98.11.11


4 COLONNES À LA 5

Je n'ai vraiment rien contre la candidate Line Beauchamp, que je ne connais pas personnellement, non plus qu'aucun de ses adversaires. Tout ce que je sais d'elle, c'est qu'elle a l'appui de Pierre Foglia. Ce qui est plutôt une bonne note, puisque je pense que Foglia est certainement dans la bonne moyenne des gens qui peuvent porter un jugement éclairé. J'en ai seulement contre l'injustice et l'hypocrisie.

Une injustice et une hypocrisie qui n'ont rien à voir avec Foglia ni Line Beauchamp, mais qui découlent de la loi électorale et de la place des médias dans le système. Un système pourri à l'os. Une parodie de démocratie. Parce que Line Beauchamp, grâce à son ami Foglia, entre dans la course avec un avantage énorme sur ses concurrents : 4 colonnes de compliments à la page 5 de La Presse, un article de fond qui la met en évidence auprès de 1 000 000 électeurs.

Le problème n'est pas que Foglia appuie Line Beauchamp; c'est bien son droit, et c'est à ca que devrait servir sa crédibilité. Le problème, c'est le monopole de l'espace médiatique. Les adversaires de Line Beauchamp n'auront jamais l'occasion d'occuper 4 colonnes à la 5 de La Presse. On ne dira jamais du bien, ni même du mal, d'eux au profit de 1 000 000 électeurs. Ils vont rester des inconnus. Ce qu'ils disent, ce qu'ils pensent, leur programme - s'ils en ont un - va rester bien discret. Les électeurs devront choisir entre Line Beauchamp dont on leur a dit du bien... et des inconnus. C'est ca, l'injustice.

L'hypocrisie, c'est que, pendant que Line Beauchamp dispose ainsi d'une extraordinaire publicité gratuite, les candidats en général doivent comptabiliser leurs moindres dépenses électorales. De sorte que les autres candidats, ceux qui n'ont pas d'amis à La Presse, non seulement ne bénéficient pas d'une publicité qui vaudrait une fortune si elle était vendue, mais ne peuvent même pas tenter de contrer cet avantage indu en y allant, par exemple, d'une distribution illimitée de tracts ou de la publication d'un bouquin, sans être restreint par les limites imposées aux dépenses électorales.

Attention ! Je ne suis pas contre la limitation des dépenses électorales; je dis seulement que ces limites sont dérisoires, aussi longtemps qu'on ne s'assure pas que tous les candidats ont un accès égal aux médias. C'est d'une totale hypocrisie de prétendre qu'on équilibre les chances entre les candidats par un contrôle des dépenses, alors qu'il est évident que les dépenses utiles d'un candidat sont essentiellement celles qui le font connaître et font connaître ses idées. Or, RIEN n'existe pour garantir une diffusion au moins minimale des idées de chacun des candidats, ni imposer une parité entre la publicité gratuite que les médias leur accordent.

Et ce qui est injuste dans la course entre la candidate Beauchamp épaulée par Foglia et ses rivaux, l'est tout autant quand on compare la publicité accordée aux Péquistes et Libéraux aux miettes qu'on accorde aux autres partis. Sans parler des candidats indépendants, présumés par les médias être tous toqués et stériles de toute idée. Les médias jugent... puis diffusent la lumière de leur propre jugement, ce qui écarte tous ceux dont les idées ou les chances de succès ne satisfont pas aux critères des journalistes. Ceci est l'un des obstacles majeurs à l'exercice d'une véritable démocratie.

Pour que la démocratie trouve son compte, il faudrait, au minimum, que tout candidat puisse disposer, dans chaque média, d'un espace (temps d'antenne) égal a 50% de l'espace (temps d'antenne) accordé au candidat qui en reçoit le plus. Dans le cas exemplaire de l'article de Foglia, il serait raisonnable que les concurrents de Line Beauchamp se voient offrir chacun la moitié de l'espace de la chronique de celui-ci pour se présenter et dire pourquoi, eux aussi, méritent peut-être le respect des électeurs.

 

Pierre JC Allard





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