise de la propriété du sol.

 

1.2. La propriété du sol

 

1.2.1 La reprise

« La propriété » - disait Proudhon ­ « c'est le vol ! ». N'est-il pas évident, en effet, que la terre n'a jamais été appropriée à l'origine que par une occupation de fait d'un territoire, suivie de la force d'en exclure les autres ? Les ressources que la nature nous donne gratuitement, à charge pour nous d'investir le travail requis pour en tirer profit, n'ont jamais non plus été appropriées que par une possession de fait du sol et la force de conserver de façon permanente cette possession d'abord précaire. Quand on remonte la chaîne des titres d'un propriétaire actuel sur la terre ou sur ses ressources, on n'en arrive jamais qu'à cette illégitimité initiale.

En stricte justice, seule l'humanité pourrait collectivement se prétendre légitime propriétaire des ressources naturelles. Une Nouvelle Société globale, dont le gouvernement serait mandaté par l'humanité tout entière, pourrait détenir pour le bien commun un droit éminent sur l'ensemble des ressources planétaires, mais même les droits souverains qu'un État exerce aujourd'hui sur les ressources d'un territoire au nom d'une collectivité sont discutables et risquent d'être un jour discutés.

On pourrait en discuter ici, mais ce n'est pas notre propos. Une Nouvelle Société globale gèrera les ressources planétaires de façon globale, mais, dans la Nouvelle Société à la seule dimension d'un État dont on peut espérer l'avènement prochain, c'est l'État, au nom de la collectivité, qui doit bien agir comme gardien du sol et de son contenu. Nul individu ne peut se prétendre propriétaire d'une parcelle de la Terre. Le sol - la « terre » des Gracques ou de Zapata - ne peut appartenir qu'à tout le monde. Le sol, mais aussi ses ressources: la forêt, les gisements miniers, les sites à potentiel énergétique et les droits que peut avoir aujourd'hui une collectivité sur l'exploitation des océans.

Dans bien des sociétés, aujourd'hui, l'État a permis que le sol et les ressources naturelles appartiennent à des intérêts privés. C'est une erreur qui doit être corrigée. Parfois, en réaction à l'injustice qui a présidé à l'appropriation du sol et dont nous voyons les effets, on propose une redistribution de la propriété du sol entre ceux qui l'exploitent. C'est là une autre erreur qu'il faut éviter. Il n'est pas logique de donner à certains ce qui doit être à tous. D'ailleurs, il y a des millénaires qu'on voit les effets néfastes du parcellement abusif et de l'utilisation inefficace qui résultent de la propriété privée des sols par de petits exploitants. La terre et ses ressources doivent revenir à la collectivité qui en est la seule propriétaire légitime et être confiées à la garde de l'État. La reprise par l'État de la propriété du sol et de ses ressources est une priorité.

Dans une Nouvelle Société, l'État est le gardien de la surface, du fonds, du tréfonds et de leur contenu, le seul ultime responsable de leur exploitation pour le bien commun : le sol appartient à la collectivité et est inaliénable. Cette reprise de la propriété du sol par l'État, toutefois, ne signifie pas que celui-ci doive prendre en charge la production du secteur primaire. À quelques situations exceptionnelles près que nous verrons plus loin, l'État doit au contraire, même dans le secteur primaire et lorsqu'il s'agit d'apporter une première transformation à une ressource naturelle sur laquelle il a réaffirmé les droits de la collectivité, laisser comme dans les autres secteurs la fonction production à l'initiative privée.

La propriété du sol lui-même ne doit pas être cédée aux individus, mais le droit d'exploiter le sol doit leur être concédé, avec efficacité et justice. Lorsque ce droit leur est concédé, l'individu a droit au fruit de son travail. Il est le légitime propriétaire de ce qu'il y a bâti, ou de ce qu'il y a semé jusqu'à ce qu'il l'ait récolté. De la même façon toutes les matières premières, en l'état où nous les livre la nature, appartiennent à tous et doivent être sous la garde de l'État, mais l'individu a droit à la plus value que leur confère son travail et c'est le travail qui crée toute richesse. Un poisson en barque vaut plus qu'un poisson en rivière et cette valeur ajoutée appartient légitimement au pêcheur. Les façons de concilier efficacement propriété de l'Etat et exploitation privée constituent le thème central de cette section.

Quand on dit que la propriété est le vol, toutefois, il serait plus exact de dire que la propriété est le recel. Indubitablement mal acquise au départ, la terre, avec le temps, peut néanmoins avoir été acquise de bonne foi par la suite. Dans une Nouvelle Société, dont le credo de base est de ne léser personne, la reprise de la propriété du sol par l'État est liée à certaines conditions qui garantissent que soient dédommagés de leurs pertes ­ sinon de leur manque à gagner - ceux qui ont acquis la propriété du sol contre valeur alors que celui-ci était encore légalement aliénable. De même doit rester sans discussion à son propriétaire tout ce qui est une valeur ajoutée par le travail.

Quand l'État reprend ses droits sur le sol, il est donc souvent équitable qu'il concède simultanément sur ce sol, à l'ex-propriétaire, un droit d'usage très large découlant du travail que celui-ci y a investi. Ce droit usage qui fait de l'ex-propriétaire un concessionnaire, occupant ou exploitant, n'est pas inusité. Pour ceux qui manient le jargon légal, les conditions de ce droit concédé par l'État à l'ancien propriétaire sont similaires à celle de l'emphytéose, à cette distinction près que la durée n'a pas à en être définie; ce droit est simplement ici limité par les conditions d'utilisation et d'investissement dont on le fait dépendre.

Quand est formellement mise en place une Nouvelle Société, La DGAT a le mandat immédiat de mettre en place les mécanismes requis et de prévoir les compensations qui s'imposent. Elle a, en principe, un an pour le faire; au jour dit, le sol devient la propriété de l'État. Le moment de la passation des titres est fixé à un an de la prise de pouvoir par un gouvernement NS, mais toute évaluation pour fins de compensation est basée sur la valeur en date de cette prise du pouvoir et toutes les transactions foncières conclues après cette date sont réputées l'avoir été sous condition de cette reprise des sols par l'État.

 

1.2.2 Les concessions et compensations

 

Quand a lieu la reprise des sols, elle a lieu sous réserves des droits d'usage et compensations ci-après.

1. L'usage des sols construits reste au propriétaire si ce dernier en fait la demande. Celui-ci demeure propriétaire des bâtiments et conserve le droit ­ dans le respect des règlements en vigueur ­ de les habiter, de les louer ou de les exploiter à tout autre fins productives, de les améliorer, de les vendre, de les détruire, même, à condition de les remplacer par des bâtiments de même nature et destination dont la valeur fiscale soit égale ou supérieure à celle des bâtiments qu'ils remplacent. La DGAT concède de même, à l'ex-propriétaire qui garde l'usage de bâtiments, l'usage du sol attenant aux bâtiments et dont il était aussi propriétaire, à la hauteur de cinq (5) fois la surface au sol construite de ces bâtiments.

2. Sont assimilés à des sols construits, les terrains non construits mais qui ont été viabilisés en y aménageant des voies de circulation ou en y installant des services, à condition pour le propriétaire de déposer un plan des constructions qu'il veut y ériger et de le mettre à exécution dans les (trois) 3 années qui suivent.

3. L'usage des sols non construits mais exploités à des fins productives ­ minières, agricoles, etc. - reste aussi au propriétaire, si ce dernier en fait la demande, à condition que lui ou ses ayant droits y poursuivent une exploitation semblable, dans le respect des règles pertinentes à ce type d'exploitation telles que décrites plus loin.

4. Si des améliorations utiles ­ des chemins ou des fossés d'évacuation des eaux, par exemple - ont été apportées à un terrain que le propriétaire n'entend pas exploiter et donc conserver, la DGAT reprend ce terrain, mais consent s'il y a lieu à l'ex-propriétaire une servitude lui permettant la jouissance normale des terrains dont il conserve l'usage et auxquels ces améliorations sont utiles. Si, ces améliorations servent aussi à d'autres terrains dont la DGAT reprend possession, cependant, l'ex-propriétaire doit recevoir une compensation, établie par évaluation judiciaire, égale au coût de remplacement de ces améliorations moins la valeur de l'usage qu'il en conserve.

5. Le propriétaire du sol qui désire l'exploiter peut, même s'il n'y a encore apporté aucune amélioration, demander que l'usage lui en soit concédé pour trois (3) ans, avec la note « projet non défini en préparation », à charge pour lui alors d'en payer l'impôt à la valeur fiscale qu'il lui aura fixé. Ce terme de trois (3) ans échu, toutefois, son droit d'usage du sol prend fin, à moins qu'il n'y ait érigé un bâtiment ou mis en marche une exploitation productive dont la valeur fiscale déclarée s'ajoute et soit supérieure à celle qu'il avait fixée initialement à ce droit d'usage.

6. Quiconque n'y a pas construit, ne l'a pas exploité et ne désire pas l'exploiter, ne peut demander qu'on lui laisse l'usage du sol. Il peut cependant, s'il apporte la preuve qu'il l'a acquis contre valeur, toucher de la DGAT le prix qu'il en a payé lorsqu'il l'a acquis, indexé au jour de la reprise par la DGAT selon l'indice des prix à la consommation ou une extrapolation qui en tient lieu.

Les droits d'usage consentis par la DGAT sont transmissibles. Ils s'éteignent, toutefois - et les habitations et autres biens immeubles qui y sont aménagés retournent à la DGAT sans compensation - : a) si l'impôt n'en est pas payé dans les 30 jours de l'échéance, la valeur fiscale déclarée des lieux ne pouvant jamais être inférieure, en monnaie indexée, à la valeur initiale déclarée lorsque le droit d'usage du sol a été concédé ; b) si, pendant trois (3) ans (cumulatifs), les lieux ne sont pas utilisés selon leur fin.

La reprise par la DGAT ne porte pas préjudice au propriétaire qui y habite ou exploite le sol. Celui-ci demeure propriétaire des bâtiments ou de son exploitation, ainsi que de ce nouveau droit d'usage qu'on lui concède sur le sol; il tire, qui de son habitat, qui de son exploitation, la même jouissance ou le même profit qu'auparavant. En fait, il y gagne au change puisque, comme tout autre contribuable d'une Nouvelle Société, il doit fixer une valeur fiscale à son patrimoine et payer l'impôt sur ce capital. (Texte 706) La reprise des sols par la DGAT, pour l'immense majorité des propriétaires, n'a d'autre impact que celui bien positif de soustraire de leur patrimoine la valeur du sol et donc de diminuer d'autant l'impôt sur la capital qu'ils doivent payer.

L'ex-propriétaire du sol y gagne même doublement, pour un temps, puisque ses bâtiments ou son fonds de commerce produisent les mêmes avantages et profits à partir d'un capital désormais dégrevé de la valeur du sol; leur valeur marchande en est donc naturellement augmentée. Parce que le profit qu'on en retire est le même, cependant, il faut prévoir que ce double gain ne durera qu'un temps : la valeur marchande des actifs plus celle du droit d'usage tendra à devenir rapidement égale à celle incluant le sol qu'avaient ces actifs avant que la DGAT ne reprenne la nue-propriété du sol.

Cette revalorisation aura lieu rapidement. Que l'ex-propriétaire du sol, devenu uniquement propriétaire des bâtiments et/ou d'une exploitation, prenne donc garde de ne pas sous-évaluer la valeur de ses biens désormais allégée du sol dont la propriété a été cédée à la DGAT. Souvenons-nous, en effet, que l'évaluation fiscale qu'il en fait constitue une « offre de vente irrévocable » (OVI) qui l'oblige à vendre ses bâtiments ou son exploitation, avec le droit d'usage qu'on lui a concédé, au prix de cette évaluation fiscale. S'il en mésestime la valeur, il risque qu'on accepte vite son OVI. Le texte 706 explique les outils dont le propriétaire peut disposer pour se prémunir contre ce danger.

Cette reprise des sols par la DGAT, qui laisse le propriétaire dans sa maison, l'agriculteur dans ses champs et même le spéculateur sérieux en position de compléter sa spéculation, peut sembler un exercice inutile, mais ce n'est pas le cas. Elle a deux effets qui ne touchent pas la majorité des propriétaires mais sont bien importants. D'abord, elle institutionnalise la propriété de la collectivité sur le sol, les matières premières et ressources naturelles; ensuite, toute occupation privée du sol n'étant plus concédée que pour une fin spécifique, prévue au départ et énoncée comme une condition essentielle de la concession, la destination du sol ne peut plus être changée.

On pourrait obtenir ce dernier résultat autrement. En changeant la nature du droit de propriété, par exemple, ou en imposant des règlements qui, sans le dire, mèneraient au même résultat. Changer de propriétaire, toutefois, semble la meilleure solution et certes la plus franche. Or, il est urgent que la DGAT intervienne pour régir efficacement l'utilisation du sol. N'en prenons qu'un exemple.

L'utilisation des terres cultivables en pays développés tend à s'optimiser, mais le problème se pose de leur transformation intempestive en terrains constructibles. On peut pallier ce problème par une législation ad hoc, mais la vulnérabilité des autorités locales à des pressions politiques et financières est connue et les changements politiques tendent à rendre erratiques les orientations à long terme en ce domaine. Pourquoi tenter le diable, surtout s'il a des neveux et des cousins? Si l'État est le propriétaire du sol et que sa destination ne peut plus être changée sans une procédure d'exception auprès de la DGAT rendue sciemment bien ardue, l'urbanisation sauvage cesse sans même que le gouvernement en place ou les autorités locales aient à s'en expliquer.

 

1.2.3 La problématique du tiers-monde

 

Le but de ce site n'est pas de régler les problèmes des pays dits « en voie de développement », sauf dans le contexte d'une Nouvelle Société globale qui prend alors en charge en toute priorité le mandat de les amener au seuil à partir duquel les propositions NS peuvent s'y appliquer. Il n'est pas mauvais, toutefois, surtout quant on parle de production, de réfléchir à l'effet de certaines mesures si elles étaient appliquées dans le tiers-monde.

Dans les pays dit « en voie de développement », la problématique est différente, mais la reprise du sol par une DGAT globale ou nationale apporte un résultat encore plus remarquable que dans les pays développés. On sait que dans une Nouvelle Société (Texte 76), chaque propriétaire doit, pour fin fiscale, fixer la valeur de ses actifs qui sont alors taxés de l'impôt universel sur le capital et que la valeur assignée à tout élément de son patrimoine constitue une offre de vente irrévocable (OVI) de cet élément au prix ainsi établi. La DGAT d'un pays sous-développé qui récupère des milliers d'hectares de bonne terre inutilisée sans frais - car qui a un titre d'acquisition contre valeur dans le sertao brésilien ? ­ peut bien concéder sans sourciller au propriétaire qui le lui demande un droit d'usage de trois (3) ans sur la terre ainsi reprise et le laisser fixer à ces terres en friches la valeur fiscale que celui-ci leur assignera. Le résultat sera bénéfique quelle que soit l'évolution de la situation.

En effet, si le propriétaire devenu concessionnaire fixe à son exploitation une valeur élevée, la DGAT augmente ses entrées fiscales et le concessionnaire qui a librement consenti à cette charge fiscale doit, s'il ne veut pas se ruiner, mettre l'exploitation en marche, produisant une richesse réelle et créant des emplois. S'il ne le fait pas, il constate vite qu'il s'est surtaxé et, à court terme, le sol devient pour lui une dépense insupportable plutôt qu'une occasion de gain. Tôt ou tard il ne voudra plus en acquitter les charges et devra s'en départir.

Si, au contraire, le propriétaire fixe à son exploitation une valeur faible et n'y apporte aucune amélioration, quiconque souhaite l'exploiter vraiment peut s'en porter acquéreur à vil prix. Même des travailleurs agricoles, aujourd'hui sans terre, pourraient le faire, l'État leur consentant les crédits nécessaires sur la garantie de la production des terres dont ils deviendront ainsi les exploitants. Ceci aboutit à une réforme agraire de fait, pour une fraction du prix que coûterait toute réforme agraire politiquement imposée et qui ne serait pas une simple confiscation.

