QUELQUES REFLEXIONS SOUS FORME DE THESES PARTANT DE L'AFFIRMATION QUE L'ECOLOGIE N'EST PAS L'AFFAIRE D'UN PARTI

 

"Tout �a c'est du mou!..." (Mort � cr�dit)

 

SPLENDEURS ET MISERES DE L'ECOLOGIE POLITIQUE

 

"...le programme de G�n�ration Ecologie avance une s�rie de propositions tr�s diverses pour "marier l'�cologie et l'�conomie": assouplissement de la politique de cr�dit bancaire ; cr�ation d'"�co-taxes"..."

Le Monde, 12 mars 1993: pr�sentation du programme de gouvernement de G�n�ration Ecologie par Brice Lalonde, le 11 mars � Lyon.

 

1 LE regroupement des �cologistes politiques... c'est � dire politiciens, qui se prenaient pour un des rouages essentiels d'un fonctionnement harmonieux de l'Etat, s'est d�gonfl� comme une baudruche. Ceci leur aura au moins donn� l'occasion de montrer une fois de plus leur v�ritable visage: celui d'hommes et de femmes d'appareils adh�rant totalement aux valeurs du syst�me. Alors pourquoi ceux qui partagent �galement ces

valeurs, la plus large masse, auraient-ils �t� chercher des repr�sentants autres que ceux qui sont les plus aptes � g�rer le monde tel qu'il est !

 

2 LES verts se r�f�rent commun�ment � l'id�e de d�mocratie, fut-elle directe pour les plus radicaux. C'est oublier un peu vite que ce qui a �t� nomm� tout au long de l'histoire d�mocratie reposait sur une structure durement diff�renci�e, incluant parfois l'esclavage, parfois le salariat,

toujours l'atomisation des �tres humains et l'exclusion d'une large part d'entre eux de la dite-d�mocratie. Ainsi, les admirateurs de la d�mocratie ath�nienne1 se dispensent souvent de signaler qu'elle �tait fond�e sur l'exclusion des femmes et des esclaves. La m�me logique nous conduit jusqu'� aujourd'hui o� la d�mocratie constitue une forme particuli�rement ad�quate d'organisation de la soci�t� qui engendre les catastrophes �cologiques. Derri�re les professions de foi d�mocratique

se cache la r�alit� des rackets grands et petits: il s'agit de d�finir les r�gles fixant qui a ou non le droit de s'exprimer en fonction des int�r�ts de leur boutique. C'est peut-�tre pourquoi les politiciens �colo-d�mocrates sont si bien � l'aise dans la fonction de boutiquiers2.

 

3 DEPUIS que la technique peut organiser des catastrophes naturelles, on sait que les �cologistes sont des techniciens de la survie (J. Lounissart, Quelle guerre la connerie, novembre 1992). Si pour L�nine, chantre au d�but du si�cle de l'�tatisation du capitalisme russe, le socialisme c'�tait les soviets plus l'�lectricit� ; pour les partis �cologistes, la soci�t� � laquelle ils aspirent c'est la modernit� plus les stations d'�puration. Ceci permet � l'�colo politique de ne pas �tre confondu avec l'�colo barbu puant la ch�vre (c'est de toute fa�on parfois le m�me � quelques ann�es d'intervalle). Il faut avouer � sa d�charge que bien d'autres avant lui ont occup� ce terrain. Cette revendication de la modernit� a �t� int�gr�e par nombre de radicaux des ann�es 60-70, par exemple au travers de ce que l'on a appel� le situationnisme. Si elle a �t� depuis en partie d�laiss�e, cette "modernit� radicale" a �t� peu critiqu�e, oubliant par exemple qu'en 1969 la revue "Internationale Situationniste" d�crivait la conqu�te de l'espace en termes complaisants... voir m�me h�ro�ques :

"Les hommes iront dans l'espace pour faire de l'Univers le terrain ludique de la derni�re r�volte: celle qui ira contre les limitations qu'impose la nature... Nous irons dans l'espace, non comme employ�s de l'administration astronautique ou comme "volontaires" d'un projet d'Etat, mais comme ma�tres sans esclaves qui passent en revue leurs domaines: l'Univers entier mis � sac pour les conseils de travailleurs." (Internationale Situationniste N�12, septembre 1969, p.81).

