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Jouvet au th��tre




Ondine
de Jean Giraudoux

Cette pi�ce fut cr��e � Paris sur la sc�ne de l'Ath�n�e, le 4 mai 1939
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Textes du programme:


Photos du programme






Ondine: synopsis

Il �tait un chevalier appel� Hans qui, pour l'amour et la gloire de sa fianc�e, la comtesse Bertha, fille adoptive de son Roi, courait les aventures dans une sombre et redoutable for�t. En vain, depuis un mois, il s'effor�ait de la traverser, esp�rant quelque rencontre singuli�re. Pas une �me. Une seule compagnie: son cheval auquel il se confie, les oiseaux et les b�tes sauvages.

Enfin, un soir d'orage, apr�s une longue journ�e de pluie, il atteignit aux rives sauvages d'un lac. Au bord du lac, vivait une toute jeune fille d'une merveilleuse beaut�; on l'appelait Ondine. Tout en elle �tait surprenant: ses jeux et ses plaisirs n'�taient pas ceux des autres enfants; sous ses doigts, les objet les plus vils devenaient pr�cieux, tout semblait s'accomplir autour d'elle par miracle. Les �l�ments eux-m�mes lui ob�issaient.
Elle passait pour �tre la fille d'un vieux couple de p�cheurs, mais il n'en �tait rien. Sous cette apparence humaine se cachait une v�ritable ondine, la ni�ce m�me du Roi des Ondins, tout puissant sur le monde des eaux.
Par ce soir d'orage et de pluie, elle vit venir le Chevalier. A peine l'aper�oit-elle qu'elle se prend d'un grand amour pour lui. Et pas un instant elle ne doute que lui aussi l'aime et qu'il est venu l� dans l'intention de l'�pouser. Elle le lui dit. Le Chevalier �coute Ondine, �tonn� et ravi � la fois. Jamais fille au monde ne lui a paru plus belle, plus aimante, plus digne d'�tre aim�e. Il est conquis �me et corps. Rien ne pourra d�sormais le d�tacher de la jeune fille. Il demande sa main � ceux qu'il croit �tre ses parents.
Mais le Roi des Ondins ne pardonne pas � Ondine d'aimer un homme. Il veut la detourner de ce mariage. "Il te trompera!" lui crie-t-il. Et tout le peuple des eaux lui r�p�te ces mots, se moque d'elle et de son amour. Ondine refuse de les croire. Elle les d�fie. Alors le Roi des Ondins lui propose de faire LE PACTE: Si le Chevalier la trompe, il aura le droit de le tuer. Ondine accepte.
Le Chevalier �pouse Ondine. Il ignore tout de la nature de sa femme et du pacte qui la lie. Mais Ondine sait que tout ce qui est l'eau surveille �troitement son mari.

Et maintenant, tous deux vont quitter le lac solitaire pour aller vers le monde, vers les hommes - et vers les femmes. - Ils partent pour la cour du Roi o� Hans reverra Bertha, la fianc�e qu'il abandonna. Le Roi des Ondins les suit, dissimul� sous un d�guisement.
Comment et pourquoi le Chevalier quitta la Cour, comment et pourquoi il se retira dans son ch�teau, loin du monde, avec Ondine et Bertha et ce qu'il en advint, c'est ce qui va vous �tre cont�.


La Motte Fouqu�

Le nom de Ondine est un nom courant, presque un nom commun. Il d�signe cette charmante divinit� qui habite chaque lac ou chaque ruisseau.
Mais il est li� pour toujours � celui du baron de La Motte Fouqu�, descendant d'un �migr� fran�ais en Allemagne et officier de cuirassiers prussien, depuis qu'il publia en 1811 le conte qui portait pour titre cet unique nom. Ce n'est pas qu'il ait cr�� en litt�rature ce personnage. Depuis Paracelse, qui ouvrit notre fable aux nymphes, aux sylphes, aux salamandres, notre r�pertoire fabuleux abonde en divinit�s secondaires de l'eau, dont la plus c�l�bre, M�lusine qui, �pouse d'un humain, devait cependant se plonger chaque matin dans une source et un jour oublia, rel�ve de l'hydrographie fran�aise, et dont les plus harmonieuses ont �t� jusqu'ici les Filles du Rhin.
Mais, par sa na�vet� et la fra�cheur de son intrigue, le petit roman o� La Motte Fouqu� d�crit l'amour d'une Ondine pour un chevalier errant a �clips� ceux de ses devanciers et son h�ro�ne est devenue une des favorites et des filleules du romantisme europ�en. Qu'il le lise dans sa premi�re traduction, celle de la baronne de Montolieu, qui date de 1818, ou dans la derni�re, celle du comte Charles de Polignac qui est de cette ann�e m�me, le lecteur fran�ais ne peut r�sister au charme de l'aventure, o� l'appareil moyenageux si d�suet des chapelains, des armures et des vieux parents adoptifs perd lui-m�me de sa convention. Sur le paysage d'Europe rh�nane, sur ces for�ts de Souabe ou de Palatinat, r�gne une sorte de style et de myst�rieuse clart� que l'�poque n'explique pas, mais dont la source se r�v�le � celui qui a visit�, dans l'Orne, le ch�teau ancestral des La Motte Fouqu�, encore intact avec ses douves de gr�s, ses jardins Louis XIII, son �tang, et qui ressemble plus qu'aucun autre au ch�teau imaginaire de celui qui a cr�� la vraie compagne humaine d'Ondine, je veux dire G�rard de Nerval et Sylvie. Peu importe que La Motte Fouqu� ait entass� cent soixante-dix volumes d'indigeste chevalerie et d'interminables sagas. Du fait qu'il a �crit Ondine, il est le Parsifal des �crivains, il n'a �crit qu'Ondine.

