Revue de presse




 



Enseignants : le malaise Allègre


Dossier enseignement

Libération mercredi 23 février 2000

En dépit des vacances, enseignants et parents continuent leurs actions dans le département du Gard, où 15 000 personnes avaient manifesté le 12 février. Autre mouvement emblématique de cet hiver, celui du collège Charles-Fauqueux de Beauvais (Oise). La mobilisation ne faiblit pas: le 28 février, date de la rentrée, y marquera le 46e jour de grève. D'autres établissements du second degré rejoignent actuellement les mouvements enclenchés dans le primaire. Le lycée professionnel Claude-Chappe de Nanterre (Hauts-de-Seine) s'est mis en grève avant-hier. Et les enseignants du collège de Salindres (Gard), en vacances depuis seulement cinq jours, ont d'ores et déjà voté la poursuite de la grève pour la rentrée.Côté syndicats, on se déclarait hier satisfait des créations de postes annoncées, mais on doutait qu'elles soient suffisantes pour calmer le jeu. Nicole Geneix, secrétaire générale du SNUipp, organisation majoritaire dans le premier degré, estimait ainsi que les mouvements engagés révélaient un «enjeu de société» qui dépasse la question de la carte scolaire. La manifestation unitaire du 16 mars sur l'emploi public, selon elle, pourrait en témoigner. D'autant que la FCPE, principale fédération de parents d'élèves, a officialisé hier sa participation au mouvement.

(1) Libération des 12 et 18 février 2000.

Le Monde mercredi 2 février 2000


Fin de l'occupation du collège des Aiguerelles à Montpellier

LA RENTRÉE DES ÉLÈVES aura lieu mercredi 2 février au collège des Aiguerelles, à Montpellier, après quatorze jours d'occupation de l'établissement par les parents, qui dénonçaient le « climat d'incivilité ». A la suite de l'arrivée, lundi 31 janvier, de six des sept postes promis, un nouveau règlement intérieur devait être rédigé mardi. Dimanche, dans l'émission « 19 heures, dimanche », animée par Ruth Elkrief sur TF 1, un dialogue entre la ministre déléguée à l'enseignement scolaire Ségolène Royal, et des parents d'élèves s'est tenu dans des conditions houleuses. La ministre a été huée lorsque, en réponse à un parent qui lui demandait comment un seul surveillant peut encadrer 760 élèves, elle a expliqué que « la cour ne doit pas être laissée aux seuls surveillants », allusion à une présence accrue des enseignants dans l'établissement, ainsi qu'à une diversification de leurs missions. Au collège des Aiguerelles, une nouvelle organisation des méthodes de travail devrait d'ailleurs se traduire par un renforcement de la présence des professeurs dans l'établissement. Lundi, à Lormont (Gironde), à l'occasion d'une journée interacadémique sur la mise en œuvre de ses réformes, la ministre déléguée a réaffirmé son souci de développer « une pédagogie de la proximité », afin de« tenir le terrain ».





Libération mardi 18 janvier 2000

Le Syndicat des enseignants lâche Allègre
Le SE-FEN ne veut plus être la «courroie de transmission du ministère».
Par EMMANUEL DAVIDENKOFF

Un soutien de moins pour Claude Allègre, lâché par son principal relais syndical, le Syndicat des enseignants (SE-FEN). Ebranlé par le résultat des élections professionnelles, le secrétaire général de l'organisation, Hervé Baro, a annoncé hier «des changements de méthode, de pratique, de positionnement et d'image». En décembre 1999, le SE-FEN a en effet subi un nouveau revers. Sept ans après la scission de la Fédération de l'éducation nationale (FEN), le bilan est sans appel: la Fédération syndicale unitaire (FSU) attire deux fois et demie plus de suffrages que les héritiers de la FEN, dont le SE est la principale composante.

Le ton monte. Hervé Baro prévient que le SE s'apprête à «durcir le ton» et qu'il ne sera plus «la courroie de transmission du ministère». Le syndicat accompagne depuis le début les réformes engagées par Claude Allègre; il estime avoir été pénalisé par la mauvaise image du ministre de l'Education. Le SE participera aux mouvements de grève sur les sections d'enseignement général et professionnel adapté (20 janvier), les professeurs de lycée professionnel (3 février), l'emploi dans le service public (mars) et le statut des directeurs d'école (rentrée 2000).

Autre changement : alors que la spécificité du SE consiste à réunir, de la maternelle au lycée, des enseignants de différentes catégories, il s'engage désormais à «mieux respecter les identités des uns et des autres». Là aussi, l'inertie du terrain l'emporte sur le volontarisme du discours, les statuts particuliers (instituteur, prof de collège, prof de lycée...) priment sur une introuvable «identité enseignante».

