ÉTABLISSEMENT

Peuplement des terres / Homesteading

Auteur / Author  JANE McCRACKEN
Le peuplement des terres de l'Ouest est une initiative gouvernementale de la fin du XIXe siècle et du début du XXe par laquelle on attire des immigrants dans les provinces de l'Ouest du Canada en offrant des terres à des prix dérisoires. En vertu de la politique sur les terres fédérales, 160 acres (65 ha) ne coûtent que 10 $, mais le colon doit construire une maison, souvent faite de rondins, ou une simple hutte de terre et cultiver une superficie déterminée au cours des trois années qui suivent son établissement. Un nouveau colon a besoin d'outils agricoles élémentaires et, comme les chevaux sont dispendieux, la plupart utilisent des boeufs pour défricher et labourer la terre. Ils doivent aussi aménager des coupe-feu pour protéger les bâtiments agricoles contre les incendies, en plus de cultiver des légumes et de chasser pour compléter leur alimentation. Si l'eau est de mauvaise qualité, ils doivent recueillir l'eau de pluie ou la neige fondante. À plusieurs endroits, une nouvelle ferme doit se trouver à moins de 15 km d'une voie ferrée pour être rentable, et les terres concédées à la Compagnie de la baie d'Hudson ou aux sociétés ferroviaires dans ces secteurs constituent un irritant majeur, car les derniers arrivés ou les colons pauvres sont forcés de s'établir loin des marchés et des villes. Les chemins de fer fournissent aussi de l'emploi aux colons jusqu'à ce qu'ils puissent vivre des produits de leur ferme.

Les colons et leurs familles sont souvent séparés de leur parenté et de leurs amis, et plusieurs vivent dans des conditions difficiles, marquées par la solitude. L'absence de routes et de ponts représente l'une des grandes difficultés. La plupart des pistes deviennent impraticables lorsqu'elles sont détrempées par la pluie, et, à l'automne, les fermiers attendent que le sol soit gelé pour transporter leurs récoltes aux terminaux ferroviaires. Les accidents qui se produisent sur les fermes entraînent souvent des incapacités permanentes ou même la mort, car les médecins sont rares. Par ailleurs, la sécheresse ruine ceux qui se sont établis dans le Triangle de Palliser. Le prix de la colonisation s'avère trop élevé pour nombre d'agriculteurs, qui doivent abandonner leurs concessions et tenter leur chance ailleurs. Les difficultés, cependant, renforcent les liens qui unissent les colons. Les préjugés s'atténuent à mesure que les gens s'entraident, et les corvées de construction de bâtiments et de confection de courtepointes sont chose courante. Les portes ne sont jamais verrouillées et des lanternes restent allumées la nuit pour guider les voyageurs. Au début, les activités de loisir sont confinées aux fermes isolées mais, à mesure que les communautés s'accroissent, on organise des compétitions sportives et les centres communautaires offrent des divertissements variés. Le mouvement de colonisation des Prairies commence à s'essouffler après la Première Guerre mondiale, alors que l'immigration décroît et que l'établissement des gens dans les villes s'accentue.

Homesteading, a late 19th- and early 20th-century phenomenon in which immigrants were attracted to the Canadian West by government advertisements of "free" land. Under the Dominion Lands Policy, 160 acres cost only $10, but the homesteader had to build a house, often of log or sod, and cultivate a specified area within 3 years. A new homesteader required basic agricultural implements, and since horses were expensive, most used oxen to clear and break the land. A fireguard to protect farm buildings had to be ploughed, and a vegetable garden planted and game hunted to supplement the food supply. If the water was of poor quality, homesteaders had to collect rainwater or melt snow. In many areas a homestead had to be within 15 km of a railway to be farmed economically; the reservation of land for the Hudson's Bay Co or railways within this belt was a source of frustration, for the poor or latecomers were forced to settle away from markets and towns. The railroads did provide employment for homesteaders until their farms began producing.

Homesteaders and their families were often separated from friends and relatives, and many suffered years of hardship and loneliness. One of the greatest difficulties was the absence of roads and bridges. Most trails were impassable when wet. In the autumn homesteaders waited until the ground was frozen before transporting their produce to the railhead. Farm accidents often resulted in permanent injury or, because doctors were rare, death. Drought ruined those who settled in the arid Palliser Triangle. For many the price of homesteading was too high; they cancelled their claims and moved away. Adversities, however, bound homesteaders together. Prejudices were lessened as people helped one another. Building and quilting bees were common. Doors were kept unlatched and lanterns hung at night to guide travellers. At first, recreation was confined to the lonely homestead, but as communities grew there were sport days and a variety of entertainment at the community halls. Homesteading on the Prairies declined after WWI as immigration fell off and movement toward the cities increased.

