Maman Dion est décédée à 92 ans

Elle était la plus illustre maman du Québec, la mère de Céline Dion. Thérèse Tanguay Dion, qu’on appelait affectueusement «Maman Dion», est décédée vendredi matin à l'âge de 92 ans.

La femme de Charlemagne avait souffert de divers problèmes de santé ces derniers mois. En juillet dernier, sa fille aînée, Claudette Dion, avait annoncé que sa mère vieillissante avait développé des troubles de mémoire, ainsi que des problèmes d’audition et d’acuité visuelle

La dame portait bien son surnom. Mère de 14 enfants – Denise, Linda, Louise, Manon, Liette, Pauline, Ghislaine, Claudette, Michel, Paul, Daniel (décédé en 2016), Clément, Jacques et, bien sûr, Céline – et grand-maman de 32 petits-enfants, Thérèse Tanguay Dion était également arrière-grand-mère 48 fois et avait même 6 arrière-arrière-petits-enfants à chérir.          

C’est sans doute aussi son cœur de maman qui la poussait à s’impliquer socialement, notamment par l'intermédiaire de la Fondation Maman Dion, qu’elle a créée en 2005 et qui offre matériel scolaire, lunettes et vêtements neufs aux enfants et aux adolescents issus de milieux défavorisés.          

Le grand amour de sa vie, le père de ses enfants, Adhémar Dion, était décédé en novembre 2003, à l’âge de 80 ans.

En juillet 2019, sa fille Claudette Dion, dans une entrevue accordée au magazine Échos Vedettes, avait évoqué le déclin de la santé de sa mère, qui avait toujours été très active.          

«Ce qu’elle avait à donner, elle l’a donné. Là, c’est à nous de lui donner de l’attention et de l’amour», avait dit Claudette.          

On apprenait alors que Maman Dion avait perdu de l’acuité visuelle et que sa mémoire lui jouait parfois des tours. Elle avait aussi des problèmes d’audition et de baisse d’énergie.     

Une vie d’extrêmes  

De sa naissance à Sainte-Anne-des-Monts, en Gaspésie, le 20 mars 1927, aux paillettes de Las Vegas, Thérèse Tanguay Dion aura connu les extrêmes d’une vie bien remplie.          

Issue d’une famille modeste, Thérèse Tanguay Dion a eu pour exemple la résilience et la persévérance de son père, Achille Tanguay, qui a notamment bâti de ses mains ce qui deviendrait le village de Saint-Bernard-des-Lacs.          

«Toute sa vie, c'est une femme qui a fait des choix, qui voulait avoir la maîtrise de son existence», écrivait Georges-Hébert Germain dans Thérèse Dion, la biographie qu’il a consacrée à la célèbre femme.          

Assez jeune, elle a été obligée d’arrêter l’école pour aider à la maison. Mais, même si les conditions de vie étaient difficiles, l’amour au sein de cette famille fut extraordinaire.          

C’est son père qui lui a transmis son amour de la musique en lui offrant un violon pour son 11e anniversaire de naissance.          

«C’est le plus beau cadeau que j’ai eu de ma vie», a déjà raconté Maman Dion dans un documentaire biographique.          

La musique, qui a toujours fait partie de son existence, lui a d’ailleurs permis de rencontrer, quelques années plus tard, celui qui allait devenir son mari, Adhémar Dion, grand joueur d’accordéon.          

Ils se sont mariés en 1945 et, même si ce dernier n’était pas très intéressé à avoir des enfants, il s'est laissé convaincre. Ils en auront 14. La «petite dernière», Céline, née le 30 mars 1968, était vouée à l’éclatant destin de devenir une chanteuse internationale, la plus grande chanteuse au monde, selon plusieurs.          

Ce n’était qu’un rêve 

Tous ses enfants jouaient de la musique et chantaient, mais Thérèse Tanguay Dion a très tôt décelé que la cadette de la fratrie avait un don particulier pour le chant.          
Photo d'archives

 «Je voulais qu’elle devienne une grande chanteuse, mais, pour démarcher des producteurs, je savais qu’il ne fallait pas qu’elle fasse des reprises. Mon plan était qu’elle chante ses propres chansons», s’était rappelé Maman Dion dans une entrevue pour sa biographie.          

Ne trouvant pas de parolier pour pondre des chansons à sa fille de 12 ans, elle a décidé d’écrire elle-même la pièce qui serait le premier succès de Céline, Ce n’était qu’un rêve, dont son fils Jacques a composé la musique.            

Après avoir envoyé la cassette à René Angélil, alors producteur de Ginette Reno, Mme Dion a obtenu un rendez-vous avec lui le 13 mars 1981. Une rencontre qui a scellé le destin de sa fille et le sien. René Angélil a accepté de prendre la jeune fille sous son aile.          

Le succès de Céline Dion a été immédiat, d’abord au Québec, puis à l’international. Pendant plusieurs années, Maman Dion a accompagné sa fille dans ses obligations professionnelles aux quatre coins du monde, jusqu’à ce que Céline atteigne l’âge de la majorité.          

Carrière médiatique  

Par la suite, Thérèse Tanguay Dion n'a pu se résoudre à rester à la maison sans s’occuper. Elle a voulu relever de nouveaux défis et, comme elle était reconnue pour être une cuisinière hors pair, elle a décidé, au début des années 1990, de commercialiser les pâtés Maman Dion.          

Durant la tournée de promotion de sa nouvelle entreprise, elle a été invitée sur le plateau de l’émission Le Point J, un talk-show animé par Julie Snyder. Cette dernière ayant trouvé Mme Dion particulièrement allumée et intéressante, elle lui a offert, quelques mois plus tard, d'animer une émission culinaire.          
Photo d'archives

En 1999, Thérèse Tanguay Dion entamait donc une nouvelle carrière d’animatrice à la télévision, à plus de 71 ans. Pendant trois saisons, elle sera à la barre – et aux fourneaux – du magazine culinaire Maman Dion, à TVA. Éric Salvail était son coanimateur.          

En 2002, toutefois, elle a subitement mis un terme à toutes ses activités pour rester au chevet de son mari Adhémar, atteint d’un cancer.          

Philanthropie  

Après le décès d’Adhémar, en 2003, Maman Dion n'est pas revenue à la télévision, choisissant plutôt de se consacrer à aider les autres.          

Plus tôt, en 1998, elle avait mis sur pied la Fondation Achille Tanguay (du nom de son père), qui venait en aide aux familles dans le besoin. En 2008, l’organisme a réorienté son action et est devenu la Fondation Maman Dion, qui, à chaque rentrée scolaire, offre des fournitures scolaires et des vêtements aux enfants issus de milieux défavorisés.          

En parallèle, elle s’est aussi investie dans la mise sur pied d’un centre de soins palliatifs, la Maison Adhémar-Dion, qui accueille gratuitement des personnes en fin de vie.          

Tout au long de sa vie, Thérèse Tanguay Dion a reçu des honneurs de toutes sortes. En mai 2019, Marguerite Blais, la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, lui avait notamment remis la médaille de l’Assemblée nationale pour son exceptionnelle implication dans la communauté.
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Journal de Montréal, vendredi 17 janvier