human teorema - Le premier Soleil de Jan Calet - Out 25/10/2024 with Sulatron Records
all songs written and performed by Human Teorema:
Alan Charron - Tim Girerd-Hengstenberg - Xabi Irigoin - Mathieu Leroy
Produced by Dimitri Dedonder @Mégaphone Studios - Aubervilliers
Mastering by Clément Agapitos
Cover Painting by Bruno Schmeltz: site internet
"The album traces the journey, explorations, and visions of Jan Calet, a professor of ancient civilizations in Rome in the early 90's, as he traverses through the ages and abysses until his renewal."
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article dans un magazine allemand: ici et ici
Plus aucun repère ne me guide dans les paysages que je découvre. Je ne tombe ni ne vole. Mes sens ne sont d'aucune utilité pour décrire mon déplacement au milieu de ces structures. Sans apercevoir de toit, je vois des porches qui ne sont soutenus par aucune pierre. Étendues infinies de roches, comme agencées par les fées des rêves de Lord Dunsany. Délicatement, ma vision s’étire sur ces reflets. Les couleurs se mélangent dans une douceur inattendue. J'ai toujours été d'ici. Mon corps, ma chemise de nuit, mes pieds. Ils ont disparu. Je sais où je vais, guidé par un incroyable raisonnement serein. Une réalité qui m'a toujours traversé. C'est dans ce perpétuel confort que je le ressens pour la première fois. Le choc d'une Babylone nouvelle, rien ne m'avait préparé à voir brutalement ces montagnes, bâties, maçonnées, comme d'innommables statues dispersées géométriquement, où inexorablement je suis amené. Au pire moment, où jamais je ne voudrais retrouver la vue ; je distingue maintenant un lieu de désolation, infect, sombre, une espèce d'hôpital m'apparaît ; je vois une multitude de malheureux en proie à toutes sortes de maladies : syncopes affreuses, douleurs aiguës, défaillances, convulsions, épilepsies, frénésies démoniaques, mélancolies, folies lunatiques, phthisie languissante, peste cruelle et consomption. Malgré la douleur, des danses ithyphalliques, des priapées, des infamies sans nom se jouent à côté, sous moi. Les salles qui m'entourent, d'une réalité abjecte, me semblent construites sous aucune loi de la physique humaine. Surgir des draps, essoufflé, tremblant. Ouvrir les volets et retrouver sous des rayons anormalement obliques et laiteux, la courte horizon d'usines et de plaines de l'ancienne zone industrielle d'Ostiense, au sud de Rome. Pas de chants d'oiseau ce matin. Retrouver *La Repubblica* sur ma table de chevet, 12 janvier 1993, rassurant. Vite, écarter ces images nocturnes, recoller la réalité, retrouver mes étudiants à la faculté de la Sapienza. Je m'appelle Jan Calet, professeur de civilisations antiques. Mais trop de doutes sont désormais infusés dans mon corps. Dans un flottement continuel entre réalité et suspicion, mes journées s’articulent à comprendre mon expérience du Songe. Je rencontre, cherche, consulte mes vieux maîtres tout en fouillant les archives de cette faculté construite au XIIIe siècle sur les ruines d'un temple lié aux divinités chthoniennes. Les regards changeants de mes pairs sur mes investigations, mon reflet assombri, terne, et les mots inconnus que je crois entendre à l'aube, me poussent à chercher des réponses que je ne souhaite pas découvrir. Gare de Rome-Termini, Genève, Dortmund, Ostende. Le voyage par rail et ses paysages changeants m'offre un court repos. La traversée de la mer du Nord en ferry pour Douvres, ainsi que le bus qui défile sur les routes du sud de l'Angleterre, sont comme une lueur de lucidité dans mon esprit embrumé et assombri. J'aperçois enfin la banlieue rouge d'Oxford, la ville aux clochers rêveurs, après les dernières collines de la grise campagne du Worcestershire. L'antique bibliothèque Bodléienne, fière architecture baroque, censée contenir les écrits les plus secrets, apocryphes et dangereux de notre lignée