 

 

Vie des colons / Pioneer Life

Auteur / Author : SUSAN JACKEL
De nouvelles régions du Canada s'ouvrant une à une à la colonisation européenne, il incombe donc aux colons ou pionniers la pénible tâche de bâtir des maisons et de créer des communautés. Toute leur vie est réglée par la nécessité de pourvoir aux besoins immédiats de leur existence dans un environnement nordique et sauvage : nourriture, abri, vêtements et combustible. Il faut également adapter à ces nouvelles conditions de vie les institutions sociales : églises, écoles, gouvernement local et l'ensemble des moeurs et coutumes. Certains colons apportent des biens personnels, comme des meubles, des ustensiles de cuisine, des livres et des objets décoratifs; d'autres s'établissent sur des terres préparées par des compagnies de colonisation ou à peu de distance de villes ou de villages existants.

Toutefois, surtout avant que des routes, des canaux et des voies ferrées ne facilitent les communications et le transport des marchandises, la vie de la plupart des colons du Canada est synonyme d'isolement, de privation et de misère; ils n'espèrent pour tout succès que la survie. Néanmoins, après quelques années seulement, l'installation rudimentaire fait place à un confort relatif, ainsi qu'à la perspective de sécurité et même de prospérité pour les enfants. C'est ainsi que la persévérance, l'optimisme, l'économie, la débrouillardise et la vaillance sont les vertus que valorisent les générations suivantes, bien après l'époque des pionniers.

La conception des maisons des colons varie en fonction des matériaux disponibles sur place, du pays d'origine et des besoins particuliers de chacun. Cependant, toutes doivent être conçues pour résister aux hivers longs et froids du Canada. La première maison d'un colon consiste généralement en un bâtiment d'une seule pièce, fait de rondins, de pierres des champs, de troncs d'épinettes ou de terre. La construction de maisons à ossature de bois ou de briques avec cloisons intérieures, étages, fenêtres et toits de bardeaux annonce la fin de l'époque pionnière, l'habitation d'origine étant transformée en étable. Les meubles sont le plus souvent fabriqués par les colons eux-mêmes. Il en va de même des tissus servant à confectionner des couvertures et des vêtements, des tapis qui couvrent les planchers de bois non raboté, des matelas et des jouets. Le raccommodage des bottes et des harnais, et la réparation des articles en fer-blanc doivent souvent attendre la visite d'un homme de métier itinérant. Alimenter l'énorme foyer, habituellement l'unique source de chaleur de l'habitation, est une perpétuelle corvée : le bois, bien qu'il soit abondant presque partout, doit tout de même être abattu, coupé, fendu et transporté à la maison.

Le menu des colons dépend des produits locaux et est généralement aussi nourrissant que monotone. Les récits et journaux de voyageurs parlent de repas de porc servis trois fois par jour mois après mois, agrémentés seulement de gâteaux de farine grossièrement moulue, de compote de pommes séchées ou de petits fruits sauvages en conserve, de pommes de terre et d'autres tubercules comestibles. Mais l'abondance de gibier à poil ou à plume et de poisson, et la présence de potagers, d'oiseaux de basse-cour et de vaches laitières permettent bientôt de varier le menu.

La pratique de la coopération, qui caractérise les corvées communautaires, soit pour la construction de maisons et de granges, le défrichement des champs ou la confection de courtepointes, s'applique également dans l'organisation locale et dans les relations entre les sexes. Ainsi, une même église peut servir le matin aux presbytériens et le soir, aux méthodistes; on met rapidement sur pied des districts scolaires dont les instituteurs et institutrices sont payés par des cotisations locales, et logent chez les habitants. Les colons travaillent de concert à construire des chemins, à attirer des gens de métier et de petites industries et à promouvoir la prospérité de leur district.

