L'exploratrice


Graphisme J M Negroni

Poussi�re de brume.

*

Amant de peine, de rancœurs,
Jours de col�re et de tourmente,
Telle une tornade de pleurs,
Tu fais de moi, la transparence �vanescente.

 

~~*~~


Ne plus passer dans la ruelle !
Ne plus c�der � cet appel !
Ne plus rechercher sa pr�sence
Install�e l�, comme une gifle.

Elle avance, le nez au sol,
D'un pas nonchalant, l�ger,
L'air de ne pas montrer son attente
Mais dans son corps,
Des sensations de toutes sortes, se manifestent.
L'id�e de ne pas dire " bonjour ", lui est insupportable,
Cependant, elle prend un air indiff�rent
Malgr� le tumulte qui s'empare d'elle,
Fort, comme un ouragan !
  R�elle puissance anarchique
Lui faisant perdre tout contr�le.

Au dehors elle est calme,
� l'int�rieur, c'est un chien fou qu'on a puni
Et qui ne sait plus comment faire
Pour que son ma�tre lui pardonne !
Un chien qui c�de � la panique
Et cherche par tous les moyens,
Une opportunit� propice
� des retrouvailles heureuses.
Mais son ma�tre ne veut mollir
Or le chien ne sait o� aller, ni qui il est.

Elle est ainsi, en cet instant
O� le m�pris frappe comme une verge.
Un vrai coup de cravache rageur
Qui meurtrit son �me, sa vie.
" Comment puis-je tomber si bas ?
Se reproche-t-elle, mal � l'aise,
Comment peut-on �tre l'esclave
D'une telle passion si malsaine " ?

Aux prises avec deux sentiments :
Celui de fuir et de rester,
De tout plaquer, de s'accrocher,
Elle tournoie comme feuille au vent
Chass�e de l'arbre par l'hiver,
En s'exhibant de tout son �tre
Pour attirer son attention ;
Lutte silencieuse, atroce,
Entre deux tendances contraires,
L'exploratrice est solitaire
Et son arm�e est en d�route.

Elle passera une journ�e
Bien difficile, en v�rit�,
Mais demain...
Car c'est d�cid�,
Demain, elle fera un d�tour !

Le lendemain ?
Tout recommence.
Le chien revient, cherche son ma�tre.
Alors dans un effort intense,
Elle l'attache, le muselle,
Tirant sa laisse avec mollesse
Car le chien hurle :
- " Je veux partir !
N'essaie pas de me retenir !
Je veux obtenir un sourire,
Essayer de capter ses yeux,
Lui arracher un bonjour,
M�me s'il n'est pas affectueux !
- Et qu'esp�res-tu ? Des excuses ?
Un contact intelligent ?
- ...En fait, je l'ignore mais je ne supporte pas
D'�tre rejet�e comme �a,

Sans aucune raison cr�dible,
Sans �gard, sans loyaut�,
Ni qu'on s'essuie les pieds sur moi !
- C'est pourtant bien la position dans laquelle
Tu te places, non ?
- Certes, tu dis vrai, reprend le chien ;

Mais je souffre, que puis-je y faire ?

Se voir tourner contre soi, 

En d�dain, en col�re,
Les sentiments que l'on porte � un homme,
N'est-ce pas d�routant ?
Comment peut-on salir de la sorte,
Une femme qui s'est offerte � vous
Dans toute la tendresse de son cœur ;
La cong�diant, telle une souillon,
Sans pr�avis ni pr�ambule ?
Lui demeurer indiff�rent

Sachant sa douleur cependant,
Puis se pr�tendre antifasciste,
Antiraciste en m�me temps ?

Comment peut-on faire �a,
Sans jamais sembler se remettre en question ?

- Mais, tu n'as pas � te rabaisser voyons !
Allons, fais un effort, secoue-toi !
- ... J'ai aim� cet homme

Et j'en suis humili�e.
- Eh bien, cela ne suffit-il pas ?

- Si... R�pond le chien, plein de tristesse. "

Or, le ciel ce jour l�, est cl�ment,
Car la ruelle est vide, ce qui r�gle tout conflit
Pour aujourd'hui...

~~~

Sous le soleil qui inonde la campagne,
Elle se retrouve, elle musarde.
� c�t� de son cœur en flamme,
Vit cette blessure qui s'attarde.
Elle inonde des pages invisibles,
De mots et de pens�es profuses.
Ses pas s'envolent, ind�l�biles
Traces impr�gn�es de l'amour.
Et dans le vent farouche,
Une ti�deur fr�le son front,
Un baiser doux, dessus sa bouche,
Vient se poser, il porte un nom :
Celui de cet amant fugace,
Qui p�se lourd dans sa m�moire,
Celui qui, plus fort que l'audace,
Se d�robe en laissant l'histoire
Pendue au clou de son parcours,
Suspendue l�, dans l'air du temps...
Des relents de regrets font surface,
Comme issus d'un profond n�ant.

Elle a longtemps cherch� les causes,
Tous les comment et les pourquoi ?
Mais un vide aujourd'hui s'impose
� sa conscience pleine d'�moi.
S'�vader, un instant encore,
Pour d'autres sph�res, d'autres milieux,
S'occuper un peu de son corps,
Est encore, ce qu'il y a de mieux.

Elle surplombe maintenant
Au sommet d'un mont, la vall�e,
Contemple pour un court instant,
La ville qui est � ses pieds.
Bizarrement, elle se surprend
� chercher des yeux, sa demeure ;
S'y trouve-t-il donc � pr�sent ?
Est-ce qu'il y vit, qu'il y meurt ?
Tout ce qu'elle a imagin�,
L'a tant plong�e dans des orni�res !
Elle s'est battue, durant l'�t�,
Contre des monstres, d'es sorci�res...

Quelques chardons, quelques �pines
D'�glantier, s'agrippent � elle
Sournoisement, courbant l'�chine
De leurs corps faiseurs de dentelle,
Comme pour l'emp�cher de fuir,
Lui faire commettre un faux pas
Mais � cette heure qui soupire,
Son �me ne mollira pas.
La paix au cœur, de tous ses sens,
Elle s'impr�gne, elle respire
Le vent et toutes les essences
De cet humble hiver � venir.

Et puis soudain, se lib�rant
Des ronces et des �glantiers,
Elle descend en tr�buchant
Sur quelques pierres du sentier.

