JOURNAL SALONGO
HEBDO
République Démocratique du Congo
Editeur - Directeur Responsable:

Bondo Nsama
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Grandes manœuvres à l'espace présidentiel
On fait la paix ou on feint la paix ?

Les intérêts des uns font le bonheur des autres

Grippée depuis le lancement par le Mlc de l'ultimatum renvoyant au pied du mur la composante ex-gouvernement alias Pprd et alliés accusée de bloquer délibérément les dossiers sur lesquels il lui est politiquement et financièrement difficile de lâcher le morceau, la transition semble s'être engagée dès la fin de la semaine dernière sur la voie de la décrispation.
Dans une déclaration particulièrement mordante dressant le catalogue de tous les faux-fuyants auxquels la famille politique du chef de l'Etat avait semble-t-il systématiquement recouru pour contourner le principe du partage des responsabilités dans les services de sécurité, la diplomatie, la petite territoriale ainsi que dans les entreprises publiques et d'économie mixte, les amis de Jean-Pierre Bemba n'avaient laissé aucune ouverture à Joseph Kabila et à ses exécutants du Pprd, parti dont il est l'initiateur, selon l'imprudente révélation de Marie-Ange Lukiana quelques jours plus tard. Le fait même que cette déclaration ait été lue par Olivier Kamitatu qui passe volontiers pour une colombe au sein du Mlc traduisait assez l'exaspération de ce parti et la situation de non-retour dans laquelle il engageait ses partenaires dans la gestion de la transition.
Ce bras de fer entre le Mlc et le Pprd, bien des observateurs le considéraient avec inquiétude comme le prélude au dysfonctionnement de l'ensemble des structures post Dialogue intercongolais dont on sait qu'elles opèrent dans un cadre strict dont la finalité est la tenue des élections libres, démocratiques et transparentes. Des structures qui n'ont de raison d'être que de servir de faire-valoir au schéma 1+4 qui est le centre d'impulsion de tout le processus de transition.

A chacun sa fâcherie

Au-delà de la question de savoir si ou non les raisons étalées par le Mlc pour justifier son ultimatum sont dignes de considération et si la réplique du Pprd sonnait vrai ou n'était au contraire qu'une manifestation d'irritation épidermique, il convient de noter que cette " sortie " a eu au moins le mérite de rétablir l'équilibre dans le comptage des points pour fâcherie entre ex-belligérants contraints d'être ensemble aux commandes de la transition.
Le Pprd avait eu sa tranche de mauvaise humeur via son groupe parlementaire qui avait claqué la porte de l'Assemblée nationale pour manifester son mécontentement face aux hésitations de la plénière à avaliser la mise à disposition de toute une division des Fardc pour les besoins de sécurité du chef de l'Etat. Le Rcd lui avait emboîté le pas par la suite pour se plaindre du mépris avec lequel ses partenaires avaient accueilli sa proposition de marquer une pause pour faire le point du processus et décider en conséquence d'une nouvelle marche à adopter. Restait au Mlc de trouver lui aussi un prétexte pour se mettre en vedette en exigeant que la date du 31 janvier 2005 soit la date de couronnement de répartition des responsabilités partout où cela devait s'effectuer conformément à l'Accord global et inclusif.
La colère ayant ainsi été embrassée dans chaque camp, la suite logique c'est le silence de la tempête qui rend plus aisée la navigation sur des eaux redevenues tranquilles, c'est le stade auquel sont parvenus non sans nul les deux ex-belligérants sous le regard mi-indigné mi-moqueur du Rcd dans un rôle peu habituel de donneur de leçon de bon sens et de réalisme.
Sur fond de médiation interafricaine sous la baguette du Président sud-africain Thabo Mbeki consacré par les circonstances l'homme des crises en Rdc, l'espace présidentiel donné pour désintégrer dans le feu des rivalités et de la méfiance, s'est employé à récolter patiemment chacun des belligérants mettant un point d'honneur à montrer que si le processus de transition devait se saborder, ce ne serait sûrement pas de son fait.

On fait ou on feint la paix ?

