Le Chant Inachevé

 

 

Avant-Propos : Tome Second

  Il n’existe de mots assez justes pour décrire la douleur de la perte d’un être cher. Même un poète de la trempe d’Yvalin échoua dans cet exercice. Le récit s’achève ici, avant que ne soit cité à nouveau le nom de Lorindil :

 

  Voici le résumé du Livre des Fils de Sang ; écrit par le Barde Yvalin d’Avelorn dans ses Chants d’Yvresse ; Chants 550 à 600. Notre barde présente à son auditoire une nouvelle menace pour le royaume tout entier :

 

*** Har Garond la Maudite ***

 

  Loin au Nord se trouve Naggaroth, le terrible royaume de Malekith. Terre de malheur, de haine et de désolations glacées, ce domaine maudit se divise en de nombreuses terres, à la manière des royaumes d’Ulthuan.

  Au sud-est de ces terres de toundras et de forêts putrides se trouvent les Collines de Granite, de vastes montagnes de roche grisâtre aux sommet usés par le poids des siècles.

  Sur le plus haut plateau fut fondé Har Garond, la cité sanglante, par Garandrach’, un prince de Caledor ayant choisi le parti de Malekith lors de la Grande Déchirure.

  La ville tout entière semble élever de longs doigts crochus en direction des cieux, tandis que des innombrables geôles de la cité s’échappent les hurlements de captifs torturés pour le seul plaisir de citadins dépravés.

 

  Et les furies ne cessaient de sacrifier, les miliciens de surveiller l’horizon depuis leurs sombres tours, et le seigneur Ganor de méditer ses sombres projets de carnages…

 

  Le sombre monarque s’était taillé à la mort de son père une réputation de dictateur sanglant, lorsque, contraint à l’exil par un concile de bourgeois de la cité, il revint quelques mois plus tard, couvert d’or et de crânes de guerriers vaincus, suivi par une ost de pillards fanatiques.

  Durant la Nuit du Pouvoir, il remonta sur le trône familial, non sans livrer aux furies les usurpateurs et leurs nombreux disciples…

  Il entreprit alors de nombreux raids par-delà le monde ; pillant les désolations nordiques, il écrasa une horde de guerriers de Khorne. Ravageant les alentours d’Athel Loren, il ne laissa du Clan des Gui qu’une sinistre rangée de têtes plantées sur des piques, au milieu d’une clairière ravagée.

  L’Empire ne fut pas non plus épargné, et lors de la bataille du Col Maudit, l’armée de Karl Frantz fut terrassée.

  De nombreux héros profitèrent de cette période ; Malenor devint le bras droit de son Seigneur, Malus l’assassin attitré de Ganor, Laeneth ravagea maintes fois les lignes ennemies de sa sombre magie, et Dulmorwen s’imposa comme la meilleure guerrière de l’armée.

  Mais la folie s’empara de l’âme du monarque. Il projeta d’envahir les royaumes nains ; la bataille se solda par un cinglant échec. Le sang ne fut nullement coulé ; il suffit aux guerriers d’ Har Garond de voir leur seigneur gravement blessé par un éclat d’obus pour fuir le combat.

  De nombreux officiers furent exécutés en réponse à cette inadmissible couardise. Mais rien n’y fit. Ganor perdait de son charisme, et de nombreux héros tentaient régulièrement de le faire assassiner.

  Afin de rétablir son prestige, le Sombre Monarque leva une immense armée contre l’Empire. Une Arche Noire accosta à l’ouest de Marienburg, prête à répandre mort et désolation, tandis qu’une seconde arche noire voguait en direction des Désolations du Chaos.

  Karl Frantz revint défendre sa nation, et lors d’une bataille sanglante, défia le Sombre Monarque.

  Les deux empereurs combattaient depuis des heures sans qu’aucun camp ne parvienne à triompher ; le flanc gauche impérial fut anéanti, mais la couardise des chevaliers druchii condamna le flanc gauche elfique. Karl Frantz en profita pour défier Ganor. Le combat fut intense, et pendant un bref moment, l’elfe noir sembla l’emporter. Mais ce fut l’empereur des Humains, qui d’un puissant coup de son marteau de guerre, éclata le torse de son adversaire.

  Le centre de l’armée Druchii s’enfuit, l’infanterie, la cavalerie impériale et Karl Frantz à ses trousses. Les survivants elfes noirs, menés par Laeneth, parvinrent à s’échapper et à regagner Naggaroth.

  Dans la Cité Sanglante, la consternation fut de taille. Les multiples factions rivales s’affrontaient pour prendre le pouvoir, et durant cette mesquine lutte politique, Malenor et Laeneth trouvèrent la mort de la lame experte de Malus…

  Dulmorwen voulut rentrer en Har Garond. Elle savait que son armée pouvait s’imposer face aux milices rivales, et caressait l’espoir de succéder à son défunt cousin sur le trône. Mais sa rivale, Duthaurmen, complotait les mêmes projets. Et c’est elle que l’armée de l’arche noir décida de suivre.

