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Biographie (1re partie)
Jeunesse et
�tudes
A l'�cole, Louis est un enfant calme, r�serv�. Il
travaille, il r�ve. Son professeur voudrait bien lui
faire perdre le d�faut de prononciation qui
l'afflige. Il chuinte et h�site en parlant.
En 1901, la trag�die frappe la famille Jouvet. Louis
Jouvet p�re est �cras� sous un rocher alors qu'il
supervisait le creusement d'un tunnel. Eug�nie am�ne
sa famille vivre avec elle chez son fr�re qui est
pharmacien � Rethel. Bient�t, Louis devra choisir
une profession, et toute sa famille entend bien qu'il
deviendra lui aussi pharmacien, comme son oncle. En
attendant, il poursuit ses �tudes au Coll�ge
Notre-Dame, o� le chanoine Morigny, passionn� de
th��tre, anime avec intransigeance la troupe du
coll�ge. Louis bient�t n�glige ses �tudes tellement
il est pr�occup� par cette nouvelle passion, et il
voudrait bien en faire sa carri�re. Mais sa famille
s'y oppose farouchement. Pour qu'on lui fiche la
paix, il se pliera � leur d�sir, tout en ayant la
ferme intention de consacrer tous ses temps libres �
son amour pour le th��tre. Apr�s un stage � Rethel
dans la pharmacie de son oncle, il peut enfin se
rendre, en 1904, � Paris pour poursuivre ses �tudes,
et sa passion...
Les d�buts
Son temps est partag� entre les stages en pharmacie et le th��tre amateur au sein du Groupe d'Action d'art. Jouvet participe � des repr�sentations th��trales, des r�citals de po�sie, mais prend aussi le temps de suivre les cours de l'Ecole nationale des Arts d�coratifs. Puis il fait une rencontre privil�gi�e, celle de L�on No�l qu'il approche apr�s un spectacle et dont il suivra les cours d'art dramatique jusqu'en 1910. L�on No�l ne m�nage pas son �l�ve, mais Jouvet l'aime et le respecte. Il lui devra beaucoup.
Tout en continuant de courir les cachets et de faire
un peu de tourn�e, il trouve le temps de tomber
amoureux de sa voisine d'en-face, Else Collin. Else
est une jeune Danoise qui travaille comme garde
d'enfants chez Jacques Copeau, � qui elle parle
souvent de Louis. Copeau caresse un projet de
th��tre, et il en parle � Louis Jouvet, apr�s l'avoir
vu jouer au Th��tre du Ch�teau-d'Eau, � l'insistance
d'Else. Une amiti� na�t instantan�ment entre ces
deux hommes qui partagent la m�me passion.
La guerre 14-18 New York La troupe s'installe, men�e � la baguette par un Jouvet maniaque qui ne tol�re aucune incartade et multiplie les amendes et les notes de service pour faire r�gner la discipline. Malheureusement le Vieux-Colombier n'obtient pas le succ�s escompt�, et bient�t Copeau op�re des changements au r�pertoire qui ne plaisent gu�re � Jouvet, ni � Charles Dullin, qui a lui aussi rejoint New York en 1918. Ils reprochent � Copeau d'avoir chang� la mission du th��tre, et d'avoir sacrifi� aux raisons �conomiques. Les relations sont de plus en plus tendues entre Copeau et Jouvet, et bient�t ils ne se parlent plus. Apr�s deux ann�es souvent difficiles, c'est le retour en France. Dullin a d�j� �t� cong�di�. Jouvet, trop indispensable, est toujours l�. Le Vieux-Colombier rouvre ses portes � Paris en 1920. Le r�le de Jouvet y prend de plus en plus d'importance, mais l'entente avec Copeau sur les questions artistiques est devenue impossible et il veut partir. C'est pourquoi il accepte en 1922 la direction technique de la Com�die des Champs-Elys�es, que lui propose Jacques H�bertot.
En 1924, Jouvet est maintenant seul aux commandes de
son th��tre et peut le g�rer � sa guise. Il engage
les acteurs que la fermeture du Vieux-Colombier vient
de lib�rer: Valentine Tessier, Romain Bouquet...
Les lignes directrices du th��tre de Louis Jouvet
reposent sur la primaut� du texte. Dans la
philosophie artistique de Jouvet, seule la pi�ce
compte: le texte, le public. L'acteur ne compte que
comme interm�diaire, comme ex�cutant, au service de
l'auteur et du public. Ses probl�mes, ses �tats
d'�me, Jouvet n'en a que faire. Il est dur,
intransigeant avec sa troupe, mais s'il les
'engueulent, c'est par amour du travail, pas pour le
plaisir...' D'ailleurs, il loge � la m�me enseigne.