Nous ne disons pas qu'un pays appliquant cette mesure pourrait redistribuer ses terres agricoles équitablement et selon les besoins, sans se donner quelque mal et sans avoir quelques fusils à portée de la main Mais cette approche apporterait une légitimité, une légalité et une équité à l'opération. Bien sûr, les propriétaires sont taxés, mais ce sont les propriétaires eux-mêmes qui fixent la valeur de leurs avoirs et ce prix n'est même pas discuté! Pour parodier Anatole France, « La loi qui, dans sa splendide impartialité, interdit aux riches comme aux pauvres de voler du pain ou de dormir sous les ponts » taxe ici impartialement les pauvres comme les riches de la même proportion de leurs avoirs. Si on applique cette mesure, on ne peut parler de spoliation et ceci est un avantage politique énorme pour un gouvernement du tiers-monde.

La reprise des terres par l'État en conformité des principes ici posés peut être politiquement séduisante pour un pays sous-développé, mais il ne faut pas voir dans cette description que nous en faisons un encouragement à procéder de cette façon sans mettre en place les autres outils qui constituent une vraie Nouvelle Société. Ces outils pourraient faire cruellement défaut au gouvernement téméraire qui appliquerait cette seule mesure de reprise des terres sans en disposer. Nous en donnerons une illustration plus loin, à la section 3.5 de ce texte

 

 

2. LE SOUS SECTEUR « EXTRACTION » (ONMP)

 

2.1 La mission

 

Même aujourd'hui, dans la plupart des États, les ressources minières, le pétrole, le gaz sont déjà propriété de l'État ; c'est l'exploitation qui en est donnée en concession. Ceci semble aller dans le sens que nous proposons, mais cache une fourberie. À toutes fins pratiques, en effet, même si elle n'en est que concessionnaire, c'est la minière ou la pétrolière qui bénéficie aujourd'hui de la valeur de rareté de la ressource qu'elle exploite. C'est elle qui encaisse les hausses fulgurantes de prix si l'approvisionnement semble menacé. C'est elle aussi, en principe, qui subit un dommage si la demande s'effondre, mais, dans la réalité, la production est simplement alors réduite et ce sont les travailleurs qui écopent. L'exploitation est mise en veilleuse sans dommages pour l'exploitant, car la ressource restera enfouie, bien à l'abri, en attendant des jours meilleurs.

Dans la situation présente d'exploitation privée des ressources naturelles et des matières premières, c'est la minière ou la pétrolière concessionnaire qui est en fait maîtresse du jeu dans le sous-secteur « extraction ». Elle n'a pas seulement partie liée avec les spéculateurs, elle EST spéculation. Sa première fonction, avant même celle de produire, est d'être le lieu du passage aller-retour entre la richesse réelle qu'elle produit et la richesse virtuelle qui se crée autour de sa valeur boursière. On n'extrait pas du sol d'abord pour satisfaire aux besoins de la production, mais pour servir d'aval à des transactions financières, d'autant plus profitables qu'on aura créé sciemment des déséquilibres offre-demande, corrigés ensuite à volonté au moment opportun pour les spéculateurs.

Ce n'est pas la situation que l'on souhaite prolonger dans une Nouvelle Société et il est facile d'y remédier. Les besoins globaux en matières premières sont bien connus et leurs variations sont facilement prévisibles. Elles le sont avec une marge d 'erreur assez étroite pour qu'on puisse modifier la production dans les délais nécessaires et éviter toute pénurie, simplement en laissant fluctuer le volume des stocks de réserve le temps que les erreurs soient corrigées. Il est facile de constituer des stocks adéquats, mais le système économique actuel choisit de laisser l'équilibre s'établir par des variations de prix et de main-d'uvre plutôt que par une gestion des stocks. C'est une crapulerie du Système. Un cadeau aux spéculateurs dont la population mondiale paye le prix.

Dans une Nouvelle Société, l'État est le seul propriétaire du sol et des matières premières. Son but, concernant le sous-secteur « extraction », est d'abord d'assurer l'approvisionnement au meilleur coût, mais il cherche aussi à aplanir la courbe de production, celle des prix de vente et des coûts de revient, il cherche à mettre en place la gestion la plus efficace des opérations et à optimiser l'exploitation par l'utilisation du meilleur équipement. Parce que c'est toute la collectivité qui supporte les risques de fluctuation des cours, il vise à réduire la spéculation. Il accepte qu'avec une technologie de plus en plus performante on puisse n'utiliser progressivement dans ce sous-secteur qu'une main-d'oeuvre moins nombreuse, mais il ne permet pas que cette baisse systémique de l'emploi soit compliquée par les aléas du marché.

Dans ce sous-secteur, comme dans tous les autres du secteur primaire, l'État n'entend pas assumer directement la fonction de production mais plutôt en laisser la tâche aux entrepreneurs du secteur privé. Il assume cependant sa responsabilité qui est de contrôler les volumes d'extraction et de forage et de garantir l'approvisionnement en matières premières des producteurs du secteur secondaire, comblant par des importations les déficits de la production nationale tout en écoulant les surplus de celle-ci sur les marchés mondiaux.

La stratégie de l'État qui récupère le contrôle du sous-secteur « extraction » est d'obtenir et de mettre à profit une meilleure connaissance de la demande présente et future, de constituer des stocks de réserve et d'absorber, au palier de la gestion de ces stocks, les variations saisonnières et les fluctuations de la demande des utilisateurs. Son objectif est de maintenir ainsi relativement constantes - ou en courbes lentes sans inflexions - les quantités de matières premières tirées du sol.

 

2.2 Office National des Matières Premières (ONMP).

 

Pour s'acquitter de cette sa mission, le premier geste pertinent à la gestion du sous-secteur « extraction » d'un gouvernement commis à la mise en place d'une Nouvelle Société est la création d'un Office National des Matières Premières (ONMP) ayant rang de direction générale au sein d'un Ministère des ressources naturelles et de l'environnement.

L'ONMP ainsi créé a la responsabilité de la gestion des matières premières et des ressources naturelles nationales. Il doit optimiser la production des sites d'extraction, ainsi que la constitution de stocks adéquats à partir de cette production nationale et des achats qu'il peut faire à l'étranger. Il doit répondre sans délai à la demande d'approvisionnement en matières première des producteurs nationaux du secteur secondaire. Il doit gérer, au mieux des intérêts nationaux, la vente de gré à gré ou sur les marchés mondiaux de denrées des surplus de la production nationale et a l'exclusivité de ces exportations.

 

2.2.1 Recherche et planification

Dès sa création, l'ONMP a pour premier mandat d'établir un plan d'action. Ce plan doit être opérationnel avant la reprise du sol par l'État et l'ONMP, durant sa première année de fonctionnement, doit donc en toute priorité recueillir l'information nécessaire concernant la demande pour chaque matière première - tant au niveau mondial qu'au niveau national - et en faire une projection éduquée pour divers horizons. Simultanément, l'ONMP doit aussi déterminer le potentiel de production nationale de chaque matière première pour les mêmes horizons, calculer les surplus et déficits nationaux selon diverses hypothèses de production, en tirer les conclusions monétaires et modéliser le tout. Ceci exige, évidemment que, soient aussi choisis et pondérés les critères à partir desquels les possibles stratégies de production et de commercialisation de l'ONMP seront comparées puis deviendront sa politique.

Cette recherche préalable vient compléter, en tout ce qui est spécifique au sous-secteur extraction, l'information plus moins pointue recueillie par les services de planification et de recherche du Ministère des ressources naturelles et de l'environnement lui-même. Cette recherche de l'ONMP, comme d'ailleurs celle du Ministère, redoit se poursuivre sans interruption et sans cesse se raffiner. Au plus tard dans l'année de sa création, toutefois, l'ONMP doit pouvoir entreprendre son action concrète.

 

2.2.2 Prospection

Dès sa création également, l'ONMP met en place, comme outil indispensable de sa recherche et de sa planification, une politique de prospection. L'Etat qui devient propriétaire des ressources naturelles doit établir sa stratégie en ayant la meilleure connaissance possible de TOUT le potentiel dont il dispose. Il peut, dans un premier temps, privilégier l'exploitation des gisements déjà en activité, mais il doit connaître sa marge de manoeuvre et garder bien ouverte l'option de la mise en exploitation de nouveaux sites prometteurs, au fur et à mesure que s'épuiseront les réserves des sites en exploitation ou, tout simplement, par simple opportunité et pour optimiser sa marge de manoeuvre.

L'ONMP met en marche immédiatement sa politique de prospection, et en tempo accéléré. Le but de la prospection n'est plus d'annoncer de temps en temps de quasi-nouvelles venant corroborer ou infirmer des rumeurs, tout en gardant cachée, sauf aux seuls initiés, la véritable disponibilité des ressources. Le but de la prospection dans une Nouvelle Société est de fournir, non seulement à l'ONMP mais à tous les agents économiques concernés, une vision claire de la situation qui leur permettra de planifier au mieux leur action. Cherchant à tout connaître de toutes ses ressources, l'ONMP affecte néanmoins prioritairement les moyens et les ressources humaines dont elle peut elle disposer à obtenir celles des estimations des réserves en sol qui lui semblent les plus urgentes, au vu des conclusions du modèle qu'elle vient de construire (voir supra 2.2.1).

Qui s'occupe de la prospection ? Quiconque a la formation requise, normalement un géologue, peut demander et obtenir de l'ONMP un permis de prospection, en son nom propre ou celui d'une compagnie. Les prospecteurs ainsi autorisés peuvent avoir accès à toute l'information dont dispose présentement l'État ou les propriétaires/concessionnaires actuels du sol. Ils ont accès physique à toutes les terres publiques ou privées pour y faire les relevés et y prélever les échantillons qui leur paraissent utiles. Ils doivent seulement donner préavis de leur visite et de sa durée, remettre les lieux en état à leur départ et compenser l'occupant des troubles et dommages qu'ils lui auraient occasionnés. En cas de contestation, le tribunal civil a juridiction pour déterminer le quantum du dédommagement.

L'ONMP, selon ses priorités, peut fixer pour objectif prioritaire aux prospecteurs la découverte de gisements de certaines matières clairement identifiées. Il peut, pour aiguillonner les prospecteurs, ajouter une prime spéciale pour une découverte de cette nature qui vendra s'ajouter à ce qui constituera leur rémunération normale. La rémunération normale du prospecteur, sans égard à cette prime, consiste en deux (2) volets : a) un montant par tonne de réserves découvertes et dont la présence a bien été confirmée par une analyse indépendante réalisée par d'autres experts à la demande de l'ONMP, et b) un pourcentage du prix par tonne extraite qui sera payé à l'exploitant lorsque le gisement sera mis en exploitation.

Les prospecteurs ne limitent pas leurs examens au sol vierge; ils peuvent aussi réévaluer les réserves des gisements dont l'exploitation a été abandonnée par leurs exploitants. Si l'examen du prospecteur révèle des ressources significativement plus considérables ou à teneur plus forte que ne l'indiquait l'information fournie par l'exploitant à l'ONMP, le prospecteur obtient sur la différence les pourcentages qu'il aurait touchés pour la découverte d'un nouveau gisement. Si la différence est telle que l'on puisse mettre en doute la bonne foi de l'exploitant, une enquête plus approfondie aura lieu qui pourra entraîner contre ce dernier les peines qu'auront fixées les normes de l'ONMP.

Toutes les analyses fournies par les prospecteurs concernant les divers gisement sont publiques. C'est sur la base de ces analyses que les exploitants potentiels font subséquemment leurs propres études et, comme nous le verrons plus loin, présentent leurs offres d'exploitation à l'ONMP

 

2.3 L'ONMP producteur

 

2.3.1 Les nouveaux concessionnaires

Au jour dit, l'État reprend la propriété du sol, tel que nous l'avons vu au chapitre précédent (1.2) En plus des conséquences générales pour tous les propriétaires et dont nous avons déjà discuté, cette reprise a des effets particuliers pour les producteurs actuels du sous-secteur «extraction ». Ceux-ci, en effet, se retrouvent concessionnaires d'une exploitation qui ne possède plus rien qu'elle puisse légalement exploiter. Ce qu'elle exploitait, elle ne le possède pas, puisque c'est l'État qui est propriétaire de la matière première que le sol recèle.

À la différence de l'agriculteur qui met la graine en terre et peut se dire propriétaire d'une récolte qui est le fruit de son travail, ou d'un éleveur qui, quoi que son troupeau ait pu paître, peut laisser à son départ une prairie où l'herbe n'est pas moins abondante qu'à son arrivée, une entreprise minière ou pétrolière qui « remet les lieux en état » ne s'acquitte que d'une tâche cosmétique ; ce qu'elle a tiré du sol n'y reviendra pas. Si elle exploite selon sa nature d'entreprise minière ou pétrolière - et à la reprise du sol, la DGAT ne lui a pas concédé d'autres droits ­ elle va tirer du sol une matière non renouvelable et qui est propriété de l'État. Il faut qu'on lui en accorde le droit.

Bien sûr, on va le lui accorder. Mais les termes ne seront pas les mêmes qu'auparavant. Selon les termes de sa concession, ce n'est plus seulement un droit d'exploiter mais aussi un devoir d'exploiter qui lui est conféré. Ce n'est donc plus un permis d'exploiter que donne une Nouvelle Société au concessionnaire du secteur « extraction » mais, s'il remplit les conditions prescrites, un mandat d'exploitation. Le nouveau rapport entre l'État et le concessionnaire est que, le sol et son contenu appartenant à l'État, le concessionnaire n'offre à l'État que son expertise d'exploitant pour forer ou extraire. Sa rémunération doit donc être fonction uniquement de la quantité de travail qu'il fournit et de la qualité de son expertise.

Le concessionnaire a accès à la matière brute avec la permission de l'État et sa tâche consiste uniquement à s'en saisir et à la transporter, sous une forme plus commode, de son point d'origine au point convenu pour sa livraison. C'est à cela que se limite son rôle. Il livre à l'État une quantité définie de la matière à tirer du sol, dans les délais et au prix dont ils vont convenir par contrat. À aucune étape du processus il n'en a la propriété. Qu'il s'agisse d'or ou de fer, de bauxite ou de gravier, les fluctuations des cours ne sont pas l'affaire de l'exploitant. Fonte, raffinage et autres transformations subséquentes qui en facilitent le stockage ne le regardent pas, à moins qu'il ne s'y intéresse aussi mais à un autre titre. Son travail d »exploitant d'une entreprise d'extraction est terminé quand la matière première qui était en terre n'y est plus, mais se trouve là où l'État a voulu qu'elle soit. Il vend un service.

La mission du concessionnaire, telle qu'elle est redéfinie ici, est beaucoup plus étroite que celle d'une société minière ou pétrolière actuelle. Elle correspond, en fait, à ses seules activités de production. Elle est plus étroite, mais elle n'est pas nécessairement moins lucrative. L'exploitant est encouragé à améliorer ses procédés de gestion et ses méthodes de production : c'est ainsi qu'il augmentera sa productivité et son profit. Sauf en ce qui a trait à la santé/sécurité des travailleurs et au respect de l'environnement, il peut faire toutes les économies qu'il souhaite.

Il peut faire ­ et c'est le point crucial - tous les licenciements qu'il juge opportuns. La sécurité d'emploi n'existe plus dans une Nouvelle Société - remplacée par une sécurité du revenu - et l'organisation du travail partagé dans une Nouvelle Société ne permet simplement pas une augmentation contraignante de la charge de travail des salariés (Texte 701). Les réductions de personnel se traduisant donc par une productivité accrue et n'ayant pas d'effets négatifs, l'employeur peut faire des licenciements et est même encouragé à en faire le plus possible.

Une entreprise dont l'État reprend la propriété du sol qu'elle exploite peut se contenter de ce nouveau rôle, auquel cas elle a l'opportunité d'obtenir pour 5 ans le contrat d'exploitation qui lui permettra de poursuivre ses activités en présentant une offre de services, tel que nous le verrons à la section 2.3.3. Elle peut aussi choisir de cesser ses opérations et de se départir de ses actifs, à des conditions et selon l'une ou l'autre des modalités que nous verrons immédiatement par la suite à la section 2.3.4.

L'ONMP a la responsabilité de l'approvisionnement du système de production en matières premières. Il s'en acquitte en confiant par contrat, à des entreprises privées spécialisées, pétrolières ou minières, des mandats d'extraction. Les contrats accordés sont pour une quantité déterminée a un prix fixe : la quantité que son plan suggère à l'ONMP d'extraire du sol. Cette quantité correspond, pour chaque matière, à la demande totale estimée des utilisateurs nationaux, à une provision pour constituer un stock de stabilisation et, pour certaines matières dont le pays est exportateur net, à une quantité supplémentaire destinée au marché mondial. Elle est vraisemblablement supérieure à la demande du marché au moment de la reprise du sol.

