Le secteur horticole urbain et périurbain


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Table des matières

Cette page:
 
1.    Situation générale
    1.1 Les superficies cultivées
    1.2            Importance des espèces cultivées
2.     Les systèmes de production horticoles
    2.1            Les périmètres maraîchers urbains et périurbains
    2.2            Les parcellaires maraîchers
    2.3            Les agriculteurs pratiquant l'horticulture
3.     Economie de la production et de la consommation des fruits et légumes
    3.1            La terre
    3.2            Le capital et les intrants
    3.3            Le travail
    3.4            Le profit dans la production maraîchère
 
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4.
     Environnement de la filière
    4.1            Législation foncière
    4.2            Législation phytosanitaire
    4.3            Le cadre tarifaire
    4.4            Les services publics
    4.5            Les organisations paysannes (OP)
    4.6            Les ONG/ONGD
 
 
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1.     Situation générale

Dans ce cadre, de nombreuses familles urbaines s’adonnent à des activités de production maraîchères centrées sur des cultures maraîchères à cycle court[1], destinés à approvisionner les marchés urbains et à leur assurer des revenus réguliers pour survivre. Outre les périmètres ‘organisés’, depuis la crise économique les familles très pauvres n’ont souvent pas d’autre choix que de cultiver des petites parcelles (dans des conditions sanitaires et d’occupation précaires) pour assurer un minimum de qualité nutritionnelle à leur famille et/ou d’échapper à la malnutrition voir la faim. De plus, les zones périurbaines les systèmes agricoles se sont mutés vers la production maraîchère, principalement durant la saison sèche qui est plus favorable.

Chaque maraîcher ‘professionnel’ cultive en moyenne une dizaine d’ares : l’activité maraîchère constitue pour 95% d’entre eux leur unique source de revenu. De plus, un grand nombre de familles de Kinshasa s'approvisionnent à partir de parcelles contiguës à leur domicile dont ils tirent leurs besoins en légumes consommés et également une partie de leurs revenus. Le "squatting" ou ‘développement sauvage’ est la règle, de nombreuses parcelles sont situées le long des routes et des rivières.

La production maraîchère de la capitale a augmenté grâce aux nombreux petits maraîchers localisés dans le tissu urbain de la ville. Environ 7.250 maraîchers spécialisés sont actuellement installés dans les zones aménagées de la capitale (environ 720 ha, dont 558 ha ‘utiles’)[2]. Bien que ces aménagements soient appropriés, certains ne se sont pas avérés durables ou "reproductibles". Les périmètres sont actuellement gérés par des coopératives (13 coopératives) dont les membres n'ont pas accès aux titres de propriété des parcelles qu'ils cultivent. Face à l’incapacité des coopératives de répondre aux besoins des maraîchers travaillant dans ces périmètres, de nombreuses associations plus petites se constituent, les membres de ces associations ne coopèrent pas dans les coopératives.

Cependant la production pourrait être augmentée, car la situation est favorable à plusieurs titres , dont (i) la disponibilité de la main-d’oeuvre (les cultures maraîchères requérant une personne à temps plein par 500 m² soit environ 20 emplois à l’hectare), (ii) les nombreuses parcelles de terre fertile (dont les bas-fonds) sont disponibles à l’intérieur des villes ainsi qu'en périphérie, et (iii) un marché potentiel pour écouler des quantités additionnelles de fruits et légumes.

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1.1            Les superficies cultivées

Faute de statistiques fiables, les données recueillies par les équipes HUP[3] permet d’obtenir une image approximative des surfaces actuellement cultivées en produits maraîchers.

Les surfaces sont exploitées à leur maximum en saison sèche, alors qu’en saison des pluies moins de la moitié est emblavée en cultures maraîchères et sont soit emblavées en vivriers (riz, maïs), soit laissés en friche, dû aux conditions d’inondation temporaire. Les périmètres horticoles aménagés de Kinshasa sont généralement emblavés en produits maraîchers toute l’année, alors que dans les villes plus petites l’activité vivrière complémentaire est souvent considérée en saison des pluies.

Outre les difficultés techniques de production en saison des pluies (surtout pour les légumes exotiques), le transport pose problème et cause des pertes importantes.