Grand écart. Enfin, le SE veut en finir avec la FEN. L'ancienne forteresse enseignante traîne une image poussiéreuse. Hervé Baro souhaite qu'une fédération new look trouve sa place au sein de l'Union nationale des syndicats autonomes (Unsa),

organisation interprofessionnelle créée, entre autres, par la FEN. Il faudra des adducteurs solides aux dirigeants du SE pour réaliser cet ambitieux grand écart. Car ils affirment ne rien céder sur le fond. Ni dans leur volonté de réforme, ni dans leur attachement à l'idée d'un syndicat unifié: «Le corporatisme pur et dur, c'est le néant éducatif.»

Mais l'union n'est pas toujours simple. On apprenait ainsi hier soir que Daniel Le Bret s'apprêtait à quitter la codirection de la FSU. Sur fond de divergences avec l'autre secrétaire générale, Monique Vuaillat, patronne du puissant Snes. Indice de la difficile coexistence entre deux pratiques syndicales, mais aussi entre deux cultures enseignantes.

Libération mardi 18 janvier 2000

L'école primaire change de rythme en douceur
Le ministère encourage une réorganisation des classes.

Par ALAIN AUFFRAY

C'est une révolution douce. Dans le XVIIIe arrondissement de Paris, l'école de la rue René-Binet ambitionne, à terme, de bouleverser les programmes, les rythmes et l'organisation du travail. A la rentrée scolaire, les maîtres de cette école s'étaient portés volontaires pour la mise en œuvre de la charte «Bâtir l'école du XXIe siècle», lancée par Claude Allègre en janvier 1999. Ce texte propose une série d'innovations pédagogiques fondées sur la généralisation du travail en équipe et sur un recentrage autour des apprentissages fondamentaux. Le ministère a recensé, dans tout le pays, 2 600 établissements volontaires. En contrepartie, l'institution propose aux équipes éducatives une aide à l'élaboration des projets et un suivi par les équipes de chercheurs de l'Institut national de la recherche pédagogique (INRP).

Atelier. En s'invitant à l'improviste dans cet établissement exemplaire, le ministre et le directeur de l'INRP, Philippe Meirieu, ont pu se faire une idée flatteuse des six premiers mois d'expérimentation. Hier matin, les élèves du cycle 2 (regroupant les grandes sections de maternelles, les CP et les CE1) étaient dispersés par petits groupes de moins de dix enfants. Dans ces ateliers «de compétences» ou «de remédiation», ils sont répartis en fonction de leurs besoins. Dans «l'atelier de motricité fine», on exerce la maîtrise des gestes précis. L'atelier de calligraphie s'adresse à des élèves sensiblement plus avancés. Certains apprennent, sous forme de jeu, à situer des objets dans l'espace, d'autres marquent le rythme d'un prélude de Bach ou parcourent «le site Internet de la comtesse de Ségur». Après la matinée d'ateliers, ces élèves retrouvent leurs classes et leurs «maîtres référents».

«Petite Sorbonne». Selon Philippe Meirieu, cette organisation illustre parfaitement «l'esprit de la charte»: cette école a su s'affranchir «du fonctionnement traditionnel de la classe». Elle a surtout su exploiter au maximum les compétences des intervenants extérieurs: aides éducateurs, professeurs de musique, d'art plastique et de gymnastique employés par la Ville de Paris. L'ambition de la charte n'est pas, poursuit-il, «d'imposer une nouvelle réforme»: il s'agit «d'accompagner le changement» et surtout d'en finir avec ces «petites Sorbonne» que sont encore trop souvent les écoles élémentaires.

«Nous voulons que tous les enfants réussissent. Non pas au tir à l'arc, mais dans les apprentissages scolaires», explique la directrice de l'école Sylvie Bouchet, qui ne cache que l'objectif est loin d'être atteint. Sur 170 élèves, une quinzaine restent en grande difficulté: «Ces élèves-là, peut-être faut-il oser dire qu'on ne sait pas quoi en faire.» Et pourtant, six mois d'expérimentation ont déjà radicalement changé les choses. Coincé contre le boulevard périphérique et le marché aux puces, cette école a souffert d'une réputation de ghetto violent. En trois ans, près de 30 % des familles ont choisi de fuir. Selon le rectorat, l'expérimentation en cours devrait stopper l'hémorragie. «Si ça continue, cette école affichera complet l'an prochain» veut-on croire dans l'entourage du ministre. L'énergique directrice reste plus combative que jamais: «Notez bien que nous travaillons pour tout le monde: nous avons aussi d'excellents élèves», martèle-t-elle à ses visiteurs.


 Revue de presse: 1998 / juin 1999
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