Pour certaines matières, le marché est concurrentiel et aucun concessionnaire ne pourrait même satisfaire seul à cette demande. Pour d'autres, il peut n'exister en fait qu'un seul exploitant. Comment éviter en ce dernier cas les désavantages d'un monopole? Que l'État exproprie ou non cet exploitant, la situation n'en demeure pas moins monopolistique. Nous allons voir ci-après ces deux cas de figure.

 

2.3.2 Les soumissionnaires

Dans un marché ou de nombreux exploitants sont en concurrence, l'ONMP va accorder des contrats, à la hauteur de la quantité totale qu'elle souhaite acquérir, selon le processus d'appel d'offres de services que nous expliquons ici. Le soumissionnaire peut être un ci-devant propriétaire ou concessionnaire qui compte satisfaire aux conditions de son offre à partir du sol qu'il exploitait avant la reprise par l'État et dont on lui a concédé l'usage. Ce peut être aussi un nouvel intervenant qui, ayant la crédibilité, la compétence et les ressources requises, souhaite exploiter en concession un nouveau gisement dont les nouveaux mécanismes de prospection mis en place ont fait connaître les avantages ; si son offre est acceptée, ce dernier obtiendra, pour 5 ans également, le droit d'exploitation du sol qu'il convoite. Le propriétaire ou concessionnaire actuel qui possède déjà l'équipement, la main-d'oeuvre et la connaissance du terrain, est évidemment en position privilégiée pour obtenir un tel contrat, mais il n'est pas sûr qu'il l'obtienne.

Dans un marché où une seule exploitation contrôle le marché, la procédure est différente. Ne pouvant mettre en concurrence des exploitations, l'ONMP va opposer des équipes de gestion. La procédure d'appel d'offres de services sera la même, mais à cette distinction près qu'à la proposition que fera le concessionnaire en place pourra s'opposer celle de quiconque, répondant aux critères pour le faire, offrira de prendre charge de l'exploitation de ce concessionnaire, incluant son équipement et ses immeubles, et de livrer à meilleur prix à l'ONMP une partie de la quantité de cette matière pour laquelle il a sollicité des offres de services.

Il s'agit donc en fait d'une prise de contrôle du concessionnaire en place, mais au lieu que celle-ci ne dépende comme aujourd'hui d'une décision des actionnaires, elle est liée à l'obtention d'un contrat de l'ONMP qui est le seul contrat que le concessionnaire puisse obtenir. Le seul, car Il ne faut pas tomber dans le piège de voir l'ONMP comme un acheteur unique (monopsone) qui acquiert la production du concessionnaire, ce qui ouvrirait la porte à une exploitation sans contrat de l'État, le concessionnaire écoulant alors la production hors système. Cette alternative n'est pas possible, car l'État n'est pas un acheteur : il est déjà propriétaire de la matière brute au départ. L'ONMP ne paye au concessionnaire exploitant que le service de l'extraire. Si le concessionnaire l'extrait sans contrat et sans le remettre à l'ONMP, il le vole. S'il n'a pas de contrat, il doit cesser d'extraire.

Dans ce contexte, on comprend pourquoi une prise de contrôle de l'entreprise concessionnaire peut dépendre tout entière du résultat de l'appel d'offres de service lancé par l'ONMP. Si suite au processus que nous voyons ci-après c'est l'offre d'un nouveau gestionnaire qui est acceptée, l'ONMP acquiert l'exploitation du concessionnaire en place au prix fixé par évaluation judiciaire et donne au nouvel exploitant le choix entre acquérir l'exploitation au même prix, ou la lui louer afin qu'il exécute son contrat à un prix convenu avant que le contrat ne lui soit accordé.

 

2.3.3. L'appel d'offres de services

Ayant en main une information solide concernant l'offre et la demande nationale et globale, ainsi qu'une estimation des réserves dont il dispose, l'ONMP, au jour de la reprise de la propriété des sols par l'État, peut inviter les ex-propriétaires devenus concessionnaires du sous-secteur « extraction » ainsi que toute autre partie compétente, solvable et intéressée, à présenter leurs offres de services pour l'obtention de contrats d'extraction.

 

L'appel quinquennal

La procédure de base de l'ONMP est l'appel d'offres quinquennal. À date fixe, à tous les cinq ans, l'ONMP rend publique sa demande pour l'extraction d'une quantité déterminée de chaque matière première au cours des cinq (5) années suivantes. La demande est publiée sur le site Internet de l'État (Texte 708), précisant la quantité mensuelle dont l'État veut recevoir livraison et le prix maximal par tonne qu'il accepte de payer, demandant que les entreprises qualifiées et intéressés lui présentent une offre : quelle quantité de la matière demandée peuvent-ils lui livrer et à quel prix? Les exigences en termes de compétence, d'expérience et de solvabilité sont clairement identifiées. Les critères d'évaluation de ces offres et la pondération de ces critères sont publiés en même temps que les termes de référence. Le processus est totalement transparent.

Chaque exploitant fait son offre en déposant celle-ci et la caution requise au guichet prévu à cet effet du site Internet de l'État. Toutes les offres soumises sont immédiatement rendues publiques. Chaque soumissionnaire peut présenter plusieurs offres distinctes pour des quantités et à des prix distincts pour diverses dates de livraison. Il s'agit donc, en fait, pour chaque matière dont on veut obtenir l'extraction, de 60 offres mensuelles plutôt que d'une offre quinquennale ; les soumissionnaires, cependant, afin de ne pas risquer de hiatus dans leur processus de production, ont le choix de rendre l'une ou l'autre de leurs offres conditionnelle à l'acceptation d'une ou de plusieurs autres. Quiconque n'a pas présenté une offre dans les 30 jours suivant l'appel est forclos de le faire par la suite.

Pour ceux qui ont présenté une offre, la démarche de l'ONMP devient à partir de ce moment une mise aux enchères : chacun peut bonifier son offre en changeant les quantités offertes, ou son prix par tonne dans une fourchette de 20% de son prix initial, ou en modifiant l'échelonnement de ses dates de livraison. Il peut le faire à sa guise, en pleine connaissance des propositions de ses concurrents, jusqu'au 5è jour avant que n'expire le délai de trois mois après la publication de l'appel d'offres initial. Au cours des 5 derniers jours, seuls peuvent être modifiés les prix par tonne. Quand le délai est expiré, l'appel est clos. Pour éviter même l'apparence d'un passe-droit, le site Internet de l'État, à la seconde prévue et sans intervention humaine, cesse simplement d'accepter les propositions.

L'ONMP s'assure que les offres soumises répondent bien à toutes les exigences de l'appel d'offres et accorde des contrats d'exploitation, à la hauteur de la quantité totale qu'il a choisi de faire extraire, à celles des entreprises qui, tout en respectant les critères établis, ont offert de lui fournir la matière au meilleur prix, compte tenu des offres liées dont il faut respecter les conditions. La fourchette des prix se réduira en fin de course. Si la quantité demandée colle d'assez près au potentiel d'extraction des exploitants, le prix tendra vers le plafond fixé par l'ONMP.

Si la quantité demandée est significativement plus faible que la capacité de production,, la concurrence sera plus rude. La proposition de l'ONMP, tenant compte de son désir de se constituer des stocks, sera probablement supérieure à ce qu'aurait été la demande d'un marché ouvert dans un système néo-libéral, mais il n'est pas certain qu'il y ait un contrat pour tout le monde. Or, sans un contrat de l'ONMP, le concessionnaire ne peut exploiter. Nous verrons plus loin comment le concessionnaire sans contrat peut se retirer du marché de l'extraction sans être acculé à la ruine.

 

L'appel exceptionnel

L'ONMP, en principe, satisfait à tous ses besoins par les contrats d'extraction qui découlent de son appel d'offre quinquennal. En pratique, un événement imprévu peut amener une baisse ou une recrudescence de la demande mondiale pour un temps, ou la pente de l'augmentation à long terme de la demande peut augmenter ou diminuer. Si la demande chute, L'ONMP a les moyens de laisser simplement ses stocks se gonfler. Si la demande menace de dépasser les quantités dont il peut disposer, toutefois, ou si la tendance à la hausse des prix indique une insuffisance chronique de l'offre sur la demande qu'une simple variation des stocks qu'il a accumulés risque de ne pouvoir contrôler, l'ONMP peut vouloir augmenter ses volumes d'extraction.

En ce cas, l'ONMP peut lancer en tout temps un appel d'offres de services exceptionnel. Suite à cet appel d'offres, il accorde un ou plusieurs nouveaux contrats pour obtenir la quantité supplémentaire de la matière qui lui semble requise pour rétablir ses stocks et l'équilibre du marché. S'il estime qu'il s'agit d'une tendance lourde et que la production doit être accrue de façon permanente, l'ONMP procède exactement de la même façon que pour l'appel quinquennal, la durée du contrat étant cependant prolongée de telle sorte que le terme en coïncide avec celui des contrats qui seront accordés lors du prochain appel d'offre quinquennal.

Si, cependant, il prévoit que l'augmentation de la demande est strictement conjoncturelle et à court terme, il limite son invitation aux exploitants déjà sous contrat et aux nouveaux intervenants qui souhaiteraient remettre en marche certaines des exploitations que l'ONMP a acquises au moment de la reprise des sols et n'a pu revendre (voir 2.3.4 infra). En ce cas, il suit les mêmes règles que lors de l'appel quinquennal, mais à cette distinction près que la durée du contrat peut être plus courte et que le plafond du prix par tonne extraite que l'ONMP accepte de payer est normalement plus élevé.

 

2.3.4 Vente et rachat des concessionnaires

Certains propriétaire devenus concessionnaires ne pourront peut-être pas faire une offre acceptable et obtenir un contrat. Surtout si de nouveaux exploitants se manifestent, anxieux de mettre en activité des gisements plus rentables découverts par les prospecteurs. Que certaines entreprises moins productives disparaissent n'est pas une catastrophe, mais l'Etat doit minimiser les dommages créés par sa politique. Elle le fait par une intervention en deux temps.

 

L'hypothèse OVI

Dans un premier temps, le concessionnaire sans contrat, se voit accorder trente (30) jours pour vendre son exploitation à qui il veut et sortir du marché de l'extraction. Dès que les contrats découlant de l'appel quinquennal ont été accordés, les concessionnaires, aussi bien ceux qui ont obtenu des contrats que ceux qui ont été évincés, doivent comme toute autre entreprise et chaque citoyen d'une Nouvelle Société fixer la valeur fiscale des biens de leur patrimoine : c'est sur cette valeur qu'est payé l'impôt sur le capital qui est l'outil fiscal de base d'une Nouvelle Société. Tel que nous l'avons déjà expliqué, cette valeur fiscale constitue une offre de vente irrévocable (OVI) du bien évalué et quiconque le souhaite peut l'acquérir à ce prix (Texte 706).

Lorsqu'un concessionnaire n'a pu obtenir de contrat d'exploitation, il peut fixer au prix qui lui convient la valeur fiscale de son entreprise et en rendre ainsi l'achat attrayant pour un acquéreur éventuel. Il le peut parce que l'ONMP, dans le but clair d'aider les perdants de son appel d'offres, accepte automatiquement d'accorder un contrat d'extraction de cinq ans au nouvel acquéreur, pour les quantités correspondant aux volumes de production des cinq (5) dernières années de l'entreprise acquise, au prix par tonne le plus bas payé par l'ONMP pour l'extraction de cette la matière lors de son appel quinquennal.

Pourquoi un acheteur se manifesterait-il à ces conditions ? Parce que pouvant jouir d'un contrat ferme à prix ferme, il peut voir si les améliorations qu'il pourrait apporter sur le plan de la gestion et des opérations de l'entreprise qu'il acquiert lui permettraient d'amortir ses investissements et de tirer un profit acceptable de son acquisition. S'il s'était manifesté avant l'appel d'offres, il aurait dû encourir les frais de préparation de son offre sans garantie de succès. Surtout, le prix que lui aurait fait le concessionnaire en place aurait normalement inclus une valeur pour le droit d'usage obtenu au moment de la reprise du sol. Le concessionnaire qui n'a pas obtenu de contrat à l'appel quinquennal est forcément plus conciliant.

Il y a un autre scénario. Voyant à quel prix l'ONMP rémunère finalement ses fournisseurs de services d'extraction - et considérant les investissements qu'il a déjà mis comme ceux qu'il devrait encore y mettre pour que son exploitation soit rentable ­ un concessionnaire peut se raviser et vouloir rester présent sur le marché des services d'extraction. Il ne peut lui-même se racheter, mais il peut susciter un rachat amical plutôt qu'hostile.

Les responsables de la division des opérations de l'entreprise,, par exemple, ayant la compétence requise, peuvent avec l'appui financier de celle-ci, se constituer en corporation et présenter une offre sous une autre raison sociale pour en faire le rachat. L'État n'a pas à intervenir dans la relation entre l'entreprise qui cesse ses opérations et la nouvelle corporation et ne considèrera pas cette opération comme indélicate. Que la nouvelle entreprise exécute son contrat et l'objectif de l'ONMP est atteint.

Si cette hypothèse d'un rachat par OVI ou de gré à gré ne se réalise pas, le concessionnaire doit se départir de son exploitation à des conditions moins avantageuses, mais qui ne signifient pas sa ruine.

 

Vente à l'Etat selon évaluation judiciaire

Si, 30 jours après l'appel quinquennal, le concessionnaire n'a pas cédé son exploitation et que l'ONMP n'a donc pas reçu de demande pour l'octroi d'un contrat d'extraction aux conditions décrites ci-dessus, le concessionnaire peut, dans les 30 jours suivants, demander à l'ONMP qu'elle reprenne en bloc son exploitation, tous immeubles et meubles inclus. Cette reprise est alors acceptée au prix de la valeur aux livres des éléments du patrimoine de l'entreprise, précisant chaque élément du bilan avec sa dépréciation selon les règles comptables précédemment utilisées par l'entreprise. S'il y a contestation, une évaluation judiciaire détermine le montant à lui payer .

Il est clair que ses réserves en terre ne font pas partie des actifs de l'entreprise, puisqu'on considère qu'elle n'en a jamais eu la propriété légitime; en revanche, les frais réels de prospection qu'elle a assumés pour identifier ses gisements en exploitation lui sont remboursés, au prorata des réserves identifiées qui sont encore en sol. De même ses frais de prospection pour les gisements pour lesquels elle avait une concession et dont l'exploitation n'a pas encore débuté, mais non pour ceux dont elle a abandonné l'exploitation. Si elle a acquis le sol contre valeur, l'ONMP lui rembourse aussi le prix qu'elle en a payé. Frais de prospection et prix d'acquisition sont indexés en monnaie courante au moment de la reprise de propriété par l'État

Cette solution est une aubaine pour une entreprise à qui son équipement désuet ou ses gisements à faible teneur ne semblent plus permettre d'être concurrentielle. Elle touche ainsi un montant inespéré pour des dépenses faites il y a longtemps et un capital fixe sans grande valeur. Il s'agit, en somme, d'une mesure caritative, exemple de la volonté d'une Nouvelle Société de transformer la société en ne lésant personne.

Les exploitations acquises de cette façon sont mises aux enchères, leur achat étant assorti d'un contrat d'exploitation de cinq (5) ans, accordé par l'ONMP pour une quantité ne pouvant excéder le volume de production des cinq (5) dernières années de l'entreprise acquise, mais pouvant lui être inférieur à la demande de l'acquéreur. Le prix par tonne extraite offert par l'ONMP au nouvel acquéreur est inférieur de 5% au prix le moins élevé dont l'ONMP a pu bénéficier lors de l'appel quinquennal. Cette proposition peut intéresser un acheteur qui, diminuant sa production, entend brader une partie de l'équipement qu'il obtient, et/ou pense rentabiliser ses opérations en concentrant l'extraction sur une partie seulement des gisements

La mise à prix est fixée au prix payé pour les immeubles et équipements du concessionnaire partant, excluant le remboursement de son prix d'achat initial et de ses frais de prospection. S'il n'y a pas preneur à ce prix, l'ONMP selon son analyse du potentiel de l'exploitation, peut : a) fermer l'exploitation et en vendre l'équipement, ou b) la mettre en veilleuse dans l'espoir de la remettre en marché plus tard à des conditions différentes, sans doute dans le cadre d'un appel d'offres exceptionnel.

