43

Le Phénix au bûcher


 

Nous sommes en 2007, sur cette planète, 6 600 000 000 d'êtres humains et les liens que nous avons tissés ont fait de nous UNE société. Une société qui est née occidentale, mais qui est devenue globale. Cette société globale est parvenue à produire cette année 47T$ de biens et services et elle fera mieux l'an prochain . C'est en moyenne 7000 $ par habitant et bien suffisant pour nourrir, vêtir, donner un toit à tout le monde. Pourtant, les deux-tiers de l'humanité vivent dans la misère et 30 000 enfants meurent de faim tous les jours ; nous avons un problème de distribution.

La guerres viennent et vont, comme toujours, mais dans un contexte où il semble qu'elles soient plus que jamais inutiles. Surtout, les guerres se terminent, mais la paix ne revient pas. La violence se poursuit un peu partout, plus ou moins larvée ; les oasis de sécurité deviennent plus rares sur cette planète et cette sécurité, là où elle subsiste, est sans cesse plus précaire, moins sereine. Nous avons un problème d'ordre.

Un siècle, un millénaire les sociétés meurent et il en naît d'autres. Vivons nous une crise de croissance, ou le phénix est-il en marche vers le bûcher ? Toutes les sociétés ne s'immolent pas par le feu ; certaines se laissent mourir d'inanition, quand elles renoncent à se nourrir d'un espoir. Il y a des siècles que notre société se gave de progrès, comme Rome s'était nourrie de conquêtes, puis, insidieusement est venue l'inappétence. Le progrès continue toujours, mais ne motive plus que ceux qui jouent à y trouver TOUTE leur raison de vivre ; la vaste majorité de l'humanité ne croit pas que demain sera mieux qu'aujourd'hui. L'espoir est parti. Somme nous une société moribonde ?

La crise que nous vivons n'est pas un phénomène local, c'est un problème mondial. A divers degrés, ce que l'on vit aujourd'hui où que ce soit n'est qu'une facette de ce qui se passe partout. Dans le monde sous-développé, en Afrique, en Amérique latine, une partie de l'Asie, c'est une pauvreté objective abjecte qui crée une crise permanente. Le pouvoir formel est précaire, son emprise réelle faible, sa légitimité nulle. Parfois, un pouvoir clanique, arbitraire, devenant toujours de plus en plus mafieux - puisque la criminalité y est le seul secteur porteur de l'économie - peut s'y exercer de fait, ici ou là, mais sur des territoires trop restreints pour que puisse s'y maintenir une structure de développement stable. Le désordre est si total qu'on y meurt au jour le jour, sans attirer l'attention

Dans les pays en voie de développement, il en est où s'est établi un pouvoir totalitaire et qui, dénoncés ­ et souvent sabotés - par le reste de la société globale, ont perdu la partie de créer le bonheur, lequel n'est vraiment possible que dans la liberté. Il en est d'autres qui feignent une forme de démocratie, mais celle-ci tout entière soumise à une omniprésente corruption et que viennent saper les problèmes systémiques d'un chômage et d'une dette publique en constante croissance.

Dans les pays dits développés, les USA offrent l'exemple qui semble prémonitoire d'une fracture sociale entre les pauvres et les riches, entre les blancs et les autres. Une fracture qui s'élargit et conduit à un inévitable éclatement, dont l'imminence est occultée par un cirque médiatique: un déluge d'informations incohérentes qui, paradoxalement, sert de censure et permet que le citoyen moyen n'ait plus qu'une vision de plus en plus floue de l'ensemble de la situation.

L'Europe suit la même voie, encouragée par les inégalités inhérentes à une expansion qui lui a permis de faire côtoyer ses nations riches et pauvres et par une immigration qui lui crée peu à peu des opposition ethnique et raciales à la mesure de celles de l'Amérique. C'est une voie balisée par la concentration de la richesse, l'exclusion progressive des travailleurs, la récupération de la démocratie par la manipulation des médias, la rupture de la solidarité sociale, le choix de la décroissance, la diminution inexorable des services sociaux et une perte d'éthique.

Cette perte d'éthique favorise la criminalité, comme dans le tiers-monde, mais dans les pays riches elle mène d'abord à la prolifération de la délinquance et à une désaffection croissante envers les valeurs sociales sans lesquelles une société complexe ne peut vivre. On assiste de plus en plus à l'abus de biens publics, à la fraude fiscale généralisée, au travail au noir et, surtout, toutes ces tares deviennent socialement tolérées. Il devient acceptable de ne pas respecter les règles qui ne nous conviennent pas et l'on peut compter sur l'indulgence des autres, puisqu'ils en font tout autant.

Le « système » qui gère la société n'inspire plus aucun respect. Que ce soit à tort ou à raison est un autre débat, car le système est inextricablement lié à la société qu'il gère et elle ne vit pas sans lui. Sans lui elle s'étiole, entre en crise et meurt. Quelles qu'en soient les raisons, la croissance exponentielle du nombre de ceux, exclus ou rebelles, qui en Occident, au coeur même de la société globale, rejettent le système, marque l'agonie d'une société en phase terminale.

Le phénix est bien vieux. Il est né des révolutions américaine et française. Pour sortir de la crise actuelle, il faut le mener au bûcher, c'est-à-dire faire table rase des idées reçues et des manières de faire que le temps a rendu désuètes. Ne pas le faire, c'est choisir la barbarie, car les valeurs qui devraient soutenir notre société ne le font plus. Il y a eu maints précédents. C'est ce que la Chine a vécu, à chacun de ses grands interrègnes, dont les noms poétiques ne doivent pas faire oublier qu'ils ont été des périodes de mise en veilleuse de la civilisation. C'est ainsi, en Euro même, qu'est venu le Moyen âge

Nos principes claudiquent, nos enthousiasmes défaillent. Le phénix doit monter au bûcher. Comme il l'a fait souvent. Comme il l'a fait à la fin du XVIII ème siècle, par exemple. La mutation doit s'effectuer au plus tôt, car aussi longtemps que dure l'agonie, la civilisation s'estompe. Nous y avons TOUS intérêts. C'est d'abord le sort des défavorisés qui devient plus cruel, mais quand la contagion s'étend et que même l'ordre public ne peut plus être maintenu, il n'y a plus de classe épargnée : hormis les meneurs du désordre, tout le monde perd. Or, c'est aujourd'hui que ça se passe. L'irak, la Somalie C'est déjà la barbarie dans les marches de l'empire.

Le syndrome de la décadence qui suivra est parfaitement connu..


SUITE

Index Section H

Accueil

Index général

Mesurez votre audience

Hosted by www.Geocities.ws

1