Le Lied, la langue et l’histoire




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ANDRÉ HIRT



Ce petit livre, qui n’est ni de pure musicologie, ni d’esthétique ou encore de philosophie, cherche à raconter comment ce qui est un genre musical très marginal mais important (le Lied, essentiellement romantique) a constitué la forme de la subjectivité moderne.

Poésie chantée, musique sur des mots, on ne sait au juste (poésie et musique s’y trouvent néanmoins problématisées sur un mode aigu), le Lied se distingue de l’opéra, comme la subjectivité de l’histoire.

C’est pourquoi quelques passages du livre ont l’allure d’une intervention auto-biographique. Il fallait seulement mettre en scène le Lied dans une subjectivité déterminée. La question qui apparaît sous cet angle est celle de la langue, la façon dont une subjectivité peut se dire, non seulement poétiquement (y en a-t-il en vérité une autre ?), non seulement musicalement (mais il manque l’assise de la représentation), mais dans l’entremêlement que propose le Lied. Le Lied est ainsi une langue à part dans laquelle il est arrivé que les plus profondes subjectivités se pensent. Quelle est donc cette langue plus intérieure (interior intimo meo, dirait Saint-Augustin) que la langue ?

(Le contresens, à cet égard, serait de penser que ces interventions subjectives de l’auteur sont « narcissiques » ou je ne sais quoi d’autre. Elles sont seulement nécessaires en raison de l’objet traité).

La deuxième partie du livre traite du compositeur de Lieder le plus méconnu, mais aussi le plus raffiné : Hugo Wolf, ami de Gustav Mahler, mort fou dans un asile, après n’avoir composé quasiment que des Lieder sur les poèmes les plus choisis et somptueux de la langue allemande. Il apparaît aussi que l’intervention de Hugo Wolf dit quelque chose de très important sur la nature de la poésie. C’était là mon intention de départ, puisque tout mon travail, depuis le début, porte sur la puissance de pensée de la poésie, en sa fragilité même.

Enfin, la dernière partie du livre commente quelques pages décisives de la Montagne magique de Thomas Mann (un roman, donc), où le Lied, en particulier le Tilleul (der Lindenbaum) de Schubert – sans doute le Lied le plus connu de tout le répertoire — porte toute la problématique de la subjectivité face à elle-même, à la nature de son désir et à la mort, comme face à la tragédie historique (le personnage de Hans Castorp sur le champ de bataille de la guerre de 1914 entend en intériorité Le Tilleul).

Quelques précisions sur la nature de ce livre :

— Sa modestie formelle est réelle (absence d’appareil conséquent de notes), de manière à ce qu’il puisse se lire comme un récit, qu’il est au demeurant.

- Il voulait également et surtout ouvrir des angles d’attaque peu pratiqués sur la question de la subjectivité. À ma connaissance, seul Roland Barthes l’a tenté à sa manière dans Le Chant romantique (et on sait que cet angle fut décisif pour l’auteur de la Chambre claire et de La Préparation du roman). On a évité l’érudition, surtout les facilités modernes attendues sur ce genre de questions (la psychanalyse par exemple).

- Enfin, dans mon propre travail, ce livre a surgi de façon latérale pour m’apparaître finalement, en sa brièveté, central. Je me suis rendu compte qu’il expliquait en quelque façon tout ce que j’ai fait jusqu’à aujourd’hui.

Si la question du Lied peut apparaître désuète, peu pratiquée, ce qui en soi est déjà un signe des temps et un révélateur de notre situation (comment la subjectivité moderne se dit-elle ? Sait-elle se dire autrement que par et dans des poncifs vulgaires), ce que ce livre permet de penser, c’est aussi ce qui nous arrive à tous par les chansons ou les chansonnettes…

Pas moins sérieusement, le livre s’efforce de trouver une forme qui soit à la fois narrative, musicale et poétique tout en s’efforçant de réfléchir l’ensemble philosophiquement. Il est inutile de préciser que ce ne fut pas facile à réaliser. Je ne sais si j’y suis parvenu. Mais c’était au fond toute ma curiosité lorsque je me suis demandé pourquoi j’écoutais des Lieder et pourquoi ils insistaient dans ma mémoire avec leur contenu obscur de remémoration.

A. H.

“maelström”  [ 112 p. / 11 x 18 / ISBN : 978-2-917431-19-1 / EAN : 9782917431191 / 12 € ]


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