Mise à jour 1999
La providence par paliers
Dans la foulée de ce qui s'est passé au Lac-Saint-Jean
et de la Crise du Verglas, la proposition #16 apparaît prémonitoire
et prend une réalité nouvelle. Évidemment, il y a deux
points de vue entre lesquels on peut choisir au vu de ces récents
événements. On peut adopter l'optique des victimes ... ou
celle des autres.
Si vous êtes de ceux qui avez subi une perte résultant de ces
catastrophes, peut-être voyez-vous désormais sous un jour nouveau
un système d'assurance collective universel qui vous aurait accordé
le DROIT d'être indemnisé des dommages que vous avez subis.
Si tel eut été le cas, vous auriez évité pas
mal de stress... Si vous êtes des "autres", vous pensez
peut-être avec inquiétude à la somme que l'État
aurait dû verser dans ces deux cas bien précis et à
l'impact que l'indemnisation complète des victimes aurait eu sur
vos impôts.
En fait, il est important de se dégager de ces deux optiques pour
voir la vraie leçon de ces deux catastrophes et en tirer la bonne
conclusion. La vérité, c'est que, même s'il n'y a pas
une loi pour les y obliger, les gouvernements réagissent toujours
en tentant d'indemniser les victimes ... si l'impact médiatique de
la catastrophe est suffisant. Le comportement de l'État en ce genre
de situation a maintenant créé une coutume qui vaut droit
acquis.
Le contribuable n'a donc plus à se poser de questions; il peut savoir,
sans l'ombre d'un doute, que s'il y a eu une catastrophe il payera. Le problème
est que ce droit acquis n'étant pas défini, la victime, elle,
ne sait pas si elle sera payée ni combien elle recevra. Elle ne sait
pas non plus où se situe la barre, puisque ce sont en faits les médias
qui décrètent qu'il y a eu ou qu'il n'y a pas eu catastrophe.
En d'autres termes, vos chances d'être indemnisé sont d'autant
meilleures que le drame a été plus spectaculaire. Trois maisons
sont emportées par une tornade et c'est l'affaire des propriétaires;
trois cents maisons sont emportées par la crue et ça devient
la responsabilité de l'État. C'est une vision pragmatique
qui a ses mérites, mais qui n'a rien à faire avec l'équité
ni le bons sens.
C'est une approche d'autant moins équitable que la charité
publique intervient aussi, laquelle est entièrement dépendante
de la couverture médiatique. Ainsi, au Lac-Saint-Jean, on a reçu
des dons à ne savoir qu'en faire. Vraiment à ne plus savoir
qu'en faire, car un excédent de plus de quatre millions de dollars
a été versé à un compte spécial au profit
d'autres victimes éventuelles après que toutes les réclamations
des sinistrés du Lac-Saint-Jean aient été prises en
compte et satisfaites selon leur mérite.. !
Il y aurait intérêt à préciser les termes de
la responsabilité collective. Chacun se sentirait mieux protégé
et, toutes contributions publiques et privées confondues, l'indemnisation
des victimes coûterait moins cher si elle était faite selon
des normes. Et l'on pourrait intervenir plus efficacement pour interdire
la construction dans les sites à risque...
Et l'autre volet de la proposition #16 ? La création de petites mutuelles?
Suite à la publication du livre, en 1992, il semble que beaucoup
de gens s'y soient intéressés. On m'a même invité
à donner une conférence sur le sujet. Je ne sais pas où
en est aujourd'hui ce volet de la proposition #16. Éclairez-moi...
Pierre JC Allard
Texte 1992
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