humaine, m'attend au cœur de la ville. Ma précieuse lettre d'introduction aux étages inférieurs, creusés dans le grès d'Oxford, est serrée dans mon porte-chemise. L'éminente Professeure Della Catucci, tentant de tout son corps d'entraver ma quête, me l’a signée juste avant mon départ en train. Mon récit ici s'abîme. La découverte d'un livre dont le nom ne peut être prononcé ou réécrit, son déchiffrement lié à ma connaissance herméneutique, les similitudes infamantes entre ses récits, recueillis à différentes époques et dans des lieux variés, et mon rêve du 12 janvier 1993 – peut-on encore le définir comme un rêve ? – les vérités éternelles et les règles immuables de la morale bafouées, mon corps lâche, et les médecins anglais, peu familiers de ce genre de délire, me conseillent de quitter villes et hommes. La maison de montagne d'une vieille tante bas-alpine, Thorame-Haute, ces territoires entre montagnes italiennes et forêts françaises de l'ancien duché de Savoie seront le lieu de mon réveil. Cet été-là, les rivières lézardent, les lacs d'altitude s'immobilisent, j'accompagne du regard le berger et ses moutons à l'estive. Cet été-là, je ne lis plus, je contemple consciemment, je ne ris qu'en solitaire. Mais cet été-là, dans mes chagrins visionnaires où je donne à tous des torts imaginaires, lors d'une de mes sorties entre les voies explorées d'une montagne dont le nom s'est oublié, il est venu à ma rencontre. Me relever, parlant d'une voix qui s'entend entre les vallées, m'assister d'un regard électrique, me guider d'un souffle chaud. Seul vestige de cette rencontre : un stigmate mental, un mantra qui ne me quitte plus : Céléphaïs. Étonné de ma remise en état psychique, et d'une certaine manière physique, je suis maintenant en chemin. Je suis la voie, celle de l'homme qui ne dit mot, à travers une obsession consciente et intangible. Comment savoir de quelle manière j'ai su qu'il fallait que j'embarque sur l'Atalante, ce navire marchand au port de commerce de Marseille ? Voilà les premières errances totales de mes souvenirs. Suis-je vraiment seul à ces moments précis ? Le trajet méditerranéen coule sans mesure temporelle, je passe la plupart du temps libre de Jan Calet dans ma cabine, observant les étoiles, rêvant dans les pénombres et relisant mes vieilles notes trouvées à la Sapienza avec appétit. Le reste de l'équipage apparaît réfractaire à ma présence. Indifférent à ces manifestations, je contemple mon reflet dans ce vieux miroir. Un visage émacié, perturbé, je ne sais si je reconnais le jeune professeur à la faculté ou si j'aperçois une image venue d'un lointain passé. L'arrivée au port de l'antique Lattaquié, qui a fait partie des quatre villes de la Tétrapole syrienne, avec les trois autres cités royales de Séleucie de Piérie, Antioche et Apamée, sera ma dernière position géographique connue. Je débarque dans l'encombrement de ruelles indistinctes aux détours sinueux et brusques sur lesquelles des planches jetées d'un côté à l'autre de la rue forment des plafonds dont les interstices laissent de grandes plaques de lumière crue tomber sur la foule de vendeurs ambulants. Souvenirs imprécis de ma rencontre avec le guide. Je suis resté sourd jusqu'au bout aux conseils timorés comme aux exagérations chimériques au sujet des difficultés et des dangers de mon entreprise. Je vais le suivre, dans sa route dans le désert. Dès la sortie de la ville, le chemin est sablonneux, facile, à peine interrompu par quelques ravines. Les motos lourdement chargées, meutes animées d'où émergent seuls les sons des moteurs, l'odeur de l'huile chaude qui suinte des deux temps, qui se répand, et les têtes casquées, vestiges chevaleresques de sécurité et de gloire. Puis, le sol devient maigre, pierreux par endroits et couvert de hautes herbes encore vertes parmi lesquelles dominent l'arboise et l'absinthe. La caravane, les rangs