EXPOSITION

DES PRODUITS DE L'INDUSTRIE FRANÇAISE EN 1839.

RAPPORT

DU JURY CENTRAL.


SECTION IV.
INSTRUMENTS DE MUSIQUE.
M. Savart, rapporteur.


Considérations générales.

La facture des instruments a fait de grands progrès depuis 1834 : les pianos à queue, les pianinos, les flutes, les instruments à vent en cuivre et les instruments à archet ont présenté des améliorations qu'il ne semblait pas qu'on pût faire dans un laps de temps de cinq années. C'est surtout par les perfectionnements de détail, par la précision du travail, par l'entente plus complète du mécanisme et du rôle de chaque partie des instruments, que les facteurs se sont généralement fair remarquer. En voyant, dans les salles de l'exposition, un si grand nombre d'instruments de musique : huit grands orgues, cent quatre-vingt-sept pianos, plus de soixante instruments à archet, et une quantité considérable d'instruments à vent de toute nature, on était, au premier abord, porté à penser que les jurys d'admission s'étaient montrés trop peu sévères, et que beaucoup de ces produits n'auraient pas dû figurer à l'exposition ; mais, à un examen plus attentif, il était facile de reconnaître que, parmi ces produits, bien peu étaient médiocres, et que le plus grand nombre était fort remarquable.

L'essai, la comparaison des instruments de musique présente de grandes difficultés ; il en est toujours ainsi lorsque nos jugements reposent sur les impressions d'un seul de nos sens. La commission a donc dû s'entourer des lumières de compositeurs et d'artistes habiles, et ell a demandé l'adjonction de MM. Berton, Auber, Baillot et Galay, dont la grande réputation et le talent bien reconnu nous dispensent de tout autre éloge. Tous les jugements prononcés l'ont été avec leur concours, et toujours à la majorité des voix, très-fréquemment à l'unanimité.

En 1827, les instruments de musique avaient été essayés dans les salles mêmes de l'exposition, en présence du public ; en 1834, on les avait portés dans les salles du Louvre, et leur examen avait été fait avec un plus grand soin ; mais les noms des facteurs, inscrits sur les instruments, étaient restés à découvert, et, par conséquent, ils étaient connus des membres de la commission. Cette année, nous avons dû satisfaire aux voeux du plus grand nombre des exposants , surtout des facteurs de pianos , qui demandaient que les noms nous restassent inconnus, et, par conséquent, que le jugement portât principalement sur les effets sonores, but final de tout instrument de musique.

Si cette manière de procéder présentait quelques inconvénients, on ne peut pas se dissimuler qu'elle offrait aussi de grands avantages. En effet, à une époque où la théorie de la construction des pianos n'est pas faite, ou les facteurs sont partagés d'opinion presque sur tous les points de leur art, notamment sur la disposition du mécanisme que les uns placent en dessus des cordes, et les autres en dessous ; sur la disposition des sommiers et des résistances à opposer au tirage des cordes ; sur celle des tables, sur celle des étouffoirs que les uns placent en dessous des cordes, les autres en dessus, que les uns font simples et les autres à double tête ou même doubles, l'un en dessus, l'autre en dessous des cordes : à une pareille époque et dans un tel état de l'art, et surtout en considérant que des instruments de dispositions très-diverses paraissent donner les mêmes résultats, il semble que la marche proposée par les facteurs et adoptée par la commission, de juger principalement d'après les effets sonores, était préférable à toutes les autres.

L'examen des instruments a eu lieu dans les salles du palais Bourbon ; les noms des facteurs ont été converts en l'absence des membres de la commission, et un numéro a été placé sur chaque instrument ; un ou deux commissaires, pris parmi les facteurs les plus anciens, sont constamment restés présents aux épreuves, afin qu'ils pussent constater et dire à leurs confrères que la plus grande loyauté avait constamment présidé à nos essais. Ce sont ces délégués qui ont, dans tous les cas, découvert eux-mêmes les noms des facteurs dont les instruments avaient paru dignes d'être placés en première ligne.


§ 1er. INSTRUMENTS A CORDES.