Les premiers colons sont habituellement des hommes célibataires qui partent vers l'inconnu pour pratiquer la traite des fourrures, la coupe du bois, la prospection minière ou l'élevage. Toutefois, des femmes se joignent aux hommes pour coloniser la Nouvelle-France aux XVIIe et XVIIIe siècles, les Maritimes et le Haut-Canada de 1760 à 1860, et les Prairies pendant la période de PEUPLEMENT DES TERRES de 1870 à 1914. Le travail des femmes est essentiel au confort et au succès à long terme de l'exploitation d'une ferme. De plus, la politique canadienne d'immigration et la Politique sur les terres fédérales favorisent la vie familiale considérée comme une garantie de stabilité sociale et d'accroissement de la population. Les femmes pionnières travaillent inlassablement pour le bien-être matériel et culturel de leur famille. En bravant la solitude et les privations, en faisant preuve de force et de courage, elles se sont assuré une place d'honneur dans la société canadienne.

As each new area of Canada was opened to European settlement, pioneers faced the difficult task of building homes and communities from the ground up. Pioneer life revolved around providing the basic necessities of existence in a northern wilderness-food, shelter, fuel and clothing-and adapting familiar institutions (churches, schools, local government, and the web of social manners and customs) to new conditions. Some pioneer settlers brought personal belongings, including furniture, kitchen utensils, books and ornaments; some settled on land prepared by Colonization Companies or within reach of villages or towns.

For most, however, and especially before roads, canals and railways provided communication and transportation of goods, pioneering on all Canada's frontiers meant isolation, deprivation and hardship, success being measured by sheer survival. Yet, usually within a few years, primitive pioneering was followed by relative comfort, and the prospect of security and even prosperity for one's children. Thus, persistence, optimism, thrift, resourcefulness and the acceptance of unremitting hard work became character traits valued by succeeding generations long after pioneer conditions had passed.

Pioneer houses varied with local building materials and the newcomers' origins and means, but all had to be designed to withstand Canada's long, cold winters. A settler's first house was typically a one-room structure made of logs, fieldstone, spruce poles or prairie sod. Frame or brick houses with partitions, second storeys, glass windows and shingled roofs signalled the end of pioneering, as the original dwelling became a stable. Furniture would often be homemade. Also homemade were the cloth for blankets and clothing; carpets to cover unplaned wood floors; pails and children's toys. The mending of boots, harness and tinware might await an itinerant tradesman. Providing fuel for the huge fireplaces, usually the dwelling's only source of heat, was a constant chore; timber, although plentiful in many areas, had to be felled, trimmed, cut into lengths and carried home.

Pioneer diet depended on local produce and was generally nourishing but monotonous. Diaries and travellers' accounts tell of pork served 3 times a day, month in and month out, varied only by coarsely ground meal cakes, stewed dried apples or preserved small fruits and berries, and potatoes and other root vegetables. But game, fish and wildfowl were abundant in most places, and home gardens, dairy cattle and domestic fowl soon led to a more rounded and appetizing menu.

The characteristic co-operative principle that found expression in community work parties ("bees"), whether for house building, barn raising, clearing fields or making quilts, was reflected in local organization as well as in relations between the sexes. A church might serve Presbyterians in the morning and Methodists at night; a school district would speedily be formed, with the teacher being paid by local assessment and "boarded around" in the community. Settlers worked together to build roads, to attract tradesmen and small industry, and generally to promote the prosperity of their district.

Although pioneers on fur-trading, lumbering, mining and ranching frontiers were usually single men, women joined in the settlement of New France in the 17th and 18th centuries, of the Maritimes and Upper Canada 1760 to 1860, and throughout the prairie HOMESTEADING era, 1870-1914. Women's work was essential to the comfort and long-term success of a farm operation, and Canadian immigration and the Dominion Lands Policy encouraged family life as a guarantee of social stability and a larger population. Pioneer women worked tirelessly for their family's material and cultural betterment, and although they suffered loneliness and hardship, their courage and strength gave them a place of respect in Canadian life.

 

 

Maisons de rondins / Log Houses

Auteur / Author : WILLIAM C. WONDERS
Les maisons de rondins sont étroitement liées à l'établissement passé et présent des colons; les forêts canadiennes étant à même de fournir un matériau de construction. Bien avant l'arrivée des colons européens, les Indiens de la côte ouest utilisent des charpentes de rondins pour leurs grandes maisons planches. La plupart des premières maisons de fermes de la Nouvelle-France sont construites avec des billes de bois enfoncées verticalement dans le sol, une technique utilisée dans le nord-ouest de la France et par quelques autochtones de la région.