Jouvet s'occupe plus du th��tre que de lui-m�me, et
toujours il place la grandeur du th��tre avant sa
gloire personnelle.
Jean
Giraudoux Le cin�ma parlant, qui vient de faire son apparition, fait d�sormais fureur et Louis Jouvet est sans cesse courtis� par les producteurs, mais toujours il refuse sous pr�texte qu'il n'a pas le temps. Ses responsabilit�s trop nombreuses au th��tre l'accaparent. Un grand succ�s en 1929, malgr� des relations tendues avec son acteur principal, Michel Simon, dont il appr�cie peu le talent, Jean de la Lune de Marcel Achard occupe la sc�ne de la Com�die tandis que Giraudoux pr�pare sa nouvelle pi�ce, Amphytrion 38. L'Amphytrion 38 de Giraudoux s'av�re un triomphe qui retentira bien au-del� des fronti�res de la France, et Jouvet-Giraudoux sont d�sormais c�l�bres. Mais si la carri�re de Louis Jouvet prend alors un essor �tourdissant, tout ne va pas pour le mieux dans sa vie priv�e. Il est d'abord tr�s affect� par la mort de sa m�re, puis par la rupture avec sa ma�tresse Lisa Duncan (une des Isadorables d'Isadora Duncan), avec qui il vivait depuis 6 ans. Jouvet le prend tr�s mal, mais le th��tre continue de remplir sa vie. Tout au long des cr�ations, il ne cesse de penser au jour o� il pourra enfin monter Moli�re. L'Ecole des femmes et Dom Juan l'obs�dent. Invit� � pr�senter une mise en sc�ne au th��tre Pigalle, il y monte Donogoo-Tonka de Jules Romains, avant de partir pour une tourn�e europ�enne qui le m�nera jusqu'� Vienne. De retour � Paris, il monte un nouveau Giraudoux, Judith. La pi�ce n'est pas assez claire � son go�t, il demande des retouches; peine perdue, la pi�ce est un �chec. Mais la production suivante, le Domino de Marcel Achard, conna�t un grand succ�s.
1932: Jouvet enfin se laisse convaincre de faire son
entr�e au cin�ma dans le Topaze de Marcel
Pagnol (r�alis� par Louis Gasnier), et se met ensuite
lui-m�me aux commandes d'une version film�e de
Knock. Dans Knock, il distribue dans
un petit r�le une toute jeune com�dienne qu'il a
remarqu�e quelques mois plus t�t � une r�ception.
C'est Madeleine Ozeray. Ils entameront bient�t
ensemble une grande aventure th��trale et amoureuse
qui durera 10 ans. Les deux pi�ces qu'il monte
ensuite auront peu de succ�s, La Margrave, et
Intermezzo. Mais Petrus, de Marcel
Achard, marche rondement. Puis c'est la pi�ce tant
attendue de Jean Cocteau qu'il met � l'affiche, La
machine infernale. Par l'entremise de Cocteau,
Jouvet rencontre alors pour la premi�re fois
Christian B�rard, dit B�b�, � qui il confie les
d�cors. C'est le d�but d'une longue et tr�s profonde
amiti�. B�rard devient le d�corateur attitr� de
Jouvet.
L'Ath�n�e (et le
cin�ma...) On lui offre la direction de la Com�die Fran�aise, qu'il refuse. (Il en refusera la direction � trois reprises.) Il ne veut pas avoir � transiger, � n�gotier, ou � faire des concessions � des soci�taires. Jouvet veut �tre le ma�tre absolu dans son th��tre. Il accepte cependant de faire au Fran�ais deux mises en sc�ne qui n'auront malheureusement pas tout le succ�s escompt�, et qui l'emp�cheront de participer au tournage de La grande illusion, o� il devait incarner Boieldieu.