Pianos.

Les pianos, tant par leur forme que par leurs dimensions et la qualités des sons, peuvent être divisés en quatre classes : en pianos à queue, pianos carrés, pianos droits à cordes obliques, et pianinos, qui sont aussi des pianos droits, mais à cordes verticales. En outre, chacune de ces quatre classes peut encore être subdivisée en deux autres, attendu que pour chacune l'instrument peut être à deux ou à trois cordes.

Soixante-sept facteurs de pianos se sont présentés à l'exposition ; nous avons à demander des récompenses pour vingt-sept d'entre eux. Cent cinquante-un pianos ont été soumis à nos épreuves ; cent quatre-vingt-sept étaient dans les salles de l'exposition.

Tous ces instruments ont été essayés par M. Auber, qui s'est prêté, avec une patience admirable, que l'amour de la justice peut seul expliquer, à tous les essais que la commission pouvait désirer. D'abord les pianos d'une même espèce étaient essayés d'une manière générale, afin de mettre de côté tout ce qui paraissait d'un ordre inférieur ; puis tous ceux quui avaient paru mériter un exament spécial étaient placés à côté les uns des autres, et on les comparait entre eux autant de fois qu'il était nécessaire pour arriver à les classer par ordre de mérite. Il nous suffira de dire que la comparaison de deux pianos a quelquefois duré plus d'une heure.

Pianos à queue.

Vingt-six pianos à queue ont été soumis à notre examen : cinq ou six seulement ont été reconnus pour de médiocres instruments ; la classification des autres a demandé un temps fort long et des épreuves variées de bien des manières. Nous devons même dire que, avec le désir de ne faire porter les récompenses que sur six de ces instruments, nous n'avons pu nous empêcher d'en conserver un septième, tant il nous paraissait digne de rester sur les rangs.

Voici les noms des facteurs dans l'ordre où nous les avions rangés sans les connaître :

MM.Érard,
Soufleto,
Pleyel,
Kriegelstein et Plantade,
Boisselot, de Marseille,
Roselen.

On peut remarquer que six noms seulement figurent dans cette liste, tandis que sept pianos avaient été réservés ; cela provient de ce que M. Érard avait présenté deux pianos à queue, et de ce que tous deux ils ont été mis tout d'abord, et à l'unanimité, en première ligne, sans qu'ils nous fût possible de donner la préférence à l'un sur l'autre.

Pianos carrés à trois cordes.

Sur cinquante-trois pianos carrés que la commission a entendus, vingt-deux ont d'abord été mis à part comme étant les meilleurs ; puis ensuite, par des comparaisons successives, on est arrivé à n'en conserver que sept qui ont été classés par ordre de mérite ; et les noms des facteurs ayant été découverts, la liste suivante s'est trouvé formée :

MM.Érard,
Kriegelstein,} sur la même ligne.
Pleyel, ...
Wolfel,
Pape,
Gaidon,
Herz.

Le piano de M. Érard, d'un patron un peu plus grand que celui des pianos carrés ordinaires, l'emportait de beaucoup par l'intensité du son. La comparaison des pianos de Mm. Kriegelstein et Pleyel a duré plus d'une heure et demie ; quoique ces deux instruments fussent très-différents par la qualité du son et par la construction, celui de M. Kriegelstein étant à frapper en dessus, la commission n'a pu se résoudre à placer l'un avant l'autre.

Pianos carrés à deux cordes.

Onze pianos carrés à deux cordes ont été présentés à notre examen : trois ont été distingués. Celui qui a paru mériter d'être mis en première ligne est de M. Pape, le second, de M. Busson, et le troisième de M. Côte.

Pianos droits à cordes obliques.

Vingt-sept pianos de cette espèce opnt été entendus et comparés ; nous avons pensé qu'il suffisait d'en réserver quatre qui sont, en les rangeant toujours par ordre de mérite, de MM . Érard, Mermet, Grus et Mercier.

Il est encore à remarquer ici que le piano de M. Érard était plus grand que tous ceux du même genre, et qu'il l'emportait de beaucoup sur les autres par l'intesité et la rondeur du son.