 

2.3.5 Traitement et stockage

L'ONMP constitue des stocks. Il détermine en chaque cas sous quelle forme il est le plus pratique de les conserver. Il peut décider que le métal soit extrait du minerai, fondu, coulé en lingots avant d'être stocké. De même pour le pétrole qu'on peut raffiner et le gaz qu'on peut liquéfier. C'est affaire d'opportunité. Selon le type d'exploitation, le minerai doit être traité sur place ou peut l'être à des milliers de kilomètres de son lieu d'extraction. Quel que soit le choix posé ­ même si c'est le concessionnaire lui-même qui assume la responsabilité de l'opération suivante - il s'agit bien d'une autre opération. Le contrat d'extraction est exécuté quand l'extraction est complétée. L'opération suivante peut être confiée aux mêmes concessionnaires ou à d'autres sous-traitants en aval, mais est rémunérée par l'ONMP comme un autre service. Dans tous les cas, la propriété de la matière première traitée demeure à l'ONMP en cours de traitement.

Dans certains pays, les entreprises capables d'offrir ces services sont assez nombreuses pour que l'ONMP puisse accorder ces contrats de traitement du minerai par appel d'offres. On le fera alors, dans le cadre également d'une entente quinquennale. Lorsqu'il n'y a qu'une entreprise du genre, l'État, par l'entremise d'une Société de Gestion des Entreprises d'État (SGEE) dont nous verrons le rôle dans un prochain texte consacré au secteur secondaire, l'expropriera à sa valeur réelle, selon évaluation judiciaire, tenant compte cependant d'un profit raisonnable dont cette expropriation prive l'entreprise, puisqu'il n'y a pas à cette expropriation la justification de reprendre une ressource naturelle. La logique de cette expropriation est de ne pas permettre une dépendance de l'État face à un monopole privé.

Si le volume d'activité national le justifie et que plusieurs entreprises de ce genre sembleraient pouvoir coexister et être rentables en se faisant une concurrence normale, l'Etat repartit les actifs de l'entreprise expropriée en lots, chaque lot constituant un tout cohérent susceptible d'être exploité, et vend ces lots aux enchères, au prix qui permet de récupérer le montant de l'expropriation. Ce processus de création artificielle d'un marché concurrentiel est cité ici comme une possibilité, mais il serait bien étonnant qu'il puisse être appliqué avant que ne soit mise en place une Nouvelle Société globale.

Normalement, il n'y aura pas preneur pour ces lots, ou le marché national sera trop restreint pour qu'on puisse espérer y créer une situation de concurrence viable. La solution sera alors que la SGEE gère l'entreprise expropriée, constituant simplement en son sein des unités de travail dont la rémunération de chacune sera liée à sa productivité, conformément au modèle recommandé au texte 701. Cette démarche permet de recréer, au sein de l'entreprise monopolistique même, la motivation et le désir d'innovation propre à une situation de concurrence normale et qui en sont les principaux avantages.

. Quel que soit le scénario qui s'applique, l'ONMP n'aura pas la responsabilité de gérer cette entreprise dont l'activité n'est pas du secteur primaire mais du secondaire. Il en est simplement le client. La matière brute demeure la propriété de l'ONMP, cependant, même entre les mains de l'entreprise publique qui en assure ainsi le traitement. Quand le traitement est terminé, la matière sous sa nouvelle forme est incorporée aux stocks de l'ONMP et elle y reste jusqu'à ce que l'ONMP la vende à un producteur national ou l'écoule sur le marché mondial.

 

2.4 L'ONMP fournisseur

 

Le but de l'État qui intervient dans le sous-secteur « extraction » n'est pas d'en tirer un profit, assumant le rôle d'un spéculateur qui y détient une position dominante. Le but de l'État est ici de répondre de la façon la plus efficace aux besoins des industries nationales de transformation, ces besoins étant déterminés au départ en remontant de la demande finale à la demande pour les matières premières, à travers toute la structure de consommation intermédiaire.

Dans une Nouvelle Société globale, l'ONMP n'a qu'à ajuster ses activités d'extraction à cette demande finale, suivant sa lecture continue des indicateurs des échanges interindustriels. Les erreurs d'estimation sont corrigées le plus vite possible, n'ayant d'ailleurs pas d'autres conséquences qu'une augmentation ou une diminution des stocks que maintient l'État comme élément essentiel de sa stratégie. Une Nouvelle Société établie à l'échelle d'un seul État doit cependant composer aussi avec les contraintes d'un marché qui, tout au moins au départ, est encore soumis aux diktats des maîtres du Système néo-libéral actuel. Nous verrons plus loin (2.4.2) comment elle s'y prendra.

 

2.4.1 Secteur National

En ce qui concerne son rôle de fournisseur universel des entreprises nationales de transformation, l'ONMP ne veut pas assumer une position monopolistique. Toute entreprise peut à son gré, sans avoir à en demander l'autorisation à qui que ce soit et sans avoir à payer de droits d'importation, acheter ses matières premières du fournisseur étranger de son choix. Si elle veut s'approvisionner auprès de l'ONMP, toutefois ­ et pour toute matière dont le pays est producteur en quantité suffisante pour ses besoins les prix de l'ONMP seront les plus bas ­ l'entreprise doit passer un contrat à terme d'au moins un an, pour une quantité déterminée et à un prix ferme convenu.

Ce contrat est irrévocable. L'utilisateur recevra la quantité convenue de la matière au prix convenu, mais il n'en recevra pas d'autre à ce prix. Si dans le cours de ses activités il demande à l'ONMP un approvisionnement complémentaire, celui-ci le lui accordera dans toute la mesure du possible, mais l'utilisateur le payera au prix du marché mondial au jour de sa demande. Ceci exigera de l'utilisateur qu'il fasse un choix d'équilibre entre une demande à l'ONMP qui pourra certainement satisfaire tous ses besoins à meilleur prix, mais pourra parfois l'obliger à maintenir lui-même un stock et une demande minimale lui permettant de fonctionner « just-on-time », mais le laissant en partie vulnérable aux aléas du marché.

Six (6) mois avant l'expiration de son contrat annuel, l'utilisateur doit renégocier avec l'ONMP son approvisionnement pour l'année débutant à la fin de son contrat en cours. S'il néglige de le faire, les premières livraisons n'auront lieu que six (6) mois après qu'une entente sera intervenue. La négociation d'un nouveau contrat d'approvisionnement avec l'ONMP sera la plupart du temps une formalité. Si, toutefois, la quantité que demande une entreprise est significativement supérieure à sa demande de l'année précédente, il sera exigé d'elle une déclaration à l'effet que toute la quantité demandée est pour sa propre production, qu'aucune partie n'en sera revendue à l'état brut et qu'aucun produit dont cette matière est la composante essentielle ne sera vendu dont la valeur ajoutée par le travail de l'entreprise ne soit au moins égale à celle de la matière elle-même.

Pourquoi cette restriction ? Parce que, dans le cours de ses activités, l'ONMP obtiendra des matières premières d'importation dont elle deviendra distributrice sur le marché national. Dans ces efforts pour en régulariser le cours au profit des producteurs nationaux, elle pourra parfois les leur offrir à un prix inférieur à celui du marché mondial. Il n'est pas question que des producteurs abusent de cette situation pour devenir eux-mêmes partie prenante de la spéculation dont on veut les protéger

Il est clair qu'ayant en main les contrats fermes des utilisateurs nationaux, l'ONMP peut déterminer avec plus de précision les quantités de chaque matière qu'il doit faire extraire. Il n'a à s'en remettre aux indicateurs et aux prévisions économiques que pour établir sa prospective à long terme et optimiser ses transactions avec l'étranger.

 

2.4.2 Marché mondial

Nous avons vu que l'ONMP planifie ses activités d'extraction pour chaque matière première sur une période de cinq (5) ans, en fonction de trois éléments. D'abord, une demande nationale, en partie estimée par des indicateurs économiques mais reposant aussi, pour une large part, sur des ententes fermes; ensuite, les exigences de la constitution et du maintien de stocks qui lui serviront à aplanir les fluctuations du marché; enfin, si le pays est exportateur net d'une matière première, la quantité excédentaire aux besoins nationaux que l'ONMP estime pouvoir vendre avantageusement sur le marché mondial.

Concernant ce troisième volet, une Nouvelle Société cherche à se maintenir loin de la spéculation. Sur le marché mondial, tout en prenant garde de ne pas devenir dépendante d'un seul client ou d'un seul fournisseur, elle privilégie la vente en bloc de ses excédents par des contrats de longue durée négociés d'Etat à État, ce qui lui permet de régulariser encore davantage ses rythmes de production. En toute priorité, d'ailleurs, elle tente d'établir des accords de troc, obtenant en paiement des matières qu'elle livre et dont elle a un surplus les quantités nécessaires des matières dont elle est en déficit.

L'ONMP ne cherche ni à bénéficier de la spéculation mondiale ni à la contrarier; il cherche, cependant, à ce que les stocks qu'il se constitue en toutes matières et les ressources financières de l'État dont il peut avoir l'aval lui permettent de dissuader les spéculateurs de tenter des opérations qui lui seraient désavantageuses. Il établit le niveau des stocks qu'il se constitue - plus élevé pour les matières dont le pays est importateur - à un niveau assez élevé pour qu'aucune baisse ni hausse du prix d'une matière première puisse avoir, pour lui ou les utilisateurs nationaux, d'autre impact qu'une fluctuation de ces stocks de réserves.

Comment respecter les règles d'une production équilibrée dans un contexte où les plus gros joueurs font tout pour créer des déséquilibres ? Tout dépend naturellement du pays où s'installe une Nouvelle Société. Les pays puissants comme la Russie, la Chine, les USA, l'Europe le peuvent sans difficulté. Même des pays d'importance modeste peuvent le faire, s'ils sont grands producteurs de matières premières, comme le Canada, le Brésil, l'Australie. Les autres pays le peuvent, s'ils ont le niveau de développement nécessaire, en adoptant une attitude pragmatique Une Nouvelle Société encore faible ne doit pas s'attirer d'attaques concertées venant de plus fort qu'elle. Elle doit, au contraire, tirer son épingle du jeu en s'appuyant sur la force que lui donne le soutien massif de sa population et l'efficacité supérieure de ses procédés de gestion et de production.

La situation la plus difficile est celle d'un petit pays sous-développé qui se retrouve exportateur net indispensable sur le marché mondial, comme la Zambie ou le Congo. Un pays de ce niveau de développement ne peut mettre en place une Nouvelle Société. S'il souhaite utiliser néanmoins l'approche ici décrite pour ses activités d'extraction, il n'y parviendra avec succès que s'il consent à pactiser avec le Système tant que celui-ci est le plus fort, cherchant néanmoins par des opérations de troc à stabiliser la demande et l'offre de matières premières pour ses producteurs nationaux.

En se faisant une alliée d'une transnationale de spéculation qui a les contacts et le pouvoir requis, même un petit pays sous développé pourra contrôler son industrie extractive et se retrouver dans le cercle des gagnants. Il pourra y rester le temps que s'installe une Nouvelle Société dans un pays assez fort pour résister au Système et qui deviendra alors son allié et partenaire commercial naturel. En attendant, il doit participer aux alliances qui lui semblent opportunes et utiliser les armes de ses adversaires chaque fois que nécessaire. Ceux qui veulent établi peu à peu une Nouvelle Société doivent faire ce qui doit être fait et n'avoir jamais la naïveté de la franchise dans un monde menteur. En dire plus ici serait participer de cette naïveté.

 

 

3. SECTEURS AGRICULTURE ET ÉLEVAGE (ONPA)

 

L'agriculture et l'élevage sont deux activités bien distinctes et constituent deux sous-secteurs différents. Les rivalités entre éleveurs et cultivateurs ont d'ailleurs fourni le scénario d'au moins la moitié des films Western et le prétexte à un nombre significatif des guerres de l'Histoire. Sans parler des luttes de la préhistoire, dont on peut supposer que la plupart ont opposé des sédentaires protégeant leurs champs à des nomades voulant y faire passer leurs troupeaux. Même aujourd'hui, dans certaines régions du Brésil, de l'Argentine, de l'Ethiopie et du Sahel, la paix entre éleveurs et cultivateurs est loin d'être faite.

Lorsque la situation le justifie, deux directions générales distinctes s'occuperont l'une de l'agriculture et l'autre de l'élevage. Souvent, cependant, tout en les départageant lorsqu'ils s'affrontent, on les réunira en une seule structure administrative. On le pourra d'autant plus facilement qu'on doit appliquer à l'un comme à l'autre de ces volets une même politique de rationalisation de la production et de soutien à la commercialisation. (C'est le cas de cette fusion agriculture/élevage qu'illustre ce chapitre. Ne pas oublier, pourtant, qu'on pourrait les scinder en deux structures parfaitement symétriques)

 

3.1 La mission

 

Une Nouvelle Société veut d'abord une utilisation optimale des sols, selon leur spécificité physique, qui permette la production la plus efficace possible des biens que veut en tirer la collectivité. Elle veut ensuite que le travail qu'exige cette production soit rémunéré à sa juste valeur, les gains de productivité profitant à ceux qui travaillent la terre plutôt qu'à d'autres qui la possèdent.

Pour atteindre ces deux objectif, l'État qui a repris la propriété du sol en concède le droits d'usage à ceux qui peuvent et veulent l'exploiter. D'abord, la DGAT dont nous avons vu le rôle concède celui du sol déjà affecté à l'agriculture/élevage à ceux qui en étaient les propriétaires avant la reprise du sol et qui en deviennent désormais les concessionnaires exploitants. Ensuite, il concède l'usage des terres jusque-là mal exploitées mais propres à la culture ou à l'élevage, à de «nouveaux paysans » qui ne jouissent pas de droits acquis mais donc l'intégration aux sous-secteurs agriculture et élevage semble économiquement et socialement justifiée.

Dans la plupart des pays développés, les «nouveaux paysans » sont une rareté et seul un engouement durable pour la vie eu grand air dans une situation où le travail à domicile devient plus facile pourrait créer une demande pour un retour à la terre. Les sols cultivables sont déjà cultivés et, si les lois du marché et la démographie n'ont pas mené à leur urbanisation, ils sont déjà cultivés de façon productive. La reprise par l'État de la propriété des sols utilisés pour l'agriculture et l'élevage en pays développés n'est donc, la plupart du temps qu'une opération comptable : la propriété passe, mais la possession demeure. L'exploitation est confiée au propriétaire actuel s'il le désire et le loyer exigé de l'exploitant ­ devenu désormais un « fermier » au sens strict - est largement compensé par une structure nouvelle de subvention nouvelle liée à la production même et que nous verrons plus loin.

Le résultat final de la reprise de propriété du sol par l'État se traduit donc, pour l'agriculteur ou l'éleveur d'un pays développé, par une amélioration nette de sa condition. Le but concret que vise ici une Nouvelle Société encore nationale plutôt que globale est d'amener sans contrainte les producteurs à produire, au vu des besoins nationaux et des opportunités d'exportation, ce que l'État considère comme la gamme la plus rentable de produits, en quantité, type et qualité. En pays développés, la productivité est l'alpha et l'oméga de la politique agricole et n'est soumise à d'autres contraintes que le respect de l'environnement et du patrimoine

Si le premier défi de l'État dans les sous-secteurs agriculture et élevage est de gérer la production traditionnelle, il ne faut pas oublier l'impact qui ira grandissant dans les pays développés des méthodes de cultures intensives : culture en serres, hydroponique, etc. Il faut se souvenir, aussi, que l'élevage n'est pas seulement l'image d'Épinal du gaucho dans la pampa. Quand on définit l'élevage, dans une Nouvelle Société, on y inclut naturellement l'élevage des porcins et l'aviculture, l'apiculture, la pisciculture, la sériciculture, toutes techniques où l'usage du sol ne joue qu'in rôle d'appoint. Il est donc important que le contrôle de l'État sur la production agricole ne s'exerce pas uniquement par sa reprise de la nue-propriété des terres, mais aussi et surtout par son action au palier de la distribution. Dans une Nouvelle Société, l'État est le principal acheteur et distributeur de la production agricole.

