LA VIE APRÈS L’ONF
André Petrowski, auteur :
un rêve enfin réalisé

Propos recueillis par Marie-Pierre Tremblay
mars 2002

« Deux ans après avoir quitté l'ONF, nous dit André Petrowski, je me suis laissé convaincre d'acheter les droits miniers sur plusieurs milliers d'hectares d'un territoire situé entre Shawinigan et La Tuque, autour de la rivière Matawin. J'ai fait faire des forages. Il y avait de l'or. Beaucoup d'or. Pas assez cependant pour en justifier l'exploitation commerciale. Nous étions en 1989-90. Donc, qu'est-ce que tu fais avec ça ? »

Et c'est ainsi qu'est née la série L'Or, télédiffusée à Radio-Canada à l'automne 2001. 13 épisodes. Une cote d'écoute de plus de 1 000 000 de téléspectateurs par émission (le top de la saison). Le réseau anglais l'a achetée et le doublage est terminé.


Un rêve enfin réalisé

Ce succès n'a pas été sans peine. « En premier lieu, je suis allé voir Rock Demers - on était en 1990 - et je lui ai proposé six épisodes. Il m'a dit oh ! là là, je les veux. Une semaine plus tard, il en voulait 13. Elles ont été vendues à Radio-Canada, au MIP. Et c'est à partir de ce moment-là que les choses ont commencé à traîner en longueur. Mais finalement, la série était en ondes l'automne dernier. Il est question d'une suite. Nous avons commencé les négociations. » Production : Rock Demers et Pierre Gendron (Les Productions La Fête) ; réalisation : Jean-Claude Lord ; idée originale et auteur initial : André Petrowski ; scénario et dialogues : Michelle Allen. Avec Marina Orsini et une quinzaine d'autres acteurs de premier plan. « Oui, le scénario et les dialogues, à la télé, c'est très technique, et moi, la mécanique, cela ne m'intéresse pas. Donc Michelle Allen a fait ce travail. Elle a changé les noms des personnages, mais tous les éléments de l'histoire sont les miens.»

C'était la deuxième expérience d'André Petrowski comme auteur d'une série télévisuelle. Sa première création, Libre Échange, était une sitcom en 17 épisodes qui racontait l'histoire d'un couple séparé à l'amiable et celle de leurs enfants. Elle a été télédiffusée à TQS en 1990 et 1991.

Un chemin qui n'est pas toujours pavé d'or
« Lorsque j'ai décidé de prendre une pré-retraite, c'était parce que je voulais me consacrer à l'écriture. J'ai toujours été un écrivain frustré. Je suis entré à l'ONF en pensant avoir la chance de faire du cinéma. La vie en a voulu autrement. J'ai une bonne vingtaine de projets très avancés, des trucs d'action, de fiction, et j'ai eu des subventions de recherche pour plusieurs d'entre eux. »


J'ai toujours été un écrivain frustré

En effet, il a obtenu l'appui de la SOGIQ (à l'époque) pour développer un scénario basé sur un voyage en Ukraine qu'il a fait avec son frère et sa mère. Celle-ci retournait au pays natal après 65 ans d'absence et retrouvait avec émotion de nombreux membres de sa famille. C'était avant la chute du communisme. Ian MacLaren s'est montré intéressé à le produire mais il n'y a pas eu de suite.

Un autre projet subventionné portait sur deux lesbiennes qui voulaient devenir mères. C'était un sujet nouveau à l'époque (début des années 90), mais encore une fois, cela n'a pas abouti.

« Présentement, continue-t-il, j'essaie de vendre une mini-série sur les pourvoiries. Il n'y a rien qui a été fait là-dessus et c'est pourtant très important au Québec ».

« Mais surtout, surtout, j'ai des projets qui ont trait aux jeunes. J'en ai un que j'appelle Ados-Action. Parce que les ados c'est un monde complètement ignoré. Tout comme celui des vieux comme moi. Et à quelque part, on est très près les uns des autres. J'ai obtenu de l'aide de Patrimoine Canada pour en développer l'un des volets qui est l'intégration des jeunes immigrants dans la société québécoise. Je voudrais parler de la francisation, car moi, j'ai eu la chance d'émigrer d'un pays francophone, mais la plupart des jeunes immigrants d'aujourd'hui ne parlent pas français, et il sont majoritaires dans beaucoup d'écoles de Montréal. Il y a aussi les jeunes itinérants. 5000. Abandonnés par leurs parents. Ils n'ont plus de guidance. Il faut catalyser et encadrer le bordel qu'ils DOIVENT faire. Je voudrais aussi parler des travailleurs de rue. J'ai beaucoup de documentation... Et je suis à la veille de fesser fort pour lancer ce projet-là. »


Je suis à la veille de fesser fort
photos : Marie-Pierre Tremblay

Mais ce n'est pas facile. Il y a beaucoup trop de créateurs pour le marché. Donc il y a des games qui se jouent. Des intérêts qui se disputent entre eux. « Et moi, je ne veux pas faire partie de ça. Petrowski n'appartient à aucune clique. Petrowski va rester Petrowski. »

Enfin, L'Or en librairie
Hé oui ! Ce premier roman - qui n'est pas la transcription de la série télévisée - sera en librairie dès le 3 mai 2002. Comme l'écrit son éditeur : « L'Or met en scène un monde fascinant, car fondé sur une quête irrationnelle. Un monde qui marche au métal jaune, à ses succédanés et à ce qu'il procure: luxe, pouvoir, poudre blanche, alcool, objets d'arts, sexe. André Petrowski met en scène une véritable géographie de la route de l'or et des fantasmes qui l'accompagnent : des forêts abitibiennes aux châtelets du ghetto McGill, d'une chambre d'hôtel de Rouyn-Noranda à celle de Toronto, de Montréal à Paris, de l'Amérique du Nord à l'Europe, etc ». Au moment où ces lignes sont écrites, André n'avait pas encore vu le plan de mise en marché. Mais il voit grand : il espère que le livre sera traduit en anglais et distribué en France. « Tous les éléments y sont pour séduire les Français » lance-t-il l'oeil allumé. Et il ajoute « la suite est presque prête ».

Toujours flamboyant, aussi solide qu'un chêne, André Petrowski, 73 ans, s'exprime et convainc autant par le geste que par la parole. Il conserve une inébranlable foi en l'avenir, en sa capacité de se renouveler. « Depuis 1986,j'ai toujours fait ce que j'ai voulu. Et ça continue. Et ça, c'est génial. Au fait, j'aurais un projet à proposer au NFBCIubONF... »

L'Or, André Petrowski, éd. Trait d'union, coll. « Les Heures volées », 320 pp, 27,95 $ (environ), chez tous les bons libraires.

________________________

ANDRÉ PETROWSKI agit comme producteur délégué (La Chaîne alimentaire, 1977) et contribue à la diffusion des films de l'ONF pendant 20 ans, soit de 1966 à 1986. Il travaille tout d'abord à la promotion des longs métrages jusqu'à J. A. Martin photographe), puis il passe au Service commercial et à l'International où il est représentant pour l'Amérique latine pendant sept ans, En 1984, il est affecté au Bureau de Montréal et mène de formidables offensives pour faire pénétrer les films de l'ONF dans les vidéoclubs et les bibliothèques publiques. On lui reconnaît volontiers le titre de « Père de la vidéo ».


Hosted by www.Geocities.ws

1