Pianinos ou pianos droits à cordes verticales.

Ces instruments, qui étaient encore très-imparfaits en 1834, ont fait, depuis cette époque, des progrès immenses ; on est parvenu à leur faire produire des sons qui, pour l'intensité et la rondeur, peuvent rivaliser avec ce qu'on fait de mieux en pianos droits à cordes obliques.

Trente-quatre de ces instruments ont été soumis à notre examen : quelques-uns étaient à trois cordes, le plus grand nombre n'en avait que deux.

Parmi ceux qui étaient à trois cordes, deux ont paru supérieurs à tous les autres ; celui qui avait été mis au premier rang était de M. Schoen, le second, de M. Koska.

Parmi ceux qui étaient à deux cordes, quatre ont été distingués : le premier était de M. Pleyel, le second de MM. Hatzenbuhler et Faure, le troisième de M. Eslanger, et le quatrième de M. Kriegelstein.

Le pianino de M. Pleyel était extrêmement remarquable par la rondeur, la force et l'égalité des sons.

Tel est l'ordre dans lequel nous avons pu, sous le rapport des qualités du son, classer les pianos de chacune des quatre classes ; mais maintenant il est claire que les récompenses à accorder doivent aussi porter sur la bonne confection de ces instruments, sur le fini du travail, sur les perfectionnements apportés à la construction, et qu'il ne faut pas non plus négliger l'importance et la durée des établissements. La listte des récompenses à donner devra donc contenir d'autres noms que ceux des facteurs déjà cités jusqu'ici ; et il pourra même arriver que des facteurs obtiennent des récompenses plus élevées que celles auxquelles ils auraient eu droit si on n'avait eu égard qu'au rang occupé par leurs instruments sous le point de vue de la qualité des sons.


RAPPEL DE MÉDAILLES D'OR.

M. PAPE, à Paris, rue des Bons-Enfants, 19.

M. Pape a exposé un piano à queue, plusieurs pianos en forme de console et de guériodon, un piano vertical, deux pianos carrés, l'un à deux, l'autre à trois cordes.

Plusieurs de ces instruments étaient à frapper en dessus et présentaient une disposition nouvelle de la table d'harmonie et du chevalet. Le piano carré à deux cordes de M. Pape a été placé au premier rang de ce genre d'instruments ; il se faisait surtout remarquer par le grand volume des sons qu'il émettait.

Les pianos en forme de console et de guéridon que M. Pape a construits, en vue de réduire, autant que possible, les dimensions des pianos, n'ont pas dû être comparés avec d'autres pianos, puisqu'ils sont faits dans un but déterminé, celui d'occuper moins de place et d'avoir une forme gracieuse. Ils éteaint remarquables par la disposition du mécanisme, entièrement de l'invention de M. Pape, et par la beauté des sons.

Les instruments qui sortent des ateliers de cet habile artiste sont d'une exécution très-soignée. M. Pape occupe cent-quatre-vingts ouvriers et confectionne quatre cents piano par an ; il a obtenu la médaille d'or en 1834, le jury l'en juge aussi digne qu'à cette époque.

M. PLEYEL, à Paris, rue Rochechouart, 20.

Deux pianos à queue, dont l'un, de petit format, a mérité d'être placé en troisième ligne, un piano carré qui a obtenu le deuxième rang, deux pianinos dont l'un a été jugé supérieur à tous les instruments du même genre. La fabrique dirigée par M. Pleyel est la plus considérable de Paris ; elle confectionne de huit à neuf cents pianos par an et occupe trois cents ouvriers ; elle est digne, sous tous les rapports, qu'on lui accorde le rappel de la médaille d'or qui lui a été donnée aux précédentes expositions.

MM. ROLLER et BLANCHET, à Paris, rue Hauteville, 16.

Cette maison a exposé deux pianos droits à cordes obliques, un piano à queue à deux cordes et un piano à queue vertical. C'est à MM. Roller et Blanchet qu'on doit la création de ce genre de pianos qu'on appelle droits et dans lesquels les cordes sont obliques ; ces habiles facteurs se maintiennent toujours au premier rang, et leur établissement est aussi digne que jamais de la médaille d'or qui lui a été accordée en 1834.


