COORDINATION DES YVELINES (78)
LA RÉFORME de L'EDUCATION NATIONALE dite « réforme ALLÈGRE-MEIRIEU
»
INFORMATION AUX PARENTS D'ÉLÈVES
Face à l'ampleur grandissante du mécontentement des personnels de l'Education
Nationale, notre ministre se présente comme le porte-parole de l'opinion publique
contre un corps enseignant englué dans ses conservatismes et la défense
de ses privilèges. Il nous semble donc aujourd'hui urgent d'informer les parents
d'élèves de l'avenir que réserve l'école selon Allègre
à leurs enfants.
I) Vers un « SMIC culturel »
Si rien n'est fait pour stopper la réforme en marche, l'école
dès l'an 2000 ne tiendra plus aucun compte de la diversité des enfants.
Le ministre part d' un constat qui fait l'unanimité : dans le système
actuel, l'échec scolaire touche un tiers des enfants. C'est parfaitement exact.
Il faut y remédier. La solution du ministre est simple : un enseignement unique
de 3 à 16 ans, sans la moindre porte de sortie pour ceux qui s'y adaptent
mal. Ces portes ne seront plus nécessaires ! Le ministre a tout prévu
! Il n'y aura plus d'échec scolaire. Comment ? En supprimant de nombreux enseignements
et en réduisant les contenus et les heures de cours dans les matières
dites principales (français, mathématiques, anglais). Quant aux matières
qui disparaissent, elles seraient remplacées par des « activités
» encadrées par les enseignants.
On veut vous faire croire à la mise en place d'une école attachée
au suivi de chacun et à la réussite de tous. Mais la vérité
est bien différente. On va simplement assister à une accélération
de la baisse du niveau dans les écoles gratuites et publiques. Mais il y aura
toujours une sélection...fondée sur l'argent. Car il est évident
que les parents d'élèves, fortunés, enlèveront leurs
enfants de l'école publique.
En simplifiant à l'extrême les contenus enseignés,
le ministre s'en prend à ce qui fonctionne pourtant très bien dans
le système français et que les autres pays nous envient. Il veut, en
effet, supprimer les filières d'excellence : classes européennes, classes
à options d'excellence, classes préparatoires aux grandes écoles...
ainsi ceux qui n'y ont pas accès ne se sentiront pas lésés.
Le ministre dénonce le fait que ces filières bénéficient
surtout aux classes aisées, qu'elles sont donc injustes... discours démagogique
s'il en est. Car quand elles seront supprimées dans l'Education Nationale,
les enfants des classes aisées iront suivre ces enseignements dans le privé,
coûteux et donc fermé aux familles sans argent. Dès lors les
10 % d'élèves qui viennent actuellement de milieux modestes, seront
définitivement exclus d'une possible promotion sociale.
On pourrait comparer le processus engagé à ce qui s'est passé
au Crédit Lyonnais. Cette banque avait de graves difficultés mais qui
ne touchait pas tous ses investissements. Les actifs rentables sont privatisés
tandis que l'Etat prend à sa charge les secteurs déficitaires. De même,
l'école de demain se chargera du peuple modeste tandis que les élèves
de milieux aisés pourront continuer à suivre un enseignement de qualité
dans les écoles privées moyennant finance.
Ce qui se cache derrière la volonté affichée d'une réussite
scolaire pour tous c'est donc l'instauration d'un« SMIC culturel », selon
une expression en vogue dans les couloirs du ministère depuis une décennie,
à l'usage des gens modestes. L'école du peuple deviendra alors une
vaste garderie apprenant à ses « usagers » à lire et écrire
à peu près. Au moment où Aux Etats-Unis on commence à
s'alarmer du nombre grandissant d'illettrés et d'adultes en perdition ( un
jeune adulte sur trois), on veut, en France imposer un système à l'américaine
fait d'une sous-école populaire voisinant avec des « high-schools »
d'excellent niveau et hors de prix.
Par ailleurs, le ministre insiste beaucoup sur la nécessité
d'une Education à la citoyenneté dans son « école du XXIème
siècle ». Là aussi, on peut s'interroger. En effet, si parallèlement,
on ne donne plus aux enfants les outils nécessaires au développement
de la réflexion personnelle et de l'esprit critique, qui passe par un travail
intellectuel approfondi et l'acquisition d'une large culture générale,
l'éducation civique n'est plus que la mise en place de normes comportementales
chez les futurs adultes priés de se satisfaire d'une existence médiocre
et d'emplois peu valorisants.
II) Un processus déjà largement engagé
Ce que vous venez de lire n'est pas de la science fiction. Pire... sur
bien des points, l'oeuvre de démolition a déjà commencé.
Ce qui s'est passé dans les collèges ces dix dernières années
le démontre.
Le coup d'accélérateur a été donné par
Lionel Jospin lors de son passage au ministère de l'Education Nationale. Les
ministres qui lui ont succédé ont poursuivi dans la même voie
: d'abord Jack Lang puis François Bayrou.
