JOURNAL SALONGO
République Démocratique du Congo
Editeur - Directeur Responsable:
Bondo Nsama
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L'orage criminogène à Kanyabayonga…

 

Pour justifier cette autre guerre de rapine, dont la ville de Kanyabayonga dans le Nord-Kivu est le théâtre, le Rwanda rejoue la seule carte qui gagne, celle des Interahamwe. Le Rwanda continue à faire une exploitation ignoble du génocide tutsi, une banalisation de ses propres morts, un fonds de commerce criminel. Le ministre rwandais des Affaires étrangères donne de la voix : " les Interahamwe sont toujours mêlés à l'armée régulière congolaise, ou l'armée congolaise est toujours mêlée aux Interahamwe. Nous restons vigilants ". En fait de vigilance, Kigali est résolument sur pied de guerre. Si les troupes banyarwanda qui affrontent les Fardc, depuis le dimanche 12 décembre 2004, avaient subi des revers, l'armée de Kagame aurait immédiatement volé au secours de ses protégés… Pour faire écran aux turpitudes de l'armée rwandaise, déjà présente au Nord Kivu, au lendemain de la tripartite Obasanjo, Kagame et Kabila à Ouagadougou, à l'occasion du sommet de la francophonie, des éléments rwandophones de l'ex-Anc du Rcd/Goma ont verrouillé l'aéroport de Goma. Dès lors qu'il s'agit des quelques éléments de la 8ème  région militaire, à la tête de laquelle se trouve Obed, cette révolte s'appelle en jargon militaire " mutinerie". La Monuc est formelle quant à la présence des " mutins " à Kanyabayonga : "depuis dimanche soir, 12 décembre, les accès de la ville de Kanyabayonga sont contrôlés par les soldats de l'ex-Anc et les troupes gouvernementales tentent de reprendre la ville".

 

Le montage grossier porte la signature de Kagame

 

L'encre de sa signature, dans le cadre de l'Accord sur la paix, la sécurité et la stabilité dans la région des Grands Lacs, le samedi 20 novembre 2004 à Dar-es-Salaam, n'avait pas totalement séché des documents officiels que Kagame annonçait son " come back " en Rdc. C'est devant le Parlement rwandais que Paul Kagame a proféré des menaces d'une intervention de ses troupes en Rdc. Mieux, le même Kagame a, dans la foulée, que ses troupes avaient franchi la frontière congolaise.

Bien avant le Président Kagame, et à plusieurs reprises, le ministre rwandais des Affaires étrangères, Charles Murigande a prévenu l'opinion tant congolaise qu'internationale de l'imminence de l'intervention de l'armée de son pays sur notre territoire. Enfin, Kagame a adressé à Obassandjo, Président en exercice de l'UA, une lettre dans laquelle il donne la mission assignée à ses troupes en Rdc : " l'opération sera d'une durée de quatorze jours. Les soldats s'attaqueront uniquement aux rebelles hutus ".  Depuis lors, le scénario est réalisé au quotidien, malgré les récentes dénégations de Paul Kagame. Mais, quelle valeur peut avoir la parole d'un Kagame ?...

Kagame revient au Nord-Kivu, au moment où le cours du Coltan est passé de 32 à 128 dollars Us, le kilo. Comme par enchantement, Kigali est devenue la capitale du Coltan congolais, avec la complicité des Congolais. La non moins célèbre Mme Aziza Kulsum Gulamali, dont le nom fut longtemps mêlé, sous les régimes successifs du Parti-Etat et de l'Afdl, aux trafics de cigarettes " Sportman " et d'armes de guerre, est actuellement directrice générale de la Société Minière des Grands Lacs. Cette entreprise de droit rwandais détient le monopole de la commercialisation du coltan.

La raison cachée du safari meurtrier actuel des troupes rwandaises dans l'Est congolais demeure la même : faire main basse sur les richesses naturelles de la Rdc. Ce montage grossier bénéficie - je le répète - du soutien de l'aile dure des Banyarwanda du Rcd et du régime rwandais. Le conseiller personnel du Président Kagame en matière de sécurité, M. Paul Karegeïa, s'est spécialisé dans l'exportation du Coltan et l'exploitation des mines d'or et de diamants, dans le Nord-Kivu, le Sud-Kivu et en Ituri, dans la Province-Orientale.

 

Les "mutins" de la 8ème région militaire : un prétexte

 

Une fois de plus, pour les mêmes raisons et le même prétexte, des centaines d'hommes armés ont envahi la Rdc, malgré les dénégations du Rwanda, pour son nième guerre de rapine.

Ces rwandophones - ceux de l'ex-Anc/Rcd et du Rwanda - ne combattent pas à l'insu de Paul Kagame ; ils tiennent le matériel militaire ultra moderne, avec lequel ils combattent, de l'état-major rwandais. Bien plus, beaucoup d'entre les officiers congolais rwandophones étaient des cadres de l'armée rwandaise, il y a quelques années. Paul Kagame ne peut nier qu'il a au moins laissé faire, voire couvert. Ces fameux " mutins " rwandophones ont peut être leurs griefs et leurs raisons. Kagame, lui, n'a que des torts.