NOUVELLE MÉDAILLE D'OR.

M. Pierre ÉRARD, à Paris, rue du Mail, 13 et 21.

Neveu du célèbre Sébastien Érard, M. Pierre Érard à pris à tâche de soutenir la grande réputation de l'établissement que son oncle avait créé et qu'il lui a légué. Cette tâche difficile, M. Érard l'a dignement remplie : ses pianos, dans trois genres différents, ont été mis en première ligne, et, nous devons le dire, leur supériorité était marquée.

Les instruments qui sortent des ateliers de M. Érard se distinguent non-seulement par la qualité des sons, mais encore par le fini du travail, par la disposition du mécanisme et par la solidité de toutes les parties qui les constituent.

Le jury décerne une nouvelle médaille d'or à M. Pierre Érard.


RAPPEL DE MÉDAILLE D'ARGENT.

M. PFEIFFER, à Paris, rue Montmartre, 132.

M. Pfeiffer, l'un de nos plus anciens et de nos plus habiles facteurs, a exposé un piano carré à trois cordes dans lequel il a cherché à diminuer, autant que possible, la hauteur des sommiers et l'épaisseur du fond, afin d'avoir plus de légèreté sans perdre, d'ailleurs, de la solidité. Cet instrument a paru fort bon et habilement disposé.

Le jury accorde à M. Pfeiffer le rapel de la médaille d'argent qu'il a obtenue à l'exposition de 1827.


NOUVELLES MÉDAILLES D'ARGENT.

MM. KRIEGELSTEIN et PLANTADE, à Paris, boulevard Montmartre, 8.

Ils ont présenté un piano à queue qui a mérité d'être placé en quatrième ligne ; deux pianos carrés, dont l'un a été mis au second rang, et un pianino placé au quatrième rang.

Les instruments qui sortent de cet établissement se font remarquer par leur parfaite exécution. Le piano carré de M. Kriegelstein était à frapper en dessus, au moyen d'un mécanisme simple qui ne nuit en rien à la facilité du jeu de l'instrument ; une disposition analogue s'observait dans le piano à queue, où des étouffoirs doubles empêchaient complétement les sons de persister après que la touche avait été abandonnée.

L'établissement de MM. Kriegelstein et Plantade avait obtenu une médaille d'argent en 1834 ; le jury pense qu'il mérite une nouvelle récompense du même genre.

MM. SOUFLETO et Cie, à Paris, rue du Faubourg-Saint-Martin, 174.

Ils ont exposé deux pianos droits à cordes obliques et un piano à queue qui a été jugé digne d'occuper la première place après ceux de M. Érard, et dans lequel on observe plusieurs dispositions nouvelles, notamment une table voûtée et un fond consistant en un barrage extrêmement léger ; ce qui ne paraît cependant pas nuire à la solidité de l'instrument.

M. Souflete a aussi remplacé la cheville qui sert de guide à la touche et sur laquelle elle se meut, par un axe horizontal porté par une petite tige verticale, le tout faisant système et ayant l'aspect de la lettre T, modification qui paraît heureuse ; can, dans la disposition ordinaire, la mortaise qui rec,oit la cheville finit toujours par s'élargir, et il en résulte un mouvement latéral de la touche et de l'échappement qui peut donner naissance à un bruissement désagrèable, et, en outre, nuire à la pureté du son. Néanmoins nous ferons observer que c'est à l'expérience à prononcer sur la valeur de cette innovation.

M. Soufleto avait obtenu une médaille d'argent en 1834 pour des pianos droits faits à l'instar de ceus de M. Roller dont il a été l'élève ; le jury, considérant que son piano à queue a été mis au second rang, lui décerne un nouvelle récompense du même ordre.

MM. WOLFEL et LAURENT, à Paris, rue de l'Université, 25.

Ils ont exposé un piano à queue, deux pianinos et un piano carré à trois cordes à frapper en dessus qui a été mis au troisième rang des instruments de cette espèce.

