Pour ses accusations vraies
ou fausses
Olenghankoy brûle
Joseph Kabila
A l'élection
présidentielle, Kamerhe affrontera Olenghankoy… celui que le
maréchal Mobutu qualifiait de " dangereux "
Joseph Olenghankoy, ancien
ministre des Transports et Communications et président des
Forces Novatrices de l'Union Sacrée (Fonus) a récemment
défrayé la chronique politique. Ses propos diffamatoires
et vertement outrageants vis-à-vis du Président de la
République, sur les antennes de CCK/TV - dont le
Vice-président Jean-Pierre Bemba est le propriétaire -
ont largement fait le tour de Kinshasa, de certaines contrées du
pays, voire des capitales occidentales, via l'internet.
J'ai eu le privilège, sous la Deuxième République,
d'entretenir un fréquent et fructueux commerce politique avec
les acteurs de premier plan. Je me suis intéressé
notamment à Olenghankoy, sans toutefois le fréquenter.
Ses pas décisifs - comme les premiers - sur la scène
politique, Joseph Olenghankoy les a accomplis, sous les phares de
Salongo. Ses premiers balbutiements, ses propos péremptoires et
décousus mais enfammés à la Conférence
Nationale Souveraine (Cns), Salongo les a rapportés aussi
régulièrement que possible dans ses colonnes. Au sein de
cette classe politique faisandée, dépourvue du soutien du
peuple, Olenghankoy s'était choisi deux parrains, deux
alliés pour entrer dans la cour des grands: M. Tshisekedi et
l'Union Sacrée de l'Opposition Radicale et Alliés
(Usoral).
Pas bête mais plutôt
dangereux
Dans son combat contre l'Usoral, Mobutu avait fini par s'accommoder des
actes et discours de Tshisekedi,considéré aux yeux de
l'opposition comme l'opposant le plus irréductible. Dans
l'opinion, le leader de l'Udps apparaissait comme un " mythe politique
", une sorte de " démiurge ", capable d'opérer des
miracles dans l'enfer socio-économique congolais, une fois au
pouvoir.
Pourtant, ce n'est pas tant le populaire Tshisekedi que Mobutu Sese
Seko redoutait, un particulier. Pour preuve, quand il m'arrivait de
faire avec le Chef de l'Etat la comptabilité, l'inventaire voire
l'analyse des actions de l'Usoral, Mobutu me rétorquait : " Je
connais parfaitement Tshisekedi… " Mais, c'est le " Stop "
(Secrétariat Technique de l'Opposition), le " brain-trust " de
l'Usoral qui donnait des insomnies à Mobutu. Avec le " Stop ",
dont les animateurs étaient formés essentiellement des
jeunes turcs, sous la conduite de Birindwa, efficaces par leurs
initiatives et leurs actions, Mobutu n'avait pas la même
assurance, ni la même appréciation. Dans les sillages du "
Stop ", il y a eu des hommes, dont les propos et les actions politiques
faisaient mal à l'ancien Chef de l'Etat. De Olenghankoy qui, de
part ses origines tribales, lui rappelait peut-être P.E Lumumba,
en moins charismatique mais de même stature intellectuelle, il
avait coutume de me dire : " Pas bête ce garçon tetela,
mais dangereux ". Pas bête, parce que Olengankoy, cet illustre
inconnu, très jeune, avait fini par se faire un nom aux
côtés des grands. Dangereux, parce que le président
des Fonus, " mangeant à tous les râteliers ",
jusqu'à fréquenter alors et la famille politique et la
famille biologique de Mobutu, en savait un peu trop… Tout au long de la
Cns, Olenghankoy a été constamment la risée des
intellectuels et des journalistes. On s'est gaussé de son
ignorance et de ses gaffes, mais il a fini par s'imposer à
travers les " villes mortes ", dont il assumait la paternité…
Comment cet homme simple - d'aucuns diraient " simplet " a-t-il
pu devenir, en ces années de braise, " l'enfant terrible
de l'opposition radicale ", jusqu'à entrer au gouvernement de
transition, en qualité de ministre des Transports et
communications ? A tous ces titres, Olenghankoy en aura ajouté
un autre. Celui d'être sous la transition issue de Pretoria, le
premier leader politique à avoir publiquement dit du mal -
beaucoup de mal - de Joseph Kabila. Pas bête donc ce
garçon tetela, mais dangereux, comme le furent ces
ancêtres à l'époque de Léopold II, sous
l'Etat indépendant du Congo. Ces propos prophétiques se
sont vérifiés, tout au long du parcours politique du
président des Fonus, avec Mobutu, avec Tshisekedi, avec
Laurent-Désiré Kabila et finalement avec Joseph Kabila.
