Mise à jour 1999
Les commensaux
La proposition # 18 a autant de volets que de groupes-cibles. L'évolution
de la situation a été différente selon qu'on pense
aux jeunes, aux aînés, aux assistés sociaux ou aux familles
monoparentales En ce qui concerne les jeunes, les rares renseignements dont
on puisse disposer indiquent que, malgré la publicité qu'une
série télévisée populaire a apporté au
concept de vie en commun, le phénomène est resté à
peu près stable depuis 1992.
Quand on interroge les jeunes, il en ressort que la solution de facilité
- qui est celle du "coloc" ou au mieux du partage des frais à
trois - reste leur premier choix. Une solution "commensale" leur
apparaît complexe. Une assistance de l'État à l'identification
des partenaires et à l'organisation de la cellule commensale est
indispensable si on veut promouvoir cette option pour les jeunes et les
résultats restent incertains.
Pour les aînés, la situation est différente: l'intérêt
est bien présent . Dès la publication du livre, j'ai été
approché à la fois par des promoteurs qui voulaient mousser
ce concept et par des individus qui cherchaient à y participer. J'ai
mis les uns en contact avec les autres et, par la suite, j'ai été
mis au courant de tentatives pour transformer des foyers pour personnes
âgées en coopératives d'habitation avec services. Mon
but n'étant pas de m'immiscer dans une entreprise commerciale, je
n'ai pas maintenu le contact avec ces projets mais je suis convaincu que
la proposition #18 serait accueillie avec enthousiasme par les aînés
si l'État voulait bien y accorder un peu d'attention.
Les assistés-sociaux se sont battus avec énergie depuis des
années pour que le gouvernement retire la règle discriminatoire
qui les empêchait de partager un logement sans en être pénalisés.
J'avoue ne pas pouvoir comprendre la politique à courte vue de État
qui mesquine ainsi aux déshérités l'occasion d'épargner
quelques dollars qui seraient immédiatement ré-investis dans
la consommation courante. Il faut qu'il y ait quelque part un crétin
qui ne comprenne pas qu'il est plus avantageux pour l'économie de
donner un dollar à un pauvre qui le dépense qu'à un
bien nanti qui l'ajoutera à son épargne.
Les familles monoparentales - sauf peut-être dans le cadre de communes
réunies sur la base de croyances parareligieuses - n'ont pas, à
ma connaissance, pris l'initiative de créer des cellules commensales.
L'État n'a pas pris non plus d'initiatives particulières pour
les y encourager. Pour ceux-ci, la proposition #18 est restée lettre
morte.
Qu'en est-il aujourd'hui de cette proposition? Je crois qu'elle correspond
toujours à un besoin de notre société et que l'État
devrait mettre en place un Secrétariat au Commensalisme. Les aînés
en seraient la première clientèle, les familles monoparentales
suivraient si on se donnait la peine de publiciser correctement cette initiative.
Les jeunes? Je suis moins confiant, et il faut s'attendre sur ce marché
à une mobilité plus grande. Pourquoi ne pas faire l'expérience?.
Quant aux assistés sociaux, il serait opportun que toutes les barrières
qui s'opposent au partage des logements soient éliminées et
que le commensalisme soit présenté sous un jour favorable.
Mais il ne faudrait pas que l'État, voyant tout à coup un
avantage social à en tirer, contraigne les assistés sociaux
à adopter un mode de vie autre que celui dont chacun d'eux décidera.
Pierre JC Allard
Texte 1992
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