  Dulmorwen, à bord d’un navire maraudeur, rejoint Naggaroth. L’on dit que de sinistres pactes furent signés avec le Seigneur Magarch de Karond Klar. Du moins la Vipère, ainsi que la surnomment ses ennemis, s’éclipsa durant de longs mois de la scène politique pour le moins tourmentée d’Har Garond…

 

  Loin au Nord, Duthaurmen et son ost périssaient entre les griffes des démons…

 

  Dans la cité sanglante, l’anarchie régnait.

  En Ulthuan, la consternation tombait : une horde de pillards Druchii était parvenue à écraser les défenses d’ Avelorn. Les survivants tremblaient en racontant le récit de ces sinistres semaines de combat, tandis que les chauds rayons du soleil d’août inondaient les forêts du royaume d’Isha. De leurs bouches revenait le même mot, prononcé à la fois avec crainte et défiance, celui de la Vipère…

 

*** Du carnage en Avelorn, et de l’avènement de Valdelia ***

 

  L’on sait peu de choses de ces jours maudits.

  La première bataille eut lieu lors d’une chaude journée d’août. Et Dulmorwen massacra bon nombre de ses adversaires. Cependant, les demoiselles d’honneur et les auriges de Tiranoc permirent de vaincre les furies, tandis que les heaumes d’argent enfonçaient le centre de l’armée.

  La seconde bataille eut lieu dix jours plus tard. Dulmorwen avait retenu la sanglante leçon du précédent conflit ; elle envoya ses éclaireurs déborder le flanc gauche, tandis que la horde Druchii se ruait sur le flanc droit. Le piège fonctionna à merveille, et le centre se retrouva totalement encerclé, avant d’être annihilé…

  L’heure était grave, mais les autres royaumes elfes n’avaient point le temps d’intervenir : en Yvresse se profilait l’ombre de Grom la panse, menaçant de détruire l’île continent tout entière.

  Ce fut une jeune demoiselle d’honneur, au passé inconnu, qui osa défier la horde de Dulmorwen. Les elfes noirs avaient repérés un temple au sud du royaume. La jeune guerrière, que ses consœurs nommaient Valdelia, organisa la défense de l’édifice en un ultime carré. Les Elfes Noirs tombèrent dans le piège et se ruèrent à l’assaut. Cependant Dulmorwen préféra n’envoyer qu’une ultime avant-garde ; ses devoirs envers son Sombre Monarque l’appelant à quitter Ulthuan afin de Lui prêter main forte dans les Désolations du Chaos. Cette retraite fut certainement la seule raison à la réussite du plan suicidaire de la jeune elfe ; les cavaliers noirs furent exterminés, et les guerriers des milices d’Har Garond vaincus dans une orgie de sang.

  En Avelorn, cette victoire mineure fut considérée comme l’œuvre d’Isha elle-même, et les prêtresses de la Déesse Mère exhortèrent leurs semblables à une croisade sainte contre la Vipère, responsable de tous les tords perpétrés contre Isha…

 

  Les années s’écoulèrent. le seigneur archimage Lorindil goûtait à la paix légendaire du royaume forestier d’Athel Loren, en compagnie de son épouse, la belle Luthien. Il croyait avoir accompli son destin et goûtait au repos aux côtés de la gardienne de l’âme de Laethenia. Mais il se trompait.

 

  Un matin, Morai-Hegg lui apparut une ultime fois. Elle lui ordonna de rejoindre l’armée d’Avelorn au plus vite. Là, il devait retrouver un être de son sang, disparu peu de temps avant sa naissance, et y réaliser sa destiné.

  Lorindil obéit. Il embrassa sa compagne, et quitta pour toujours les vertes clairières d’Athel Loren…

 

 

  Le barde reste muet, quant au devenir du mage Lorindil. Curieux oubli, mystérieux récit inachevé que voilà !

  Les Elfes ignorent encore beaucoup de choses sur leur propre histoire ; non pas celle de leurs Rois, de leur guerre contre le Monde extérieur, mais celle, plus modeste, de leurs héros, véritables artisans de la culture elfique.

  Mais qu’importe ! Il existe d’autres voies que les parchemins de la Tour de Hoeth pour percer les secrets des plus illustres personnages d’Ulthuan, il en est même une transcendant le corps lui-même, séparant l’âme de son enveloppe pour un voyage à travers le temps et l’espace, le possible et la réalité…

  C’est ce voyage, ami lecteur, que je te propose d’effectuer. Laisse-moi te conduire à travers les brumes du passé jusqu’en la demeure de Lorindil l’exilé, en Athel Loren, et permets que je te narre ses exploits obscurs, et son combat face au Poids de son Destin…

 

 

A suivre...
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