© Neues Elsaß-Lothringen, 1998 - Nationalforum Elsaß-Lothringen


Le Komplottprozess

Ce mois de mai 1998 marque pour l'Alsace-Lorraine le soixan-te-dixième anniversaire du fa-meux procès de Colmar, aujour-d'hui oublié par la plupart de nos compatriotes, (qui certes n'ap-prennent pas leur histoire natio-nale dans les écoles françaises), et qui est un exemple eloquent de la façon dont la France »démo-cratique« traite ceux qui préten-dent rester fidèles à leur identité et aux valeurs qu'elle véhicule. En 1928, dix ans après le retour des Français en Alsace-Lorraine, la situation dans le pays est pour le moins agitée. Il n'aura fallu que quelques mois à la population pour qu'elle se rende compte du désastre provoqué et programmé par les vainqueurs. Les Français, à force d'entêtement et d'igno-rance, ont réussi, véritable tour de force, à créer l'union sacrée pour la défense de l'identité nationale que matérialisait le Einheitsfront, Front Unique, qui regroupait les autonomistes, les communistes, et les cléricaux! Ces deux derniers étant bien entendu tout aussi au-tonomistes que les premiers. C'est I'époque où le secrétaire gé-néral du Parti communiste fran-çais venait en Alsace-Lorraine af-firmer le droit à l'indépendance nationale de notre pays, n'hési-tant pas à prôner la séparation d'avec la France! C'est l'époque encore où le préfet prononçait la dissolution du conseil municipal de Hagenau en Basse-Alsace, (24/01/1928), jugé trop autono-miste par le pouvoir colonial, que le peuple cependant rétablissait intégralement en place au moyen du bulletin de vote, pour envoyer promener la France, son opinion publique, sa liste bidon et fran-chouillarde, et son préfet morali-sateur qui souhaitait pieusement par le biais de cette dissolution autoritaire, »donner ä la popula-tion l'occasion de se réhabiliter aux yeux de l'opinion publique de la France entière«... Devant le fiasco manifeste de la politique d'assimilation forcenée engagée par ce pouvoir étranger absolument inconscient de la réa-lité politique d'Elsaß-Lothringen, qui s'était largement émancipée durant le demi-siècle qu'avait du-ré le retour à l'Allemagne, chacun pouvait espérer au moins une re-mise en question de la »méthode« française. C'est bien mal connaî-tre l'esprit fanfaron et prétentieux qui caractérise nos voisins d'ou-tre-Vosges, (qui sont à cette heure et aux dernières nouvelles, tou-jours aussi persuadés que le monde entier envie leur prétendue supériorité...), empêtrés depuis des siècles dans leur arrogance, il n'y avait aucune raison que ça change tant il est vrai que la pro-pension au changement implique un minimum d'intelligence. Ce peuple se dresse comme un seul homme et brandit ses couleurs nationales en affirmant son droit à l'autodétermination? Il ne peut s'agir que d'une manipulation or-chestrée de l'étranger: un com-plot! Un complot destiné à des-tabiliser la république une-et-indivisible! Voilà la raison, il ne reste plus qu'à démasquer les coupables et s'il ne s'en trouvait pas, on n'hésiterait pas un instant à les fabriquer de toutes pièces, fausses preuves à l'appui, intérêt supérieur exige! L'union sacrée n'a pas non plus manquée de se réaliser en France, puisque le pouvoir a trouvé dans la presse un soutien incondition-nel et fanatique, tout disposé à relayer et amplifier les allégations les plus farfelues. Le regretté Pierri Zind dans son fameux El-saß-Lothringen une Nation lnterdite (éd. Copernic), raconte par exemple que : »La Schutz-truppe de Paul Schall, une for-mation de défense d'une quaran-taine de personnes«, (rendue né-cessaire par la violence des mili-ces françaises d'extrême-droite NDLR), »au surplus confondue avec le Stosstrupp, ou troupes de choc, du baron von Bulach qui n'avait jamais dépassé le stade du reve, devint pour le 'Lorrain' une force militaire de 11 régiments de 300 soldats chacun!