Compère Rouge Gorge et sa mie la mésange,
Partageaient de concert hivernale
pitance,
Que mains de deux enfants sur fenêtre
posaient.
Loriot, pipits, chardonnerets, sur appui eux aussi
Puisaient leur survivance.
Tout à son tour chacun picorait la provende,
Et veillait den laisser, afin quonc ne manque
Le grain du compagnon, le gras de la commère.
Depuis moult années nos si charmants oiseaux,
En toute intelligence et en toute amitié,
Vivaient jusquau temps chaud, attendant labondance.
Or, voilà quil advint quun vulgaire moineau,
Venu on ne sait doù, leur disputa leur grain.
Hargneux, voleur, jaloux, il fit tant et si bien
Quil chassa les amis, en dérobant leur grain.
Se goinfra, sempiffra, ne partageant pas mie,
Gardant par de vers lui, ne leur laissant plus rien.
Rouge Gorge maigrit, Mésange sétiola.
Cétait, pour les amis, la fin de la noria
Que jusquici en chur ils avaient fait joyeux.
Le goujat quant à lui se faisait de la graisse.
Il devenait dodu, grasset, pesant et lourd.
Il faisait le faraud et singeait les seigneurs,
Clamant que, étant fort, tribut lui revenait.
Il piaillait tant et plus, raillant les deux compères
Et disait au plus haut " le gras vient au plus fier,
Je suis sur mon domaine ! "
Ses cris et piaillements tant et si bien tombèrent
En oreilles pointues dun matou de passage,
Étique et affamé, en quête daventure.
Le nigaud lui plût fort, dodu, et gras, si lourd,
Quil ne put senvoler et tomba sous la griffe.
Avant que de dire " ouf ", Grominet lengloutit,
Jusquà sen pourlécher, sauvé de la famine.
Ainsi font les faquins, rarement partageurs
Préférant, jen ai peur, mourir de trop manger
En méprisant les leurs, sans rien leur accorder,
Indifférents et sourds à qui pleure de faim.
Compère Rouge Gorge et sa mie la Mésange
Ont repris leur noria, en bonne intelligence.
Il faut savoir donner, quand on veut recevoir.
De solidarité, toujours, la vie nous fait devoir.
Yvon Doffagne
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