Que reste-t-il lorsque deux partenaires se sont brouillés et ne sont guère ménagés par des insultes à peine supportables ? Dans le meilleur des cas, un mauvais souvenir que chaque camp s'efforce d'oublier au plus vite pour rétablir le climat  serein d'antan. Dans la pire des hypothèses, de la rancœur dissimulée prête à ressurgir à la première occasion. Le premier cas s'appelle un règlement durable. Le second évoque un simple replâtrage.
Dans quelle situation faut-il placer le compromis auquel seraient parvenus Joseph Kabila et Jean-Pierre Bemba à l'issue de leur entretien-marathon de vendredi dernier que d'aucuns ont qualifié d'entretien-vérité ? Comment faut-il interpréter les sourires d'après la réunion de l'espace présidentiel et du conseil supérieur de la défense tenue mardi 25 janvier 2005 ?
Il est malaisé et même osé de prendre des choses pour ce qu'elles ne sont pas.
Certes, Joseph Kabila et Jean-Pierre Bemba se sont parlés, et cela s'avérait nécessaire. Mais l'essentiel est de savoir s'ils se sont dit réellement des choses qui fassent qu'après leur conversation ne ressemble en rien à l'atmosphère qui avait régné avant, de sorte que soit effectivement enregistrées des avancées non seulement sur le contentieux qui les a dressés l'un contre l'autre, mais plus largement sur le parcours à baliser pour que le train de la transition ne rencontre plus aucun obstacle et fonce sans encombre sur le terminal des élections dont les uns et les autres souhaitent la tenue de préférence endéans le délai normal de la transition.
Ceci pour souligner que la paix rétablie entre les deux hommes ne peut pas être jugée selon la largeur des sourires mais suivant la démarche qui sera la leur en compagnie des autres membres de l'espace présidentiel pour que l'image globalement négatif que celui-ci renvoie à l'opinion puisse prendre une autre coloration qui soit en harmonie avec les vœux de la population.

Les intérêts des uns font le bonheur des autres

Ce serait d'ailleurs leur faire injure que de leur rappeler ce à quoi le peuple congolais voudrait ardemment s'engager. Ils ne le savent que trop bien.
A en juger par la manière, sévère, dont l'opinion a jugé la querelle autour de l'ultimatum du Mlc, les animateurs de la présidence de la République ont eu l'intelligence de se rappeler que l'on n'est jamais bien servi que par soi-même. La querelle les desservait tous indistinctement, y compris le non-belligérant Z'Ahidi Ngoma qui lui non plus n'est pas sans reproche dans la gestion courante de la composante hétéroclite qu'il préside de façon non-consensuelle.
Les élections qui se profilent à l'horizon constituant un moment privilégié pour la population de distribuer des points à ceux qui l'ont dirigée sans mandat et qui ambitionnent de le diriger demain avec son aval rendent sages même les fous. A force de se déballer mutuellement sur la place publique, les acteurs au sommet de l'Etat hypothèquent dangereusement leurs chances de sortir indemnes du scrutin.
En décidant de fumer le calumet de la paix, ils ont compris qu'ils n'auraient de salut au lendemain des élections que s'ils se concentraient sur leur intérêt commun d'aujourd'hui qui est de survivre et de se succéder à eux-mêmes indépendamment de l'ordre d'arrivée.
Sauraient-ils se montrer, dans leur propre intérêt, capables d'une telle vision, eux qui ne s'étaient jamais voué d'amitié auparavant et qui doivent réaliser l'exploit de vivre désormais comme si cela avait été vrai ? C'est cela la difficulté majeure de compromis intéressés, mais il n'empêche que le seul fait de l'avoir réalisé constitue déjà une victoire sur eux-mêmes et indirectement une victoire pour le peuple qui y trouve un motif de se sentir moins angoissé à l'idée que cette fois-ci, les dirigeants au sommet sont enfin déterminés à agir ensemble pour accomplir son vœu le plus cher et le plus inaliénable dans l'immédiat, c'est-à-dire les élections.
Bondo Nsama


© SALONGO HEBDO 28/01/2005



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