1937: C'est Electre de Jean Giraudoux,
L'Impromtu de Paris, puis en 1938, le
Corsaire de Marcel Achard, grand succ�s, qui sera
n�anmoins la cause d'une brouille entre les deux
hommes, lorsque Jouvet apprendra par les journaux
qu'Achard a c�d� les droits cin�matographiques � un
producteur qui lui pr�f�re Charles Boyer dans le
r�le-titre. Mais d'autres projets de films viennent
s'offrir � Louis Jouvet: Entr�e des artistes,
et surtout H�tel du Nord qui conna�tra un
�norme succ�s et fera de lui une v�ritable star du
cin�ma. Ce qui pr�occupe le plus Louis Jouvet en cette fin de l'ann�e 1938, c'est de trouver un d�corateur pour la nouvelle pi�ce de Giraudoux, Ondine. Christian B�rard est peu inspir� par cette oeuvre et Jouvet doit chercher ailleurs. Les d�corateurs se succ�dent dans son bureau, mais rien ne lui convient. Finalement, Jouvet contacte Pavel Tchelitchew � New York. L'association co�tera une petite fortune � Jouvet qui n'a vraiment pas d'autres choix, mais il sera content des d�cors de Tchelitchew, et envisagera de retravailler avec lui. Tout en tournant les int�rieurs de La Charrette fant�me, Louis Jouvet, tenaill� par le trac, voit approcher la date de la premi�re, le 4 mai 1939. Mais la pi�ce est un triomphe, la salle ne d�semplit pas et Madeleine Ozeray obtient un grand succ�s personnel. Les vacances arrivent. Jouvet ferme l'Ath�n�e pour l'�t�. Il a promis d'�tre au festival de Cannes fin-ao�t pour d�fendre La charrette fant�me qui y sera pr�sent�. Il reprendra Ondine en septembre. Mais tout l'�t�, la guerre couve. D�but septembre, c'est la mobilisation g�n�rale et l'entr�e en guerre de la France. Quand il rentre � Paris, Jouvet doit se rendre � l'�vidence. Presque tout son personnel masculin est mobilis�. Il doit fermer temporairement son th��tre. En mars 1940, le tournage de Volpone, interrompu l'ann�e pr�c�dente faute de fonds, peut enfin reprendre. Jouvet aura beaucoup de plaisir � faire ce film, o� il partage la vedette avec son cher ami Charles Dullin, ainsi que Fernand Ledoux avec lequel il aime bavarder. Le jour m�me o� d�bute le tournage, Ondine reprend l'affiche � l'Ath�n�e.Cependant les Parisiens n'ont pas le coeur au th��tre en cette p�riode de guerre. Les recettes sont insuffisantes, et Jouvet se voit contraint de retirer Ondine de l'affiche le 15 mai. En juin, les Allemands sont � Paris. L'armistice est sign�e. Jouvet se voit bient�t interdit de monter Giraudoux et Romains, on lui sugg�re plut�t Heinrich von Kleist. Dans ces conditions, il pr�f�re garder son th��tre ferm� ind�finiment. Avec Madeleine Ozeray, il va se reposer � Aix-en-Provence. Ils y rencontrent Max Oph�ls et projettent avec lui de tourner en Suisse une version film�e de L'�cole des femmes. Mais Louis Jouvet a aussi d'autres projets en t�te, et lors d'un s�jour � Paris en septembre 1940, il en parle avec Marcel Karsenty. Karsenty avait organis� l'ann�e pr�c�dente la tourn�e sud-am�ricaine de la Com�die-Fran�aise. Jouvet, qu'on avait aussi d�j� invit� � faire une tourn�e l�-bas, avait d�clin� jusqu'� pr�sent faute de temps. Mais maintenant partir lui semble la seule voie possible. Karsenty accepte de s'occuper de toute l'organisation. Interdit d'enseignement par l'occupant, Louis Jouvet donne le 7 d�cembre 1940 son dernier cours au Conservatoire d'art dramatique. Dans le mois qui suit, il tente de recruter les acteurs qui l'accompagneront. Certains voient d'un tr�s mauvais oeil ce d�part, comme si Jouvet abandonnait le navire. Mais Jouvet suit son id�e, r�gle l'int�rim � l'Ath�n�e, prend les dispositions pour que ses appartements soient maintenus pendant son absence et obtient un laissez-passer de libre circulation jusqu'au 31 mars 1941. Le 2 janvier, il part pour la Suisse, mais d�s le d�but du tournage de l'Ecole des femmes, il s'aper�oit des v�ritables relations de Madeleine et Oph�ls qui entretiennent depuis quelques temps une liaison secr�te. Bless�, Louis Jouvet abandonne le projet. Le film est arr�t�. La rupture est imminente, et Jouvet songe un moment � trouver une autre actrice (et une autre compagne), mais Madeleine d�cide finalement de rester avec lui. A Vichy, Karsenty s'est affair� � obtenir les permissions et les bons qui permettront le d�part pour l'Am�rique du Sud. C'est ainsi que Jouvet quitte Lyon le 26 mai 1941, avec 25 acteurs, 1 secr�taire, 2 machinistes, 1 directrice de sc�ne, 1 r�gisseur, 1 costumi�re, et Marcel Karsenty qui s'occupe de tout (th��tres, abonnements, relations publiques, location, publicit�, etc.), Jouvet ne voulant se consacrer qu'aux r�p�titions. Ils apportent aussi avec eux 34 tonnes de mat�riel (d�cors, costumes et accessoires) et de bagages. La troupe quitte Lisbonne sur le Bag� en direction de Rio de Janeiro le 6 juin 1941. Ils sont sens�s revenir en octobre... |