serrés, avance lourdement, le guide toujours en tête, ses deux seconds ferment la marche pour veiller à ce que nul ne s'écarte ou ne reste en arrière ; des cavaliers plus mobiles couvrent les flancs. Un nuage de silencieuse et morne tristesse pèse sur tout ce monde, nul ne m'adresse la parole, et je m'isole chaque soir dans la relecture de mes écrits. Le désert, mystérieuse immensité attractive comme tout inconnu, imposant comme l'infini, que le voyageur fasciné voudra pénétrer pour y déchiffrer l'histoire du passé, en étudier le présent et en dévoiler les secrets. Je me sens attiré par ce charme vertigineux, irrésistible, sans oser, sans vouloir tourner la tête vers le monde connu, vers tout ce que je sais quitter définitivement. Dans un ciel inconnu, des étoiles nouvelles. Mon corps ne dort plus. Mais mes pensées s'échappent. Ce qui me coupe du réel. Un matin, ils sont partis. Diable de compagnie. Un bidon d'essence abandonné à côté de moi, et les dernières indications pour trouver les ruines de Mel Haal' Oudidih. Inexorable dérive. Je suis maintenant seul, et l'infâme me guide hors des temps. Les dunes et les rochers mouvants essaient de cacher les restes de murs qui marquent l'entrée de l'ancienne ville. Même le vent ne cache plus son envie de fuir ces pierres, mais il supporte et pousse ma moto qui semble s'effriter à chaque circonvolution de roue. Cette désolation recèle pourtant une harmonie qui me permet de facilement trouver le trou central. Aucun signe ne s'oppose à y descendre. Mais si tout être humain en situation normale ne descendrait dans cette abîme, tant l'atmosphère y est malsaine, je me déleste des derniers ustensiles qu'il me reste et commence la descente. L'escalier, initialement déplorable dans son état, se transforme peu à peu en un escalier démesuré, les proportions s'allongent et se cabrent. Mon imagination sera-t-elle plus forte que la réalité ? La chaleur commence à s'estomper plus ma descente continue. Quelle force peut-elle me faire continuer à enchaîner ces marches. J'aimerais tant m'arrêter. Mais un air plus frais et plus énergisant. Mais un sentiment de sécurité. Mais une lumière. L'éblouissement me transperce d'un coup, et mes yeux s'habituent. C'est un passage qui se déploie comme une porte. La suite n'est plus qu'une cohue de perceptions, d'intuition et de ressentis. Je ne tombe ni ne vole. Céléphaïs se découvre tout autour de moi. Je sillonne l'espace avec une telle douceur que l'air reluit comme un feu ardent. Les architectures s'assemblent, s'étirent dans des légendes en mosaïque. Ce que je pensais être un hôpital, la nuit du 12 janvier 1993, n'est qu'une assemblée universelle d'entités aux traditions fabuleuses. Je ne sais si je suis sous l'influence du vertige ou de l'extase. Ce dévoilement eschatologique ne me semble ici qu'un immense lac de sérénité. Si l'on considère les trois opérations de l'esprit : concevoir, juger, raisonner ; je ne suis plus Jan Calet. Mais un être nouveau. Je ne désire pas me réveiller.
deutsche Version :
1-ONIRICO Kein einziger Anhaltspunkt leitet mich mehr durch die Landschaften, die ich entdecke. Ich falle weder noch fliege ich. Meine Sinne sind nutzlos, um meinen Weg zwischen diesen Strukturen zu beschreiben. Ohne ein Dach zu erblicken, sehe ich Portale, die von keinem Stein getragen werden. Unendliche Weiten von Felsen, wie von den Feen in Lord Dunsanys Träumen arrangiert. Sanft weitet sich mein Blick auf diesen Spiegelungen. Die Farben mischen sich in unerwarteter Zartheit. Ich war immer schon hier. Mein Körper, mein Nachthemd, meine Füße – sie sind verschwunden. Ich weiß, wohin ich gehe, geführt von einem unglaublichen, ruhigen Verstand. Eine Realität, die mich immer durchdrungen hat. Zum ersten Mal spüre ich sie in diesem ständigen Komfort. Der Schock eines neuen Babylon, nichts hatte mich darauf vorbereitet, plötzlich diese Berge zu