2003/02/14
UNE GUERRE QU'IL FAUT FAIRE ET GAGNER
J'ai suivi ce matin à la télévision, comme des
millions d'autres, la réunion publique du Conseil de Sécurité
des Nations Unies. Étant un grand ami de l'Espagne , je me suis senti
humilié quand sa représentante, devant les caméras
de télévision du monde entier, est venue bafouiller un discours
mal préparé, ânonnant des platitudes à-plat-ventristes
pour prouver que le petit épagneul ferait bien ce que voulait son
maître George. Puis, je me suis souvenu que 76% des Espagnols se sont
dit opposés à la guerre contre l'Iraq. Je me suis rappelé
aussi cette phase prophétique de "1984" : "Tous les
gouvernements du monde sont maintenant en guerre contre leur propre population".
Orwell, une fois de plus, a vu juste et l'a bien dit.
La proportion des opposants à la guerre est à peu près
la même dans les huit (8) pays européens dont les dirigeants
- dans un accès de cette bassesse gratuite dont parle Gogol -
se sont empressés d'écrire une lettre infâme, donnant
d'avance un blanc-seing aux USA pour l'imminent massacres des civils iraquiens.
Mais qui diable représentent donc ces gouvernants de pays dits "démocratiques",
si ne les fait pas reculer l'idée de contrevenir à la volonté
clairement exprimée des trois-quarts de leurs électeurs ?
Comment le Système peut-il venir aussi bêtement fournir
la preuve par 9 que la démocratie libérale est un conte pour
enfants attardés et que huit pays "souverains" d'Europe
sont en fait colonisés, menés par des fantoches qui acceptent
sans discussions leurs directives de Washington? Cette incroyable stupidité,
venant s'ajouter au grossier cafouillage des services secrets britanniques
plagiant la thèse d'un étudiant américain,
me laisse songeur. LE SYSTÈME A-T-IL PERDU LA TÊTE... OU NOUS
TEND-IL UN PIÈGE?
Évidemment, je n'en sais rien. Mais quel est le résultat
prévisible de ce schisme entre les peuples d'Europe et leurs gouvernants,
si ce n'est de fomenter un peu partout le développement de partis
politiques nationaux pro-européens? On remarquera que du même
coup la crise actuelle redonne à la France son rôle traditionnel
de hérault des libertés et vient couvrir d'un ultime vernis
de pacifisme l'image inquiétante d'une Allemagne militariste qui
persiste dans l'inconscient de biens des Européens.
Il y a fort à parier qu'on entendra bientôt clamer partout:
"Nos gouvernements sont veules? Faisons l'Europe!" On voudra une
Europe forte, capable de se tenir debout face aux USA. Faisons l'Europe.
Bravo, n'est-ce pas? Bien sûr. Je suis entièrement en faveur
de la création d'une Europe unie qui, d'ailleurs, est tout à
fait dans la ligne de l'Histoire. Mais il faut être bien vigilant.
Que sera cette Europe si elle est ainsi au départ orchestrée
par le Système? Veut-on que l'Europe devienne une Nouvelle Société
ou seulement un nouvel avatar du Système?
Le Système apparait aujourd'hui américain parce qu'il
se manifeste en dollars, qu'il est protégé par les troupes
et les bombes américaines et que son ultime rempart est constitués
de ces dizaines de millions d'Américains qu'on a abêtis et
dépolitisés à tel point qu'ils ne VOIENT même
plus le capitalisme. LONG LIVE BIG BROTHER ! Mais le Système n'est
pas américain, il est apatride. Un capitaliste n'a d'autre patrie
que le capitalisme. Le capitalisme peut devenir européen...
En remettant leurs pouvoirs de création de monnaie et donc de
vraie politique financière à la Banque Centrale Européenne,
les pays européens ont crée les conditions pour que l'Europe
devienne potentiellement aussi inféodée au système
financier international que les USA. Pour compléter la mainmise du
capitalisme apatride sur l'Europe, il ne reste qu'à niveler ces constructions
historiques que sont la France, l'Allemagne, l'Italie et les autres, et
dont chacune, au vu de ses intérêts propres, peut devenir un
foyer de résistance au Système.
Une Europe unie serait plus facile à gérer. On pourrait
la gérer"à l'américaine" avec deux partis
interchangeables et parfaitement corrompus sans même traces de corruption.
Le Système, rationalisant sa gestion des peuples comme il l'a fait pour
celle des entreprises, en liquidant les cadres intermédiaires que sont
ses Quislings locaux, pourrait alors n'avoir à administrer que la
Maison Europe et la Maison Amérique, chacune sous la surveillance
de son Président-concierge respectif.
Cette hypothèse se concilie bien, d'ailleurs, avec la façon
provocatrice dont on fait la promotion d'un marché commun des Amériques
(ZLEA), processus qui ne semble avancer que de manifestations "anti"
en manifestations "anti", toutes bien visibles et remarquablement
organisées. Le but visé n'est-il pas d'obtenir, au moment
opportun, une demande populaire "spontanée" pour une union
politique? Celle-ci rendant acceptable une union économique qui autrement
ne rendrait de comptes à personne. Brésiliens, Honduriens,
Canadiens, vous voulez une union politique? On vous a compris...
Et pendant que l'Amérique, allongée d'un pôle à
l'autre, en aura plein les bras de l'exploitation de ses propres déshérités
et se refermera sur elle même le temps de se refaire une vertu, le
Système pourra continuer sous une nouvelle raison sociale. Pouquoi
le capitalisme traînerait-il ces boulets devenant lourds de la bêtise
et de l'arrogance américaine, s'il peut changer de domicile et se
refaire une image de culture et de tolérance, vivre "à
l'européenne" et n'avoir que des amis..... le temps de les flouer
et qu'apparaisse son vrai visage ? Cette crise d'Iraq dont les causes
et les enjeux réels sonnent faux ne serait-elle qu'une péripétie
macabre d'un jeu plus vaste et beaucoup plus subtil?
Histoire-fiction ? Peut-être, mais supposons que cette hypothèse
soit vraie, comment réagir? Il faut réagir en ne perdant jamais
de vue les intentions de l'adversaire, qui sont de créer une Europe
aussi apolitique que les USA et de garder les outils financiers hors du
contrôle des institutions démocratiques. C'est là qu'il
faut faire barrage. La création de l'Europe est un bien en soi et ne devient pas moins souhaitable parce que le Système a pris une longueur d'avance pour en tirer profit. Il faut encore travailler ferme pour la construction de l'Europe..., mais ne pas permettre que la politique perde son pouvoir ni la démocratie son sens.
Suite à cette "crise d'Iraq" dont la plupart des gouvernements
européens sortiront déshonorés, prévoyons que
s'accélérera la création d'une Europe politique. BRAVO
! Mais il faut s'assurer que le pouvoir financier qui a été
délégué à la Banque Centrale Européenne
en prenant pour prétexte la fragmentation politique de l'Europe retourne
sous le contrôle du gouvernement démocratiquement élu
d'une Europe unie. C'EST LÀ LE COEUR DU PROBLÈME.
Ce retour du pouvoir financier aux institutions démocratiques,
le Système ne le permettra jamais de son plein gré. Il faudra
que les peuples lui fassent la guerre pour le lui arracher. Et il faudra
que cette guerre soit gagnée.
Pierre JC Allard
Page précédente
Page suivante
Litanie des avanies
Retour à l'accueil