Contributions : Analyses



mars 2001

Appauvrissement de la section S :

La formation scientifique sacrifiée

 

Pour le premier changement de cap de la formation scientifique au lycée, il avait fallu changer de nom : la transformation de la " section C " en " section S " avait fait réagir les professeurs de mathématiques : elle a en effet représenté une régression de l’apprentissage du raisonnement et de la démonstration, pour se contenter de la maîtrise de procédures d’application apprises par la répétition d’exercices. On espérait ainsi augmenter l’attirance vers cette formation réputée difficile et sélective. On avait même favorisé le dumping de ces sections, en récompensant les lycées qui augmenteraient de 5% les passages en S par des heures supplémentaires dans la DHG, au profit de ces sections.

Autres temps , autres mœurs. On n’éprouve plus le besoin, maintenant, de changer l’appellation d’une section, même si on la vide de sa substance, et qu’on en change la finalité. Après avoir appauvri théoriquement la formation mathématique, la réforme appauvrit la formation tout cours. Quel besoin, pour un scientifique, de s’élargir l’esprit par des langues vivantes  (3 heures ® 2 heures, dont une de cours) et de le rendre critique par un enseignement philosophique (4 heures ® 3 heures, dont 2 de cours)?

Ce dénuement progressif de la formation scientifique est triplement navrant.

- Beaucoup d’élèves qui réussissaient leurs études dans toutes les matières allaient en section S pour se garder la possibilité des choix les plus ouverts , et profitaient pleinement d’un enseignement qui n’était pas seulement technique.

- A une époque où la technique et la science prennent une puissance inégalée, il est alarmant de constater la dérive technicienne de la formation. Nous formerons des applicateurs de plus en plus obéissants.

- Cette évolution propose une baisse des exigences, et une spécialisation, en pensant attirer davantage d’élèves vers les études scientifiques . C’est oublier que cette désaffection est aussi due à un abandon du désir de la réussite intellectuelle. Celle-ci confère certes une reconnaissance sociale, mais pas toujours des revenus alléchants. Les formations et les carrières peut-être moins enthousiasmantes, mais plus rapidement et mieux rétribuées représentent une séduction nouvelle. Ainsi, beaucoup d’élèves de S qui pourraient réussir des études scientifiques, s’orientent vers des formations courtes et commerciales.

Ce dépouillement de la formation scientifique sert en fait deux objectifs :

- diminuer son coût en l’allégeant des matières considérées comme un luxe inutile ;

- produire des exécutants.

Les conséquences en seront à la fois intellectuelles et politiques. D’où viendront les " têtes bien faites" spécifiques de notre enseignement, que les laboratoires étrangers cherchent à attirer? D’où viendront les scientifiques qui réfléchissent aux enjeux de leur pratique et peuvent en informer les citoyens afin que ces derniers puissent en décider en connaissance de cause ?

 

 

 
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