~~~

...
Il y avait foule ce soir l�,
La porte restant entre ouverte,
Faisait rentrer un brin de froid,
Semblant jouir de la d�couverte.
Quelques tableaux, quelques po�mes,
Pendus aux murs, de haut en bas,
Quelques agapes de car�me
S'offraient au monde, entass� l�.
Les bouches pleines, parfum�es,
S'animaient en credo expert,
Sur l'art et son utilit�,
Sur le ch�mage et la mis�re.

Son ascenseur est remont�
Au niveau du rez-de-chauss�e.
Elle navigue au gr� des yeux
Et quelques mots de politesse,
Le temps d'un soir, peut-�tre deux,
Prenant un bain de gentillesse...

Pourtant,
Comme un ballon qui vole vers le ciel,
Elle doit l�cher ses esp�rances,
Prise de fer ou bien de chance,
Poigne d'amour et de silence.

Ne plus plonger dans l'indolence,
Ne plus pleurer sur la froidure,
Reprendre ses atouts en main,
Ne plus regretter l'innocence.
Savoir absoudre les parjures,
Pour suivre sa route demain...

Des vagues d'eau dormantes
Sommeillent dans son cœur,
Des spirales g�antes
L'agitent, la tourmentent.
Elle tourne, oscille,
Telle boussole d�r�gl�e
Car le temps d'un sourire,
Son univers s'est ab�m�.

L'oiseau s'est envol�,
Emportant sous ses ailes,
La ti�deur de son corps,
Le duvet de son �me.
� pr�sent le frimas fera place � l'hiver
Et le vide laiss�, engendre l'abandon.

Suspension dans le temps.
Attente interminable !

Il faut sortir du puits.

~~~

Son ascenseur s'est arr�t�
� une hauteur interm�diaire.
� pr�sent elle croise des rois,
Des princes en costume de nuit,
Orn�s de strass, de paillettes.
Elle se retrouve seule au bal
O�, d�guis�, le monde rit,
Gorge d�gag�e, jabot de soie,
Manches gonfl�es et double bas.
Gosiers secs, ventres creux,
S'emplissent jusqu'� sati�t�.

Impassible, elle passe,
Tel un ruban de velours,
Ondulante, d�licate,
Caresse qui fl�ne toujours...
Quelques masques aux yeux �teints,
S'inclinent sur son passage ;
Elle leur sourit tendrement,
Ne sachant qui la d�visage.

La f�te atteint son comble,
Dans une bo�te de b�ton
O� quelques n�ons crachent leurs �clats.
Les bouches pleines, multicolores,
S'animent � grands renforts de sons,
Postillonnant leurs positions,
Sur l'art d'aimer et de le faire.
L'animation grandit encore,
Comme fœtus dans le corps,
Cependant que son cœur s'ennuie.

M�lancolique, elle sort
De tout ce fatras �toff�,
Guirlandes et ribambelles
S'�chappent aussi,
D'un plafond sali et jauni,
Pour aller mourir dans la nuit,
En retombant au raz du sol.
Quelques sourires qu'elle adresse,
� une femme dans son coin,
Lui rendent un peu d'enthousiasme.
Soudain elle se sent moins seule.

Et la soir�e tire � sa fin,
Sans plus de rires ou de soupirs.

Parmi la foule regroup�e autour des tables,
Elle aper�oit ce triste clown au regard sombre,
Sautillant d'un pas malhabile, entre les gens,
Exub�rant dans son parler.
Puis le temps d'un regard fugace,
Presque �chang� incidemment,
Le temps de refuser le verre
De champagne qu'on lui tend,
Il s'�vapore sans rien dire,
Sans pr�venir, sans crier gare...

Et c'est toujours la m�me �treinte, toujours, la m�me sensation.
La tenaille se referme sur son plexus, lui faisant mal.
Ce vide qui s'installe, finit par �tre familier.
Toujours la m�me envie, de courir, de hurler !
Se montrer face � lui,
Lui dire : que �a suffit ! qu'il n'y a d'interdit,
Que le droit d'interdire !
Ou bien, le faire mourir dans son cœur � jamais,
Mais qu'il sache que c'est lui qui le veut, le choisit !!


LP


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