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1.2            Importance des espèces cultivées

Les rendements moyens obtenus sont relativement faibles et peuvent varier de 0,3-0,5 kg/m² par cycle (gombo, céleri, ciboulette, piment) à 2-3 kg/m² par cycle (amarante, morelle, chou de Chine, chou pommé, aubergine, poireau). Les rendements de la tomate sont particulièrement faibles ne dépassant que rarement le niveau de 1,5 kg/m². Les rendements les plus élevés concernent les légumes-feuilles tels que l’amarante. Les variétés préférées sont relativement anciennes et souvent traditionnelles telles que Roma pour la tomate, Cayenne pour le piment, Marché de Copenhague pour le chou, Black beauty pour l’aubergine, Marketer pour le concombre, Amsterdam pour la carotte.

Parmi les fruits bananes et les plantains constituent les seules spéculations cultivées à large échelle : la banane douce est localisée surtout dans la sous-région du Bas-Fleuve. L'ananas prédomine à Songololo, Mbanza-Ngungu, Madimba et Kasangulu; les agrumes se trouvent surtout dans la sous-région des Cataractes (Bas-Congo). Le mangoustan, le ramboutan et le safou sont souvent cultivés dans des parcelles de case et ne font l'objet que d'activités de collectes/cueillettes. On trouve souvent un nombre limité d'arbres fruitiers autour des maisons. Le centre de recherche de l'INERA à M'vuazi (Mbanza-Ngungu) est spécialisé dans la sélection et la multiplication des arbres fruitiers : outre les vergers vieillissants, le travail d’amélioration sur la banane et le plantain, actuellement au stade des essais paysans, devrait porter ses fruits dans les prochaines années.

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2.     Les systèmes de production horticoles

Une analyse détaillée des systèmes de production actuels pour les légumes en RDC[4] permet de distinguer :

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2.1            Les périmètres maraîchers urbains et périurbains (partiellement aménagés ou non)

Ils sont localisés surtout à Kinshasa et y représentent plus de 50% de la filière horticole : la plus grande partie de cette production est destinée aux marchés urbains. Les maraîchers cultivent une gamme variée de spéculations liées aux préférences des consommateurs kinois. De rares arbres fruitiers sont plantés pour délimiter les parcelles. Les maraîchers, dont environ 30-50% sont des femmes, cultivent en moyenne de 3 à 30 ares : cette activité constitue l’unique source de revenu pour 95% des producteurs. L’encadrement technique est déficitaire et les producteurs s’approvisionnent en engrais et en produits phytosanitaires (1 ou 2 produits) sur le marché informel. L’arrosage reste souvent manuel et la vente des produits s’effectue généralement sur le champ, directement à la planche.

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2.2 Les parcellaires maraîchers (principalement destinées à l'auto-consommation)

Ce système de production maraîcher est fort développé à Kinshasa mais moins à Lubumbashi : en moyenne ce type de producteurs représente aujourd’hui une forte proportion des familles pauvres, chaerchant ainsi à améliorer un peu leur repas quotidien. Ils/elles cultivent une superficie moyenne d’un are, localisées dans les parcelles d’habitation, le long des chaussées, dans les camps militaires et les enclos d’entreprises, et commercialisent eux-mêmes leurs suppléments de production dans les marchés de proximité. L’encadrement technique est pratiquement inexistant et les producteurs s’approvisionnent en semences, engrais et produits phytosanitaires auprès des commerçants ambulants. L’utilisation des ordures ménagères est généralisée. A Kinshasa, les principales espèces cultivées sont la baselle (basselle), oseille (ngai-ngai), patate douce (matembele), amarante (biteku teku), pointe noire, choux : le nombre de spéculations est souvent limitée à 1 ou 2 dont la patate douce est la culture préférée car peu exigeante et avec une période de cueillette qui s’étend sur 4-5 mois. A Lubumbashi surtout les oignons, tomates, poireau et choux pommés sont cultivés.

Remarquons que ce type de maraîchage a permis de ‘reverdir’ partiellement les villes et de nettoyer les zones situées en bordure de route, où les détritus de toute sorte s’accumulaient.