 

3.2 Office National des Produits Agricoles (ONPA)

 

La reprise du sol et la concession de droits d'usage est l'affaire de la DGAT, mais achats et distribution se font par le biais d'un Office National des Produits Agricoles (ONPA) ayant rang de direction générale au sein d'un Ministère des Ressources naturelles et de l'environnement. L'ONPA met en place une structure d'assistance technique et financière aux exploitants des secteurs agriculture et élevage; d'abord au palier de la production, puis à celui de la commercialisation des produits. Il intervient comme expert et conseil des nouveaux paysans comme des anciens, pour que le sol soit affecté sans heurts à sa meilleure destination. Il intervient comme banquier, pour mettre le crédit nécessaire à la disposition de ceux qui veulent s'établir et produire. Il intervient comme acheteur/distributeur de premier recours, enfin, pour que producteurs comme consommateurs soient traités équitablement.

Dans les sous-secteurs agriculture/élevage, sauf si l'exploitant a reçu pour s'établir une aide financière de l'État, les conseils donnés à l'exploitant sont des recommandations, pas des directives et il peut à son gré accepter ou refuser les offres d'achat de sa production qu'on lui soumet. La ressource exploitée est ici renouvelable et l'exploitant qui paye ses impôts peut faire ce qui lui plait. Contrairement au sous-secteur « extraction » où L'ONMP est le meneur de jeu, l'État par le biais de l'ONPA ne joue dans les secteurs agriculture/élevage qu'un rôle auxiliaire.

 

3.3 L'ONPA et la production

 

3.3.1 L'ONPA conseiller

Quand le propriétaire dont l'État reprend la propriété du sol préfère en renoncer à l'usage plutôt que d'en demeurer concessionnaire et d'en acquitter l'impôt sur le capital, c'est la DGAT qui détermine la nouvelle affectation des terres. Si cette affectation est à l'agriculture ou l'élevage, elles ne sont concédées à un nouveau concessionnaire que sous condition contraignante des types de culture ou d'élevage qui y seront permis et c'est ONPA qui les définira. Même chose si un nouvel exploitant l'obtient contre valeur de l'ex-propriétaire devenu concessionnaire mais que c'est l'ONPA qui lui prête la somme requise pour l'acquérir ; l'ONPA peut alors en fixer l'usage jusqu'à ce que le prêt ait été remboursé.

Dans tous les autres cas, l'exploitant peut prendre les décisions qui lui plaisent quant à l'utilisation des sols, sous réserve de ne pas en changer la destination d'origine dont la DGAT a fait le constat en lui accordant sa concession. L'ONPA, toutefois, lui donnera des conseils et il aurait tout intérêt à les suivre, car elle s'y connaît mieux que lui. Ce n'est pas que la problématique de l'utilisation des sols pour l'agriculture/élevage soit complexe : elle est simple. Considérant la demande et les prix relatifs des produits agricoles et d'élevage ainsi que la capacité des sols, il faut consacrer à la culture et à l'élevage les espaces adéquats qui optimisent le revenu de l'exploitant. Même raisonnement entre deux types de cultures et aussi entre deux type d'élevages : les bovins dans l'herbe, puis les ovins et enfin les caprins sur les sols de misère.

La difficulté traditionnelle, c'est que l'exploitant ­ à l'exception de la transnationale qui contrôle une monoculture -ne sait pas évaluer la demande et les prix et n'a d'ailleurs pas les renseignements nécessaires pour le faire. Il peut encore moins en prévoir les variations, non plus que celles des coûts de transports et autres éléments pertinents. Ce que l'exploitant ne sait pas faire, l'ONPA le sait. L'ONPA d'une Nouvelle Société peut estimer la demande nationale et internationale. Il peut prévoir l'évolution des prix d'autant mieux qu'il contribue lui-même pour une bonne part à les établir sur le marché national et dispose des contacts pour suivre leur évolution sur les marchés mondiaux des denrées. L'ONPA dispose de l'expertise pour traduire son estimation de la demande pour les produits d'agriculture et d'élevage en une affectation idéale du sol aux divers types de culture et aux divers type d'élevage pour optimiser la rentabilité de la production.

Dans une Nouvelle Société, ces estimations de l'ONPA sont du domaine public et l'ONPA met à la disposition du producteur des conseillers pour le guider dans ses choix. Les messages et conseils de l'ONPA sont publiés, diffusés, expliqués aux exploitants par des conseillers, agronomes chevronnés. Pour le propriétaire devenu concessionnaire et qui exploite une terre qui lui appartenait, elles ne constituent pas des directives, mais des recommandations. Libre à lui de cultiver le trèfle là où pousseraient des asperges ou de laisser brouter ses chèvres sur des terres qui supporteraient une culture maraîchère. Il pourra vendre sa production à l'État ou la commercialiser lui-même, pour autant qu'il acquitte l'impôt sur la valeur fiscale qu'il a fixée à ses lots.

Évidemment, s'il fait tout à l'envers il fera moins de profit. C'est son droit. Si, toutefois, il méjuge de la valeur de son exploitation parce qu'il en tire peu de profit et lui fixe une valeur fiscale inférieure à sa valeur marchande, il risque bien que quelqu'un lui en offre le prix et en devienne acquéreur. Avec le temps, les terres dont l'affectation ne colle pas au plan optimisé de l'État et n'est pas efficace changeront de mains et seront utilisées ensuite de façon plus conforme. Parce que l'ONPA peut faire mieux, elle en arrivera à déterminer peu à peu l'usage des sols qui lui semble optimal.

Le rôle de conseil de l'ONPA ne se limite pas à recommander les types de cultures ou d'élevages à privilégier. Il y a aussi l'information qu'il diffuse par la distribution au départ de brochures - et en continu sur Internet, en mode interactif - concernant, les engrais, les pesticides, la rotation des cultures, etc. Compte tenu de l'importance d'optimiser la production agricole et de la catastrophe financière que représente une épizootie, chaque producteur a accès gratuitement aux services d'un vétérinaire et d'un agronome.

C'est l'exploitant qui choisit ces professionnels, mais leurs services sont rémunérés par l'ONPA qui en intègre le coût à sa structure de prix. Ils le sont selon le même principe de paiement par capitation qu'une Nouvelle Société utilise pour financer la Santé, l'Éducation et autres services, c'est-à-dire sans égard au temps d'intervention ni à la condition du sujet traité, mais en fonction d'un prix forfaitaire annuel par hectare variant selon le type de culture, ou par unité selon le type d'élevage.

 

3.3.2 L'ONPA banquier et assureur

En pays développés, le rôle de banquier de l'ONPA est de financer l'achat ou la location, par un producteur ou un groupe de producteurs, de l'équipement de pointe qui est la condition sine qua non de la rentabilité en agriculture/élevage et dont l'absence est le signe le plus évident du sous développement. L'OPNA joue aussi le rôle d'assureur contre les risques liés aux intempéries et aux risques de force majeure, ceux que les compagnies d'assurances traditionnelles hésitent à couvrir : inondations, séismes, etc.

Dans le tiers-monde, là où la reprise des sols va de paire avec une réforme agraire, le rôle de banquier de l'ONPA quand s'installe une Nouvelle Société globale, est primordial. Aucune institution bancaire néo-libérale traditionnelle n'accepterait de prêter à un individu sans argent, sans travail, sans éducation et sans expérience, le fonds de roulement nécessaire pour opérer une exploitation agricole sur une terre dont, par surcroît, il n'est même pas propriétaire. Elle lui prêterait encore moins l'argent requis pour en acquérir la concession.

L'ONPA peut le faire, dans une Nouvelle Société globale, non seulement parce que l'État qui lui en fournit les fonds a pour priorité la dimension sociale de l'affaire, mais aussi parce que l'ONPA contrôle de fait toutes les variables qui garantissent le remboursement du prêt. Le nouveau paysan reçoit une formation de départ que lui fournit l'ONPA et, par la suite, un coaching continu que lui donne aussi l'ONPA. Il reçoit aussi de celui-ci les conseils pertinents au type de culture qu'il y introduira et qui aura été déterminé - par l'ONPA - en tirant le meilleur parti du sol lui-même et des conditions de commercialisation du produit. Il travaillera avec l'équipement adéquat, qui lui sera souvent prêté par l'ONPA. Sa récolte sera achetée par l'ONPA à un prix qui en garantit la rentabilité et elle sera pleinement assurée contre tous les risques. Le remboursement dû sur la somme qu'on lui a prêtée pour son fonds de roulement initial sera prélevé à la source du prix payé pour sa récolte et n'en représentera jamais plus de 10%. L'avantage pour l'agriculteur est évident. Fini, pour lui, les problèmes de financement ; il peut emprunter ce dont il a besoin directement de l'ONPA, sur la seule garantie de son contrat et de sa récolte.

 

3.4 L'ONPA et la distribution

 

3.4.1 L'ONPA acheteur

L'ONPA est l'acheteur universel des produits des sous-secteurs agriculture/élevage. Il se porte en principe acquéreur de toute la production, en exécution de contrats conclus avant même que la production n'ait débuté et que quoi que ce soit n'ait été investi pour la produire. Il l'achète à un prix fixé de telle manière qu'il soit suffisant pour rembourser toutes les dépenses que le producteur a dû faire pour produire et rémunère adéquatement le travail que celui-ci a apporté à cette production. Sauf dans les cas que nous avons vus précédemment, l'exploitant reste pourtant libre d'accepter ou de refuser cette offre d'achat de l'ONPA. Le processus d'achat passe par les étapes suivantes.

Une fois l'an, à une date fixe qu'il juge opportune, mais toujours la même, l'ONPA divulgue avec transparence sa politique et ses intentions dans un rapport annuel. Il y ajoute des commentaires quant aux cultures dont il souhaite à terme diminuer ou augmenter le volume ou la surface cultivée, ainsi que les efforts qu'il entend mettre pour améliorer l'équipement et augmenter les rendements dans chaque type de culture. Ceci, afin que les agriculteurs comprennent dans quel contexte se situent les changements qu'on leur suggère et puissent prévoir le soutien financier et technique dont ils disposeront.

L'ONPA, par exemple, si sa politique a moyen terme est de diminuer l'usage du tabac et d'en réduire progressivement ses achats d'une année à l'autre, le dira clairement et proposera une ou des cultures de substitution. Il encouragera le passage vers ces cultures de substitution en offrant pour celles-ci des prix plus élevés, en mettant prioritairement l'expertise technique de ses conseillers au service de ceux qui veulent en changer, en proposant au besoin une formation professionnelle ad hoc et en accordant des crédits spéciaux pour l'achat des équipements nécessaires à cette nouvelle culture. C'est ce genre d'information que diffuse, entre autres, le rapport annuel

Le rapport annuel de l'ONPA rend public également le calendrier d'émission des offres d'achat de produits agricoles qui seront proposées en cours d'année aux producteurs, indiquant pour chacune les quantités approximatives que l'ONPA compte acquérir. Les offres d'achat elles-mêmes sont émises aux dates ainsi indiquées au calendrier, une ou plusieurs fois par année selon la nature du produit. Ainsi, par exemple, si un type de culture permet deux récoltes par année, les offres d'achat seront émises deux fois par an, chaque 60 jours avant le moment normal des semences. Le principe directeur est que l'exploitant puisse accepter ou non l'offre d'achat d'un type de production avant de s'être commis à la produire.

L'offre d'achat est publiée sur le site de l'État sur Internet. Même dans les pays les plus pauvres, une Nouvelle Société qui s'installe offre immédiatement à tous ses citoyens un accès universel à l'Internet, (Texte 708). L'offre d'achat indique simplement le prix auquel l'ONPA s'engage à acheter toute quantité du produit faisant l'objet de l'offre d'achat dont le producteur est prêt à lui confirmer, dans les 30 jours suivant l'offre, la livraison au moment de la récolte. Le producteur peut accepter cette offre pour la quantité qu'il veut et qu'il peut produire, confirmant son accord aussi par Internet.

Dès que le délai de réponse à son offre d'achat est expiré - un mois avant les semences ou l'événement déclencheur qui en tient lieu s'il s'agit d'un autre type de production - l'ONPA, au vu des contrats qu'on lui a confirmés et de son estimation des besoins (consommation interne et exportation) peut faire aux producteurs une deuxième offre, à un prix différent. Cette offre n'est faite que si la quantité dont on lui a confirmé la livraison est insuffisante.

Même si l'ONPA fait cette deuxième offre, il ne s'engage cependant cette fois qu'à acheter la quantité dont il a besoin. La page ONPA du site Internet de l'État confirme, dès qu'il les reçoit, les acceptations de son offre que les producteur lui font parvenir ; quand le seuil qu'a fixé l'ONPA est atteint, la confirmation automatique que retournait le site aux producteurs est remplacée par un avis les informant que leur acceptation a été tardive et qu'ils doivent désormais s'intéresser à une culture différente.

Les offres d'achat, respectant les cycle de production des divers produits, sont cependant échelonnées, dans la mesure du possible, de façon à ce que leur refus de s'engager dans un type de production aux conditions qui leur sont offertes laissent au producteur une marge de manoeuvre pour accepter une autre offre et produire autre chose. Des offres distinctes sont faites pour tous les types de culture, les produits laitiers, la laine, le bétail d'abattage, etc., et les conditions de livraison varient évidemment selon la nature du produit.

l'ONPA se porte ainsi, sans aucune contrainte, acquéreur de la production agricole. Il le fait en principe selon son estimation des besoins, mais rien ne lui interdit - dépendant de la nature du produit, bien sûr - d'acheter plus et de se constituer une réserve pour faciliter la transition d'une culture à une autre, ou d'acheter moins et d'encourager ainsi certains producteurs à se garder une marge de manuvre sur le marché.

L'agriculteur, en effet, a ici le meilleur de deux mondes. Il peut d'abord vendre sa production à l'ONPA et se mettre du même coup à couvert des aléas de son métier; ce qu'il va produire est alors vendu avant même que la graine ne soit en terre et une assurance le protège contre les intempéries et tous les autres risques. Rien ne l'oblige à le faire, cependant. Il peut aussi vendre production sans passer par l'intermédiaire de l'État. Qui veut spéculer, peut parier que la demande sera plus forte que ne l'a prévu l'État, ne pas vendre tout ou une partie de sa production à l'ONPA et chercher à la vendre soi-même.

 

3.4.1 L'ONPA distributeur

Devenu propriétaire au moins d'une très large part de la production des secteurs agriculture et élevage, l'ONPA a le mandat d'abord de la distribuer aux grossistes nationaux qui en assureront la vente aux consommateurs. Quand il prend livraison de ses achats, il approvisionne ceux-ci selon la cédule dont il a convenu d'avance avec eux.

Cela fait, la deuxième fonction de l'ONPA est à l'import-export. Il vend sur les marché mondiaux, de gré à gré ou au cours des denrées, les produits dont la production nationale est suffisante pour en faire l'exportation et y achète de la même manière, en quantité suffisante et au meilleur prix, les produits pour lesquels la demande nationale est supérieure à la quantité produite au pays. Son volume considérable de ventes et d'achats donne à l'ONPA une position de force pour négocier sur le plan international et conclure des accords de troc à long terme.

Quand est mise en place une Nouvelle Société globale qui s'attaque directement aux problèmes du sous-développement, l'ONPA n'approvisionne pas que ses grossistes mais aussi un réseau de vente directe au consommateur. À ces comptoirs, la population peut avoir accès aux produits essentiels indiqués à une liste dont le contenu varie selon les circonstances spécifiques à chaque situation et les coutumes locales. Ceci évite la spéculation et le profit des intermédiaires, sur des produits ou une légère différence de prix peut être littéralement une question de vie ou de mort pour certains éléments de la population. Sont exclues de cette liste les cultures maraîchères produites de façon artisanale et vendues directement par le producteur au consommateur dans les marchés publics.

Ceci est un outil de justice sociale extrêmement puissant, puisque l'ONPA n'est pas tenu de vendre les produits agricoles à profit. Il peut payer ses achats au prix qui garantit un revenu adéquat au producteur agricole et vendre ces produits au prix qui convient pour que la population puisse en consommer selon ses besoins. Si le prix de vente par l'ONPA d'un produit agricole, au comptoir de vente directe au consommateur, est ainsi inférieur au prix qu'il en a payé ­ et ce sera souvent le cas dans les pays du tiers monde, au moment où une Nouvelle Société globale cherchera à y implanter ses méthodes dans une structure économique encore fragile ­ la différence constitue une subvention à l'agriculture locale tout en nourrissant la population, ce qui est souhaitable. On le fait ainsi en laissant un minimum de prise aux intermédiaires et magouilleurs nationaux et étrangers.