sehen, gebaut, gemauert, wie namenlose Statuen geometrisch verstreut, wohin ich unaufhaltsam hingeführt werde. Im schlimmsten Moment, in dem ich am wenigsten das Augenlicht zurückgewinnen möchte, erkenne ich nun einen Ort der Verwüstung, widerlich, dunkel. Es erscheint mir eine Art Krankenhaus; ich sehe eine Vielzahl Unglücklicher, die von allen Arten von Krankheiten heimgesucht werden: grausige Ohnmachtsanfälle, scharfe Schmerzen, Zusammenbrüche, Krämpfe, epileptische Anfälle, dämonische Rasereien, Schwermut, wahnsinnige Melancholie, schwächender Verfall, grausame Pest und Schwindsucht. Trotz des Schmerzes werden ithyphallische Tänze, obszöne Rituale und namenlose Niederträchtigkeiten neben mir, unter mir gespielt. Die Räume um mich herum, von abscheulicher Realität, scheinen nach keinem Gesetz der menschlichen Physik errichtet worden zu sein. 2-STUDIIS Herausfahren aus den Laken, außer Atem, zitternd. Die Fensterläden öffnen und unter unnatürlich schrägen und milchigen Strahlen den kurzen Horizont von Fabriken und Ebenen des alten Industriegebiets Ostiense, südlich von Rom, wiedersehen. Kein Vogelgesang an diesem Morgen. La Repubblica liegt auf meinem Nachttisch, 12. Januar 1993, beruhigend. Schnell diese nächtlichen Bilder verdrängen, die Realität wieder zusammenfügen, zurück zu meinen Studenten an der Universität La Sapienza. Mein Name ist Jan Calet, Professor für antike Kulturen. Doch zu viele Zweifel sind jetzt in meinen Körper eingeflossen. In einem ständigen Schweben zwischen Realität und Argwohn versuche ich, das Erlebnis meines Traums zu begreifen. Ich suche, treffe, konsultiere meine alten Lehrer, durchforste die Archive dieser Universität, die im 13. Jahrhundert auf den Ruinen eines Tempels für chthonische Gottheiten errichtet wurde. Die wechselnden Blicke meiner Kollegen auf meine Nachforschungen, mein düsteres, stumpfes Spiegelbild und die unbekannten Worte, die ich im Morgengrauen zu hören glaube, treiben mich an, Antworten zu suchen, die ich eigentlich nicht entdecken will. Bahnhof Roma Termini, Genf, Dortmund, Ostende. Die Reise per Zug mit ihren wechselnden Landschaften bietet mir eine kurze Ruhepause. Die Überfahrt über die Nordsee mit der Fähre nach Dover sowie die Busfahrt durch die Straßen Südenglands sind wie ein Lichtstrahl der Klarheit in meinem vernebelten, verdunkelten Geist. Endlich sehe ich die roten Vorstädte von Oxford, die Stadt der träumerischen Türme, hinter den letzten Hügeln der grauen Landschaft Worcestershires auftauchen. Die alte Bodleian Library, eine stolze barocke Architektur, die angeblich die geheimsten, apokryphen und gefährlichsten Schriften unserer Menschheit enthält, erwartet mich im Herzen der Stadt. Mein wertvoller Empfehlungsbrief für die unteren Stockwerke, in den Sandstein Oxfords gegraben, ist fest in meiner Mappe verstaut. Die angesehene Professorin Della Catucci, die mich mit aller Kraft daran hindern wollte, hatte ihn kurz vor meiner Abreise unterzeichnet. Hier verliert sich mein Bericht. Die Entdeckung eines Buches, dessen Name nicht ausgesprochen oder niedergeschrieben werden kann, dessen Entzifferung mit meinem hermeneutischen Wissen verbunden ist, die infamen Ähnlichkeiten zwischen seinen Erzählungen, die zu verschiedenen Zeiten und an verschiedenen Orten gesammelt wurden, und meinem Traum vom 12. Januar 1993 – kann man es noch als Traum bezeichnen? – die ewigen Wahrheiten und die unveränderlichen Regeln der Moral, die verletzt wurden, mein schwacher Körper und die englischen Ärzte, die mit dieser Art von Wahnsinn wenig vertraut sind, raten mir, die Städte und die Menschen zu verlassen. Das Berghaus einer alten Tante in den Niederalpen, Thorame-Haute, diese Grenzgebiete zwischen den italienischen Bergen und den französischen Wäldern des alten Herzogtums Savoyen werden der Ort meines Erwachens sein. In jenem Sommer schlängeln sich die Flüsse, die Bergseen kommen zur