Actif, Paul Kagame l'a été, dans le mal. Il est en train de perpétrer des actes criminels qu'un chef de l'Etat, membre de  l'Union africaine et signataire du pacte de non-agression dans la sous-région, aurait dû absolument s'interdire : continuer la déstabilisation d'un voisin par des hommes, des moyens financiers et par des armes. La voisine est la Rdc, déjà étranglée par la crise socio-économique, la désorganisation politique et le pillage de ses richesses naturelles, sous la barbe de la Monuc et des Africains.

C'est grave pour l'Union africaine et pour la malheureuse Afrique. Dès lors que l'inacceptable est continuellement toléré pour Kagame, tout l'édifice déjà fissuré des relations interafricaines peut s'écrouler. Pas un seul chef d'Etat africain, même pas le président en exercice de l'UA, signataire de l'Accord de Dar-es-Salaam, ne réagit au grave manquement de Kagame à son engagement solennel. L'UA aurait dû s'appeler autrement qu' "Union Africaine". De quelle union s'agit-il ?

 

L'intégration des Fardc hypothéquée ?

 

S'il est établi qu'une fraction des militaires rwandophones de la 8ème région militaire s'est volontairement mutinée, en raison du déploiement par l'état-major général des Fardc d'un renfort de 10.000 hommes dans l'Est, alors il faudrait désespérer de l'intégration et de l'unification des Forces Armées Congolaises. Les militaires de l'ex-Anc/Rcd, soutenus par le Rwanda, exigeraient " des garanties avant d'accepter de participer au brassage ". En clair, le Rwanda est déterminé à saborder le processus de transition, dont la finalité est l'organisation des élections libres, démocratiques et transparentes et l'avènement d'un nouvel ordre politique. Le régime mono-ethnique et  anti-démocratique de Kagame, fondé sur l'exploitation ignominieuse du génocide tutsi, considère la réussite du processus de transition en Rdc comme la fin du rêve et de l'hégémonie tutsi. D'où son entêtement à déstabiliser l'Est congolais. Objectif : pas d'élections au Nord et au Sud Kivu, en juin 2005, pour lequel il faudrait alors un Statut spécial.

Outre la volte-face ou les garanties exigées par l'ex-Anc/Rcd, en vue du brassage des Fardc, l'intégration des Forces Armées Congolaises est confrontée à la cruciale question de financement. Elle est considérée par nos partenaires comme étant une dépense de souveraineté. Le pays a besoin au minimum d'une dizaine de brigades pour la tenue des élections. Leurs rôles : sécuriser les bureaux de vote lors des opérations électorales. Nos besoins sont évalués en termes de 9 millions d'Euros pour la formation de 9.000 policiers. Sans ce minimum, c'est un pari risqué que d'organiser les élections. On reviendrait vite à la case-départ, avec de nouveaux foyers de rebellions.

 

Refusons l'inertie et la passivité

 

Les Congolais doivent réagir, protester, ameuter constamment l'opinion publique intérieure et extérieure, face au fait accompli. Ils doivent dire leur mépris à ceux qui rêvent d'accéder ou de se maintenir au pouvoir, par la force des armes, la guerre civile, le terrorisme ou la manipulation ethnique. A l'inverse, il faut soutenir les hommes politiques les plus (sincèrement) nationalistes, patriotes, démocrates et républicains, encourager leur démarche et contribuer à ce que leur vision et leurs choix politiques soient rendus populaires et payants.

Le patriotisme, sentiment d'attachement profond à la cause de la patrie, se gagne par des choix déchirants et par des actes concrets. Il se mérite. S'il appelle parfois le sacrifice, il le vaut.

Refusons d'être inertes et passifs. Agissons.

BONDO NSAMA

 

 

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Faucons et colombes

 

Me Ruberwa, vice-président de la République, est rentré d'une fructueuse tournée européenne : France, Belgique, Grande-Bretagne… Des rencontres utiles, d'excellents échanges, dont certains forts animés, une moisson d'informations, une gerbe de promesses (de soutien financier) en garantie pour la tenue des élections, en juin 2005. Bon voyage. Bon retour. Un retour à l'Ulysse, après un séjour Outre-Atlantique qui, celui-là, tarde à livrer ses secrets… S'il en est.

Plaidoyer pro domo. Sorti des affres de la guerre, le RCD aurait rompu avec une première logique. De mouvement politico-militaire, il s'est mué en parti politique.  Les actes de banditisme politique signalés à l'Est ne seraient-ils que le fait de quelques nostalgiques ou psychopathes? En démocrate et républicain - je dirais- en libéral, Ruberwa doit s'appuyer sur le camp des colombes, pour ''casser'' ce qui doit l'être, au niveau des idées et des hommes. Pour sa survie, le parti est contraint d'abandonner certains de ses fils, pour fait d'anachronisme, sur le bord de la route, faute de les ''bouffer'', selon la logique révolutionnaire.