            Dans leurs d�lires, nos politiciens �cologistes n'ont pas encore atteint un tel niveau de stupidit�. Mais patience, �a ne saurait tarder!

 

 

LE CREPUSCULE DES MAGICIENS

 

"L'esp�ce humaine, tout en �tant englob�e par la nature, s'est organis�e en dehors de celle-ci. Dans leur rapport au milieu ext�rieur qui les englobe, les hommes privil�gient leurs rapports entre eux au sein de la communaut�, rapports qui deviennent la condition pr�alable pour aborder la nature.

L'essence de l'homme se pr�sente donc sous la forme d'un RAPPORT SOCIAL."

Yves Le Manach, Le mat�rialisme saisi par derri�re (Editions La Digitale, 1988).

 

4 A l'oppos� de la nature comme cr�neau politicien, une autre tentation est de faire de celle-ci, par une sorte de n�o-paganisme mal dig�r�, un objet de d�ification3. Ceci est d'autant plus facile qu'on ne sait pas pr�cis�ment de quoi il s'agit lorsque les uns et les autres parlent de "nature". Est-ce une totalit� pr�existante dont l'homme serait n�cessairement s�par� de par son essence ? Un concept invent� par l'homme pour d�signer l'ensemble disparate qui l'entoure ? Le produit de l'interf�rence entre l'activit� des diff�rentes esp�ces, donc principalement une cr�ation humaine ? Peut-�tre un peu de tout cela !

            Je serais tent� de d�finir la nature comme l'ensemble de ce qui est perceptible par l'homme: �tres vivants, choses, ph�nom�nes (tout ce qui ne rentre pas dans le concept �sot�rique de "sur-naturel"). Bien entendu tout ce qui compose cette nature existe r�ellement, des liens existent (de diff�rentes sortes),... mais l'id�e m�me de nature est d'abord une invention humaine correspondant � un besoin de simplification, de classification,... Son contenu n'est d'ailleurs pas strictement d�finissable et varie selon les cultures... et les moyens de perception humaine.

            Ce que nous nommons la nature ne constitue pas un tout, mais un ensemble tr�s diversifi�, travers� par des interf�rences diverses. En ce sens, je ne crois gu�re que l'on puisse d�finir un rapport entre l'homme et la nature, mais plut�t une multitude de rapports (li�s ou non) entre l'homme et diverses entit�s regroup�es sous le terme nature. Il n'y a pas de sens � pr�tendre que l'on a le m�me rapport vis-�-vis d'un chien, d'un ours, d'un virus ou d'un feu de bois.

 

5 JE ne pense pas que l'homme ait � chercher � l'ext�rieur de lui-m�me des raisons aux pratiques �cologiques ou autres. Plus, je pense qu'il ne le peut pas (tout comme l'ours r�gle son existence par rapport � ses probl�mes d'ours!) et quant il pr�tend le faire, c'est au travers de th�ories id�ologiques produites par les hommes: �conomisme, ethnologisme, scientisme,...

 

6 SI quelque chose caract�rise l'�tre humain, c'est peut �tre d'�tre capable de noircir du papier pour s'interroger sur... la nature, l'essence de l'homme... L'homme est un animal complexe, m�me dans ses comportements les plus irr�fl�chis, fouineur, imaginatif,... Ceci a d'ailleurs une base mat�rielle, le d�veloppement et l'organisation du cerveau humain qui sont ses caract�ristiques biologiques essentielles. Le revers de la m�daille de cette aptitude � innover, c'est que

nous n'avons pas d'habitat ou de mode de vie - pas d'environnement - naturels. Il faut faire avec! C'est, au passage, certainement pourquoi l'individu humain ne peut se laisser ind�finiment enfermer dans des communaut�s traditionnelles. Quel qu'ait �t�, par exemple, l'int�r�t de certaines communaut�s am�rindiennes, chaque indien �tait potentiellement leur fossoyeur, puisqu'il avait la capacit� intellectuelle d'imaginer ou d'adh�rer � quelque chose de compl�tement diff�rent.

