Reine d’Ecosse
8 fev 1587

Monsieur mon beau-frère,

étant par la permission de Dieu pour mes péchés comme je crois venue me jeter entre les bras de cette Reine ma cousine, où j’ai eu beaucoup d’ennuis & passé près de vingt ans, je suis enfin par elle & ses états condamnée à la mort, & ayant demandé mes papiers par eux ôtés à cette fin de faire mon testament, je n’ai pu rien retirer qui me servît, ni obtenir congé d’en faire un libre, ni qu’après ma mort mon corps fût transporté
selon mon désir en votre royaume où j’ai eu l’honneur d’être reine votre soeur & ancienne alliée.
Ce jourd’hui après dîner ma été dénoncée ma sentence pour être exécutée demain comme une criminelle à huit heures du matin. Je n’ai eu loisir de vous faire un ample discours de tout ce qui s’est passé, mais s’il vous plaît de croire mon médecin & ces autres miens désolés serviteurs, vous oyrez la vérité & comme grâces à dieu je méprise la mort & fidèlement proteste de la recevoir innocente de tout crime quand je serais leur sujette. La religion catholique & le maintien du droit que Dieu m’a donné à cette couronne sont les deux points de ma condamnation & toutefois ils ne me veulent permettre de dire que c’est pour la religion catholique que je meurs mais pour la crainte du change de la leur & pour preuve ils m’ont ôté mon aumônier lequel bien qu’il soit en la maison je n’ai pu obtenir qu’il me vînt confesser ni communier à ma mort, mais m’ont fait grande instance de recevoir la consolation & doctrine de leur ministre amené pour ce fait. Ce porteur & sa compagnie – la plupart de vos sujets – vous témoigneront mes déportements. En ce mien acte dernier il reste que je vous supplie, comme roi très chrétien mon beau-frère & ancien allié & qui m’avez toujours protesté de m’aimer, qu’à ce coup vous faisiez preuve en touts ces points de votre vertu tant par charité me soulageant de ce que pour décharger ma conscience je ne puis sans vous qui est de récompenser mes serviteurs désolés leur laissant leurs gages l’autre faisant prier Dieu pour une reine
qui a était nommée très chrétienne & meurt catholique dénuée de touts ses biens, quant a mon fils je le vous recommande autant qu’il le méritera car je n’en puis répondre. J’ai pris la hardiesse de vous envoyer deux pierres rares pour la santé vous la désirant parfaite avec heureuse & longue vie. Vous les recevrez comme de votre très affectionnée belle-sœur mourante en vous recommandant encore mes serviteurs. Vous ordonnerez si il vous plait que pour mon âme je sois payée de partie de ce que me devez & qu'en l'honneur de Jésus Christ lequel je prierai demain à ma mort pour vous me laisser de quoi fonder un obit & faire les aumônes requises.

ce mercredi à deux heures après minuit
Votre très affectionnée & bien bonne sœur

Au Roi très chrétien monsieur mon beau-frère & ancien allié 

 


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