Ces facteurs, dont les instruments se sont fait remarquer par leur belle exécution, ont apporté plusieurs modifications dans la disposition de la table d'harmonie et du chevalet qui la met en commmunication avec les cordes, ainsi que dans celle des mécanismes des divers genres de pianos.

Récemment établis, MM. Wolfel et Laurent occupent déjà dix-huit à vingt ouvriers.

Le jury les juge dignes de la médaille d'argent.

MM. BOISSELOT et fils, à Marseille.

Ils ont établi à Marseille une fabrique dans laquelle ils occupent soixante-dix ouvriers qui confectionnent deux cent cinquante à trois cents pianos par an, don un grand nombre est exporté en Italie. Parmi les instruments que ces facteurs ont exposés, un piano à queue d'un très-petit patron, a soutenu honorablement la comparaison avec les pianos à queue des meilleurs maîtres et a mérité d'être placé le cinquième parmi les instruments de cette espèce, qui, comme nous l'avons déjà dit, étaient presque tous d'une qualité supérieure.

Le jury décerne un médaille d'argent à MM. Boisselot et fils.


RAPPEL DE MÉDAILLE DE BRONZE.

M. WETZEL, rue des Petits-Augustins, 9.

Il fabrique des pianos de tous genres qu'il livre à des prix très-modérés. Honoré en 1827 d'une médaille de bronze qui lui fut rappelée en 1834, le jury lui accorde de nouveau le rappel de cette disinction.


NOUVELLE MÉDAILLE DE BRONZE.

M. GAIDON jeune , à Paris, rue Montmartre, 121.

Il expose deux pianos carrés à trois cordes et à sommier prolongé, disposition de son invention. Les instruments qui sortent des ateliers de M. Gaidon sont d'un travail bien soigné ; ils préentent beaucoup de solidité et offrent, par conséquent, des garanties de durée. L'un des deux pianos carrés exposés par M. Gaidon a mérité d'être placé en cinquième ligne, et c'est un grand honneur dans un concours où l'on ne comptain pas moins de cinquante-trois pianos.

M. Gaidon avait obtenu une médaille de bronze en 1834 ; le jury lui décerne une nouvelle récompense du même genre.


MÉDAILLES DE BRONZE.

M. MERCIER, à Paris, rue Basse-St-Pierre, 4.

Ce facteur, l'un des meilleurs élèves de M. Roller, construit des pianos droits à cordes obliques ; il a exposé deux de ces instruments, qui se faisaient remarquer par le fini du travail, par la beauté et la force des sons, par la disposition ingénieuse et en même temps simple du mécanisme, ainsi que par un système de doubles étouffoirs entièrement de son invention. Cet artiste distingué occupe vingt-sept ouvriers et construit cent vingt pianos par an. L'un de ses pianos droit, présenté seul au concours, à été placé au quatrième rang.

Le jury décerne une médaille de bronze à M. Mercier.

M. SCHOEN, à Paris, rue Richer, 42.

Il expose un piano carré à trois cordes et un pianino à trois cordes qui a mérité d'être placé le premier des instruments de cette espèce. Récemment établi, il confectionne par an trente-six pianos et occupe douze ouvriers tant dans ses ateliers qu'à l'extérieur. M. Schoen mérite à tous égards la médaille de bronze que le jury lui décerne.

M. MERMET, élève de Roller, à Paris, rue Hauteville, 43.

M. Mermet fabrique des pianos droits à cordes obliques ; établi seulement depuis quinze mois, ils a déjà construit trente de ces instruments. Celui qui a concouru a mérité d'être placé en première ligne après le piano de M. Érard. M. Mermet est digne de la médaille de bronze que le jury lui décerne.

M. KOSKA, à Paris, rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, 14.

Il expose un piano carré à trois cordes et un pianino également à trois cordes qui a obtenu le second rang au concours. M. Koska est un habile ouvrier qui apporte beaucoup de soins dans la construction de ses instruments. Son pianino se faisait remarquer par la disposition du clavier et des marteaux qui forment un système qu'on peut enlever et replacer à volonté, et aussi par plusiers perfectionnements de détail. M. Koska occupe ordinairement quatre ouvriers ; il confectionne ses caisses et ses mécanismes.

