99.03.31
LA MARCHE DU SAMOURAÏ
Ce qu'on sait de l'entraînement des preux chevaliers japonais
du Moyen-âge se limite à bien peu de choses, nous arrivant
souvent par le biais de films de Kung-fu "made in Hong Kong" dont
le total respect pour la vérité historique reste à
prouver. L'un des éléments sur lequel on semble être
d'accord, toutefois, c'est la "marche du Samouraï".
Un Samouraï devant être en tout temps complètement conscient
de son environnement, le postulant devait pouvoir, après une marche
rituelle dont la durée varie selon les source, en rapporter fidèlement
les péripéties. "Trois grues sont passées, la
première plus petite que les autres". L'herbe est jaunie sur
20 mètres, à gauche, après le deuxième carrefour".
" J'ai croisé 4 femmes, 6 hommes et 2 vieillards, au dernier
il manquait deux dents... " . Vous voyez le scénario ?
Je vous raconte ça, parce qu'on me demande souvent ce qu'il faut
faire, ce que chacun PEUT faire pour nous rapprocher un peu d'une Nouvelle
Société. Je crois que chacun peut et devrait faire, le plus
souvent possible, sa propre marche du Samouraï; une brève visite
d'inspection et de critique constructive des failles petites et grandes
de notre société.
Un exemple? Je sors de chez-moi, Vieux-Montréal, la chaussée
est délabrée depuis des années; n'y a-t-il pas un plan
de réfection? Cent mètres plus loin, la Place Jacques-Cartier,
dont je me souviens qu'elle était en chantier le printemps passé;
en avait-elle besoin? Et qu'a-t-on fait de la statue de Nelson? Une question
sans doute politiquement incorrecte... Un restaurant dont le chef faisait
des merveilles a fermé ses portes; on ne lui permettait pas de s'annoncer
coté rue Notre-Dame. Un cube de pierre est là; laid, inutile,
traité comme une oeuvre d'art: il a coûté 400 000 dollars.
Je regarde l'Hôtel-de-ville. N'y a-t-il pas des choses à changer?
Lesquelles? Comment?
Rue de la Commune, coin Bonsecours, je me rappelle soudain que, 25 mètres
sous mes pieds, passe la Ligne 4 du métro qui va de Berri à
Longueuil. Est-ce qu'une station ici ne revitaliserait pas l' est du quartier
et le développement du "Faubourg Québec" tout en
facilitant l'accès au Vieux Port? Et si la voie ferrée qui
longe le port devenait une ligne de métro rejoignant à la
Gare Centrale la ligne vers Deux-Montagnes, devenant la mythique ligne 3
dont on parlait il y a 35 ans, avec correspondance à Bonsecours avec
la ligne 4 et à Edouard-Montpetit avec la ligne 5 ? Si on faisait
VRAIMENT un effort pour le transport en commun? Si vous êtes ingénieur
en transport, ne devriez-vous pas proposer quelque chose?
Rue Viger, j'ai un souvenir nostalgique pour le parc du même nom et
ses arbres centenaires, auquel a succédé une horreur de béton,
un espace désert bien mal nommé "Agora". Retour
vers le Palais des Congrès, un malentendu architectural dont on a
décidé qu'il ne recouvrirait pas l'autoroute Ville-Marie mais
flotterait au dessus, laissant s'en échapper le bruit et les gaz
délétères; symbole aussi, maintenant, d'un autre malentendu
entre l'État et les architectes dont on voudrait qu' ils rendent
cette ville plus belle... mais en confiant toujours les contrats au plus
bas soumissionnaire. Pourquoi n'aurions nous pas un vrai plan d'urbanisme?
Et si vous êtes architecte ou urbaniste, n'avez-vous rien à
suggérer?
N'avez-vous rien à suggérer si vous êtes médecin,
avocat, informaticien, mécanicien... ? Si chacun dans son milieu
de travail et de loisir - en mettant à contribution sa compétence
professionnelle mais aussi son simple bons sens - identifiait les problèmes
qui nous assaillent de toute part et proposait des solutions concrètes,
ce serait un énorme bond en avant car c'est l'apathie qui est la
source première de tous nos maux.
Ici, un abribus. Si on les chauffait un peu en hiver, les portes des véhicules
venant s'ajuster sur les portes des abris côté chaussée
et les portes côté trottoir étant pivotantes pour raison
d'économie ? Là, une de nos églises, toutes portes
cadenassées; Dieu ne reçoit pas tous les jours. Pourtant,
c'est une de nos spécificités comme peuple qu'une poignée
de travailleurs criant misère aient pu se priver et donner l'argent
pour construire ces nefs aux dimensions de cathédrale. Pas une fois,
mais à des douzaines de reprises - et certains de ces édifices
ont une valeur architecturale et artistique certaine. Pourquoi ne pas ouvrir
les portes?
Une affaire de sécurité? On ne manquerait pas de bénévoles
qui, cellulaire en main, pourraient surveiller les lieux et obtenir de l'aide
en quelques minutes au besoin... et je me sentirais plus fier d'avoir été
baptisé si, les jours de grand froid, les itinérants passaient
la nuit sur un banc d'église plutôt que dans une ruelle.
Un parc. Fermé au coucher du soleil... Est-ce qu'un peu d'éclairage
la nuit, en été, nous ruinerait ? Et, encore une fois, on
ne manquerait pas de volontaires "armés" de cellulaires
pour y assurer la sécurité. Un grand magasin. Vide. Il est
trop tôt... Qu'arriverait-il si, au lieu de viser l'ouverture 24 heures
sur 24, on déplaçait les heures d'ouverture de telle façon
que les commerces soient ouverts quand les gens ont terminé leur
boulot et ont le temps d'aller faire du shopping?
Pendant qu'on y est, pourquoi ne pas décaler aussi les heures de
travail des usines de celles des bureaux, de sorte que l'ouvrier puisse
faire ses emplettes et voir son médecin avant ou après ses
heures de travail? Décaler aussi, peut-être, les heures d'ouverture
des bureaux de l'État de celles du secteur privé. Décaler
quoi et de combien de temps? Je ne le sais pas, mais je sais qu'une enquête
simple nous le dirait: pour quelques dizaines de milliers de dollars l'État
pourrait le savoir. Et la meilleure solution à court terme aux embouteillages,
ne serait-ce pas de distribuer sur toute la journée les "heures
de pointe".?
Tournez à gauche, tournez à droite, il y a toujours quelque
chose qui ne va pas et qui pourrait être remis en ordre. Facilement.
Il n'y a que ceux dont c'est le travail de s'en occuper qui ne voient ni
les problèmes ni les solutions. Si vous voulez faire quelque chose
pour un monde meilleur, il n'est pas essentiel de vous faire brûler
vif. Faites la marche du Samouraï, identifiez un ou plusieurs problèmes,
suggérez une solution aux autorités (in)compétentes...
et donnez-moi des nouvelles.
Pierre JC Allard
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