Plus tard, les pieux sont placés sur un appui ou sur une fondation au-dessus du niveau du sol. Cette méthode est remplacée par la méthode du pièce sur pièce : équarris grossièrement, des rondins relativement courts sont disposés horizontalement de façon à s'emboîter dans les entailles des coins. Les bouts effilés des rondins sont emboîtés dans des pieux verticaux, placés aux coins de la maison et le long des murs. Les marchands de fourrures reprennent cette technique dans la vallée de la rivière Rouge, tandis que la Compagnie de la baie d'Hudson adopte la même technique de construction, appelée «Red River frame» ou «Hudson's Bay style», pour ses comptoirs sur l'ensemble du continent.

Des maisons de rondins de différents modèles et de toutes dimensions caractérisent les colonies de peuplement du sud de l'Ontario. Les colons loyalistes introduisent les maisons de rondins de style pennsylvanien ou américain dont les rondins horizontaux sont emboîtés dans les coins de la maison selon différentes techniques. Ce style provient des colons suédois et finlandais venus s'installer au fleuve Delaware au XVIIe siècle. Il est ensuite perfectionné par les colons allemands et adopté par un grand nombre de colons écossais et irlandais. Même si la plupart des maisons de rondins sont plus tard remplacées par des maisons construites avec d'autres matériaux, plusieurs servent encore de résidences.

Les immigrants, tels les Ukrainiens, venus plus tard s'établir dans les prairies occidentales, construisent souvent leur première maison avec des rondins d'après le style de leur pays d'origine. Aujourd'hui, dans les forêts subarctiques, les maisons de rondins servent encore d'abris aux trappeurs et aux bûcherons. Leur aspect attrayant et leur efficacité thermique en font des choix populaires, non seulement pour les propriétaires de chalets d'été partout au Canada, mais aussi pour beaucoup de gens qui ont un intérêt renouvelé pour les maisons traditionnelles.

Log Houses are associated with pioneer settlement, past and present, and Canada's forests provided ready building material. West Coast Indians used log frames for their large plank houses long before the arrival of European settlers. Most of the first farmhouses in New France were constructed of posts driven vertically into the ground, a technique used in northwestern France and by some local Indians.

Later, the posts were placed on a sill or foundation above ground level. This method was displaced by the pièce-sur-pièce technique: roughly squared, relatively short logs were laid horizontally, to meet at rabbeted corners. Tapered ends of the logs fitted into slotted vertical posts at house corners and along the walls. Fur traders carried this technique into the Red River valley and the Hudson's Bay Co adopted it as its standard building form (called "Red River frame" or "Hudson's Bay Co frame") for its posts across the continent.

A wide variety of size and complexity in log houses characterized southern Ontario settlements. Loyalist settlers introduced "Pennsylvanian" or "American" log houses, with horizontal logs interlocked at the house corners by a variety of techniques, a style originating with 17th-century Swedish-Finnish colonists on the Delaware River, refined by later German settlers and adopted by far-ranging Scots-Irish pioneers. Although most log houses were later replaced by houses constructed of other materials, many are still occupied as residences.

Later immigrants to the Prairie West often patterned their first log houses after customary forms of their homelands (eg, Ukraine). In the subarctic forests, log houses still provide comfortable shelter for trappers and woodsmen. Their attractive appearance and thermal efficiency make them popular not only with summer cottagers across Canada, but among many people with a renewed interest in traditional housing.

 

 

Prairies de l'Ouest / Prairie West

Auteur / Author : GERALD FRIESEN
Les Prairies occidentales, la partie «intérieure Ouest» du Canada, sont bornées par le lac Supérieur et les montagnes Rocheuses, le 49e parallèle de latitude et le Bas-Arctique. Elles ont été peuplées en cinq grandes époques. La migration d'Asie, il y a environ 20 000 à 40 000 ans, est à l'origine d'une population autochtone de 20 000 à 50 000 individus aux environs de 1640. De 1640 à 1840, plusieurs milliers de commerçants de fourrures européens et canadiens, suivis par plusieurs centaines d'immigrants britanniques, fondent des douzaines de petits avant-postes ainsi que quelques colonies de style européen, dont la plus importante est la Colonie de la Rivière Rouge. La troisième vague, de 1840 à 1890, est principalement composée de Canadiens dont l'héritage est britannique. La quatrième, et de loin la plus importante, provient d'un grand nombre de nations et a lieu de 1897 à 1929, avec une interruption associée à la Première Guerre mondiale entre 1914 et 1922. La cinquième, provenant des autres provinces canadiennes et de partout dans le monde, commence à la fin des années 40 pour se poursuivre avec des fluctuations jusqu'à aujourd'hui. Pendant tout le XIXe siècle dernier, la région a aussi régulièrement perdu des résidants, en raison de leur migration vers d'autres régions du Canada et du monde.