JOSPIN : il décide l'abandon des horaires attribués par matière
et par classe. Il les remplace par la DGH : la Dotation Horaire Global : une enveloppe
d'heures donnée en début d'année aux établissements,
à charge pour eux de se débrouiller avec. Il le fait, dit-il, au nom
de son souci de « mettre l'élève au coeur du système éducatif
». Son argument porte et nous piège. Ainsi, pensons-nous, nous adapterons
horaires d'enseignement et projets éducatifs au plus près du profil
de nos élèves. Le ministre nous encourage à faire avec nos heures
des « projets d'établissement ». Mais nous découvrons vite
que notre marge de manoeuvre est scandaleusement limitée : soit nous faisons
des projets et nos classes sont trop chargées, soit nous privilégions
les effectifs et nous abandonnons nos projets éducatifs.
BAYROU : le jeu se complique. Toujours au nom du même argument, il institue
des horaires plafonds et des horaires planchers dans toutes les matières.
Très vite nous tombons dans le piège. Pour poursuivre nos projets,
nous adoptons les horaires planchers pour découvrir l'année suivante
que la DGH a été réduite d'autant et qu'il nous faut si nous
voulons poursuivre les actions pédagogiques engagées augmenter les
effectifs des classes.
Entretemps, Jospin puis Lang puis Bayrou procèdent à la fermeture des
filières d'orientation en cinquième puis en troisième au nom
du droit qu'ont tous les enfants à faire des études longues. Les collèges
sont aujourd'hui presque parvenus à cette «hétérogénéité
maximale» dont rêve Philippe Meirieu. D'ores et déjà, les
enfants ne peuvent plus quitter le collège avant d'avoir eu 16 ans et/ou
d'avoir fait un passage dans toutes les classes de la sixième à la
troisième. Cette évolution a été populaire chez les parents
d'élèves car on la leur a présentée comme une ouverture
à tous de l'enseignement général, la possibilité pour
tous d'accéder au baccalauréat et aux études supérieures.
Mais cette ouverture n'a été qu'un mensonge. Car elle s'est accompagnée
d'une baisse rampante des exigences scolaires, seul moyen proposé par les
ministère pour intégrer les nouveaux élèves qui naguère
auraient été orientés vers d'autres voies. Le passage de classe
en classe devient de plus en plus systématique d'année en année
sans considération du niveau des enfants. Les classes technologiques sont
désormais supprimées. Les enseignements d'excellence comme le Latin,
et le Grec achèvent de mourir. Les langues vivantes autres que l'anglais sont
attaquées. Les enseignements artistiques et sportifs sont très gravement
menacés.
Parallèlement, on a largement augmenté les places
de lycées et promis le succès au baccalauréat pour tous. De
fait, désormais, 65 % d'une classe d'âge accède au baccalauréat.
Mais au prix d'une baisse importante du niveau exigé. Il n'est pas rare que
les enseignants qui corrigent le bac soient rappelés à l'ordre par
leur recteur, quand ils notent trop de copies au-dessous de la moyenne. Le résultat
de ce mensonge est simple. C'est à l'université que les étudiants
découvrent désormais qu'ils ne peuvent pas suivre. Avec une nuance
de poids par rapport aux anciennes filières : il est beaucoup plus difficile
d'apprendre un métier à 20 ans qu'à 14 ! Surtout quand on vous
a menti pendant des années en vous faisant miroiter un diplôme de qualité
sans jamais vous donner les moyens d'y accéder vraiment ! En outre, la suppression
des filières a eu un autre effet pervers : certains métiers ont aujourd'hui
du mal à recruter dans un contexte de chômage grave !
La mise en place du collège unique avec un enseignement bas de gamme
est donc pratiquement achevée. Il ne reste plus, et c'est l'objectif des réformes
en cours, qu'à l'étendre en amont au primaire et en aval au lycée
et à l'enseignement supérieur publique. Un autre atout de notre école
française est en même temps attaqué. C'est son aspect national
: programmes nationaux, diplômes nationaux. Le ministre veut « déconcentrer
». Cela signifie en clair, la mise en place d'écoles de niveaux différents
selon les quartiers ou les régions. Cela signifie, la naissance de ghettos,
comme aux Etats-Unis, ainsi que d'écoles soumises aux marchés locaux
de l'emploi imposant aux élèves des formations en relation avec l'entreprise
du coin.
Le but de la manoeuvre saute aujourd'hui aux yeux...Enseigner à tous la même
chose et réduire les savoirs à transmettre est en effet beaucoup plus
économique que d'adapter l'enseignement à la diversité des enfants.
III) L'Education Nationale gérée comme une « entreprise
»
Si le souci du ministre était vraiment la qualité de l'enseignement
et le bien être des élèves, il aurait des exigences très
poussées vis-à-vis des personnels destinés à prendre
les enfants en charge. Or la tendance est complétement inverse.
