Montréal doit soutenir les arts. Aujourd'hui plus que jamais, parce
que la publicité nous attire vers d'autres produits plus terre-à-terre
et réduit la part des dépenses de consommation qui va à
la culture. Mais ceci ne veut pas dire qu'on doive soutenir les auteurs
des pièces que le public boude, ni les peintres de tableaux qu'on
ne veut pas voir. Il ne s'agit pas de contrarier les goûts du public
au nom d'une certaine "culture" définie par une toute petite
élite, mais plutôt de faire en sorte que les Montréalais
aient plus de la culture qui leur plaît.
La politique culturelle de Montréal doit être de promouvoir
une culture qui soit pour les gens une source de plaisir et, pour en arriver
à cet objectif, il faut que Montréal subventionne la consommation
plutôt que la production de l'art, facilitant ainsi à une beaucoup
plus grande partie de la population l'accès à la culture de
son propre choix.
Je propose de le faire en offrant à chaque détenteur de plus
de 18 ans d'une Carte de Citoyen portant mention &laqno; solidarité»
d'assister gratuitement ou à rabais à six (6) événements
culturels de son choix - théâtre, exposition, concert, film
d'auteur québécois, etc - la Ville prenant en charge le coût
du billet à la hauteur de 10 $. Si on subventionne ainsi l'entrée
de 900 000 citoyens à 6 événements culturels par année,
on injecte 54 millions de dollars dans la consommation culturelle. C'est
un gain presque net pour les arts, la culture et les artistes, puisque ce
pouvoir d'achat sera mis majoritairement entre les mains de Montréalais
qui ne sont pas présentement des consommateurs fréquents de
culture.
Montréal, en collaboration avec le secteur privé, établira
un Centre de Réservation des Activités Culturelles
de Montréal (CRACM) Ce Centre, en accord avec les responsables
d'événements culturels, acceptera et portera au débit
de leur carte, à la hauteur de 15 $ par événement,
les réservations faites par les détenteurs d'une Carte de
Citoyen portant la mention
&laqno;solidarité». Chaque détenteur de plus
de 18 ans d'une Carte de Citoyen pourra aussi emmener gratuitement, à
tout spectacle auquel il assiste, une personne de 7 à 17 ans: ce
sont tous ces enfants et adolescents qu'on initiera ainsi aux événements
culturels qui deviendront la clientèle de demain.
Montréal avancera aussi à certains artistes les fonds
nécessaires pour la préparation d'événements
culturels, garantissant le coût de location de la salle et de l'équipement
ainsi que les salaires des techniciens permettant de réaliser ces
projets à la hauteur de la valeur des réservations fermes
faites au CRACM pour cet événement. Le choix des artistes
ou promoteurs auxquels on avancera ces fonds ne sera pas arbitraire. Tous
les candidats à ce financement bénéficieront d'une
publicité préalable gratuite; Montréal accordera ensuite
prioritairement un financement à ceux dont le projet aura recueilli
le plus grand nombre de réservations fermes anticipées au
Centre de Réservation (CRACM).
Les recettes anticipées correspondant aux réservations fermes
au CRACM seront d'abord mises de coté pour servir au paiement de
la salle, des équipements et des salariés. C'est seulement
quand ces frais seront intégralement couverts qu'ils seront garantis
et que la subvention sera accordée, sous condition que l'événement
soit produit. On avancera dès lors à l'artiste, pour ses frais
de préparation, 70 % de la valeur des réservations fermes
subséquentes, le reste lui étant remis après l'événement.
En subventionnant le consommateur d'activités culturelles plutôt
que l'artiste lui-même, Montréal aidera les arts sans s'immiscer
dans le problème épineux de savoir quel artiste et quelle
forme d'art sont subventionnés. Ce choix deviendra celui de la population
elle-même. La culture "à la carte" permettra à
la Ville de jouer le rôle de mécène tout en laissant
la population exprimer démocratiquement ses préférences.