Le jury décerne une médailel de bronze à M. Koska.

M. CÔTE, à Paris, rue Grange-Batelière, 21.

Il expose deux pianos carrés à frapper en dessus ; celui de ces instruments qu'il a présenté au concours était à deux cordes, il a été placé au troisième rang ; mais il aurait mérité d'être placé au deuxième rang, si son clavier n'avait pas paru un peu dur, défaut que M. Côte connaissait, auquel il pouvait facilement remédier et qu'il n'avait laissé à son instrument que sur de mauvaises indications qui lui avaient été données.

M. Côte est un artiste habile, qui a imaginé le mécanisme à frapper en dessus qui est dans ses pianos, et diverses dispositions qui semblent heureuses ; c'est ainsi qu'il a mis de doubles étouffoirs aux cordes qui forment les trois octaves les plus graves et qu'il a établi un mécanisme au moyen duquel on peut étouffer le son de l'une des deux cordes de chaque touche tandis qu'on accorde l'autre.

Le jury décerne une médaille de bronze à M. Côte.

MM. HATZENBUHLER et FAURE, à Paris, faubourg Saint-Antoine, 63.

Ils exposent un piano carré, un piano à queue, deux pianinos et un piano droit. L'un des pianinos que ces fabricants avaient mis au concours a mérité d'être placé le deuxième, et, en conséquence, le jury décerne une médaille de bronze à MM. Hatzenbuhner et Faure.

M. BUSSON, à Paris, rue Mandar, 3.

Ce fabricant à exposé un piano carré à deux cordes et à frapper en dessus. Il occupe habituellement dix ouvriers et confectionne trente pianos par an. Le piano qu'il a exposé, et qui a mérité d'être placé au second rang, est une imitation fidèle des pianos de M. Côte, chez qui cet artiste a travaillé pendant plusieurs années.

Le jury accorde à M. Busson une médaille de bronze pour le rang honorable que son piano a obtenu au concours.

M. BERNHART.

Cet artiste distingué occupe soixant-dix ouvriers et confectionne, chaque année, trois cents pianos de tous genres qu'il livre à des prix très-modérés. Honoré de la médaille de bronze en 1827 et en 1834, le jury le juge digne d'une nouvelle récompense du même genre.


MENTIONS HONORABLES.

M. CLUESMAN, à Paris, rue Favart, 4.

Il expose un piano droit, un piano carré et un pianino ; il occupe habituellement trente ouvriers et confectionne environ cent pianos par an. M. Cluesman avait obtenu une mention honorable aux précédented expositions, le jury lui décerne une nouvelle récompense du même ordre.

M. GIBAUT, à Paris, rue de la Chaussée-d'Antin, 38. bis.

Il expose deux pianos droits à cordes obliques. Cet artiste est le premier qui ait confectionné des pianos droits dans lesquels toute la partie antérieure s'ouvre à charnières ; il fabrique environ cent ceinquante pianos par an et il les livre à des prix très-bas. Le jury décerne une mention honorable à M. Gibaut.

M. GRUS, à Paris, rue Saint-Louis, au Marais, 60.

Un piano carré, un piano droit qui a mérité d'être placé le troisième au concours de ce genre d'instruments.

M. Grus est digne de la mention honorable que le jury lui décerne.

M. ESLANGER, rue Montorgueil, 8.

Un piano carré, un pianino placé en troisième ligne au concours. Cet artiste confectionne vingt à vingt-cinq pianos par an ; il occupe huit ouvriers.

Le jury décerne une mention honorable à M. Eslanger.

M. HERZ, rue de la Victoire, 38.

Un pianino, un piano à queue, un piano carré à trois cordes, qui a mérité d'être placé au sixième rang de ce genre d'instruments.

M. Hertz occupe quarante-cinq ouvriers et mérite à tous égards que le jury lui décerne une mention honorable.

M. ROSELLEN, à Paris, passage de l'Industrie, 9.

Un piano carré, un pianino et un piano à queue, qui a été placé le sixième de ce genre d'instruments. C'est à ce titre que le jury décerne un mention honorable à M. Rosellen.

