99.03.17


Nos-z'amours

 

La saga des Expos se poursuit. J'ai déjà dit ce que je pensais du sport et de son rôle. J'ai parlé aussi des stades, l'ancien et le nouveau et, surtout, des vrais jeux qui se font en coulisses, quand les mises se comptent par centaines de millions sinon par milliards de dollars. Aujourd'hui je vais proposer une réponse à cette question des Expos. Je sais, je sais que j'avais dit que je ne mettrais rien de constructif dans la Section 5, seulement des plaintes et des grincements de dents... mais c'est plus fort que moi. Une fois seulement. De toute façon cette solution dérange trop les intérêts des chacals qui tournent autour de la carcasse des équipes de sport professionnelles pour que ceux qui sont mêlés à ce dossier y accorde une minute d'attention.

Quel est le problème du base-ball professionnel à Montréal? Il est double; d'une part la population ne s'y intéresse pas assez - ce qui limite les entrées de fonds - et, d'autre part, les joueurs coûtent et coûteront de plus en plus cher, ce qui nous condamne à avoir des équipes de moins en moins bonnes. Or, dit la sagesse des peuples comme des experts, il n'y a pas de marché pour voir jouer une équipe perdante.

Logique impeccable... sauf que ce n'est pas vrai. Ceux d'entre nous qui sont assez vieux peuvent se souvenir du phénomène des Mets de New-York: une équipe de dernière place qui, sur le même territoire que les puissants Yankees, a réussi néanmoins à attirer pendant des années de meilleures assistances que ces derniers. Les New-yorkais étaient en amour avec les Mets. Ils préféraient aller voir perdre les pitoyables ("pathetical") Mets que gagner les arrogants Yankees. L'amateur -type de base-ball se reconnaissait dans cette pauvre équipe qui n'avait pas beaucoup de talent mais bien du courage.

Si les Montréalais se reconnaissaient dans leur équipe de base-ball ils iraient au stade. Ils y iraient qu'elle gagne ou qu'elle perde. Ils y iraient que le stade soit là où il est ou dix minutes plus près du centre Molson. Premier pas pour que les Montréalais "se reconnaissent", que Montréal soit "une ville de base-ball" et que le Québec tout entier s'intéresse au base-ball? Vendez au prix du marché l'équipe actuelle et constituez une équipe entièrement composée de Québécois. Je ne dis pas de "Québécois de souche"; je dis Québécois, tout simplement, et est Québécois, pour les fins du présent argument, quiconque aime le Québec et veut s'y établir en permanence. Felipe Alou est Québécois.

Que les "scouts" des Expos fassent leur travail et identifient les meilleurs - ou les moins mauvais - joueurs de base-ball professionnels Québécois, peu importe qu'ils soient à Topeka au Kansas ou à Drummondville. S'il en manque, qu'on prenne des amateurs ! Je veux voir des Gauthier et des Tremblay au stade. Comme des Johnson et des Stasny, d'ailleurs, si ce sont des Johnson et des Stasny québécois, mais je voudrais voir des francophones sur le terrain

Ils vont perdre? Certainement. Mais la plupart des pays n'ont aucune chance de gagner la Coupe du Monde de football, ce qui n'empêche pas la moitié - au moins ! - de l'humanité de s'y intéresser. UNE seule victoire en Coupe du Monde est un triomphe pour la Corée ou le Honduras. Quand NOS Expos - qu'on devrait sans doute rebaptiser " Nos-z'Amours" - vont frapper leur premier circuit et gagner leur premier match, Montréal sera une "ville de base-ball". Parce que nous aurons remporté une victoire sur toute l'Amérique

Et ça arrivera, parce que le base-ball est en grande partie un jeu de hasard: les pires équipes de l'histoire ont gagné près du quart de leur matchs! Prenons pour premier objectif modeste de ne pas faire pire que les plus mauvais. Puis, un jour, l'engouement pour le base-ball augmentant, nous aurons une équipe qui fera mieux que la moyenne; encore quelques années... et nous ferons peut-être mieux qu'aient jamais fait nos Expos 100% importés.

Et Gauthier comme Johnson ne nous coûteront pas des millions par années. Disons un salaire qui sera ce qu'ils gagnent aujourd'hui + 20 %... et des boni à la performance. Beaucoup de boni. Et aussi, un pourcentage des recettes, un pourcentage qui peut aussi varier selon la performance. La première année, on parle de la performance de l'année en cours; mais l'an prochain et les années suivantes, le pourcentage peut varier en fonction de la performance de l'année précédente ou, plus équitablement, de la moyenne des années précédentes.

Il n'est pas dit que certains de ces joueurs québécois auxquels on donnera ainsi leur chance de deviendront pas des vedettes. Tôt ou tard, de toute façon, notre équipe suscitera des vocations et nous en aurons des vedettes. Nous quitterons-t-elles pour aller au plus offrant?

Ca dépend. Ça dépend de l'importance qu'ils accorderont au fait d'être ici des héros. Ça dépendra, aussi, des contrats qu'on aura signés avec eux. On peut décaler le paiement des bonis, étaler par augmentation successives le salaire convenu sur 10 ou 20 ans, en faire une caisse de retraite, voire traiter l'équipe comme une "coopérative", elle-même partenaire des "retraités" et des commanditaires/gestionnaires dans une société propriétaire de la franchise... il y a mille façons de réaliser un slalom élégant entre, autour et par-dessus les normes légales imposées par les dictateurs du "base-ball majeur". C'est pour ça que les Expos ont des avocats.

Qui devraient être les commanditaires/gestionnaires? La Ville de Montréal, le Gouvernement du Québec ou les deux. Le sport est devenu trop sérieux pour qu'on en confie la gestion à des "sportifs" spéculateurs.


Pierre JC Allard


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