JOURNAL SALONGO
République Démocratique du Congo Editeur - Directeur Responsable: Bondo Nsama site http://www.salongo.best.cd [email protected] |
Le vote des
hommes en
uniforme divise l’Assemblée nationale et le Sénat La divergence
était totale entre
le Sénat et l'Assemblée nationale au sujet de la
participation des compatriotes
sous le drapeau - militaires et policiers - aux opérations de
vote. La chambre
haute a opté pour le vote, tandis que la chambre basse, elle,
s'y était
opposée. Ce désaccord est pour le moins surprenant
lorsque l'on sait que les
membres de deux chambres du Parlement de transition sont nés et
ont toujours
vécu en Rdc où, depuis l'époque coloniale, les
hommes en uniforme n'ont jamais
voté. Non pas parce qu'ils étaient politiquement inaptes,
mais tout simplement
parce qu'ils appartenaient à un corps réputé
apolitique. Qu'est-ce qui a emmené les sénateurs à
opérer ce virage à 180
degrés ? Cette question mérite d'être posée
lorsqu'on sait que la Rdc ne
dispose pas encore d'une armée véritablement nationale.
En attendant leur
restructuration et leur intégration, les Fardc actuelles
regroupent -
théoriquement - tous les
compatriotes
qui ont appartenu aux Fac et aux différentes milices et factions
armées qui se
sont affrontées depuis septembre
1996
jusqu'à la signature de l'Accord global et inclusif en
décembre 2002. Le Sénat
approuve… En attendant
l'intégration totale
et effective, toutes les anciennes milices et factions armées
n'obéissent pas
au Haut commandement militaire dirigé par le chef d'Etat, le
général-major des
Fardc. L'histoire récente et actuelle démontre que
certaines anciennes branches
armées des mouvements politiques qui se sont rebellés
contre le pouvoir central
continuent de n'obéir qu'aux leaders de leurs anciennes
composantes et entités.
C'est le cas actuellement des anciens militaires - rwandophones et
congolophones - de l'Armée nationale congolaise (Anc) du
Rcd-Goma et des
milices tribalo-ethniques qui sèment la mort et la
désolation en Ituri, dans la
Province Orientale. Plus que six mois nous
séparent
des élections. Permettre aux hommes en uniforme de participer,
c'est faire
d'eux implicitement des militants de leurs anciens mouvements
politico-militaires qui se sont mués en partis politiques au
lendemain de la
signature de l'Accord global et inclusif. On devrait donc dire adieu
à
l'apolitisme de l'armée. Au contraire, ce corps d'élite,
dernier rempart de la
nation deviendrait une véritable Tour de Babel où
l'unité de commandement
laisserait la place à la multiplicité de commandants… Pour quelles raisons la
chambre
haute du Parlement, institution de la Transition a-t-elle jugé
nécessaire et
opportun de vouloir copier servilement ce qui se fait dans certains
pays où
l'ordre et les mœurs politiques sont établis et respectés
par tout le monde. Ce
qui est loin d'être le cas actuellement en Rdc. Il faut
éviter de mettre la
charrue avant les bœufs. Chaque chose en son temps. Nous pensons,
sincèrement
que le moment n'est pas indiqué de légaliser la
participation des hommes sous
le drapeau aux opérations électorales. Pour sa part,
l'Assemblée
nationale a exclu les militaires et les policiers du vote. La chambre
basse a
également rejeté l'enrôlement facultatif des
électeurs et la présentation d'une
quelconque pièce d'identité à l'enrôlement.