Les premiers immigrants se déplacent d'une région naturelle à une autre selon les besoins de la saison, leur succès à la chasse et les relations diplomatiques avec les groupes voisins. Au cours du XVIIIe siècle, ils utilisent les produits européens provenant des échanges commerciaux tels les haches et les couteaux, et ils sont affectés par certaines innovations européennes, particulièrement le fusil et le cheval. Toutefois, ils gardent le contrôle de leur économie domestique et de leurs alliances diplomatiques.

Les autochtones perdent leur autonomie au XIXe siècle, en partie à cause de la pression exercée par la population de l'Est de l'Amérique du Nord et en partie à cause de la destruction de l'élément unique et crucial dans l'économie des plaines : le bison. Dans les années 1870, sept traités indiens sont négociés entre le gouvernement canadien et les autochtones des Prairies selon lesquels le gouvernement promet aux autochtones l'aide économique, l'éducation et la création de réserves en échange de leur souveraineté territoriale. C'est ainsi qu'en l'espace de quelques décennies, les autochtones des Prairies deviennent des pupilles de l'État.

D'un point de vue européen, l'histoire des Prairies occidentales est à ses débuts l'histoire d'une compétition pour la traite des fourrures. La compagnie de la Baie d'Hudson (CBO), société britannique fondée en 1670, fait la traite depuis des postes situés sur la baie d'Hudson jusqu'à ce que la compétition la force à établir des habitations à l'intérieur des terres, dans les années 1770. Les Français, et après eux la compagnie du Nord-Ouest(CNO), dont le siège est à Montréal, créent un réseau considérable de postes que La Vérendrye et ses fils repoussent toujours plus à l'Ouest pendant les années 1730, et qui sera encore élargi par Peter Pond dans les années 1770 et par Alexander MacKenzie de 1789 à 1793. Une compétition implacable force finalement la CBH et la CNO à fusionner en 1821. Restructurée, la CBH dirige la traite des fourrures et la région pendant encore 50 ans.

Quelques commerçants ont des liaisons avec des femmes autochtones. Au début du XIXe siècle, leurs descendants, qu'ils soient de langue française (Métis) ou de langue anglaise («sang-mêlés» ou nés au pays), sont assez nombreux pour constituer le groupe le plus important dans la colonie de la rivière Rouge et pour jouer un rôle important dans les opérations de la compagnie de fourrures. Et quand des intérêts étrangers se font plus pressants dans la région, de 1840 à 1860, ils se portent à la défense des intérêts locaux contre les spéculateurs. Le Canada garantit éventuellement la souveraineté sur la Terre de Rupert, mais seulement après que la rébellion de la Rivière Rouge (1869-1870) conduite par Louis Riel eut entraîné des révisions importantes des conditions permettant l'entrée de la région dans la Confédération.

En raison des pouvoirs étendus du gouvernement fédéral, et aussi parce que le premier ministre J.A. Macdonald a décidé de garder le contrôle sur les terres de l'Ouest, le cadre des politiques de développement est décidé à Ottawa. Les décisions prises entre 1870 et 1874 ayant trait à l'envoi de la Police à cheval du Nord-Ouest, à la topographie en quadrillage, aux politiques de PEUPLEMENT DES TERRES et aux activités de recrutement de l'immigration demeurent les pierres angulaires de l'histoire des Prairies pendant deux générations. Des décisions cruciales touchant les politiques tarifaires et le Canadien Pacifique sont prises de 1879 à 1880. La région doit devenir un arrière-pays agricole, bâti sur l'immigration internationale et la ferme familiale, et intégré à un secteur manufacturier croissant au centre du Canada.