 

L' ECOLOGIE COMME RAPPORT SOCIAL

 

           

"...qu'il s'incarne en un pr�sident ventru ou en un imperator de belle prestance, tout organisme dont le but av�r� est de gouverner sera n�cessairement autoritaire. C'est � dire que pour subsister il lui faudra des arm�es, des polices, des prisons. C'est � dire encore qu'il mettra sa force au service des riches,... C'est � dire aussi que ses polices traqueront les volontaires ; que ses prisons leur seront consacr�es, et qu'il donnera du plomb aux rebelles...

            Constatations qui nous autorisent � qualifier d'inutiles les r�volutions dont le but ou les r�sultats sont de remplacer un gouvernement par un autre.

            Inutiles les efforts rageurs des r�volt�s que guide une folle illusion, inutiles les sacrifices, gaspillages de force, gaspillage de vie..."

Lvovich Kibalchiche/Victor Serge, Une r�volution, L'anarchie N�288, 13 octobre 1910.

 

7 FACE � l'embrigadement politicien de l'�cologisme radical, et au charlatanisme radical, il faut comprendre l'�cologie comme rapport social4. Les probl�mes de l'�cologie sont des probl�mes de soci�t�, et non pas li�s � la pr�sence de telle ou telle �quipe au pouvoir. Ils ne sont pas le simple produit d'une machination s'abattant sur des individus innocents qui ne demanderaient qu'� vivre libres et non pollu�s. La reproduction de ce monde par tout un chacun, par les modes de relation entre les �tres, sont pour beaucoup dans les malheurs humains. Tout ce qui est la pathologie de cette soci�t�, de la pollution au SIDA, a une composante sociale... g�n�ratrice d'�pid�mies ins�parables de d�s�quilibres dans les comportements humains. Pollutions de l'environnement, des comportements et des corps sont des sympt�mes. Les "lib�rations" m�mes que permet, parfois suscite, le syst�me social ne sont pas �trang�res � cette pathologie. Un exemple est le lien qu'on pourrait �tablir entre ce que l'on a nomm� la lib�ration sexuelle d'apr�s 1968 et cette pollution mortelle du corps qu'est le SIDA5. Ce que je mets en cause dans cette "lib�ration" n'est pas le libre acc�s � la contraception (bien qu'il faudrait s'interroger sur les effets � long terme de cette chimioth�rapie qu'est la pilule anti-conceptionnelle) ou � l'avortement. Ce libre acc�s est d'ailleurs de plus en plus remis en cause � la fois par la pr�sentation du pr�servatif comme une panac�e universelle et par les attaques croissantes contre l'avortement libre. Mais je ne vois aucune lib�ration, en particulier affective, dans des comportements sexuels se voulant lib�r�s r�pandus dans les "populations � risque": recherche perp�tuelle de nouveaux partenaires (y compris au travers de la prostitution), prise de drogue n�cessaire � l'accomplissement de "performances" � r�p�tition,... Cette course apr�s le "tout et tout de suite" est bien � l'image d'une soci�t� qui pr�tend que tout est accessible et possible... � condition d'y mettre le prix. Tout comme d'ailleurs la constitution d'une partie de la population la plus touch�e, les homosexuels, en lobby... gang parmi les gangs. Que font-ils sinon reproduire inlassablement cette soci�t� tous ceux qui pr�tendent que les d�r�glements qui r�sultent des comportements humains, � commencer par les leurs, peuvent �tre emp�ch�s � coup de mesures l�gislatives plus ou moins �cologiques, ou soign�s � coup de vaccins ou de proth�ses diverses.