C'était au cours de la plénière de
jeudi dernier consacrée à l'audition et à
l'adoption du rapport de la
commission mixte paritaire Sénat - Assemblée nationale
relatif à la loi portant
identification et enrôlement des électeurs en Rdc. Les honorables
députés ont des
décisions non seulement sages, mais surtout salutaires pour
notre pays qui sort
d'une guerre dont les conséquences néfastes se feront
sentir plusieurs années
plus tard. Ils se sont surtout référés à la
Constitution de transition qui
consacre l'apolitisme des forces armées. La question est celle
de savoir
pourquoi les honorables sénateurs ont, eux, fait fi de cette
disposition
constitutionnelle. Des raisons connues d'eux seuls ont certainement
été à la
base de leur décision inopportune actuellement. Déposé
sur les bureaux de deux
chambres, le projet de loi portant identification et enrôlement
des électeurs
en Rdc a été examiné séparément par
chacune d'elles. Les conclusions adoptées
étant divergentes, une commission mixte paritaire a
été mise en place
conformément à l'article 104, alinéa 5 de la
Constitution de transition. Les
principales divergences étaient relatives au vote des hommes en
uniforme, à
l'enrôlement obligatoire et aux amendes à infliger aux
personnes refusant de
s'enrôler. Une immixtion
malveillante L'immixtion insidieuse
de
certaines institutions internationales qui soutiendraient que " les
militaires et les policiers devront, en tant que citoyens de la Rdc,
exercer
leur droit de vote" doit être stigmatisée. Il s'agit
d'une initiative
surprenante lorsque l'on sait que les forces armées de la Rdc
sont apolitiques. Par ailleurs, il y a
lieu de
s'étonner de la position du Sénat dont les membres savent
pertinemment bien
qu'une telle décision profiterait à certains pays voisins
désireux de déverser
leur trop plein de la population en Rdc. C'est singulièrement le
cas du Rwanda
qui aurait profité du vote des militaires pour faire participer
aux élections
ses troupes qui sont cantonnées en permanence dans l'Est du
pays. Kigali aurait
beau jeu car là-bas, la porosité de la frontière
est telle que personne n'a le
moindre moyen de contrôler et de distinguer les vrais Tutsi ou
Hutu congolais
des vrais rwandophones rwandais qui ne parlent aucune langue ou
dialecte
congolaise. Une fois de plus,
l'occasion est
donnée de démasquer le travail de sape qui réalise
insidieusement la Communauté
internationale dans la déstabilisation et le pourrissement de la
situation
politique congolaise. En effet, pour des raisons inavouées, la
Monuc et le
Comité international d'accompagnement de la transition (Ciat)
soutiennent
l'hypothèse qui veut que " le vote ne soit pas obligatoire
". Autrement dit, la Monuc
et le Ciat
voudraient démobiliser les Congolais pour les empêcher de
décider massivement
et souverainement de leur avenir afin de pérenniser leur main
mise sur la Rdc.
En effet, au nom de quel principe, un
acte aussi significatif que voter doit-il être " facultatif, un
droit
qu'un citoyen peut exercer ou non " dans un pays dont la mise en place
des
institutions définitives dépend précisément
de la participation sinon de tous,
du moins du plus grand nombre de ses citoyens ? Voilà comment
les stratégies de
la fameuse Communauté internationale veulent piéger les
institutions…de l'après
transition. Non à la
politisation de l'armée
et de la police Un homme averti en vaut
deux dit
l'adage. Les Congolais sont suffisamment avertis des intentions
malveillantes
de la Communauté internationale. Depuis le déclenchement
de la guerre dite de
libération en septembre 1996, les puissances occidentales
agissant sous la
couverture de la Communauté internationale se sont
appliquées non seulement à
déstabiliser la Rdc, mais aussi à piller ses ressources
naturelles par le biais
des armées des pays qu'elles soutiennent puissamment. L'évolution
graduelle vers
l'édification d'un Etat de droit en Rdc contrarie leurs desseins. Les puissances
occidentales,
notamment les anglo-saxons, n'auraient plus possibilité de faire
profiter à
leurs économies des dividendes générées par
l'exploitation illégale des
ressources naturelles congolaises par leurs multinationales dans un
Congo
souverain. L'Occident ne se préoccupe que de ses
intérêts. Le mieux-être des
Congolais est le dernier de ses soucis. Sinon ces derniers seraient
rémunérés
comme les expatriés européens. Tel n'est le
cas ni maintenant, ni demain. La situation incertaine
que
traverse actuellement la Rdc n'autorise pas le risque de politiser
l'armée et
la police. Comparaison n'est certes pas raison, mais on ne peut pas
s'empêcher
de tirer les leçons à partir de ce qui se passe autour de
soi. Il n'est un
secret pour personne que l'implication de l'armée, de la police
et des services
de sécurité dans la gestion de la cité dans les
Etats africains et
sud-américains a contribué, en grande partie au
sous-développement de ces
parties du globe. Mais si le sous-développement est tributaire
de la
paupérisation des grandes masses, il est, par contre à la
base de
l'enrichissement scandaleux de la bourgeoisie compradore. L'implication des
agents de
l'ordre dans la politique politicienne étouffe l'éclosion
de la démocratie et
favorise l'éclosion des régimes dictatoriaux et
totalitaires. La politique, aux
politiciens. L'ordre et la sécurité aux agents de
l'ordre. Préconiser la
participation de ces derniers aux activités politiques, c'est
allumer un
cocktail Molotov dont l'incendie risque de tout consumer. Enfin, il y a plusieurs
manières
de servir son pays. En assurant pleinement leur mission d'assurer
l'ordre et la
sécurité des personnes ainsi que de leurs biens, les
hommes et les femmes en
uniforme doivent accepter patriotiquement la décision
définitive qui a été
prise en ce qui concerne l'identification et l'enrôlement des
électeurs car,
seul l'intérêt supérieur de la nation guide. Clément Pambu
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