- IL Y AVAIT ...
- à Mariette M.
Il y avait la floraison magique des lilas
et les cerises comme des baisers, que
dévoraient
les merles, et puis la kichenotte
sur le regard si bleu de ma grand-mère ...
Il y avait le cimetière aux trois cyprès
toutes les couronnes de perles
et les chrysanthèmes de la Toussaint ...
- Il y avait le fleuve, ô vie.
Les champs de blé, tous les glaneurs,
cette chaleur, cette torpeur d'été,
les grands feux de javelles dans la petite
cheminée où les châtaignes
pétaient sous la braise...
Et j'étais là, petite fille sage, attentive
aux belles fleurs, aux chants d'oiseaux
aux contes de ma grand-mère aux yeux si bleus...
- Il y avait le fleuve, ô vie.
Les montreurs d'ours sur la place ombragée,
l'église romane, familière, assoupie,
les laveuses à genoux sur la berge
empierrée
et qui frappaient le linge, à tour de bras,
de leurs battoirs...
Les femmes en noir, autour du puits, qui jacassaient,
et les fêtes de l'eau, les barques de lumière...
- Il y avait le fleuve, ô vie.
Le cochon crucifié et qu'on tue et qui hurle
sans fin, dans ma mémoire encore,
les vendanges et le moût collant aux jambes
de ceux qui piétinaient les grappes,
la mule de Daniel, les charrettes de foin,
et sous la kichenotte, le regard si bleu
de ma grand-mère ...
- Il y avait le fleuve, ô vie.
Au moment de la crue, les branches et les troncs,
charriés par le courant, sombres cadavres,
ballottés, emportés dans l'étonnant
vertige,
la forge du maréchal-ferrant.
Les maisons sapées par les termites
qui s'effondraient d'un coup ...
Partout leurs plaies ouvertes ...
- Il y avait le fleuve, ô vie.
Dans le clapier, tous les petits lapins
que j'aimais tant, que pourtant l'on tuait ...
Et puis ... la maladie, le regard bleu terni,
la kichenotte au feu, le rire qui se brise,
la mémoire qui fout le camp,
les passeroses passaient,
le linge sale s'entassait ...
- Il y avait le fleuve, ô vie.
-
- Ce jour de grand soleil
- ce jour d'adolescence
- et ce parfum, dans l'air, des robiniers
- dont les bouquets pendaient comme des lampions
- du Quatorze Juillet ...
Et puis ... Ce tas de gris qui tombe du grenier,
ce corps, comme un pantin, tous les ressorts brisés
...
Grand-mère ... C'était toi, morte, sur le
pavé ...
Ton beau regard si bleu comme fardé de glaires
...
Et je me prends encore à hurler ma douleur ...
- Il y a pourtant toujours le fleuve, ô vie.
19 janvier 1985
Arlette-Marthe FOURNIER
* Moulin de
Poésie n° 3 *
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île de nacre
étirée dans la lumière
comme un oiseau...
tu m'appelles
de tes mouettes rieuses
m'enivres au vent de mimosa
me charmes ...
referme sur moi Océanide
les draps roses de tes couchants
c'est dans tes sables
que je veux m'endormir...
Janine LAMIRAUD
* Moulin de Poésie n° 20 *
*****
et...
quand ils jouent à quatre mains
improvisent en majeur
arpèges et points d'orgue
sur l'ivoire frémissant...
s'abandonnent avec volupté
- concerto intimiste
- brûlante symphonie
- ou
- fugue vers l'AUTREFOIS
-
- il n'y a pas de lendemains
Janine LAMIRAUD
* Moulin de Poésie n° 20 *
*****
l'horizon savoure
l'ultime lueur du jour
l'océan dans le silence murmure
- étale d'une soirée magique -
Elle
émerge des vagues
lui apparaît telle Nausicaa
l'écume en bracelet
autour de ses chevilles
et ses ongles de nacre sur le sable
rendent jaloux les coquillages...
bras en corbeille elle lisse sa chevelure
brunes algues étirées
jusque au creux des reins
... de loin Il la suit du regard
comme dans un rêve...
demain demain j'oserai"
Janine LAMIRAUD
* Moulin de Poésie n° 20 *
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