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2.3            Les agriculteurs pratiquant l'horticulture

Ces agriculteurs pratiquent l'horticulture parallèlement aux autres cultures vivrières pluviales (parfois également en culture mixte) : le maraîchage est une activité secondaire pratiquée surtout en saison sèche. Peu spécialisés, ces petits exploitants (de 4 à 25 ares) sont localisés essentiellement à Lubumbashi et emploient généralement la main d’œuvre familiale : leur production est destinée à raison de 30% à l’autoconsommation alors que le reste est commercialisé par les producteurs eux-mêmes sur les marchés situés dans un rayon de 10-20 km. L'outillage agricole est rudi­men­taire et souvent fabriqué sur place par UMAZ ou des petits forgerons tra­ditionnels: l’appui technique est assuré par des organismes publics tels que SNV ou par des ONG tels que le BDD, SADRI, BDC, etc.. Les cultures préférées sont les tomates, les carottes, les choux en mars-avril et les oignons et les poireaux en juin-janvier.

Remarquons que le légume le plus populaire à Kinshasa, les feuilles de manioc, sont dans leur grande majorité produites dans les parcelles vivrières du Bas-Congo.

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3.     Economie de la production et de la consommation des fruits et légumes

3.1            La terre

Les situations sont très variables suivant les conditions locales :

-          en zone urbaine, on rencontre une large diversité de situations dont :

o        propriété privée de l’Etat mise en valeur par une association qui occupe les terres soit de fait, soit par concession non formelle (i.e. accord de la municipalité) ou plus rarement par un titre de concession formel,

o        les concessions privées mises en location soit aux individus soit à l’association (qui sert alors souvent d’intermédiaire),

o        terres gérées suivant les règles coutumières.

-          en zone périurbaine[5] : la propriété traditionnelle/coutumière est la règle générale, bien que des concessions à des institutions publiques (i.e. Université, INERA) sont également rencontrées.

Les superficies exploitées par les maraîchers sont très variables entre les périmètres et dans les périmètres. Dans les petits périmètres les parcelles varient entre 1-10 ares (i.e. Kimbanseke et Bandal) alors que dans les grands périmètres les moyennes peuvent varier de 20-30 ares (i.e N’Djili). L’attribution/répartition des parcelles à l’intérieur des périmètres se fait suivant la règle de la ‘force’, intégrant à la fois des éléments de capacités physiques, financières et d’influence.

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3.2            Le capital et les intrants

Le capital très faible dont disposent les maraîchers est une des contraintes les plus importantes en début de saison : les faibles revenus ne permettent pas d’accumuler de l’épargne.

(a)    les semences : une large partie des semences locales (amarante, oseille, tomate locale, gombo, piment) sont produites sur place. Les semences des légumes exotiques sont achetées dans les boutiques d’intrants (qualité douteuse, sans date d’expiration, variétés non indiquées ou non-adaptées, prix exorbitants[6], etc.) ;

(b)    les principaux engrais minéraux et organiques utilisés sont :

o        fumiers de ferme (poule, cheval, chèvres, …),

o        parche de café, drèche de brasserie,

o        les feuilles mortes et autres détritus végétaux ramassés sur place ou acquis auprès des pousse-pousseurs,

o        la gadoue obtenue auprès de pousse-pousseurs;

o        les immondices ménagers qui demandent un travail important de tri pour éliminer une quantité importante de plastiques et autres détritus non re-utilisables, voir mêmes toxiques (piles, huiles, etc.),

o        le guano de chauve-souris,

o        les engrais minéraux (NPK, urée, DAP, TSP, etc.) achetés en petite quantité (moins d’un kilogramme) souvent au double du prix, comparé au sac.

(c)    Les produits phytosanitaires les plus vendus sont :

o        insecticides ; Thiodan, Karaté

o        fongicides : Manèbe, Peltar, Sulfate de cuivre

o        acaricide : Minicron (+ rare)

Vendus la plupart du temps au micro-détail, les emballages des pesticides sont douteux (petits sachets en plastique ou petite bouteille sans étiquettes), les mesures de précautions de manipulation jamais respectées et les quantités appliquées par les maraîchers souvent pas en rapport avec les recommandations. Dû à leur prix relativement élevé les pulvérisateurs sont extrêmement rares et beaucoup d’applications sont effectuées à la ‘brosse’, à l’arrosoir, voire à l’assiette.