Tshisekedi en sait quelque chose
Son " aura ", Olenghankoy l'a acquis à l'ombre et au nom du
farouche et mythique opposant politique de Mobutu. C'est Tshisekedi,
peut-on dire, qui fut le mentor politique de Olenghankoy sans toutefois
l'avoir été matériellement. Au lendemain du 24
avril 1990, date qui consacra la mort du Mpr-Parti-Etat, il fallait
insulter Mobutu, tenir les propos les plus invraisemblablement
diffamatoires sur son compte et enfin s'allier à Tshisekedi,
pour jouir d'une certaine considération auprès de la
majeure partie de l'opinion kinoise. Pas plus difficile que cela. Et
Olenghankoy a retenu la leçon et intériorisé la
pratique.
En 1998, l'Afdl vole de victoire en victoire. A Kinshasa, Tshisekedi
nommé Premier ministre, pour la nième fois, promet -
têtu comme une mule - de réserver au sein de son
gouvernement quelques postes ministériels à LD Kabila et
à son mouvement. Olenghankoy ne figure pas sur la liste des "
ministrables " de Tshisekedi. Doté d'un flair politique
extraordinaire et sentant d'où allait venir le vent du
changement, le président des Fonus - en conflit avec le
gouvernement Kengo - atterrit à Lubumbashi via Bruxelles. Mal
lui en prit. LD Kabila auprès de qui, il est
présenté comme l'un des pourfendeurs de Mobutu, l'ignore
superbement, par réflexe de rebelle. Olenghankoy revient
à Kinshasa, en rupture des bans avec Tshisekedi et avec le
nouveau pouvoir Afdl, contre lequel il entreprend une campagne de
contestation…
Plus tard, lors des négociations inter-congolaises de Sun City,
Olenghankoy qui s'était entre-temps rapproché de
Tshisekedi, pour avoir notamment été
incarcéré à Buluwo, - la prison où fut
violenté P.E Lumumba - finit par apprendre que le sphinx de
Limete n'avait pas changé d'opinion sur sa personne. En clair,
tant que Tshisekedi aura des prérogatives pour désigner
des ministres, Olenghankoy s'en sera jamais un. Dès lors, il
entreprit de nouer des alliances et de mener des actions de sape contre
Tshisekedi, au profit de Z'Ahidi Ngoma, au poste de
Vice-président de la République réservée
à l'Opposition. C'est avec Z'Ahidi Ngoma donc qu'il conclut le
juteux marché de " ministre des Transports et communications ".
Les amours avec Joseph Kabila
Il aura fallu à Olenghankoy de siéger au sein de la "
Commission de suivi " du Dialogue intercongolais, pour changer
radicalement d'opinion sur le président Joseph Kabila, son
adversaire politique depuis le 27 janvier 2001, date de l'investiture
du Chef de l'Etat : " J'ai découvert en Joseph Kabila un homme
qui a beaucoup de qualités ", dira-t-il, à l'occasion
d'une interview à la presse présidentielle.
Suspendu de ses fonctions de ministre des Transports et communications,
Olenghankoy se présente en homme frustré, trahi dans sa
confiance par le Chef de l'Etat à qui, il aurait rendu
d'énormes services. Il en veut pour preuve le dossier des
négociations, dans des capitales occidentales, du retour des
ex-Faz au pays. Mais, de telles révélations suscitent
moult questions. A-t-il été expressément
mandaté par le Chef de l'Etat à ce sujet ? A ma
connaissance, Joseph Olenghankoy n'a jamais fait partie des effectifs
militaires du pays, au sein desquels, il aurait eu des camarades de
promotion ou des compagnons d'armes. Il n'a jamais assumé des
responsabilités politiques ou militaires au sein de Faz, en
relation directe avec l'Armée, sous la deuxième
République. Ses relations particulières avec des
mobutistes d'alors suffisaient-elles pour le Président Kabila de
lui donner le blanc seing de négocier le retour des ex-Faz
à Kinshasa ? Lui-même, en quelle qualité avait-il
accepté une telle responsabilité ? De quelle audience
jouit-il auprès des ex-Faz ? Quels arguments a-t-il usé
pour convaincre Kabila de lui confier une mission aussi délicate
? Et pourtant des généraux comme Kinsempia, Mbuza Mabe et
tant d'autres, qui continuent à servir sous les drapeaux,
auraient été à l'aise dans une telle mission. De
même, l'ancien ministre de la Défense nationale et
Conseiller spécial en matière de sécurité
du Président Mobutu, M. Honoré Ngbanda - dont on
apprécie l'initiative pour le retour des ex-Faz au pays - aurait
été plus efficace que M. Joseph Olenghankoy. La mission
n'ayant pas abouti, et face aux révélations
croustillantes de Olenghankoy, on peut considérer que Joseph
Kabila a commis une erreur monumentale que d'avoir donné mandat
à l'ex-ministre des Transports et Communications de traiter ce
dossier.
