Montréal est une ville de locataires. Ce n'est pas un déshonneur,
mais c'est un inconvénient. L'immense majorité des Montréalais
qui ne gagnent pas 40 000 $ par année sont locataires et 40% d'entre
eux doivent dépenser plus de 30 % de leur revenu pour se loger. Pendant
ce temps, malgré les hauts et les bas de la conjoncture, les loyers
montent. Mais la valeur des maisons n'augmente pas toujours.
Depuis quelques années, la valeur des maisons n'augmente plus. En
fait, en dollars constants, la valeur de la propriété domiciliaire,
à Montréal, a perdu 19% depuis 1989. Beaucoup de propriétaires
souhaiteraient sans doute placer leurs capitaux ailleurs, sur des marchés
plus actifs, s'ils avaient la possibilité de vendre à un juste
prix ; mais la demande n'est pas forte pour la vente des duplex, triplex,
quadruplex qui constituent une part importante du parc de logements de Montréal.
Pourtant, il existe un marché pour l'achat en condominium des «hauts-de-duplex-dont-le
propriétaire-habite-en-dessous» et autres logements locatifs:
le marché que constituent ceux qui les habitent. Compte tenu de l'évolution
de la valeur marchande des propriétés à Montréal,
des taxes qu'ils paient et des alternatives de placement qui s'offrent à
eux, il est certain que bien des propriétaires vendraient volontiers
en co-propriété les logements qu'ils offrent en location.
Compte tenu des avantages fiscaux accordés au propriétaire
occupant, de l'occasion de faire des économies et de réaliser
un gain à long terme que représente l'investissement dans
une propriété ainsi que du prestige et de la crédibilité
qui s'attachent au statut de propriétaire, il est tout aussi certain
que beaucoup de locataires désireraient se porter acquéreurs
du logement qu'ils habitent.
Pour qu'ils puissent le faire, il faut que soient éliminées
toutes les restrictions et obstacles réglementaires à la transformation
des logements locatifs en condominiums et à leur achat par leur occupant
actuel. Par surcroît, dans le cadre d'un programme ad hoc dont une
étude rapide proposera le budget plafond, Montréal apportera
sa caution, auprès d'une institution bancaire, à la hauteur
de 5 000 $, pour tout prêt ayant rang de deuxième hypothèque
consenti à des locataires achetant le logement qu'ils occupent depuis
au moins trois(3) ans, aux deux seules conditions, d'abord qu'ils aient
un emploi stable depuis aussi au moins trois (3) ans et, deuxièmement,
que les paiements mensuels qu'ils devront faire par la suite sur le logement
acheté n'excèdent pas 35% de leur revenu.
Ce programme devrait permettre, au cours de la prochaine décennie,
de transformer Montréal d'une ville de locataires en une ville dont
la majorité des ménages seront propriétaires. Cette
transformation constituera un élément favorable de stabilisation
de la population et tendra, sans léser qui que ce soit, à
une plus juste répartition de la richesse.
Donnant le bon exemple, Montréal favorisera la vente, sous
condition suspensive, des logements sociaux actuels à ceux qui les
habitent depuis trois (3) ans. Le prix de vente devra être
fixé en fonction de la valeur marchande réelle des logements
cédés et les conditions devront être compatibles avec
les ressources des acheteurs, ne les obligeant jamais à des paiement
supérieurs à 35 % de leur revenu. A ces conditions, c'est
la durée des hypothèques qui devra être variable, cet
aspect étant négocié avec les institutions financières.
Tous, à ces conditions, ne deviendront pas propriétaires.
Pour les autres, Montréal, ne construira pas de nouveaux logements
sociaux alors qu'un pourcentage désolant des logements de Montréal
sont présentement inoccupés; Montréal apportera
plutôt une aide au logement social sous la seule forme d'une assistance
financière pour la location des logements existants. C'est
une approche plus valorisante pour l'assisté - qui ainsi n'est pas
«ghettoïsé» - et qui constitue une autre contribution
utile à la relance du marché de la location.