L'échec de la rébellion du Nord-Ouest de 1885, l'adoption de la loi sur les écoles du Manitoba et d'autres législations relatives à la langue en 1890 montrent que, dorénavant, la société des Prairies se définira comme protestante, de langue anglaise et britannique. En 1905, la création de la Saskatchewan et de l'Alberta semble démontrer que la tradition britannique de l'évolution pacifique allant de la colonie à l'État indépendant a été remplie.

Mais avec le début du XXe siècle, de nouvelles forces à l'oeuvre dans les Prairies occidentales rendent ce contentement caduc. Les dirigeants sont troublés par l'arrivée de centaines de milliers d'immigrants non britanniques qui exercent de grandes tensions sur les institutions des Prairies au cours des quelques décennies qui suivent. D'un autre côté, en aidant à bâtir l'Ouest nouveau, ces arrivants abandonnent une bonne partie de leur culture traditionnelle.

Les Scandinaves et les Allemands s'assimilent rapidement; les Mennonites, les Juifs et les Ukrainiens cherchent à préserver davantage leur patrimoine culturel, contribuant de ce fait à créer la définition d'un Canada multiculturel; les Hutterites demeurent coupés de l'ensemble de la communauté; quelques autres groupes religieux, notamment certains Doukhobors et les Mennonites, préfèrent quitter la région plutôt que de s'adapter à ses normes. Vers 1950, les Prairies tendent beaucoup plus vers l'idéal canadien britannique que vers celui de tout autre culture.

Les institutions politiques sont aussi durement mises à l'épreuve au début du XXe siècle. Un large fossé séparant riches et pauvres engendre une véritable tension. Dans les villes comme Winnipeg et Calgary, les demeures luxueuses situées dans des quartiers résidentiels séparés, les clubs privés, les événements associés aux collèges et à la vie sociale ainsi que la concentration des pouvoirs économique et politique entre les mains d'une poignée de gens indiquent qu'une classe dirigeante se forme. Par contraste, la misère des quartiers pauvres tels ceux du North End, à Winnipeg, de certains chantiers de construction frontaliers et des villes minières comme Lovettville et Cadomin, en Alberta, suggèrent qu'une lutte des classes est en train de se créer. L'intensité des conflits opposant les travailleurs au patronat, spécialement à Winnipeg et les villes houillères de l'Alberta doivent être vues dans ce contexte.

Ce n'est pas avant le début du XXe siècle que se développe une lutte des classes généralisée, et ce, pour trois raisons. La première, c'est l'ouverture relative de la frontière agricole : la disponibilité des fermes freine la tendance au militantisme des travailleurs miniers et des travailleurs de chantiers en leur offrant l'alternative immédiate d'une vie modeste et d'un espoir pour l'avenir. À ses débuts, l'avenir de l'agriculture est trop incertain pour qu'une identité de classe puisse se définir clairement entre les fermiers. La deuxième raison, c'est le développement d'une classe moyenne professionnelle : les enseignants, les médecins, les travailleurs sociaux et les journalistes n'appartiennent ni à l'élite des affaires ni à la classe ouvrière et, en même temps, ils tempèrent la dureté des décideurs de l'économie tout en offrant de l'aide et de l'espoir aux travailleurs. Le troisième facteur qui prévient la formation de classes, c'est la Crise des années 30.

La combinaison de la sécheresse, de la crise du commerce mondial, de la baisse des prix des matières premières et de la disparition des investissements locaux est si dévastatrice que la société des Prairies en demeure longtemps paralysée. L'hostilité ethnique, dramatique à la fin des années 20, disparaît devant cette crise plus grave. Politiquement, la colère s'exprime soit par la coopérative Commonwealth Federation, qui est modérée, soit par une variante du Crédit social en Alberta. Les Prairies entrent dans la Deuxième Guerre mondiale plus pauvres et plus unies qu'à n'importe quel moment depuis le début du siècle.

Après 1940, il se produit une remarquable transformation des Prairies. La richesse se met à abonder dans la région quand le pétrole et la potasse, aussi bien que l'uranium et d'autres minéraux, viennent diversifier une économie dépendante du blé. Les progrès de l'agriculture, qui vont d'un équipement plus important à l'usage des fertilisants, des herbicides et des nouvelles espèces de plantes, accroissent la productivité, réduisent l'importance de la main-d'oeuvre et hâtent le départ des enfants des fermes vers les villes. En 1986, les fermes des Prairies sont au total deux fois moins nombreuses qu'en 1941.