M. ROGER, à Paris, rue de Seine-Saint-Germain, 32.

Il expose un piano carré, à trois cordes, et un pianino dont le clavier est à bascule et se relève comme le tablier d'un secrétaire, ce qui fait que l'instrument occupe très-peu de place. M. Roger est un artiste distigué qui apport beaucoup de soins dand la confection de ses instruments, qu'il livre cependant à des prix modérés. Le jury lui décerne une mention honorable.


Procédés pour faciliter l'accord des pianos.

A diverses époques, les facteurs de pianos ont cherché à perfectionner les procédés pour accorder ces instruments. Tout le monde sait que cet accord se fair au moyen de chevilles d'acier, enfoncées dans l'un des sommiers, et autour desquelles les cordes sont enroulées. Ce procèdé présesente sans doute de graces inconvénients ; mais il offre cet avantage inappréciable que la corde est fixée bien plus solidement que par tous les moyens qu'on a tenté de lui subtituer ; et à cette solidité se trouve liée l'intensité du son.

Déjà en 1827, M. Cluesman avait présenté des pianos où la pointe d'attache était remplacée par un levier auquel la corde était fixée et qu'on faisait marcher par une vis de pression.

Antérieurement, Sébastien Érard avait tenté d'accorder les pianos par des vis de rappel, procédé qui était employé bien avant lui dans certains luths, dans les guitares, etc. Ce célèbre facteur , si bon juge en cette matière, avait cru devoir renoncer à ce procédé. Son neveu, Pierre Érard, a présenté un pianino où l'accord se fair par un mécanisme analogue ; seulement un pignon mû par une vis sans fin a été substitué à la vis de rappel. Cet disposition a ainsi été employée dans les guitares, et elle l'est habituellement dans les contre-basses. M. Boisselot de Marseille a également exposé des pianos où ce même mécanisme a été appliqué. M. Pfeiffer (Émile) de Versaillles a employé, mais seulement pour regler l'accord, une vis de pression dont le bout appuie sur la portion de la corde qui est comprise entre le sillet et la cheville, ce qui permet de faire monter ou baisser le son avec facilité, sans craindre les secousses qu'on observe fréquamment quand on n'emploie que la cheville seule. M. Pape a obtenue le même résultat par un procédé encore plus simple, au moyen d'une vis qui entre plus ou moins dans le sommier et dont le dessous de la tête presse sur la corde. Enfin M. Roller a exposé des pianos dans lesquels on trouve une disposition fort ingénieuse pour accorder à l'oeil, à l'aide d'un repère, une fois que l'instrument a été réglé par un habile accordeur. Ce mécanisme est de l'invention de M. Lepère, architecte fort distingué.

On peut faire sur tous ces procédés les mêmes observations, excepté peut-être sur celui de M. Pape : 1° s'il casse use corde, il arrivera presque toujours qu'on ne pourra plus jouer, parce que les pièces qui servent à tendre la corde, qui sont devenues libres, pourront frapper l'une contre l'autre et donner naissance à un bruit désagréable, qui se produira encore, même sans qu'une corde soit cassée, lorsque le mécanisme sera un peu usé ; 2° la corde n'étant pas fixée si solidement, par ses extrémités, qu'elle l'est par la disposition ordinaire, l'intensité du son est notablement diminuée. 3° Le prix de l'instrument est toujours beaucoup augmenté.

Malgré ces observations, comme il serait très-important de perfectionner le procédé actuellement employé pour accorder le piano, le jury n'aurait pas hésité à décerner une mention honorable aux facteurs qui viennent d'être cités, si tous, hors un seul, n'étaient déjà récompensés à d'autres titres. M. Pfeiffer (Émile) de Versailles, faisant seul exception, le jury lui accorde une mention honorable pour le procédé qu'il a imaginé.

Quant au système ingénieux de M. Lepère, le jury pense qu'il est nécessaire que le temps et l'éxperience prononcent sur sa valeur.


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