C'est une forme de subvention dont le maniement est facile et qui n'a que des avantages. Elle exige seulement, sur le plan logistique, que certains des produits achetés par l'ONPA soient marqués de façon indélébile avant leur revente, par radiation ou autrement, afin de dépister ceux qui, malgré la complexité de cette opération, essayeraient de racheter les produits au détail à ces comptoirs pour les vendre à nouveau à l'ONPA et réaliser un profit. Surpris, ceux qui tenteraient cette manoeuvre recevraient des peines exemplaires.

En subventionnant de cette façon, l'État aide les véritables exploitants, mais rend difficile la position de ceux qui détiennent la terre sans l'exploiter pour fin de spéculation et pour qui une subvention ainsi liée à la production ne compense plus la taxe mensuelle sur le capital qu'ils doivent payer. Une terre agricole laissée improductive sera rapidement cédée puis affermée à un autre exploitant.

C'est une mesure qui chagrinerait aujourd'hui certains responsables du FMI, de la Banque mondiale et du courtage en alimentation, mais quand sera établie une Nouvelle Société globale, ils auront été mis hors d'état de nuire. Avec un peu de chance, ils l'auront été avec politesse, au lieu de recevoir la balle dans la nuque que leurs politiques actuelles leur attirent. Cette allusion nous invite à parler un peu de la problématique de l'agriculture dans le tiers-monde aujourd'hui, avant qu'une Nouvelle Société globale n'y ait été mise en place

 

3.5 Un ONPA en pays du tiers-monde ?

 

Une reprise des terres selon les principes énoncés au Chapitre1 de ce texte parlant du rôle de la DGAT peut apparaître comme une option intéressante pour un pays sous développé. Mais à quoi bon reprendre la propriété du sol si on ne peut rien en faire ? Nous en parlons ici, parce que l'hypothèse la plus vraisemblable, après la reprise du sol par une DGAT en pays du tiers monde, est son affectation à l'agriculture et à l'élevage Dans une NS globale, à la reprise du sol par une DGAT succède bien, en effet, l'intervention d'un Office de la Production Agricole qui en rationalise l'exploitation. Mais aujourd'hui, est-il possible de mettre en place un ONPA dans un pays sous développé ? Il faut voir lucidement les obstacles qui s'y opposent.

Nous avons déjà dit et nous répétons que seule une Nouvelle Société globale peut appliquer intégralement ses principes dans les pays du tiers-monde. Elle même ne peut le faire, d'ailleurs, qu'après une phase préliminaire qui lui permet de hausser le niveau de développement de ces pays au seuil minimal à partir duquel ces principes peuvent y être instaurés. Cela étant admis, une reprise de la propriété du sol et son affectation, chaque fois que possible, à l'agriculture ou l'élevage ne peut-elle avoir lieu dans certains pays du tiers-monde, sur une base nationale, sans que toutes les composantes d'une Nouvelle Société aient été mises en place ?

Ce n'est pas impossible, mais même si on peut définir des principes universels de gestion de l'agriculture/élevage, il faut toujours se souvenir de l'écart démesuré entre l'importance relative de ces sous-secteurs dans l'économie des pays développés et celle des pays du tiers-monde. Nous avons énoncé des principes qui s'appliquent aux uns comme aux autres, mais il faut signaler les graves dangers auxquels s'exposerait un petit pays du tiers monde qui voudrait mettre en place un ONPA aujourd'hui même et procéder seul de la manière que nous venons de décrire.

Par exemple, un pays sous-développé peut créer un ONPA, procéder à la reprise des sols et les réaffecter. L'ONPA ainsi créé ne peut, cependant, dans ces circonstances, limiter ses objectifs à optimiser les gains de productivité : il y a une dimension sociale dont il doit tenir compte. La reprise du sol, en pays du tiers-monde, a l'effet d'une réforme agraire et l'ONPA doit en retirer les avantages sociaux qu'on attend d'une réforme agraire.

Or, souvenons-nous qu'une reprise des sols, dans le cadre d'une Nouvelle Société, offre en priorité à l'exploitant en place un droit d'usage pour maintenir en marche cette exploitation. Si ce principe est respecté, il implique qu'on ne remette pas en question l'utilisation du sol pour des monocultures d'exportation dans le pays où la reprise a lieu. Café, thé, cacao, bananes, coton, etc. continuent donc d'y être produits par ceux qui aujourd'hui les produisent ­ souvent des transnationales ou leurs filiales ­ et y occupent encore parfois les meilleures terres. Est-ce que cette reprise du sol à la façon NS suffirait à satisfaire les aspirations de ceux qui réclament une réforme agraire ?

Supposons, toutefois, pour fins de discussion, que le principe en a été accepté et que l'État ne reprenne et ne réaffecte que les sols non exploités. Dans certains pays, les propriétaires d'une large partie des sols cultivables ne les exploitant pas mais les gardant en friches pour spéculation, ou ne les exploitant que d'une façon peu productive qui ne leur permettrait pas d'en acquitter la taxe fiscale et de les conserver, le résultat ne serait pas négligeable. On peut prévoir que, même en donnant au propriétaire actuel toutes les chances d'en rester le concessionnaire et de les exploiter, une énorme surface de sol cultivable deviendrait disponible dont il appartiendrait à l'ONPA d'assurer l'exploitation. Ne serait-ce pas une bénédiction et cette démarche ne serait-elle pas justifiée, indépendamment de tout autre implantation des principes NS ?

Une bénédiction, oui, car quelle activité productrice plausible, autre que l'agriculture de subsistance, existe-t-il dans ces pays pour les millions de sans-travail analphabètes, sans formation, qui errent aujourd'hui en bandes, par monts et par vaux, cherchant des emplois précaires de «peones » ? Quelle autre solution qu'un retour à la terre pour ceux qui se sont exilés vers les favelas, barrios et bidonvilles des mégalopoles du tiers-monde ? Il semble raisonnable qu'on leur concède des terres et qu'on leur y laisse produire, au moins pour assurer leurs besoins alimentaires. On leur donne aussi du même coup - et c'est tout aussi important - un statut social de base acceptable : ils deviennent paysans, et non plus mendiants par nécessité, petit escrocs ou malandrins. Dans bien des pays, un retour à la terre semble venir résoudre une équation sociale qui autrement resterait sans solution.

Une bénédiction, mais aussi un défi. Avant de se lancer dans cette aventure, un pays doit vérifier d'autres éléments. D'abord, on doit pouvoir résister aux pressions démagogiques et concéder l'usage de la terre, mais ne la donner à personne. On doit ensuite faire le nécessaire, en y mettant le temps qu'il faut, pour que des millions d'inactifs s'y établissent dans l'ordre. On ne peut revivre l'ouverture de l'Oklahoma ! La reprise du sol qui, dans le monde développé, n'est qu'un simple préambule avant que ne commence le vrai travail d'optimisation des secteurs agriculture/élevage est au contraire, dans le tiers monde, le plus grand défi à relever.

Une politique de retour à la terre, pour merveilleuse qu'elle paraisse, doit être entreprise avec lucidité. Il ne faut pas que l'immensité des terres en friches dans le tiers-monde crée d'illusions sur la capacité d'absorption de main-d'uvre et de production utile du secteur agricole. Il y a bien aujourd'hui, en effet, un déficit de production alimentaire dans le monde; mais il est grossi par des problèmes de logistique qui n'ont rien à voir avec l'étendue des surfaces cultivées et, surtout, ce déficit est uniquement dû au déséquilibre des forces en présence sur les marchés. Ce déficit pourrait être réglé d'un trait de plume et en y mettant un an d'effort par quiconque en aurait le pouvoir militaire, politique et économiqueet le courage.

Une Nouvelle Société globale règlera ce déficit de façon efficace, en tirant le meilleur parti des ressources globales: on ne mettra pas de bonnes terres en jachère en Beauce pendant qu'on irrigue à grands frais des hectares de pierraille au Sahel. Une Nouvelle Société limitée à un seul pays en voie de développement - ou un pays qui sans choisir d'appliquer le programme complet d'une Nouvelle Société voudrait simplement en prendre le volet agricole ­ n'a pas cette opportunité. Il doit faire avec ses ressources propres, lesquelles peuvent être bien insuffisantes.

Surtout, tout pays qui procède à une reprise des terres par l'État et à leur réaffectation pour créer les conditions d'un retour à la terre doit comprendre que le retour à la terre ne peut être qu'une étape. Il faut prévoir que, dans une génération, deux tout au plus, les sans-travail dont on aura fait des agriculteurs ou leurs enfants devront quitter à nouveau la terre dont la mécanisation et la productivité seront devenues telles, si l'expérience a réussi, que comme dans les pays aujourd'hui développés une toute petite minorité de la population active suffira à son exploitation. Les nouveaux paysans devront redevenir citadins.

Quand on parle d'installer les inactifs sur des terres, on parle donc, en fait, d'un aller-retour. Pour que leur passage aux champs donne de bons résultats, il faut que les nouveaux paysans soient, dans le secteur agriculture/élevage, en apprentissage d'entrepreneurship et qu'ils en profitent pour devenir autonomes,. Lorsqu'ils devront inévitablement revenir un jour en milieu urbain, il faut qu'ils soient capables, comme tout le monde devra alors l'être, d'agir comme salariés quelques heures par semaines, mais de devenir simultanément des fournisseurs de services autonomes. (Texte 701).

Une Nouvelle Société globale a les outils pour gérer cette double migration. Elle contrôle les entrées au sous-secteur agricole par les conditions qu'elle pose à l'assistance qu'elle accorde aux sans-travail pour leur permettre l'accession à exploitation du sol. Elle contrôle aussi les sorties (le retour vers la ville), d'abord par ses subventions qui déterminent le revenu de l'agriculteur et donc l'écart entre ce revenu et celui qu'il toucherait en ville et, ensuite, par ses investissements en équipement agricole. Ce sont ces investissements qui produisent les gains de productivité et rendent éventuellement superflue une abondance de main-d'oeuvre dans l'agriculture et l'élevage. Le flux de retour à la ville peut être ajusté à la capacité d'absorption de main-d'uvre des secteurs secondaire et tertiaire de l'économie et couplé à un effort colossal d'éducation et de formation ciblée

Un pays riche qui prend la voie que nous avons décrite peut se munir en principe de ces outils, mais les pays pauvres qui voudraient les utiliser ont-ils les ressources pour le faire ? La fourchette est très large. Les ressources techniques du Brésil le lui permettraient sans doute, mais pas celles du Congo ou de l'Angola, quelle que soit la richesse de leur sol et de leur sous-sol. Quant à l'Inde, je ne me risquerais pas, pour de multiples raisons, à faire pour le moment le moindre pronostic sur la façon dont y évoluera l'usage des sols.

Bien des pays du tiers-monde doivent aujourd'hui songer à utiliser l'arme du retour à la terre : s'ils y renoncent, ils condamnent à des décennies de misère ceux à qui ils refusent cette opportunité. Il ne doivent pas en abuser, cependant. Une Nouvelle Société peut concéder des terres en friches parce qu'elle peut soutenir les prix agricoles. Un pays qui le ferait sans disposer des moyens nécessaires pour soutenir les prix et assurer la commercialisation des produits risquerait fort de réduire ses « nouveaux paysans » à une économie d'autoconsommation tout en compromettant le développement éventuel d'un secteur agricole vraiment efficace.

La stratégie d'une expansion suivie d'une contraction à terme de la main-d'uvre agricole représente le défi le plus important qu'il faille relever dans le tiers-monde. Une Nouvelle Société globale peut le relever parce qu'elle contrôle non seulement la commercialisation des produits agricoles, mais aussi la politique financière (Texte 706) et les conditions de formation professionnelle (Texte 704) et d'embauche (Texte 701) dans tous les secteurs de l'économie. Un pays sous-développéqui crée un ONPA, en applique les stratégies et fait d'un retour à la terre sa politique agricole sans disposer de ces autres instruments doit comprendre les risques qu'il court.

Ajoutons que si cette expérience est tentée ­ et nous ne le recommandons pas - il faudra des précautions particulières pour arrimer cette démarche au reste des politiques de l'État auxquelles elle ne s'imbriquera certes pas aussi facilement que si tous les principes d'une Nouvelle Société étaient respectés.

 

 

4. SECTEUR FORESTERIE (ONPF)

 

L'exploitation forestière apparaît a priori comme une forme d'agriculture. Elle utilise une ressource renouvelable qui ne se distingue des graminées ou autres plantes qu'en ceci que la repousse n'en est pas annuelle, mais exige 20, 30, 40 ans ou plus. Est-ce une raison suffisante pour lui accorder un traitement particulier ? Après tout, d'autres cultures - la banane par exemple - n'ont pas non plus un cycle annuel et l'on n'en fait pas des cas d'espèces. Pourquoi créer ­ là où l'importance de cette ressource le justifie, bien sûr - un Office National des Produits Forestiers ?

Ce qui exige une approche distincte, dans le cas de la foresterie, c'est d'abord que le cycle de croissance est si long que ce qui serait ici l'équivalent d'une « rotation des cultures » doit couvrir un territoire énorme. Une simple règle de trois donne, pour chaque espèce, le rapport de la jachère à l'exploitation active; le résultat est impressionnant L'importance de la foresterie sur le plan de l'occupation du territoire est considérable. C'est aussi que toute estimation de la demande à si long terme comporte une marge d'erreur qui la rend assez oiseuse. On ne sait même pas vraiment si dans 20, 30 ou 40 ans, progrès de la technologie pris en compte, on utilisera encore du bois en quantité significative en construction ou si des journaux en papier seront encore publiés !

En fait, il y a un risque très significatif en foresterie que des prévisions qui ne sont que des extrapolations bêtes conduisent à des investissements qui en forcent ensuite la réalisation, biaisant de façon néfaste une évolution qui autrement mènerait à une tout autre situation. Dit crûment, il n'est pas certain que l'on construirait tant en bois, même aujourd'hui, si ce n'était du capital fixe investi dans l'industrie forestière et du lobby des producteurs de bois d'oeuvre. Il est improbable que l'on abattrait tant d'arbres pour mettre un quotidien à la porte de chaque citoyen, s'il n'y avait tant d'argent investi et tant de profit à faire dans l'industrie des pâtes et papier.

Il ne faut pas poursuivre dans cette voie, mais plutôt penser que ciments et plastiques remplaceront tôt ou tard le bois en construction, de même qu'une lecture sur des écrans devenus plus commodes remplacera peu à peu le support papier. Une Nouvelle Société en fera l'un des objectifs de sa politique environnementale. Dans cette optique, il est pratique de considérer la foresterie, aujourd'hui et demain, à la fois comme un type de culture ET comme une opération similaire à l'extraction.

Au fur et à mesure que la demande pour les produits de la forêt diminuera et qu'on pourra en prévoir avec plus d'exactitude la consommation pour divers horizons, il se développera d'abord une véritable agriculture forestière. Sur certains terrains qui s'y prêtent, une forêt abattue ne sera replantée que pour être abattue à nouveau. Cette situation, correspondant aux exigences d'une demande et donc d'une production plus modeste, sera gérée selon les principes de tout autre culture. Quiconque ayant obtenu de la DGAT une concession d'exploitation à cette fin voudra planter un arbre aura le droit de l'abattre et ne sera soumis qu'aux règles de l'exploitation agricole appliquée par l'Office National des Produits agricoles (ONPA). Cette situation, cependant, ne s'appliquera que sur une petite partie de la forêt aujourd'hui exploitée.

Pour la grande majorité des terrains aujourd'hui en exploitation forestière dans le monde, il faut prendre pour acquis qu'il n'y aura pas reboisement ou que, si reboisement il y a, ce sera pour des fins ludiques et environnementales. La scie et la hache n'y repasseront que pour entretien. Il ne s'y établira pas une agriculture forestière. Aux fins de l'exploitation forestière, l'arbre que l'on y abat ne doit pas être considéré comme une ressource renouvelable.