L'histoire nous enseigne, en effet, que l'on peut, à
l'extrême rigueur, " dîner avec le diable muni d'une longue
fourchette ". De même, on ne peut manger un morceau de viande
avec un " nkoy " ou un léopard, sans risque d'être
croqué soi-même. Une leçon à retenir.
Les conséquences du
divorce Kabila-Olenghankoy
Olenghankoy était-il réellement devenu l'homme de
confiance du Président Kabila ? En quittant le gouvernement,
c'est sur le Président Kabila que le président des Fonus
a lancé son venin mortel et non sur la Commission parlementaire.
Encore moins sur le président de l'Assemblée nationale.
Il a choisi sa cible et l'a durement vitriolée, au cours de sa
conférence de presse, dans le but de l'assassiner politiquement.
Des propos orduriers qui n'honorent pas l'image de la fonction
présidentielle, ainsi que celle du Chef de l'Etat en exercice.
Qu'il ait dit des vérités ou des mensonges, Olenghankoy a
toutefois fixé l'opinion et lancé le débat. Outre
la diffusion intégrale de cette conférence de presse sur
CCTV du promoteur Jean-Pierre Bemba, Vice-président de la
République, des larges extraits ont été repris
dans la presse écrite, sur Internet et ont fait l'objet
d'analyses et de commentaires dans les chancelleries et capitales
occidentales, en poursuivant le tour du monde. Les retombées de
cette campagne médiatique contre Joseph Kabila ne seront pas
nécessairement immédiates. Elles pourraient intervenir
petit à petit, particulièrement à l'occasion de la
campagne électorale.
Olenghankoy brûle Joseph Kabila
Nous sommes certes loin des périodes de la pré-campagne
et de la campagne électorale. Le Pprd, profitant pourtant de
l'implantation du parti à travers le pays, mène d'ores et
déjà une vaste campagne en faveur de l'élection de
J. Kabila, à la prochaine présidentielle. Et, M. Kamerhe
ne s'y trompe pas, en faisant le marketing de Joseph Kabila, dans les
contrées du pays où il prend langue avec les populations.
Entre-temps, les propos irrévérencieux de Olenghankoy
contre la personne du Président de la République ont
donné aux adversaires du Pprd suffisamment de matières,
de thèmes et des versions à exploiter, le moment venu. Je
ne doute pas que les états -majors des partis politiques
adverses s'en inspireront et en feront largement échos, dans
leurs adresses de campagne, à moins que la loi électorale
soit rigoureusement explicite sur la nature des thèmes de
campagne et sur un code de bonne conduite des hommes et des partis
politiques.
Olenghankoy a promis de revenir à la charge, pour abattre
radicalement Joseph Kabila, en apportant les preuves matérielles
de ses accusations. Sans doute pourrait-il être poursuivi, pour
diffamation ou pour offense au Chef de l'Etat. On pourrait même
imaginer contre lui une série d'infractions, dont celle
d'atteinte à la sûreté de l'Etat… Ce serait
l'occasion de s'éclipser... pour cet homme qui a toujours
rêvé de faire mal à ses adversaires politiques.
Tout est possible. Mais demain, en sera-t-il de même, dans un
Etat de droit, de démocratie pluraliste ?... Le Pprd devrait
tirer les leçons de l'après Mobutu, au lendemain du 18
mai 1997.
Le candidat Joseph Kabila se présentera à
l'élection présidentielle chargé par la sulfureuse
accusation de Olenghankoy, qui ne fera pas de cadeau au Pprd et
à son candidat probable… Alors, M. le Secrétaire
général du Pprd, c'est le moment de préparer vos
moyens de défense, vos arguments de campagne, pour convaincre et
séduire. Sinon, la bourrasque lancée par " le dangereux "
Olenghankoy risque d'anéantir politiquement Joseph Kabila.
Bondo Nsama
© SALONGO HEBDO
04/02/2005
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