(d)    L’outillage est rudimentaire et de mauvaise qualité : les arrosoirs plastiques sont souvent de moins bonne qualité (durabilité) que ceux en zinc de fabrication locale ; les bêches et/ou fourches remplaceraient souvent avantageusement les houes pour le travail du sol.

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3.3            Le travail

La main d’œuvre constitue un poste important pour la production maraîchère. Familiale pour les petits périmètres, la main d’œuvre salariée est de règle à partir de 10 ares de culture, du moins pour les opérations à haute densité de main d’œuvre (préparation du sol, repiquage, etc.), mais également en fonction du résultat escompté et du niveau de technicité requis. De plus, l’opération de gardiennage reste très importante pour éviter les vols en période de récolte : à cet effet les associations organisent souvent une tournante pour assurer les permanences.

La répartition moyenne des opérations pour un cycle se résume comme suit :

 

Opération

Homme-jour/ha (Tollens et al.)

Rassemblement gadoues/fumier

40

Labour /fabrication planches

78

Epandage des fumier, …

3-4

Prélèvement des plantules

50

Repiquage + regarnissage

25 + 21

Ameublissement/sarclage

130

Arosage

9

Epandage des engrais

3

Récolte/ préparation vente

65

TOTAL

520

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3.4 Le profit dans la production maraîchère

Le revenu généré par 4.5 ares (ou 25 planches de 18 m²) est estimé à environ 105$ sur un chiffre d’affaires total de 233$EU pour des cultures de feuilles vertes (amarante et oseille), soit 41 $EU/mois.

Les dépenses moyennes des maraîchers se décomposent en :

-                        charges variables : engrais (53%), semences (12%), produits phytosanitaires (<5%) et main d’œuvre (30%),

-                        les charges fixes sont d’environ 10% dont l’acquisition de la terre et l’amortissement de l’outillage constituent la plus grande partie.

Le profit net de la production maraîchère (estimée par la mission micro-crédit 2001)[7].

Pour une exploitation moyenne de 10 ares, Kinshasa annonce une marge brute de 1.192 à 1.313 $EU (y compris 969 $EU de salaires), à partir de 6 cycles d’amarante, la tomate, l’aubergine et le chou de Chine, la vente de semences, de compost, de fourrages, de vente de plantes médicinales et le prêt de matériel agricole, tandis que le compte proposé par Lubumbashi dégage 855 $EU qui, en ajoutant le vivrier le compte revient à 919 $EU. Si l’on admet une famille de 7 personnes, cela donne 188 $EU/an/personne à Kinshasa et 153 $EU à Lubumbashi. Ce chiffre, s’il est confirmé, indique que le maraîcher reste largement sous le seuil de pauvreté, s’il na pas d’autres ressources. L’autoconsommation fut estimée à 1-2 plates bandes par mois, y compris les invendus (enquête Kinshasa et Lubumbashi).

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[1] Espèces maraîchères à cycle court: principalement des légumes-feuilles. F

[2] Source : Tollens, 2001. F

[3] Voir détails au niveau des monographies urbaines et les résumés présentés en annexe 6 a, b et c. F

[4] Plusieurs études du secteur horticole en RDC ont été effectuées au cours de la dernière décennie dont (i) 'Appui à l'intensification des production maraîchères et fruitières dans les zones urbaines et périurbaines” réalisée par la FAO en Septembre1996, (ii) Nourrir Kinshasa, L’approvisionnement local d’une métropole africaine, Tollens et. Al. L’Harmattan Paris, 1994, et (iii) Les caractérisations du secteur dans les villes par le projet HUP. F

[5] Les superficies unitaires cultivées sont généralement plus importantes en périphérie ; celles-ci présentent par ailleurs souvent des opportunités d’extension. F

[6] Surtout les semences emballées en petites quantités … pour les amateurs. F

[7] Les informations disponibles ont été récoltées auprès des ONG et des associations visitées, ainsi qu’à partir des tableaux de synthèse demandés aux équipes de Lubumbashi et de Kinshasa. F

 

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