L'arbre centenaire qu'on coupe dans la forêt primale pour alimenter l'industrie ne sera pas remplacé par un autre qu'on utilisera aux mêmes fins. Il constitue donc une ressource naturelle unique qui appartient à la collectivité et qui doit être exploitée avec la même retenue que le pétrole, le fer ou le nickel. Ce sont les règles de l'industrie extractive telles que nous les avons décrites au Chapitre 2 qui doivent s'y appliquer et nous ne les reprendrons pas ici in extenso. Redisons seulement que l'ONPF qui est propriétaire de la ressource l'exploite en offrant des contrats d'exploitation à des concessionnaire en concurrence pour les obtenir, apporte au produit brut les transformations qui en optimisent les conditions d'entreposage, l'entrepose puis la vend au moment opportun selon les besoins nationaux et la demande mondiale.

Tous les terrains déboisés ne devant pas nécessairement être replantés, mais seulement ceux dont la Direction générale de l'aménagement du territoire (DGAT) décide qu'ils doivent l'être, le concessionnaire exploitant n'a d'autre obligation que de remettre le terrain à l'État après la coupe, en la condition d'entretien minimal dont les règles seront précisées. Le reboisement ou l'aménagement du sol à d'autres fins sera pris en charge par l'État ou le prochain concessionnaire, lesquels s'acquitteront de cette tâche avec plus d'intérêt que celui qui vient d'en terminer la coupe.

 

 

5. SECTEUR DE LA PECHE COMMERCIALE (ONPC)

 

Tout ce que nous disons ici du contrôle de la pêche commerciale peut s'appliquer mutatis mutandis à la chasse commerciale. Dans une Nouvelle Société globale, le contrôle des activités de chasse et de pêche est exercé par deux offices distincts. Dans les pays où la chasse peut revêtir une certaine importance économique, on peut créer aujourd'hui un Office National de la chasse commerciale (ONCC) comme on peut se dispenser de créer un ONPC là où la pêche n'en a aucune. On peut même penser à un Office National de la chasse et de la pêche (ONPC), régissant les deux activités.

Nous donnons l'exemple de la pêche plutôt que de la chasse commerciale, parce qu'il est difficile de penser à long terme à une recrudescence de la chasse commerciale; c'est un anachronisme dont la survivance semble bien liée au respect des patrons culturels de certaines ethnies plutôt qu'à la valeur économique réelle de cette activité elle-même et qui tendra donc à disparaître En revanche, on doit s'attendre sans surprise à ce que l'humanité devienne un jour, au moins pour un temps, plus dépendante des produits de la mer pour son alimentation.

Nous parlons bien ici de la pêche commerciale, l'exploitation des ressources en poissons par un pêcheur qui s'y applique en espérant que cette activité sera son gagne-pain. La pêche que l'on pratique par agrément correspond à une autre utilisation du territoire dont nous parlerons plus loin (Chapitre 7)

 

5.1 Problématique

 

La problématique du contrôle de l'État sur l'industrie de la pêche commence par l'énoncé d'un principe établi en tout arbitraire. On y ajoute un aveu d'ignorance, on continue en posant une hypothèse de déclin ou de forte croissance du sous secteur, selon le pays qui est dans la mire et l'on termine par le constat que cette situation peut changer du tout au tout. Le plan mis en place doit donc être fait au crayon mine et avec l'intention de le gommer aussi souvent qu'il faudra.

 

5.1.1 Le principe

Le principe de base qui préside aux opérations des sous secteurs de la chasse et de la pêche est que gibier et poissons à l'état sauvage sont assimilés à des ressources naturelles et considérés comme propriété collective sous la garde de l'État. Si on parle du lapin en clapier ou du poisson dans l'étang sur une terre dont vous avez l'usage, il est à vous. Mais si un éléphant ­ ou un orignal ­ s'aventure dans votre manioc ou votre maïs, mieux vaut appeler la sécurité locale, qui vous en débarrassera et prendra note des dommages. Vous serez indemnisé. Une Nouvelle Société offre à tous une couverture contre ce risque et tous les autres.

Ne l'abattez pas, il vous en coûterait. À plus forte raison si l'animal est dans un plan d'eau ou autre territoire dont on ne vous a pas concédé l'usage. Pour le sport, il y a des espaces de loisirs ; pour la pêche professionnelle, il faut un permis dont nous voyons plus loin les conditions.

 

5.1.2 Un aveu

Considérant la situation actuelle de la pêche dans le monde et l'État de nos connaissances, il faut bien admettre que l'Office National de la Pêche commerciale (ONPC) d'une Nouvelle Société ne dispose pas au départ de l'information lui permettant de mettre en place une politique optimale. On cherchera à l'obtenir, mais en attendant nous ne savons pas encore vraiment comment stabiliser les stocks de poissons, ni dans quelle mesure les produits alimentaires issus de la mer deviendront des substituts acceptables aux autres protéines animales pour ceux qui n'y sont pas habitués. Il entre ici en jeu des variables culturelles que nous connaissons mal et dont, de toute façon, nous ne pourrions entreprendre ici utilement la discussion.

Aggravant cette ignorance, il est plausible ­ et ceci est un euphémisme - que beaucoup de pays pour qui la pêche dite hauturière et pélagique est une activité importante cachent soigneusement le volume réel de leurs prises tel que le leur ont communiqué leurs opérateurs nationaux et que ces opérateurs mentent d'ailleurs eux-mêmes sans vergogne à ce sujet.

Les accords internationaux sont donc plus ou moins respectés et, en plus du préjudice réel aux réserves, il y a celui, peut-être encore plus pernicieux, qu'on ne sait vraiment pas où l'on en est et qu'on ne peut donc savoir quoi y faire.

 

5.1.3 Une hypothèse

Nous en savons peu sur la réalité de la pêche et encore moins sur son évolution. Dans le doute et à court terme, il semble raisonnable de prévoir, pour la plupart des pays développés à exception du Japon et peut-être de la Russie, un plafonnement ou une réduction de la main-d'uvre dans les sous-secteurs chasse et pêche.

C'est une hypothèse de travail. Elle peut être révisée sans changer le bien fondé des autres éléments dont nous discutons. Partant de cette hypothèse, il semble que la priorité pour une Nouvelle Société soit d'offrir aux travailleurs du sous secteur de la pêche commerciale une sécurité accrue et de voir à minimiser les inconvénients d'une réaffectation que les circonstances pourraient leur imposer.

 

5.2 L'ONPC

 

5.2.1 Le permis de pêche dans une conjoncture à la baisse

Dans une Nouvelle, la pêche commerciale s'exerce dans le cadre d'un permis annuel concédé par l'ONPC. Dans une conjoncture à la baisse, il l'est d'abord à ceux, individus et compagnies, qui ont le droit acquis d'exercer cette occupation. Ce permis ne confère au pêcheur d'autre droit que celui d'aller chercher le poisson et de le rapporter à son propriétaire : l'État représenté par la DGPC.

On peut fermer les yeux sur une autoconsommation minime par les pêcheurs, pour leur alimentation personnelle et celle de leur famille, mais l'ONPC agit ici comme seul acheteur et distributeur du produit de la pêche. Cette exclusivité, qui n'existe pas dans les secteurs agriculture et élevage, est justifiée ici par le désir de conserver les ressources ; cette contrainte pourra disparaître si nos connaissances et nos moyens d'action s'amélioraient au point que cette exclusivité ne soit plus nécessaire.

Le permis accordé par l'ONPC précise les aires d'opération où le pêcheur peut mener ses activités, limite les prises qu'il peut faire durant l'année et définit le prix auquel celles-ci lui seront payées. Celui qui bénéficie d'un permis ne peut le céder. Il peut demander que la limite qu'on lui a fixée soit réduite, mais non augmentée. Si, au cours d'un mois, le chasseur ou le pêcheur n'atteint pas 6% de la limite annuelle des prises qu'on lui a fixée, il est subventionné jusqu'à concurrence de la valeur de ce 6%. En fin de période, on compense les excédents de certains mois par les insuffisances des autres, mais s'il n'a pas atteint 75 % des prises qu'autorise à son permis, sa rémunération annuelle est tout de même ajustée à 75% de la valeur des prises selon la limite qu'on lui avait fixée.

Au moment de l'émission du permis, il peut exiger que sa limite soit réduite. Toutefois, si à trois reprises il n'atteint pas la limite fixée et à laquelle il a donc consenti, il perd le droit à son permis. Il acquiert alors, en contrepartie, celui de se faire immédiatement racheter par l'ONPC l'équipement qui constitue son investissement, à la valeur qu'il lui a fixée pour fin fiscale, à moins que l'État n'ait dénoncé cette évaluation comme déraisonnable au moment où elle l'a reçue et ait refusé le paiement correspondant. Comme tout autre travailleur d'une Nouvelle Société, le pêcheur qui est ainsi évincé de son occupation traditionnelle par l'évolution technique ou les circonstances garde le droit à son revenu garanti, en échange de sa disponibilité à accepter l'emploi où l'on juge que sa compétence est utile.

Si le pêcheur excède la limite des prises qu'on lui a permises, ou pire, est surpris à vendre ses prises à un autre acheteur que l'ONPC, il perd son permis sans que l'État n'ait à lui racheter son équipement. Si, simultanément, il a bénéficié de la subvention que l'ONPC accorde à ceux qui n'ont pas pu atteindre leur limite permise, il sera aussi accusé de fraude et traité selon les termes de la loi.

 

5.2.2 Une conjoncture à la hausse

Toute cette politique orientée vers une diminution progressive du nombre de chasseurs et de pêcheurs peut changer du tout au tout, cependant, si la situation justifie une politique différente.

S'il devient nécessaire d'augmenter le volume de la pêche pour satisfaire à la demande, une Nouvelle Société globale, ayant défini le volume de prises souhaité en considérant les exigences du maintien des ressources pélagiques, accordera simultanément : a) de nouvelles concessions à ceux qui en feront la demande, et b) une augmentation de leur limite autorisée aux exploitant en place, afin que le total des prises permises s'ajuste le mieux possible à la demande.

Les nouveaux quotas de prises seront vendus aux enchères par lots, entre les intéressés, tant les exploitants actuels que les nouveaux concessionnaires potentiels. La garantie d'un revenu annuel équivalant à 75% de la valeur de leurs prises autorisées ne s'appliquera pas aux acheteurs de ces nouveaux quotas, mais ceux à qui on avait consenti ce privilège pourront continuer à s'en prévaloir à la hauteur de leurs quotas initiaux.

Une Nouvelle Société nationale devra concilier cette politique avec les traités en vigueur. Sa stratégie de négociation de ces traités sera de tenter qu'on lui concède une ou plusieurs aires exclusives de pêche hauturière, en plus de ses eaux territoriales, en échange de son engagement à ne pas exploiter le reste des eaux internationales. Ceci ne lui garantira pas le maintien des stocks à son usage ­ les poissons voyagent sans passeport ­ mais lui facilitera la mise en place d'une politique de conservation raisonnable qui aidera à les maintenir et qui pourra peut-être servir de modèle.

Seul l'ONPC peut acheter et distribuer les produits de la chasse et de la pêche. En ce qui a trait à l'achat, la remise des prises à l'ONPC a lieu à des points prédéterminés qui paraissent commodes. Quant à la distribution, elle est faite sur le marché national par des grossistes, sur le marché mondial par l'entremise de distributeurs spécialisés. Dans un pays où les produits de la mer constituent un élément significatif de l'alimentation de la population, peut-on considérer la possibilité de comptoirs de vente directe, comme ceux dont nous avons parlé au Chapitre 3, touchant le sous secteur agriculture/élevage ?

La logistique en serait plus complexe. En bordure de mer, c'est la femme du pêcheur lui-même qui traditionnellement vend chaque matin la marée aux chalands. Si l'ONPC s'immisce dans ce processus, il introduit un intermédiaire plutôt que d'en supprimer plusieurs et augmente les frais réels de l'échange. Pire, si l'on veut vendre au-dessous du prix d'achat on invite la fraude. Qui empêchera Paul d'acheter au prix subventionné par l'ONPC puis de refiler la marchandise à Pierre qui la revendra à l'ONPC au prix supérieur convenu pour l'achat ? Les quotas imposent une limite à cette arnaque, mais pourquoi courir le risque d'y inciter ?

L'opération des comptoirs de vente directe peut être utile, cependant, si les poissons achetés en bord de mer sont transportés loin du littoral et revendus à bas prix, là où les pêcheurs ne vendent pas, à une population qu'il s'agit d'initier à ce type d'alimentation. Mais ceci exigerait toute une stratégie que nous ne traiterons pas ici.

La vérité, c'est que la politique que nous proposons pour le sous secteur des pêcheries l'est pour une NS en pays développé, pour le chalutier qui ramène des tonnes de poissons. Elle ne l'est pas pour gérer des milliers de pêcheurs autonomes rentrant à l'aube à Zihuatanejo ou ailleurs avec une que de poissons à vendre dans les trois heures qui suivent. Une Nouvelle Société globale le fera, mais un contexte totalement différent.

 

 

6. LES ENERGIES RENOUVELABLES (DGER)

 

La configuration du sol se prête parfois à une production d'énergie. Le cas le plus évident est celui d'une dénivellation qui permet de harnacher la force hydraulique - allant du barrage Hoover au moulin sur une rivière des Vosges ­ mais il y a d'autres cas de figures. Il y a la marémotrice, toujours en principe sur le littoral et donc sur le domaine public, mais donc le site idéal d'exploitation pourrait fortuitement être à l'embouchure en fjord d'une rivière non navigable et donc en terrain privé. Il y a l'activité géothermale. Il y la crête ou la vallée exceptionnellement orientée qui semblent inviter l'installation d'éoliennes. Il y a le plateau qui jouit d'un microclimat d'ensoleillement propice à la mise en place de capteurs solaires.

C'est une Direction générale des énergies renouvelables (DGER) sous l'égide du MRNE qui assure l'exploitation de ces sites et la production des énergies « propres ». Pour en comprendre la mission et la structure, il faut d'abord faire référence à une entreprise d'État dont nous parlerons plus en détail dans un autre texte : l'Office National de l'Énergie (ONE),

 

6.1 L'ONE

 

L'ONE a l'exclusivité de la vente, de la distribution, de l'importation et de l'exportation d'énergie et produit lui même l'énergie qu'il tire de réacteurs atomiques et de centrales thermiques utilisant les combustibles fossiles. Il élève lui même et entretient ses lignes de transmission. Pourquoi ne pas lui avoir confié les tâches imparties à la DGER ?

Parce que le rôle de l'ONE est d'assurer la disponibilité d'énergie au meilleur coût. À coût égal, tout le monde préfère le vent au charbon et le soleil au pétrole, mais nous n'en sommes pas là. Pas encore. En attendant que les torrents, le soleil et le vent puissent satisfaire tous nos besoins à bon compte, une Nouvelle Société n'imposera une énergie « propre » à personne. Elle optimisera sans compromis la consommation d'énergie la plus économique possible. Toute autre approche est un frein au développement, hypocrite et intolérable dans un monde où plus de la moitié de la population vit encore au seuil de la misère.

Nous n'en sommes pas encore au point où les énergies propres ­ sauf l'hydroélectricité, bien sûr - peuvent être aussi économiques que nos méthodes traditionnelles de production d'énergie, mais nous y arriverons. Nous y arriverons d'autant plus vite que l'on fera avec diligence la recherche et l'expérimentation nécessaire et qu'on mettra en place des projets pilotes qui prouveront la rentabilité des énergies propres dans un contexte de production et d'exploitation dans la vie réelle.

On décidera du passage aux énergies propres d'autant plus vite, aussi, qu'on aura comparé sans complaisance le coût des énergies nouvelles à celui des méthodes actuelles augmenté des frais souvent cachés de protection de l'environnement, de remise en état des lieux d'extraction et du coût actuariel de la probabilité estimée de désastres écologiques.

C'est ce travail de recherche, d'application pilote, de réalisation éventuelle à grande échelle et de comparaison honnête des coûts qui est la mission de la DGER.

 

6.2 La DGER

La DGER a une mission en deux (2) volets qui se reflète dans sa structure interne : une Direction de la recherche et une Direction des ressources hydroélectriques.

