Les Ligures sont les premiers habitants de la future Ségusie
dont nous connaissons aujourd’hui le nom. Venus également
d’Europe centrale, ils ont occupé au cours du second millénaire
avant notre ère une grande partie de l’actuelle France, plus
particulièrement tout le bassin hydrographique de la Loire
et de ses affluents. La Loire, de son ancien nom Liger
, était le fleuve des Ligures ou Lygiens.
Remarque: L'étymologie couramment admise pour
Loire est liga (boue). Cependant, la Loire et l'Allier,
au pH (acidité) très élevé, sont certainement
les deux grands cours d'eau les moins boueux de France. Dans le lit de ces
rivières on n'y trouve que des sablières. Le Rhône,
la Garonne, la Saône, la Seine, la Marne et la Somme par contre, charrient
des tonnes d'alluvions provenant de vallées glacières ou de
terrains calcaires.
La principale cité ligure, bâtie sur une île de ce fleuve, était dédiée au dieu Lug. C’est cette même cité qui deviendra vers le VIe siècle avant Jésus-Christ la capitale administrative des Ségusiaves. En aval, le fleuve servait de voie de communications, en amont, un sentier remontait les gorges de la Loire, longeait la plaine au pied des monts du Forez, puis serpentait dans les montagnes du Velay jusqu’à un temple du soleil situé sur un haut plateau aride, actuellement Saint-Paulien.
L’Histoire de la civilisation ligure nous est connue par les nombreuses et différentes sortes de poterie que l’on a retrouvée partout en Europe où ils ont vécu. À Roanne, sur la rive occidentale du fleuve, plusieurs milliers de tessons d’époques différentes ont été mis à jour. Une étude approfondie de l’ensemble de tous ces fragments serait plus que souhaitable. Les célèbres vases gaulois en céramique peinte de Roanne, véritables oeuvres d'art des deuxième et premier siècles avant Jésus-Christ, sont l'aboutissement de près d'un millénaire de traditions et d'améliorations en matière de poterie.
Les Celtes qui utilisaient des ustensiles en bois (vaisselle, tonneaux...) ou en osier (paniers...), ont migré vers l’Europe de l’Ouest principalement par voie de terre. Leurs prédécesseurs, les Ligures, grands utilisateurs d’ustensiles en terre cuite, sont arrivé jusqu’à l’océan Atlantique sur des pirogues monoxyles et des radeaux en utilisant les fleuves et les rivières navigables. Dans l’estuaire de la Loire et le delta du Rhône, les Ligures ont su adapter et perfectionner leurs embarcations et ont développé une navigation côtière.
Les Gaulois ont hérité des Ligures l’usage de la céramique, les Ligures ont appris des Celtes le travail des métaux. Cependant, durant la seconde moitié du millénaire précédant notre ère, les Ligures ne contrôlent plus que la région côtière au sud des Apennins. Leur présence est toutefois sensible en Provence et en Loire-Atlantique. L’Armoricain serait un dialecte celte au nord de l’embouchure de la Loire, qui aurait subi l’influence linguistique des Ligures.
Hannibal:
En 218 avant Jésus-Christ, des Ségusiaves impliqués dans le commerce du bois de chêne avec les Carthaginois, s’enrôlent comme mercenaires dans l’armée d’Hannibal. Après les errements de ce dernier pendant la campagne d’Italie, les Ségusiaves engagés trouvent refuge dans une vallée piémontaise. Séduit par la douceur des lieux, ils décident de s’y implanter et fondent la cité connue aujourd’hui sous le nom de Sauze-d’Oulx.
Invasions barbares:
Vers la fin du second siècle avant notre ère, la Ségusie a été durement éprouvée par les Cimbres du Danemark et les Teutons de Germanie qui ont déferlé sur une grande partie de la Gaule et plus spécialement le couloir rhodanien. Les Éduens ont profité de cette période troublée pour étendre leur influence sur la rive occidentale de la Saône, un territoire jusqu’alors contrôlé par les Ségusiaves. Les deux figurines ci-contre, soigneusement exposées au musée Joseph Déchelette de Roanne et identifiées par les historiens locaux comme étant des objets typiquement ségusiaves, sont en fait des amulettes laissées par les Cimbres et qui témoignent de leur passage dans le Roannais vers 102 avant Jésus-Christ.