Les cantines scolaires ont été les premières à
avoir fait les frais de cette politique de soi disant rentabilité. Elles ont
été privatisées à l'époque de Jospin. Désormais,
il n'y a plus de cuisiniers dans les écoles. Ce sont des entreprises privées
qui fournissent les repas.
Bénéfice pour l'Education Nationale : elle n'a plus à gérer
ces personnels.
Préjudice pour les enfants : En effet, la qualité de la nourriture
s'en est trouvée considérablement amoindrie. Avant, le cuisinier était
responsable de la qualité des repas fournis. Aujourd'hui, l'entreprise-traiteur
recherche avant tout la rentabilité maximale ce qui se répercute sur
la qualité des repas
Préjudice pour les parents : l'augmentation des tickets de cantine atteignant
aujourd'hui souvent 20 voire 25 francs le repas.
Et ce n'est pas fini ! les suivants sur la liste sont les TOS : techniciens, ouvriers
et employés de service qui sont actuellement des fonctionnaires d'Etat aux
salaires modestes. Ils vont être prochainement remplacés par des entreprises
avec le même résultat que pour les cantines : une simplification de
la gestion des personnels dans l'Education Nationale mais une baisse de la qualité
des services et une hausse de leur coût. De même, le ménage ne
se fera plus qu'aux heures de passage de l'entreprise de nettoyage...Moins d'hygiène,
des réparations plus rares, autrement dit, un cadre de travail dégradé
pour ceux que l'on prétend vouloir « mettre au coeur du système
éducatif ».
Enfin, le niveau même des enseignants est menacé. Là encore il
faut lire entre les lignes. Il est prévu de supprimer les professeurs remplaçants,
titulaires du Capes ou de l'agrégation...et de multiplier des auxiliaires
sans qualification auprès des instituteurs. Il y a d'ores et déjà
66 OOO emplois-jeunes au SMIC et 70000 CES (Contrats Emplois Solidarité)
à 2900 francs par mois dans l'Education Nationale. Les premiers devaient être
employés à des tâches nouvelles. De fait, ils sont déjà
utilisés partout comme surveillants. Quant aux surveillants actuels,ils doivent
disparaître l'an prochain pour faire place à des étudiants payés
moins de 3000 francs par mois pour 14 heures par semaine et habilités
à ... remplacer les professeurs absents. Pour les remplacements de plus longue
durée, on a déjà commencé à employer des vacataires
embauchés pour un certain nombre d'heures, avec des contrats à durée
déterminée puis « renouvelés » même en cours
d'année par d'autres vacataires. Le nouveau venu et les élèves
devront s'adapter. Cette gestion au plus serré des personnels permet sans
doute de faire quelques économies sur le dos ... de vos enfants, qui auront
devant eux de plus en plus souvent, des enseignants clignotants (vacataires)
ou peu qualifiés.
Ce nouveau système montre l'insouciance du ministère quant à
ce qui se passe dans les classes. Les contenus enseignés, les progrès
des élèves ne sont pas dans ses préoccupations mais la gestion
« à flux tendu » du « stock des personnels », pour
un gardiennage pur et simple des élèves.
Si vous désirez en savoir plus, vous pouvez lire l'annexe à l'ouvrage
de Philippe Meirieu : l'école à la guerre civile. Vous pouvez lire
également l'article de Joseph Urbas paru dans le monde en octobre 1998. Nous
vous les ferons parvenir à la demande.
il nous a semblé que vous deviez connaître le point de vue des enseignants
et non uniquement celui que véhiculent les médias qui se sont jusqu'à
présent contentés de relayer le discours officiel.
Vous devez savoir que nous n'avons pas saisi de premier abord ce qui se préparait
quand le démantèlement du système a commencé. Nous avons
même souvent été satisfaits de voir l'école s'ouvrir au
plus grand nombre, car nous n'avons pas compris que cette ouverture allait s'accompagner
d'une baisse programmée des exigences dans la mesure où rien
n'allait être fait pour aider les nouveaux publics scolaires à s'adapter.
LE MARDI 16 MARS : OPERATION "ECOLE MORTE"
-Si vous voulez nous soutenir et montrer votre colère au ministère,
nous vous proposons un premier rendez-vous : le mardi 16 mars, nous serons en grève
pour aller manifester en masse à Paris. Ce jour-là, n'envoyez pas vos
enfants à l'école. Par ce geste, montrez que vous n'avez pas confiance
dans les évolutions en cours, que vous désirez la mise en place d'une
école de qualité pour tous.
-Vous pouvez également manifester votre soutien en adhérant à
notre coordination : il vous suffit pour cela de nous transmettre vos coordonnées
et de relayer par la suite dans votre entourage les informations et les propositions
d'action que nous vous ferons parvenir.
Contact coordination 78 :
Florence Lequeux : 01 45 77 46 95 Grégory Chambat : 01 30 22
24 67 Mayie Inthamoussou : 01 49 05 45 20
Marie et Michel Labat : O1 34 78 17 18
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