 

H�me, 1993

 

 

 

 

NOTES

 

1. L'Etat-cit� d'Ath�nes comptait 500 000 habitants r�partis ainsi:

40 000 citoyens (riches ou pauvres)

160 000 femmes et enfants n'ayant aucune participation � la vie de la cit�

300 000 esclaves n'ayant aucune garantie d'aucune sorte.

Parmi les 40 000 citoyens, sans repr�sentants mais... s�lectionn�s par l'�loquence, jamais plus de 5000 assistaient � l'Assembl�e du Peuple (L'eccl�sia).

Le S�nat ne comprend plus que 400 membres (conseil des 400) mandat�s pour un an, tir�s au sort apr�s �limination des citoyens pauvres jug�s inaptes et surtout peu concern�s. C'est ce conseil qui approfondit les lois d�battues par l'Assembl�e. L'application de ces lois est sous la responsabilit� de 9 Archontes, �lus pour un an parmi les citoyens riches. C'est �galement parmi les citoyens riches que sont �lus pour un an 10 strat�ges (= g�n�raux, ministres).

 

2. cf. la lettre suivante, exp�di�e il y a quelques ann�es � la librairie/friperie/parfumerie... mais n�anmoins �cologiste � vocation radicale, "Robin des Bois", apr�s que la boutiqui�re de service ait refus� non seulement de continuer � prendre en d�p�t la revue "Interrogations", mais de payer ou de rendre les exemplaires d�pos�s pr�c�demment. Cette lettre adress�e � deux reprises ne re�u jamais de r�ponse !

 

            A l'ensemble des animateurs et -trices de Robin des Bois

            Le 23 d�cembre dernier, alors que depuis plusieurs mois nous d�posions notre publication dans votre librairie et que nous y �tions cordialement re�us, nous f�mes "poliment �conduits" et l'on nous fit comprendre que notre revue avait �t� retir�e des rayons et que vous ne d�siriez pas vraiment nous revoir en ces lieux. Nous ne mettons pas en cause votre libre-choix et vos libres rejets. Mais � partir du moment o� vous vous d�finissez comme autre chose qu'une librairie-parfumerie, et que vous paraissez vous situer dans le cadre de la lutte contre la destruction effr�n�e de la nature, il para�t �l�mentaire que votre rejet d'individus ou publications participant de cette lutte comporte un minimum de clart�.

            Or, que comprendre lorsque passant il y a quelque temps (le 10.9.88) dans votre librairie la personne pr�sente nous assure que vraiment notre publication est tr�s int�ressante, nous propose d'en red�poser des exemplaires, nous demande quand sort la prochaine,... et que revenant d�poser le num�ro suivant on nous annonce que cette m�me publication d�plait - � vous et � vos clients - tout en se refusant � plus d'explication ! Quant � la justification � ce brusque revirement par le fait que "tout le monde ne pense pas pareil", ceci est peu s�rieux. Nous ne pensons pas que vous vous d�terminez en fonction des �tats d'�me de l'individu pr�sent tel ou tel jour, et votre rejet ne peut �tre que le fruit d'une d�cision collective.

            Soyons clairs ! Nous ne qu�mandons pas un retour dans votre �choppe. Mais nous consid�rons �tre en droit -compte-tenu de ce que vous pr�tendez �tre- de b�n�ficier d'une formulation claire de ce qui provoque votre r�action d'allergie � notre �gard.

            A vous lire,

            P.S. Nous tenons � la disposition de ceux d'entre vous qui continueraient � �tre int�ress�s par nos publications la liste des librairies o� ils peuvent se les procurer.

 

Paris, le 6.1.89

 

3. La critique de ce culte rendu � la nature (ou ... Nature!) a d�j� �t� d�velopp� dans "Une critique du radicalisme � la petite semaine (Le Point d'Interrogations, automne 1992).

 

4. C'est ce que tentait d�j� d'exprimer la lettre suivante r�dig�e en mai 1988 � la suite d'une r�union organis�e � Paris deux ans apr�s la catastrophe de Tchernobyl.