Ruhe, ich beobachte den Schäfer und seine Schafe bei ihrer Sommerweide. In jenem Sommer lese ich nicht mehr, ich schaue bewusst, ich lache nur allein. Doch in diesem Sommer, in meinen visionären Kümmernissen, in denen ich allen imaginäre Fehler zuschreibe, kam er mir bei einem meiner Ausflüge in eine namenlose Bergwelt entgegen. Ich erhebe mich, spreche mit einer Stimme, die zwischen den Tälern hallt, er gibt mir Beistand mit einem elektrischen Blick, führt mich mit einem warmen Atem. Das einzige Überbleibsel dieser Begegnung: ein geistiges Stigma, ein Mantra, das mich nicht mehr verlässt: Celephaïs. Verwundert über meine seelische und auf gewisse Weise körperliche Genesung, bin ich nun unterwegs. Ich folge dem Weg, dem eines Mannes, der kein Wort spricht, durch eine bewusste, unfassbare Obsession. Wie kann ich wissen, dass ich auf die Atalante, dieses Handelsschiff im Hafen von Marseille, gehen musste? Hier beginnen die ersten vollkommen verwirrten Erinnerungen. Bin ich wirklich allein in diesen Momenten? Die mediterrane Überfahrt vergeht ohne Zeitgefühl, ich verbringe die meiste Zeit als Jan Calet in meiner Kabine, beobachte die Sterne, träume im Halbdunkel und lese gierig meine alten Notizen von der Sapienza wieder. Die übrige Besatzung scheint mir gegenüber abweisend zu sein. Gleichgültig gegenüber diesen Erscheinungen betrachte ich mein Spiegelbild in diesem alten Spiegel. Ein ausgezehrtes, verstörtes Gesicht, ich weiß nicht, ob ich den jungen Professor der Fakultät erkenne oder ein Bild aus ferner Vergangenheit. 3-SPEDIZIONE Die Ankunft im Hafen des antiken Latakia, das Teil der syrischen Tetrapolis war, zusammen mit den drei anderen königlichen Städten Seleucia Pieria, Antiochia und Apamea, wird meine letzte geografisch bekannte Position sein. Ich lande im Gewimmel verworrener Gassen mit abrupten und verschlungenen Wendungen, über die Planken von einer Straßenseite zur anderen geworfen sind und Decken bilden, deren Zwischenräume große Lichtplatten auf die Menge der Straßenverkäufer werfen. Unklare Erinnerungen an meine Begegnung mit dem Führer. Ich blieb bis zum Schluss taub gegenüber den schüchternen Warnungen und den fantastischen Übertreibungen über die Schwierigkeiten und Gefahren meines Unternehmens. Ich werde ihm folgen, auf seinem Weg durch die Wüste. Schon beim Verlassen der Stadt ist der Weg sandig, leicht, nur von wenigen Rinnen unterbrochen. Die schwer beladenen Motorräder, animierte Rudel, aus denen nur das Geräusch der Motoren und der Duft von heißem Öl aus Zweitaktern aufsteigt, und die Helme, Überreste ritterlicher Sicherheit und Ehre. Dann wird der Boden karger, stellenweise steinig und von hohen noch grünen Kräutern bewachsen, unter denen Beifuß und Wermut dominieren. Die Karawane, eng aneinander, schreitet schwerfällig voran, der Führer stets voran, seine beiden Gehilfen schließen die Reihe, um sicherzustellen, dass niemand abdriftet oder zurückbleibt; beweglichere Reiter decken die Flanken. Eine stille, dumpfe Traurigkeit liegt über all diesen Menschen, niemand spricht mit mir, und ich isoliere mich jeden Abend in das erneute Lesen meiner Schriften. Die Wüste, mysteriöse Anziehungskraft des Unbekannten, imposant wie die Unendlichkeit, die der Reisende ergründen will, um die Geschichte der Vergangenheit zu entschlüsseln, die Gegenwart zu erforschen und ihre Geheimnisse zu enthüllen. Ich fühle mich von diesem atemberaubenden, unwiderstehlichen Zauber angezogen, ohne zu wagen, ohne zurückblicken zu wollen auf die bekannte Welt, auf alles, was ich weiß, endgültig zu verlassen. In einem unbekannten Himmel neue Sterne. Mein Körper schläft nicht mehr. Aber meine Gedanken entgleiten. Was mich vom Realen trennt. Eines Morgens sind sie fort. Ein verdammter Gefährte. Ein Benzinkanister neben mir, und die letzten Anweisungen, um die Ruinen von Mel Haal’ Oudidih zu finden. Unaufhaltsames Abdriften.