Un changement significatif de la culture matérielle accompagne les gains d'ordre économique. La télévision, les automobiles, les avions et les universités rapprochent les Prairies d'un consensus culturel grandissant. Dans la région, les questions sociales ressemblent de plus en plus à celles des autres nations : la renaissance des peuples indigènes, un phénomène politique et culturel international, constitue un développement important; le gouffre qui sépare de plus en plus les fondamentalistes et les modernistes dans les Églises chrétiennes fait partie d'une tendance internationale; comme chez les autres nations, les débats politiques sur l'avenir de la région reposent sur la perception locale des sociétés multinationales et sur l'équilibre global du pouvoir. De la même façon, les changements sociaux adoptent le moule international : les transformations remarquables dans la famille qui accompagnent le contrôle des naissances généralisé, le taux de participation plus élevé des femmes au marché du travail, le taux de divorce plus élevé et l'accroissement de l'espérance de vie sont évidentes dans les Prairies occidentales comme partout dans le monde de l'Atlantique Nord.

L'art des Prairies est également devenu international. Bien que fermement enracinés dans l'imagerie locale, même consciemment, les artistes, les romanciers, les comédiens et les danseurs des Prairies trouvent leur contexte, leurs critères et leur public dans la communauté internationale plutôt que dans la communauté locale ou régionale. Des années 40 aux années 80, les Prairies sont devenues un quartier du monde capitaliste industriel de l'Atlantique Nord.

 

Prairie West, the "western interior" of Canada, is bounded roughly by Lake Superior and the Rocky Mountains, the 49th parallel of latitude and the low Arctic. It was peopled in 5 great eras: the migration from Asia, probably 20-40 ,000 years ago, produced a native population of 20-50 000 by about 1640; several thousand European and Canadian fur traders followed by several hundred British immigrants, between 1640 and 1840, created dozens of small outposts and a few European-style settlements, the largest being the Red River Colony; the third wave, 1840s-90s, consisted chiefly of Canadians of British heritage; the fourth and by far the largest was drawn from many nations and occurred 1897-1929, with a hiatus 1914-22 associated with WWI; and the fifth, drawn from other Canadian provinces and from around the world, commenced in the late 1940s and has continued with fluctuations to the present. Throughout the last century, the region has also steadily lost residents, as a result of migration to other parts of Canada and the world.

The first immigrants moved between resource zones according to the dictates of the season, the fortunes of the hunt, and diplomatic relations with neighbouring groups. In the 18th century they utilized European trade goods such as axes and knives, and were affected by some European innovations, particularly the gun and the horse, but they remained in control of their domestic economies and diplomatic alliances.

Native autonomy was lost in the 19th century, partly through population pressure from eastern North America and partly because of the destruction of the single, crucial element in the plains economy-the buffalo. Seven Indian Treaties were negotiated in the 1870s between the Canadian government and the natives of the western interior, exchanging native sovereignty over the land for government promises of economic assistance, education and the creation of reserves for native people. Thus, in a few short decades, prairie natives became wards of the state.

From the European perspective, the early history of the western interior was the story of fur-trade competition. The English  Hudson's Bay Company, founded 1670, traded from posts on Hudson Bay until competition forced it to establish inland houses in the 1770s. The French and later the North West Compagny, with Montréal as headquarters, created an extensive network of posts that was pushed into the Prairie West by the La Vérendryes in the 1730s, and extended by Peter Pond in the 1770s and Alexander MacKenzie, 1789-93. Deadly competition finally forced the merger of the HBC and the NWC in 1821. The restructured HBC ruled the fur trade and the region for another 5 decades.

Some traders established liaisons with native women. Their offspring, whether French-speaking (Métis) or English-speaking ("mixed bloods" or country born), were sufficiently numerous by the early 19th century to constitute the largest group in the Red River Colony and an important component of fur-company operations. They led the defence of local interests against incoming speculators when outside interest in the region quickened in the 1840s-60s. Canada eventually secured sovereignty over Rupert's Land, but only after the 1869-70 Red River Rebellion led by Louis Riel resulted in significant revisions to the terms allowing the region's entry into Confederation.