 

6.2.1 La recherche

D'abord, une Direction de la recherche. La Direction de la recherche de la DGER et son personnel doivent se sentir animés d'un esprit missionnaire, quasi messianique. Ils sont là pour changer le monde et ils travaillent pour Gaïa. Ils sont pressés. Pendant qu'ils poursuivent avec zèle la recherche pour des sources d'énergie renouvelable naturelles et, surtout, pour en abaisser le coût de production, ils savent qu'à l'ONE des alchimistes en jaquettes noires préparent un autre futur basé sur l'hydrogène ou la fusion nucléaire

C'est un scénario de science-fiction, mais c'est aussi toute l'Histoire des Sciences: de cette émulation, peut jaillir plus vite l'étincelle. On comprend alors pourquoi il est opportun de garder au sein du MNRE et loin de la tutelle de l'ONE, collé aux fonctions de protection de l'environnement et doté d'un budget autonome, l'organisme qui conduit cette recherche des sources naturelles d'énergie propre. La Direction de la recherche de la DGER doit travailler d'arrache-pied à capter les énergies propres à leur sources au meilleur coût ; elle la responsabilité de l'expérimentation et de mettre en marche des projets pilotes.

La DGER a aussi le mandat de promouvoir l'utilisation d'énergies propres. Il y a une demande socialement responsable pour une énergie propre qui respecte l'environnement et qui est prête à en payer le prix; la DGER doit identifier cette clientèle et la motiver. L'ayant fait, partie de la mission de la DGER consiste même à convaincre l'ONE d'utiliser davantage les énergies propres et de mettre en place les structures qui permettent d'en retirer le prix correct.

Elle peut le faire d'autant mieux que, n'ayant pas le statut d « Office National », elle ne se pose pas en rival potentiel de l'ONE pour la vente de quelque forme d'énergie que ce soit. Elle n'a pas le mandat d'entretenir des relations commerciales ni la responsabilité d'une autonomie financière. La DGER, n'a qu'un seul client : l'ONE.

Et elle n'a au départ qu'un seul produit vraiment rentable : l'hydroélectricité.

 

6.2.2 Les ressources hydroélectriques

 

L'hydroélectricité est la preuve tangible qu'une énergie naturelle propre renouvelable n'est pas une chimère. Pour les chercheurs de la DGER, c'est à la fois une inspiration, une caution de leur sérieux, un modèle pour la mise en place de projets pilotes et une source de ressources humaines et techniques lorsque le moment est venu d'utiliser une source d'énergie expérimentale dans le cadre d'un projet à échelle industrielle.

En fait, si des projets qui doivent faire leurs frais et dont la production énergétique doit donc être vendu à l'ONE à prix concurrentiel arrivent au stade de l'exploitation, c'est la Direction des ressources hydroélectriques qui en prendra charge, élargissant sa vocation et modifiant même éventuellement son titre pour tenir compte de cette nouvelles réalité.

En attendant, la Direction des ressources hydroélectriques a le mandat bien terre-à-terre de produire l'énergie au meilleur coût, l'ONE ne la lui achetant que si, tenant compte de tous les facteurs, cette énergie qu'elle offre est commercialement une bonne affaire. Elle ne le sera que si la production d'hydroélectricité est planifiée avec soin et réalisée avec compétence.

Ceci implique que soient construits des barrages et leurs infrastructures de soutien, efficacement et dans le respect de l'environnement. La DGER définit sa politique énergétique, estime ses besoins à court et à long terme, fait ses choix, consulte toutes les parties intéressée, obtient l'aval de la Direction générale de protection de l'Environnement, demande et obtient de la DGAT l'affectation du sol requis à la production énergétique et reprend l'usage du sol de ceux qui en jouissaient en les dédommageant à la valeur de l'évaluation fiscale déclarée

Si conformément aux règles prescrites (Texte 706), un concessionnaire du sol s'était prémuni contre la reprise par OVI en acceptant de payer l'impôt sur le capital sur le double de la valeur fixée par le fisc, c'est le double de cette valeur doublée elle même qu'on lui offrira en indemnisation, le concessionnaire pouvant légitimement prétendre qu'on le prive d'un bien dont la valeur subjective dépasse largement pour lui la valeur marchande et que le sacrifice qu'on lui impose au nom du bien commun mérite cette compensation. Si même cette offre lui apparaît insuffisante, le tribunal civil en décidera sans délais.

Ces préliminaires réglés, la DGER ayant établi les plans et devis ainsi que le calendrier du projet à entreprendre passe simplement à l'action. Normalement, elle agit comme maître d'oeuvre et confie les travaux en sous-traitance sur la base d'appels d'offres.

 

6.3 L'entreprise privée dans le sous secteur de l'énergie

 

Dans le sous secteur de l'exploitation des ressource énergétiques, la participation de l'entreprise privée est au palier des travaux à exécuter, sans plus. Il n'y a pas de raison valable pour favoriser la gestion de l'énergie par des intérêts privés. L'État ne peut permettre qu'un autre pouvoir que l'État ait un contrôle sur l'approvisionnement en énergie même d'une partie du système de production ou d'une partie de la consommation privée.

Si des concessions ont été consentis sur des terrains nécessaires à la réalisation du plan énergétique, ces concessions sont rachetées en temps opportun au prix de la valeur fiscale que leur propriétaire leur a fixée, telle que nous l'avons vu à la section précédente. A plus forte raison, il serait impensable dans une Nouvelle Société de privatiser le réseau public lui-même.

Cela ne signifie pas une exclusion totale de l'entreprise privé de la production d'énergie. Rien n'interdit à un concessionnaire exploitant d'un terrain classé agricole ou forestier, par exemple, de mettre à profit une chute sur ses terres pour activer une génératrice ; rien ne lui interdit d'utiliser cette énergie dans le secteur extraction pour faire fonctionner une usine de concassage. Mais on lui permettra pas de bâtir une centrale thermique sur les terres dont l'État lui a laissé l'usage.

Si un concessionnaire, exploitant de bonne foi d'un autre sous secteur, peut produire des kilowatts excédentaire à ses besoins à partir d'une source naturelle et à un prix inférieur au coût de l'énergie produite par l'État, on ne lui interdira pas d'approvisionner son voisin. S'il veut se relier au réseau public, on lui achètera même ces kilowatts à un prix lui permettant d'en tirer un profit qui sera le coût de revient moyen de la production d'énergie par l'ONE

Mais on n'accordera pas de concession spécifique pour la production d'énergie et l'on ne permettra pas la création d'un réseau de distribution parallèle au réseau public. Si la production d'énergie devient la principale activité d'un concessionnaire exploitant d'une autre sous secteur, ou si l'embryon d'un réseau commence à se mettre en place il sera racheté à sa valeur fiscale déclarée et intégré au réseau public de l'Office National de l'Énergie (ONE).

 

 

7. AFFECTATION LUDIQUE DU TERRITOIRE (DGEL)

 

Le sol, aménagé ou volontairement laissé à son état naturel, peut servir de lieu d'agrément ; on peut en exploiter ce potentiel de plaisir et de loisir tout autant que sa capacité à nous fournir des minéraux ou à faire croître des végétaux. La Direction générale des espaces de loisirs (DGEL) contrôle l'exploitation du sol à des fins ludiques.

Nous lions cette activité au secteur primaire plutôt qu'au tertiaire, parce que ceci nous permet de mieux cerner l'utilisation des sols et que les modalités de contrôle des espaces ludiques se rapprochent de ceux utilisés pour le contrôle des autres sous secteurs du primaires. Il est plus facile d'en assurer le suivi cohérent à partir d'une DG du MRNE. Certains des aspects de l'utilisation du sol pour fins de loisir sont néanmoins liés indissolublement à la prestation de services. Nous reviendrons donc sur ce sujet dans un autre texte et nous ne le trairons ici que très brièvement.

 

7.1 Les espaces de loisir

 

Le sol affecté à des fins ludiques peut être partie du domaine public et ouvert à tous, faire l'objet d'une exploitation commerciale privée ou même être réservé au seul usage d'un propriétaire qui l'occupe.

Font partie du domaine publics les parcs en zones urbaines, les forêts domaniales, les espaces entourant les lieux de mémoire ou les sites naturels exceptionnels et classés au patrimoine, les bois où l'on peut chasser en saison et tous les plans d'eau où la pêche sportive, la nage ou la plongée sont permises. Font partie du domaine privé les chasses gardées, les rivières et étangs dont l'accès est réservé aux membres, les terrains de golf privés, les parcs d'amusement de type Disney et autres, les grottes et curiosités naturelles situés sur des terres privées et qui ne sont pas classées au patrimoine ainsi que les espaces en propriété privée entourant les résidences .

La politique de base d'une Nouvelle Société est d'encourager le développement d'entreprises dans le domaine du loisir, cette initiative répondant à l'évolution de la société vers une situation où chacun jouira de plus temps libre et d'une plus grande aisance pour en jouir. À moins d'une raison sérieuse ­ dont, la plus sérieuse, bien sûr est la protection de l'environnement ou du patrimoine culturel - l'État devenu propriétaire du sol répond donc favorablement aux demandes qui lui sont faite pour utiliser le sol à cette fin.

A fortiori, quand la propriété de la terre retourne à l'Etat, le propriétaire qui exploite le sol à cette fin peut demander qu'on lui laisse en concession les espaces déjà consacrés aux loisirs. S'il les exploite déjà commercialement, ce privilège lui sera accordé sans discussion, sous réserve qu'il n'en change pas l'affectation.

L'affectation « loisir », toutefois, recouvre une réalité bien plus variée que les affectation « extraction », « agriculture » ou « élevage ». L'utilisation concrète du sol laissé ainsi en concession pourra donc changer radicalement sans que ne soit changée cette affectation générale au loisir. Aussi radicalement, en fait, que la Direction générale des espaces de loisirs (DGEL) le jugera opportun.

 

7.2 Changements d'affectation

 

A la requête de la DGEL, si celle-ci juge qu'il en va de l'intérêt public, même l'affectation fondamentale du sol pourra être changée par la Direction générale de l'aménagement du territoire (DGAT) pour satisfaire à la demande du concessionnaire ou d'un acquéreur éventuel du droit d'usage ludique du sol. Elle ne le sera jamais, toutefois, sans l'accord de l'autorité locale qui devra d'abord elle-même accepter de changer ses règlements de zonage. Une transformation des lieux et le passage d'un type de loisir à un autre ne sera pas toujours accueillie avec joie par les voisins immédiats du projet, lesquels peuvent préférer côtoyer un terrain de golf bien aménagé plutôt qu'un parc à manèges. Il faudra les en convaincre.

Au nom de la solidarité qui doit prévaloir dans une Nouvelle Société, l'État doit pouvoir arbitrer entre les intérêts particuliers pour satisfaire aux exigence du bien commun. Si douze ou quinze millions de Franciliens veulent un parc d'amusements, la quiétude d'une commune ou d'une autre doit parfois y être sacrifiée. Les habitants de cette commune, toutefois, ont des droits acquis à jouir de cette quiétude et, si on la leur enlève, ils doivent en être dédommagés.

Ce sont les impératifs techniques qui doivent justifier les décisions prises, et c'est à ce niveau qu'interviennent la DGEL et aussi parfois la DGAT. Mais c'est l'autorité locale, aux nom des résidants, qui peut et qui doit exiger des promoteurs une compensation adéquate. Si elle ne le fait pas, elle devra vivre avec les conséquences politiques de ses décisions

Puisqu'un acquisiteur potentiel pourra toujours penser en faire une utilisation plus profitable et à laquelle le concessionnaire en place n'a pas songé, les concessions obtenues pour l'utilisation ludique du sol donneront lieu à des acquisitions forcées à la valeur fiscale déclarée (OVI) bien plus fréquentes que les autres concessions. Il est donc à prévoir que la valeur fiscale déclarée des sols a affectation ludique augmentera rapidement. Soit qu'un nouveau concessionnaire y investisse en leur donnant une fin différente, soit que le concessionnaire en place y mette le prix pour que la destination n'en soit PAS changée.

On peut arguer qu'en ce dernier cas on protège un privilège, mais une Nouvelle Société n'enlève pas aux riches de façon vexatoire. Si la valeur fiscale fixée au sol est telle que, même en l'absence de contraintes quant à son affectation, nul ne veuille s'en porter acquéreur à ce prix, c'est que l'intérêt public est optimisé par la perception de l'impôt sur le sol tel qu'il est présentement évalué et utilisé. Ainsi, même si une chasse gardée projette une image d'élitisme et d'Ancien Régime, une Nouvelle Société ne cherchera pas à en obtenir l'expropriation ou à en forcer les portes. Si elle constate qu'il existe une demande populaire pour ce genre de loisir, elle verra simplement à faciliter aux promoteurs intéressés la mise en place de services équivalent pour consommation grand-public.

Si l'espace que l'ex-propriétaire veut obtenir en concession n'est pas destiné à une exploitation commerciale mais uniquement à son agrément, il pourra mettre cet espace, comme tout autre bien, à l'abri de toute vente forcée par OIV en faisant accepter par le fisc une déclaration de valeur pour ce bien égale au double de sa valeur marchande estimée par un expert du fisc (Texte 706). C'est ainsi que le propriétaire d'une résidence qui y a apporté des ajouts sur une étendue plus vaste que celle que lui accorde automatiquement la reprise du sol par l'État - (fixée dans le rapport 5 :1 à la surface construite) - pourra, en y mettant le prix nécessaire, continuer à jouir de ses courts de tennis ou de ses perspectives.

 

 

8. PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT (DGPE)

 

Nous n'en parlons ici que pour information. La politique environnementale d'une Nouvelle société fait l'objet d'un autre texte de ce site. La Direction générale de la protection de l'environnement (DGPE) est intégrée au Ministère des ressources naturelles et de l'environnement, parce qu'il est pratique d'avoir ainsi, en rapports étroits avec toutes les autres structures de ce ministère dont l'objectif est d'exploiter la nature, celle-ci dont le but est de la protéger.

La DGPE joue un rôle clef dans les activités du MRNE qui est, de tous les ministères, celui qui peut avoir le plus d'impact sur l'environnement. A partir de cette base, cependant, elle recoupe en transversale les activités de TOUS les autres organismes de l'État et de la société. La DGPE s'occupe tout autant de la pollution de l'air des villes par l'industrie secondaire que des conséquences sur la reproduction des espèces marines de la vidange des pétroliers en mer. La DGPE est importante, et ­ comme nous le voyons ailleurs - elle n'est elle même qu'un aspect du dispositif complet mis en place par une NS pour protéger l'environnement.

Cela dit, toutefois, nous faisons allusion ici à la DGPE parce que notre étude a suivi de près la structure du MRNE et que nous ne voudrions pas nous en éloigner sans en mentionner cette importante composante, mais la DPGE n'est pas l'un des éléments responsables de la production dans le secteur primaire et ne fait donc pas partie du sujet que nous traitons ici

 

Conclusion

 

Il ne s'agit pas de tirer ici une conclusion d'ensemble sur le système productif d'une Nouvelle Société, puisque ce texte qui traite de la production dans le secteur primaire n'est que le premier d'une série de trois (3) qui en feront la revue et dont les deux suivants ne seront ajoutés au site que dans quelques semaines. Faisons tout de même le résumé de ce que nous avons vu ici.

Dans le secteur primaire, l'État se manifeste d'abord comme propriétaire du sol et des ressources, mais oriente la production plutôt qu'il ne la gère, ce qu'il ne fait qu'exceptionnellement et à corps défendant. L'État ne se garde vraiment la main mise totale que sur la production et la distribution de l'énergie, facteur si vital que la société ne peut permettre que d'autres intérêts que les siens y prévalent.

Le rôle primordial de l'État, au secteur primaire, n'est pas toutefois à titre de propriétaire. Son rôle primordial, c'est celui de régulateur des volumes de production et des prix qu'il assume en se positionnant comme intermédiaire obligé ou privilégié entre le secteur primaire en amont et le système de production en aval.

Occupant cette position stratégique, l'État qui ne cherche pas à en tirer un profit ouvre ainsi un chenal protégé par où peuvent passer vers l'industrie, sans payer de rançons aux pirates de la spéculation, toutes les matières premières sans lesquelles aucune production n'est possible.

Garantissant l'approvisionnement en matières premières à prix stables, une Nouvelle Société modifie radicalement les règles du jeu et pose l'assise sur laquelle on peut bâtir un nouveau système de production. Elle donne aussi un coup de stylet droit à la jugulaire du système capitaliste néo-libéral. Cette proposition ne fait donc pas partie de celles dont on peut espérer la mise en place sans protestation.

 

Pierre JC Allard

 


 

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