LA VIE APRÈS L’ONF
Rencontre avec Jean-Théo Picard,
homme de foi et d'action

par Marie-Pierre Tremblay
septembre 2000

À 84 ans, Jean-Théo Picard* est droit comme un chêne. Il a bon pied, bon œil, la voix bien portante et une énergie débordante. Il n'a jamais vraiment laissé l'ONF. En effet, le 28 mai dernier, il lançait à sa bibliothèque municipale le projet Vidéo Famille Saint-Lambert.

« C'est une idée qui m'est venue il y a quelque temps déjà, alors que j'étais marguillier de la paroisse. L'évêque nous avait demandé ce que nous pouvions faire pour aider les familles à mieux vivre leur quotidien. J'ai immédiatement pensé à mettre des vidéos à leur disposition. Ce qui fut dit fut fait mais avec un certain délai parce que la Bibliothèque de Saint-Lambert était alors en rénovation. »

Durant cette vingtaine de mois d’attente, il s'est employé à réunir un comité d'une dizaine de personnes (dont plusieurs jeunes de 18-20 ans) qui a visionné des films, conçu une campagne de lancement (logo, slogan, dépliant, affiche, communiqué) et préparé un formulaire d’évaluation. Il a aussi trouvé plusieurs commanditaires pour financer les coûts de l’opération. Aujourd’hui, plus d’une trentaine de titres circulent gratuitement dans sa communauté dont Les Enfants de la télévision, Fin de millénaire, Père pour la vie... « J’ai encore 2000 dépliants à distribuer, dit-il. J’ai donc rencontré les responsables des relations avec les parents de toutes les écoles de Saint-Lambert et ils m’en ont tous demandés. 200 ici... 300 là... Ensuite, dans le courant de l’année, je vais organiser deux ou trois séances d’information pour montrer aux gens comment utiliser ces films. Et puis, je vais visiter les bibliothécaires de Saint-Hubert, Longueuil, Ville Lemoyne, La Prairie, Greenfield Park. Je leur dirai ce qu’on a fait ici, à Saint-Lambert, et je les inviterai à faire de même. »


photo : Marie-Pierre Tremblay

« Non, non. Ce n’est pas le seul projet relié à l’ONF que j’ai réalisé depuis mon départ. Quand François Macerola était Commissaire, il m’a donné un tout petit budget pour que je fasse des entrevues à travers la province. Puis Joan Pennefather m’en a donné un aussi. Mais quand j’allais voir les gens avec mon magnétophone, ils me disaient : Comment cela se fait-il, Théo, que tu nous enregistres au lieu de nous filmer ? À l’ONF vous faites du cinéma, non ?... En tout cas, personne ne s’est jamais servi de ces entrevues-là pour écrire une histoire de la Distribution au Québec, ce qui était le but du projet. (note du webmestre : C'est exact, aucun livre n'a été publié. Mais pour lire quelques pages passionnantes de la transcription de ces entrevues, cliquez ICI). Toutes les cassettes sont ici, bien classée, dans une armoire. »

« À part cela, nous avons beaucoup voyagé. De 1981 à 1994, nous sommes allés en Europe tous les ans. Nous faisons aussi beaucoup de bénévolat : Croix-Rouge, Soupe et Pain, Festival de Saint-Lambert... Qu’est-ce que tu veux, tout le monde nous connaît et on connaît tout le monde. Ma femme a été échevin et moi j’ai pas mal bougé aussi, alors... un comité en amène un autre et ainsi de suite. »

« Quand j’ai pris ma retraite, je venais tout juste de me remarier. J’ai donc eu des activités "sages". J’ai pris des cours de flûte à bec... mais je n’ai pas persisté. Des cours de ceinture fléchée à la mode de l’Assomption... mais je n’ai pas eu la patience d’en faire plus que la moitié d’une... » Ce qui l’a vraiment passionné toute sa vie, c’est le scoutisme. « J’ai fondé la troupe de Saint-Jacques-de-Montcalm quand je n’avais pas encore 20 ans. Puis j’ai continué à Saint-Jean-sur-le-Richelieu. Quand je suis allé au 60e anniversaire de la fondation de cette troupe, beaucoup pensaient que j’étais Baden-Powell en personne... » Théo se lève et revient aussitôt, brandissant avec fierté sa chemise scoute bardée de badges, d’étoiles et de rubans, son foulard tissé main par les Sœurs de Sainte-Anne, ses shorts bleu azur... « J’ai été chef de clan pendant 7 ans. Au camp-école, on formait des chefs qui pouvaient à leur tour transmettre les valeurs qui font les vrais hommes. J’ai essayé de vivre selon ces valeurs et je ne le regrette pas. Tout ce que je regrette, c’est d’avoir prêté mon chapeau. On ne me l’a jamais retourné et on n’en trouve plus. Ici, au Québec, le chapeau a été remplacé par un bérêt. »

Au fait, vous n’auriez pas, dans votre placard, un feutre scout (grandeur 7) ? Envoyez-le à Théo ! Cela serait probablement le plus beau cadeau que vous pourriez faire à notre ami dont le totem est Orignal, au bond !

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* Jean-Théo Picard a été le premier agent de distribution francophone de l'ONF (si l'on excepte Luc Forest qui eut une courte carrière et est aujourd'hui décédé). Il est embauché à Québec en 1944 et sillonne la province comme représentant itinérant avec une vieille Chevrolet 34. En 1946, il est affecté à Saint-Jean-sur-le-Richelieu, au « bureau de district ». Il y travaille durant 35 ans. Parallèlement, il fait partie du conseil d’administration de la Fédération des cinémathèques de la Province de Québec (1959-1960), siège pendant six ans au Comité provincial de l’Association des bibliothèques publiques et agit comme aviseur technique auprès de la Fédération des Conseils du film (1957-1967). La mort dans l’âme, il prend sa retraite à l’âge légal de 65 ans, en 1981.

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Le 16 septembre 2006, Théo Picard fêtait ses 90 ans


Avouez que vous aimeriez avoir cette forme à 90 ans !
photo : Guy Maguire, 16 septembre 2006


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