english version :
No longer do any landmarks guide me through the landscapes I now discover. I neither fall nor fly. My senses are of no use in describing my movement amid these structures. Without seeing a roof, I glimpse porches supported by no stone. Infinite stretches of rock, as if arranged by the fairies in Lord Dunsany's dreams. Delicately, my vision extends over these reflections. The colors blend with an unexpected softness. I have always been from here. My body, my nightshirt, my feet. They have vanished. I know where I am going, guided by an incredible serene reasoning. A reality that has always passed through me. It is in this perpetual comfort that I feel it for the first time. The shock of a new Babylon, nothing had prepared me to suddenly see these mountains, built, masoned, like unspeakable statues scattered geometrically, where I am inexorably led. At the worst moment, when I would never want to regain sight; I now perceive a place of desolation, foul, dark, a kind of hospital appears to me; I see a multitude of the unfortunate, prey to all kinds of ailments: dreadful fainting spells, sharp pains, collapses, convulsions, epilepsies, demonic frenzies, melancholies, lunatic madness, languishing consumption, cruel plague, and wasting disease. Despite the pain, ithyphallic dances, priapic rites, and unspeakable infamies play out beside and below me. The rooms around me, of an abject reality, seem built under no law of human physics.
Surging from the sheets, breathless, trembling. Opening the shutters and finding, under abnormally slanted and milky rays, the short horizon of factories and plains of Ostiense's old industrial zone, south of Rome. No birds singing this morning. Finding La Repubblica on my bedside table, January 12, 1993, reassuring. Quickly, pushing away these nocturnal images, piecing reality back together, meeting my students again at Sapienza University. My name is Jan Calet, professor of ancient civilizations. But too many doubts are now infused in my body. In a continuous drifting between reality and suspicion, my days are now centered on understanding my experience of the Dream. I meet, search, consult my old masters while scouring the archives of this university, built in the 13th century on the ruins of a temple tied to chthonic deities. The shifting looks of my peers regarding my investigations, my darkened, dull reflection, and the unknown words I think I hear at dawn, push me to seek answers I do not wish to find. Rome-Termini station, Geneva, Dortmund, Ostend. The rail journey and its changing landscapes offer me brief respite. The crossing of the North Sea by ferry to Dover, as well as the bus journey along the roads of southern England, are like a glimmer of clarity in my clouded, darkened mind. I finally glimpse the red suburbs of Oxford, the city of dreaming spires, after the last hills of Worcestershire's grey countryside. The ancient Bodleian Library, a proud baroque architecture, said to hold the most secret, apocryphal, and dangerous writings of our human lineage, awaits me in the heart of the city. My precious letter of introduction to the lower levels, carved into Oxford’s sandstone, is clenched in my document holder. The eminent Professor Della Catucci, trying with all her might to hinder my quest, signed it just before my train departure. My story here begins to disintegrate. The discovery of a book whose name cannot be spoken or rewritten, its deciphering tied to my hermeneutic knowledge, the damning similarities between its stories, collected at different times and in varied places, and my dream from January 12, 1993—can it still be called a dream?—eternal truths and the immutable rules of morality violated, my body failing, and the English doctors, unfamiliar with this kind of delirium, advising me to leave cities and men behind. The mountain home of an old aunt in the lower Alps, Thorame-Haute, those territories between Italian mountains and French forests of the former Duchy of Savoy, will be the place of my awakening. That summer, the rivers crackle, the high-altitude lakes grow still, I follow with my eyes the shepherd and his sheep as they graze in the high pastures. That summer, I no longer read, I consciously contemplate, I laugh only in solitude. But that summer, in my visionary sorrows where I assign imaginary wrongs to everyone, during one of my outings among the explored paths of a mountain whose name has been forgotten, he came to meet me. Lifting me up, speaking with a voice heard between valleys, assisting me with an electric gaze, guiding me with a warm breath. The only remnant of this encounter: a mental stigma, a mantra that never leaves me: Celephaïs. Amazed at my restored mental, and in a certain way physical state, I am now on my way. I follow the path, the path of the silent man, through a conscious and intangible obsession. How could I know how I knew I had to board the Atalante, this merchant ship in the port of Marseille? Here are the first total wanderings of my memories. Am I really alone in those precise moments? The Mediterranean journey flows without any sense of time, I spend most of Jan Calet's free time in my cabin, gazing at the stars, dreaming in the shadows, and eagerly rereading my old notes found at Sapienza. The rest of the crew seems resistant to my presence. Indifferent to these manifestations, I gaze at my reflection in the old mirror. A gaunt, troubled face, I no longer know if I recognize the young professor at the university or if I see an image from a distant past.