Dans la foulée, le parti est annoncé - à l'étape de Bruxelles - aux prochaines élections, qu'il peut difficilement perdre ( ?) : des candidatures seront présentées à tous les niveaux, voire au sommet de l'Etat. On ne s'empêche pas de rêver : Me Ruberwa et les siens ne sont qu'à mi-chemin, voire en déça, du parcours d'implantation du parti à l'Ouest de la RDC. Nécessité politique urgente pour eux, parce que les forces vives les ignorent et le parti, au sein duquel coexistent difficilement faucons et colombes, ne me semble pas totalement remis de sa fracture politico-sentiementale née de l'initiative autoritaire du clan des faucons conduit par Bizima Karaha, en août 2004.

Modéré ou colombe en politique, Azarias Ruberwa semble être forcé à jouer à un équilibrisme périlleux, en vue de concilier les positions des faucons et des colombes, pour ne pas cracher, par exemple, sur la main nourricière d'hier et qui vous a fait roi. Qu'il s'agisse de la Communauté internationale ou du Rwanda.

Travailleur, intelligent, pieux, modeste, bon avocat - selon ses anciens collègues, défenseur de la bonne gouvernance, Ruberwa est un modéré, dont les idées et l'opinion heurtent souvent, hélas, la sensibilité de la grande majorité de Congolais, particulièrement en période de crise profonde entre Kinshasa et Kigali. Est-ce son talon d'Achille, dont la vulnérabilité pourrait un jour lui être politiquement fatale ? Il lui manquerait le patriotisme tranchant du colonel Masunzu, munyamulenge comme Ruberwa, dit-on. On lui reprocherait également d'entretenir le complexe du persécuté, du fait de ses origines ethniques.

Ruberwa est de ceux qui paraissent conscients d'avoir amassé un immense gain politique, pour le compte de la minorité ethnique banyamulenge, grâce à la lutte armée, à l'action politique et à la diplomatie du RCD : espace présidentiel, gouvernement, Assemblée nationale, Sénat, Armée, loi sur la nationalité, etc. Il ne faudrait pas que des faucons - qui disposeraient de volumineux et importants carnets d'adresses internationales - brisent le rêve congolais banyamulenge… Aux colombes du RCD d'étudier des stratégies, pour un grand coup qui imposerait finalement à tous une vision identique de la RDC. Belle opportunité que le verrou de Kanyabayonga.

Pierre NDOMBE



Du grain à moudre...

 

Peut-on imaginer plus congolophones et plus rwandophones que ces individus dont l'étrange réflexe a été de rouspéter contre l'envoi, par le gouvernement de la République, de troupes de renfort des Fardc à l'est du pays de nouveau embrasé  par l'invasion rwandaise ? Assurément non. Kinyarwandophones, swahiliphones ou même lingalaphones, là n'est pas la question. On présume qu'ils ont une conscience, et donc la conscience de leur bêtise.

Voilà que risque en effet de ressurgir de la manière la plus inattendue un débat censé clos, celui de la nationalité, thème qui a fait longtemps le lit des antagonismes sur lesquels continuent hélas de fantasmer des excités de tous bords. Voilà qui ne peut manquer de fournir du grain à moudre à ceux qui, par atavisme, demeurent allergiques à toute perspective de cohabitation avec des populations considérées à tort ou à raison comme affligées d'une nationalité douteuse.

Sur quoi se fondent les aboiements anti-Fardc de ces individus qui, manifestement, résonnent par la grosse caisse de Kigali ? Sur des rumeurs d'extermination d'une partie ciblée des habitants de Goma par l'armée congolaise, et sur quelques autres stupidités du même tonneau. Une scandaleuse manipulation dont les auteurs sont loin d'imaginer les conséquences dramatiques, étant entendu que personne, au vrai, ne serait en mesure de maîtriser l'onde de choc qui résulterait de l'éruption des ressentiments dans ce Kivu où s'affrontent depuis quelque temps au sein de la population des volontés contraires.

Ainsi, par la faute d'une poignée de gens et d'une masse moutonnière, tout un investissement d'efforts dans la répudiation de tous les excès et de toutes formes d'exclusion et d'intolérance est en voie de dilapidation.

Si tel est, au fond, l'objectif de ceux qui ont pris la responsabilité de se mettre au travers de la volonté du pays de se défendre contre l'agression rwandaise, alors la sentence est claire : ceux qui bradent la souveraineté de la Nation en se jetant dans les bras du Rwanda ou qui se font des complices objectifs des agresseurs ne méritent aucun respect.

La vérité n'est vérité que lorsqu'elle s'exprime dans la blancheur de son innocence. Il ne saurait donc être malséant de constater le mal et de le dénoncer. En l'occurrence, l'acte d'indiscipline des hommes de la 8ème région militaire relève ni plus ni moins de la cour martiale. Rien d'autre.

Norbert Tukulu


JOURNAL SALONGO 17/12/2004

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