En 1909, Charles Andler, qui dirigeait les �tudes de litt�rature allemande � la Sorbonne, chargea son �tudiant Jean Giraudoux de lui apporter, la semaine suivante, un commentaire d'Ondine. Une excursion � Robinson, puis un si�cle et une carri�re particuli�rement occup�s ont retard� jusqu'� cette ann�e ce commentaire qui a pris, gr�ce � Louis Jouvet et Madeleine Ozeray, la forme d'une pi�ce, et qui est donc d�di�, comme le fut Siegfried, � la m�moire de ce ma�tre qui restera la conscience de tous ceux qui ont re�u � leur naissance en Europe, ils sont nombreux, l'�me franco-allemande.
--Jean Giraudoux


Extrait de:
Les Cinq Tentations de La Fontaine


Il est un chemin path�tique entre tous, c'est celui qui m�ne un �crivain � son chef-d'oeuvre. Entre tous les rendez-vous qui se donnent entre les �tres, les plantes, ou les lumi�res dont la combinaison entretient le monde, le rendez-vous le plus noble, et d'ailleurs le plus incertain, le plus menac�, est celui que se donnent, � travers le silence et l'ignorance mutuelle, le po�te et une ombre dont il ne conna�t pas lui-m�me le visage. Au d�part, le po�te ne sait m�me pas quelle figure va l'accueillir, dans cette confrontation dont il est oblig� de chercher la date chaque jour et la place en tous lieux. Il ne sait m�me pas si c'est un homme ou si c'est une femme qui va l'accueillir. L'inspiration est la recherche obscure de ce sexe, la d�termination de la nature de cette amiti�, ou quelquefois de cette passion, qui vont lier cr�ateur et cr�ature cr��e. Eux-m�mes sont quelquefois surpris de la rencontre. Tous n'ont pas, au d�part, cette partialit� qui a amen� infailliblement Corneille vers des hommes et Racine vers des femmes. Quand Marcel Proust, au premier rendez-vous avec les personnages d'une oeuvre qui contiendra toute la tendresse de notre �poque, voit appara�tre, bien loin devant les autres, accouru le premier � l'appel avec tant d'avance qu'il semble devoir �tre le seul, se h�tant pour repr�senter l'amour, la jalousie, la passion mortelle et le roman, ce petit vieux bien calme, bien discret, peu bavard et un peu pommad� qu'est M. Swann; quand Maurice Barr�s, � l'aube d'une carri�re qu'il veut masculine, dont il fera une lutte militaire, politique, et se rendant � Aigues-Mortes, pour son premier contact avec des h�ros volontaires et conscients, ne voit appara�tre et circuler sur les remparts de Saint-Louis et des Crois�s qu'une jeune et futile personne, tous deux ont pu �tre d�sorient�s, et ce n'est qu'apr�s un premier et long dialogue qu'ils comprennent: l'un, que sur la barbe bien calamistr�e de M. Swann c'est le vent m�me de l'amour qui souffle, et l'autre que, sur les bras p�lis par la mort de Petite-Secousse, c'est celui de l'ambition. Et heureux encore ceux pour qui tiennent ces rendez-vous. Certes, il en est qui ont des rendez-vous � toutes les heures, � tous les endroits; d'autres auxquels suffit pour la vie une seule rencontre, comme Benjamin Constant et Adolphe, comme l'abb� Pr�vost et Manon. Mais, parfois, que de d�marches et de contremarches vaines! Combien d'�crivains, � travers leur vie enti�re, et en le cherchant dans la ville, et dans la campagne, et dans la peine ou la mis�re, et dans le soleil, n'ont pu arriver � d�couvrir l'endroit du rendez-vous! Vous vous rappelez cette l�gende de l'Op�ra, o� deux personnes qui sont frapp�es d'un coup de foudre r�ciproque se donnent rendez-vous � un bal masqu�, sous l'horloge, � minuit? A l'heure dite, ils sont l�, et minuit sonne, et ils enl�vent leur masque, mais, dit la l�gende, ce n'�tait, h�las! ni l'un ni l'autre. C'est l'histoire de la plupart des �crivains. Face � face avec ce qu'ils croient leur chef-d'oeuvre, ils ne sont plus l� et le chef-d'oeuvre n'y est pas non plus. Ils ne sont l� tous deux que lorsque chacun d'eux se croit devant un miroir, que lorsqu'ils se ressemblent � s'y m�prendre, que lorsque Racine est soudain le portrait de Ph�dre, Proust, le portrait d'Albertine. Ils ne peuvent s'�pouser que dans la ressemblance et l'identit� absolues. Et il ne s'agit pas seulement de la poursuite du personnage, du h�ros qui incarnera un nom et incarnera l'auteur. Rendez-vous est pris aussi avec tout ce qui fait un chef-d'oeuvre: son style, son atmosph�re, sa langue. Le grand rendez-vous est pr�c�d� de mille petits rendez-vous avec certains mots, certaines inflexions, certaines lueurs et certaines odeurs qui jalonnent la vraie route. C'est par des mots qui luisent, par des expressions qui s'allument, que Racine est men� de fa�on si s�re � B�r�nice, Shakespeare � Cressida. Et rendez-vous est pris avec les formes o� s'exprime l'oeuvre, avec ces genres que sont la trag�die, la com�die, le roman. Quand les Grecs leur donnaient le nom de Muses, quand ils repr�sentaient des formes litt�raires, que ce f�t l'Histoire, la Po�sie l�g�re ou la Satire, sous la forme d'humaines vivantes, c'est qu'ils savaient bien qu'il s'agit l� de v�ritables rendez-vous et de v�ritables accords.
--Jean Giraudoux






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