The arrival at the port of ancient Latakia, which was part of the four cities of the Syrian Tetrapolis, alongside the other royal cities of Seleucia Pieria, Antioch, and Apamea, will be my last known geographic position. I disembark amidst the clutter of indistinct alleys with sudden, twisting turns, where planks thrown from one side of the street to the other form ceilings, the gaps in which allow large patches of harsh light to fall on the crowd of street vendors. Vague memories of my encounter with the guide. I remained deaf until the end to timid warnings as well as to chimeric exaggerations about the difficulties and dangers of my endeavor. I will follow him, along his path into the desert. Upon leaving the city, the path is sandy, easy, barely interrupted by a few ravines. The heavily loaded motorcycles, animated packs from which only the sounds of engines emerge, the smell of warm oil oozing from two-strokes, spreading, and helmeted heads, chivalric remnants of safety and glory. Then, the ground becomes barren, stony in places, and covered with tall green grasses, among which dominate sagebrush and wormwood. The caravan, in tight ranks, advances heavily, the guide always in the lead, his two lieutenants bringing up the rear to ensure that no one strays or lags behind; more mobile riders flank the group. A cloud of silent and somber sadness weighs over everyone, no one speaks to me, and I isolate myself every evening by rereading my writings. The desert, a mysterious, alluring vastness like all things unknown, imposing like the infinite, which the fascinated traveler will wish to enter, to decipher its past, study its present, and uncover its secrets. I feel drawn to this dizzying, irresistible charm, without daring, without wanting to turn my head toward the known world, toward all that I know I am leaving behind forever. In an unknown sky, new stars. My body no longer sleeps. But my thoughts drift. That which cuts me off from reality. One morning, they are gone. Devil for company. A gas canister abandoned next to me, and the last directions to find the ruins of Mel Haal' Oudidih. Inexorable drift. I am now alone, and the vile guides me out of time. The dunes and shifting rocks try to hide the remnants of walls that mark the entrance to the ancient city. Even the wind no longer hides its desire to flee these stones, but it supports and pushes my motorcycle, which seems to crumble with every wheel turn. Yet this desolation holds a harmony that allows me to easily find the central pit. No sign prevents me from descending. But if any normal human being in such a situation would refrain from entering this abyss, given how unhealthy the atmosphere is, I discard the last of my remaining tools and begin the descent. The staircase, initially in a deplorable state, gradually transforms into a massive stairway, the proportions elongating and rearing up. Will my imagination be stronger than reality? The heat begins to fade the further I descend. What force compels me to continue down these steps? I wish so much to stop. But a cooler, more invigorating air. But a sense of security. But a light. The glare suddenly pierces me, and my eyes adjust. It is a passage unfolding like a door. What follows is nothing but a series of perceptions, intuitions, and feelings. I neither fall nor fly. Celephaïs reveals itself all around me. I glide through space with such softness that the air gleams like a burning fire. The architectures assemble, stretching into mosaic legends. What I thought was a hospital, on the night of January 12, 1993, is only a universal assembly of entities with fabulous traditions. I do not know if I am under the influence of vertigo or ecstasy. This eschatological revelation seems to me here nothing more than a vast lake of serenity. Considering the three operations of the mind: conceiving, judging, reasoning; I am no longer Jan Calet. But a new being. I do not wish to wake up.
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