Anecdote ancienne:
En 120 avant Jésus-Christ, les Ségusiaves fournissent
un support logistique aux armées arvernes (Puy de Dôme) venues
soutenir les Allobroges (Isère) en lutte contre l'envahisseur romain.
Ce dernier était venu à la rescousse des Éduens (Saône-et-Loire)
qui essayaient de reprendre un certain leadership parmi les tribus gauloises.
Les Éduens, entre autre, ne supportaient pas de se faire imposer
des droits de passage pour commercer par le couloir rhodanien avec le monde
méditerranéen.
Les armées arvernes, commandées par leur chef Bituit
et assistés de leurs chiens de combat, sont défait par Ahenoharbus
et ses légionnaires. Désormais, les Allobroges et tout le
sud-est de la France feront partie de la nouvelle Province transalpine.
La Mandubie (S.E. de la Nièvre) que les Arvernes avaient érigée
en marche contre les Éduens passera sous le contrôle des ces
derniers. Les Ségusiaves deviendront client des Éduens et
leurs céderont, quelques années plus tard (vers 102 avant Jésus-Christ),
une partie de leur territoire.
Les nombreuses pièces de monnaie arvernes figurants des
chiens de combats, trouvées à Roanne et en Forez, et que
nos historiens attribuent faussement aux Ségusiaves, témoignent
de cette période affairée.
Quelques molosses arvernes retournés à la vie sauvage
et couplés à des loups, ont engendré une espèce
qui a survécu jusqu'au XVIIIe siècle. Ces bêtes, moitié
loup moitié chien de combat et de forte stature, ont effrayé
les populations locales du Massif Central qui ont fait circuler plusieurs
légendes dont celle du "monstre du Gévaudan" vers 1765.
La fin de l’époque gallo-romaine:
Vers la fin de l’empire romain, et peut-être avant, la Ségusie a connu différents peuplements.
Les Brannovices séduits par la région vallonnée au sud de l’Arconse, sont à l’origine du Brionnais, un pays au nord du Roannais, sans entité religieuse ou politique particulière. Les Brannovices qui ont probablement servi de marche entre Sénons et Bituriges, appartenaient à la confédération aulerque de Normandie tout comme les Ambarres venus plusieurs siècles auparavant s’établir au nord-est de Lyon. Le type de maison rurale à bâtiments multiples (ferme et cour ouverte) caractéristique du Brionnais est une tradition brannovice commune à tous les Aulerques qui s'est perpétuée jusqu'à nos jours.
Des factions senones, originaires du Bassin-Parisien, viennent se réfugier dans la plaine du Forez. Comme les Ségusiaves, les Senons faisaient partie de la première vague celte venue s’établir en Europe occidentale vers le VIIe siècle avant notre ère. Des historiens prétendent que se sont plutôt des mercenaires Sarmates qui seraient venus s’installer en forez après le passage des Francs et des Alamands.
Des Ambivarètes venu de Belgique se réfugient dans la vallée de la Besbre. Plus tard, vers le Ve siècle, ils fondent Ambièrle sur la Côte roannaise.
Enfin, les Ségusiaves eux même, vont se retrancher dans les monts du Beaujolais et du Lyonnais jusqu’alors pratiquement inhabités, lorsque les invasions barbares vont déferler sur toute la Gaule. À l'ouest de la Loire, les Ségusiaves se regrouperont au pied des Monts du Forez, des Bois Noirs et des Monts de la Madeleine.
Remarque: Prétendre que les Brannovices et les Ambivarètes étaient des réfugiés de la fin de l’époque romaine peut sembler anachronique si l’on se réfère à Jules César qui écrivait Imperant Aeduis atque eorum clientibus, Segusiavis, Ambivaretis, Aulercis Brannovicibus, Blannoviis, mila XXXV... Le fait que ces peuples auraient été à une certaine époque “clients” des Éduens, ne signifie pas forcément qu’ils partageaient des frontières communes. Le terme “client” doit être pris dans son sens celtisé, c’est à dire comme synonyme de vassal. C’est parce que Brannovices et Ambivarètes ont été vassaux des Éduens, qu’ils se sont réfugiés en Brionnais et dans la vallée de la Besbre, lorsque les barbares ont commencé de déferler dans tout l’empire gallo-romain.