« Le décor est planté, la farce va pouvoir se jouer, mais elle tournera rapide-ment au drame. Le président français, Poincaré, lors d'un banquet organisé à Straßburg et où furent convoqués les 559 maires de Basse-Alsace, crut bon d'annoncer que l'Alsace sera stupéfaite des infamies qui seront »révélées« au procès, qui du reste n'avait pas encore com-mencé. Il semblait ignorer totale-ment que l'Alsace en question votait autonomiste et défilait quo-tidiennement, Rot un Wiß au vent, pour exiger que soit respecté son droit à disposer d'elle même! Mais les législatives des 22 et 29 avril 1928 servirent probablement à le renseigner, puisque sur 16 députés, le pays envoya 9 auto-nomistes à Paris... dont deux des inculpés du fameux procès qui commençait le surlendemain: Eu-gen Ricklin et Josef Rossé, tous deux incarcérés dans les prisons de la République! 22 accusés parmi lesquels donc le Dr. Eugen Ricklin, premier pré-sident d'Elsaß-Lothringen alors âgé de 65 ans, les journalistes Schall et Fashauer, l'enseignant Rossé, et le Dr. Karl Roos réfu-gié en Suisse. La défense était as-surée par trois avocats autono-mistes alsaciens-lorrains, assisstés de deux avocats bretons et de deux avocats corses. La presse internationale remplissait la salle, et à l'extérieur l'armée française maintenaient la foule alsacienne à distance. Le déroulement du pro-cès fut une sordide mascarade pour la simple raison que l'accu-sation de complot ne pouvait ab-solument pas être démontrée, mais on aura compris qu'il ne s'agissait que du prétexte néces-saire à la mise en scène de ce pro-cès politique. Le procureur géné-ral Fachot (c'était son nom), utili-sa par exemple les almanachs de l'artiste Solveen, l'un des accusés, qui évidemment présentaient les maisons paysannes ou les cita-tions et proverbes traditionnels allemands d'Alsace-Lorraine, pour démontrer les intentions sé-paratistes des prétendus complo-teurs! Toujours a propos de Sol-veen, l'accusation a fait citer comme témoin à charge, un poli-cier de Straßburg, Becker, venu affirmer que l'art du peintre était autonomiste. L'avocat corse Feuillet intervint alors pour de-mander ce qu'était la peinture au-tonomiste. Becker expliqua que Solveen s'inspirait de maîtres al-lemands. Feuillet demanda pour-quoi dans ce cas on n'avait pas ar-rêté Albert Dürer (mort 400 ans auparavant), et Becker de répon-dre: »Parce qu'il se cache à Ber-lin!« L'ensemble serait pitoya-blement grotesque si l'on ne jouait pas là l'avenir de compatriotes parmi les plus courageux et les plus déterminés. Commencé le 1er mai, l'audience se termine le 24. Après une heure et demi de délibération, le jury revient faire part de ses décisions. Onze des quinze accusés présents sont acquittés. Ricklin, Rossé, Fashauer et Schall sont condam-nés à 1 an de prison et 5 années d'exil. Les sept accusés absents dont Karl Roos, écopent de peines allant de 10 à 20 ans de détention. Le peuple massé devant le tribu-nal conspue le verdict et entame des chants patriotiques dont: 0 Straßburg du wunderschöne Stadt. Karl Roos se livrera volon-tairement à la police française et sera jugé à Besançon également en assises, treize mois après le procès politique de Colmar. Il se-ra acquitté par le jury, dont l'un des membres aura cette phrase historique: »Cette affaire n'a pas sa place en cour d'assises, mais au parlement à Paris!« Le procès était bien politique et la rancune tenace, puisque le Dr Karl Roos sera fusillé par les Français quel-ques années plus tard. Le Forum Nationaliste d'Alsace-Lorraine salue la mémoire des patriotes et résistants victimes de la répression du pouvoir colonial français. En 1.998, cette répres-sion se poursuit inexorablement à l'encontre des défenseurs des peuples opprimés de l'Hexagone, qu'ils soient de Corse, de Breta-gne ou d'ailleurs. Le délit d'opi-nion demeure en vigueur dans les faits, et les prisonniers politiques sont impitoyablement poursuivis. Mais le courage de nos prédéces-seurs n'aura pas été vain: Elsaß-Lothringen est toujours debout, et rien n'empêchera ce peuple de poursuivre sa marche légitime vers la Liberté
Gérald Müller


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