Because of the federal government's great powers and because of PM J.A. Macdonald's decision to retain control of western lands, the policy framework for development was created in Ottawa. Decisions taken between 1870 and 1874 on the dispatch of the North-West Mounted Police, the square survey, the policy on HOMESTEADING and immigration recruitment activities remained cornerstones of prairie history for 2 generations. Crucial decisions on tariff policy and the Canadian Pacific Railway followed, 1879-80. The region was to become an agricultural hinterland, built upon international immigration and the family farm, and integrated with a growing manufacturing sector in central Canada.

The failure of the 1885 Nortwest Rebellion and the passage of the Manitoba Schools Act and other language legislation in 1890 made plain that the defining elements of prairie society were henceforth to be Protestant, English speaking, and British. The creation of Saskatchewan and Alberta in 1905 seemed to demonstrate that the British tradition of peaceful evolution from colony to self-governing state had been fulfilled.

New forces at work in the Prairie West around 1900 made complacency inappropriate. Social leaders were troubled by the arrival of hundreds of thousands of non-British immigrants who placed great strains upon prairie institutions during the next few decades. The newcomers, on the other hand, relinquished much of their traditional culture as they helped to build the new West.

Scandinavians and Germans assimilated quickly; Mennonites, Jews and Ukrainians sought to retain more of their cultural heritage, and eventually helped to create a multicultural definition of Canada; Hutterites remained isolated from the larger community; and some other religious groups-notably a few Doukhobors and Mennonites-preferred to leave the region rather than accommodate to its norms. By the 1950s the Prairies were far closer to a British Canadian model than to that of any other culture.

Political institutions, too, underwent severe testing in the early 20th century. A wide gap between the wealthy and the poor produced real tension. In cities such as Winnipeg and Calgary, luxurious homes in segregated residential areas, exclusive clubs, colleges and social events, and the concentration of political and economic power in the hands of a few were signs that a ruling class was evolving. By contrast, the squalor of slum areas such as Winnipeg's North End, some frontier construction camps, and resource towns such as Lovettville and Cadomin, Alberta, suggested that a class struggle was in the making. The intensity of labour-management conflicts, especially in Winnipeg and the Alberta coal towns, should be seen in this context.

A full-scale class struggle did not develop in the early 20th century for 3 reasons. The first was the relative openness of the agricultural frontier: the availability of homesteads undercut the militancy of many camp and mine workers by offering a ready alternative, a modest living and hope for the future. At this early stage, the future of agriculture was too uncertain to permit the existence of firm class identities among farmers. Second was the development of a professional middle class: the teachers, doctors, social workers and journalists belonged neither to the business elite nor to the working class, and simultaneously tempered the crudeness of the economic decision makers while offering aid and hope to the workers. The third factor working against class formation was the Great Dépression.

So devastating was the combination of drought, international trade crisis, commodity price declines and the disappearance of local investment that prairie society went into prolonged stasis. Ethnic hostility, serious in the late 1920s, dissipated in the face of this more serious crisis. Political expressions of anger were channelled into either the moderate Co-operative Commonwealth Federationor Alberta's variant of the Social Credit movement. The Prairie West entered WWII poorer and more united than at any time since 1900.

After 1940 a remarkable shift in prairie fortunes occurred. Wealth flowed into the region as oil and potash, as well as uranium and other minerals, diversified an economy that had once relied on wheat. Improvements in agriculture, which ranged from larger equipment to fertilizers, herbicides and new plant strains, increased productivity, reduced the size of the work force and hastened the departure of farm children to urban centres; prairie farms in 1986 numbered half the 1941 total.

Accompanying the economic gains was a significant change in material culture. Television, cars, airplanes and universities brought the Prairie West closer to a growing global cultural consensus. Social issues within the region increasingly resembled those in other nations: the indigenous peoples' renaissance, an international political and cultural phenonemon, was an important development; the growing gulf between fundamentalists and modernists in the Christian churches was part of an international trend; and political debates about the fate of the region, as in other nations, were grounded upon local perceptions of Multinational Corporations and the global balance of power. Similarly, social change assumed an international cast: the remarkable changes in the family that accompanied widespread birth control, higher employment rates for women, higher divorce rates and increases in life span were evident in the Prairie West and around the North Atlantic world.

Prairie art also became international: though rooted firmly, even self-consciously, in local images, prairie artists, novelists and performers in theatre and dance found their context, their standards and their audience in an international rather than a local or regional community. The Prairie West, 1940s-80s, became a neighbourhood of the North Atlantic industrial capitalist world.

 

 

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