99.03.03
TRAVAIL 2020
Quand on pense à la société de demain, on voit
des images de loisir et de haute technologie. Mais la société
de demain, pas plus que celle d'aujourd'hui, ne va s'organiser principalement
en fonction de nos vacances. Elle va s'organiser en fonction de nos besoins
et de ce qu'il faudra faire pour les satisfaire. On travaillera autrement,
en 2020, mais le travail - nos efforts pour satisfaire nos besoins et nos
désirs - ne cessera pas d'exister.
Quand on pense à la société de demain, la première
question à se poser demeure donc l'affectation de nos ressources
humaines et il faut avoir en tête un modèle de ce que sera
le travail dans 20 ans si on veut planifier avec un peu d'intelligence le
chemin qui nous y mènera.
Or si quelqu'un fait ces prévisions aujourd'hui, ses résultats
ne transpirent pas dans nos politiques d'éducation et de main-d'oeuvre.
On continue à enseigner et à former comme si les travailleurs
allaient se presser aux portes des usines et comme si nos politiques d'austérité
allaient stopper la tendance vers une augmentation des services personnels
et socioculturels. Or ce n'est pas vrai, cette tendance ne s'arrêtera
pas
En 2020, il restera au Québec entre 10% et 15 % de la main-d'oeuvre
dans le secteur industriel au sens strict. Entre 5% et 7 % dans la construction
et les transports, selon l'issue du combat d'arrière-garde qu'auront
mené les syndicats. La main-d'oeuvre dans l'agriculture aura continué
sa longue descente lente et, à moins de surprises, les industries
extractives auront été presque entièrement automatisées.
Disons 2,5% de la main d'oeuvre pour le secteur primaire.
Avec le développement des magasins de type Wal-Mart et du commerce
sur Internet, le nombre des travailleurs du commerce de gros et détail
sera désormais lui aussi en chute libre. Dramatique déclin
aussi des employés du secteur des banques, assurances et institutions
financières ainsi, d'ailleurs, que des employés de niveau
secrétarial dans tous les secteurs. Les pressions du public auront
aussi forcé une réduction du fonctionnariat à tous
les niveaux, sauf en ce qui a trait aux fonctions de sécurité
qui elles seront en croissance.
Où diable la main-d'oeuvre de l'an 2020 trouvera-t-elle sa niche?
Les 4 branches d'activité en croissance seront la Santé, l'Éducation,
la Recherche et les Loisirs, la définition de chacun de ces domaines
étant élargie pour permettre l'adjonction d'une main-d'oeuvre
tendant vers la moyenne sur le plan des aptitudes et de la formation.
Ainsi, c'est le volet de ce qu'on appelle aujourd'hui les médecines
douces et les "thérapies" qui se développera le
plus vite dans la branche de la Santé, parce qu'il nécessite
moins d'investissements lourds; comme se sera la catégorie professionnelle
des "auxiliaires" qui accueillera surtout les travailleurs (euses)
déplacés du secrétariat, parce que cette catégorie
exigera un recyclage moins long et moins coûteux.
Phénomène similaire dans la branche éducation, avec
une prolifération des cours de croissance personnelle, de culture
générale, d'étude des langues, de hobbies, de préparation
à des tâches professionnelles simples.
La Recherche, au contraire - et en tout premier lieu la recherche médicale
et pharmaceutique - deviendra le premier secteur utilisateur de main-d'oeuvre
hautement qualifiée, reprenant le rôle que joue présentement
la gestion et que jouait l'ingénierie il n'y a pas si longtemps.
La branche Loisir intégrera en un seul tout ce qui est aujourd'hui
le Tourisme/Hébergement - (déjà le premier secteur
économique mondial, en chiffre d'affaires, avant le pétrole,
l'automobile, l'informatique, etc. !) - et tout le volet du divertissement
(Entertainment).
Ces quatre (4) branches occupent déjà 28 % de la main-d'oeuvre,
soit près de 1 000 000 de travailleurs au Québec (contre 650
000 dans les industries manufacturières). En 2020, ce pourcentage
devrait se situer entre 35 et 40%. Toute l'absurdité de la politique
actuelle du gouvernement dans les domaines de la santé et de l'éducation
apparaît quand on comprend cette évolution du système
de production des biens et services.
Simultanément, le statut des travailleurs changera. Le pourcentage
des travailleurs autonomes atteindra au moins 35% en 2020, même si
nous ne faisons rien; mais si, comme nous le recommandons ailleurs sur ce
site (701 html), des mesures sont adoptées rapidement pour tenir
compte de l'évolution de nos besoins, c'est de 60 à 70 % de
l'activité professionnelle globale que représentera le travail
autonome en 2020, souvent en parallèle à un emploi salarié
dont la durée n'excédera pas 15 heures/semaine.
Comment vous situez-vous face à cette transformation de la main-d'oeuvre?
Et vos enfants? Songez-y, personne ne semble le faire pour nous.
Pierre JC Allard
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