 

LETTRE OUVERTE AUX ORGANISATEURS DE LA REUNION "TCHERNOBYL A 2"

 

 Cette lettre est issue d'individus ayant assist� � la r�union que vous avez organis� le 28 avril � l'AGECA. Nous sommes sortis de celle-ci (plus exactement du d�bat final constituant l'objet de cette lettre) avec une notable amertume. Si nous nous adressons � vous, � cause de votre r�le initiateur dans cette r�union, ce que nous voulons tenter d'exprimer s'adresse � tout ceux qui �taient pr�sents (ou auraient eu motif de l'�tre) � cette soir�e. Notre but n'est pas pol�mique. Nous voudrions simplement savoir si, au del� de telle ou telle appr�ciation particuli�re, existe des refus communs entre nous m�mes et d'autres individus ou courants refusant le pr�sent et l'avenir nucl�aris�s symbolis�s par la centrale de Nogent.

Afin de faciliter d'�ventuelles r�ponses, nous r�digeons cette lettre sous forme de questions. Mais avant de passer � celles-ci, nous voudrions tenter d'expliquer comment nous avons ressenti le "d�bat" du 28 avril.

 

Ce qui nous a le plus frapp�, c'est � quel point, dans sa forme et son contenu, ce d�bat reproduisait la soci�t� que nous subissons quotidiennement. Chacun y jouait pour la ni�me fois son r�le. La journaliste jouait � la journaliste, s'extasiant au passage sur le professionnalisme de ses coll�gues japonais ; les scientifiques jouaient aux scientifiques d�tenteurs de la connaissance bien quantifiable et bien abstraite; et le repr�sentant de l'EDF jouait au bon d�mocrate relevant complaisamment au passage les erreurs des uns et des autres. Les spectateurs avaient quant � eux le choix entre s'inscrire dans la logique de discours qui ne leur apprenaient pas grand chose, ou rentrer chez eux en gardant dans la t�te les images d'horreur d�couvertes pr�c�demment.

Dans ce d�bat sans d�batteurs, un grand vainqueur: l'EDF qui n'eut pas de mal � montrer tout ce qui s�parait notre g�nie fran�ais de la balourdise de ces pauvres russes. Finalement, Tchernobyl justifiait Nogent. Voil� pour les �tats d'�mes, passons aux questions:

 

1- L'horreur est-elle quantifiable ?

 

Tout au long de cette soir�e, il n'a �t� question que des chiffres exprimant les seuils "tol�rables" d�finis par diff�rentes commissions d'experts (!). Mais notre refus du nucl�aire est-il de principe, ou peut-il �tre gradu� en fonction de la plus ou moins grande pollution engendr�e par les centrales ? Devons nous laisser ce refus �tre d�vi� vers des batailles entre commissions officielles et officieuses ? Avons nous besoin de leurs chiffres pour �tre contre le monde produisant le nucl�aire ?

Pourquoi participer � ce fanatisme du chiffre ? Aujourd'hui, tout peut se vendre: notre activit�, notre sant�, l'air que nous respirons et jusqu'aux paysages que nous aimons contempler. Un justificatif des centrales nucl�aires est de produire � faible co�t; et la volont� de fixer un seuil "supportable" ne vise pas � nous "prot�ger", mais � optimiser leur gestion. Se polariser sur ces chiffres conduit � participer � cette gestion, � demander des centrales propres (!), des enceintes plus �tanches,...

 

2- Le nucl�aire est-il un probl�me d'information ?

 

On peut comprendre que l'absence d'information sur le nucl�aire en France ait frapp� les esprits apr�s le choc de Tchernobyl. Mais l'information sur l'horreur supprime-t-elle l'horreur ? Conduit-elle m�me fondamentalement � sa remise en cause.

Il n'est pas indiff�rent d'�tre inform� de l'existence de tel ou tel point chaud. Mais il ne faut pas se cacher que cette information sensibilise surtout les anti-nucl�aires convaincus,... et n'emp�che pas les dits points chauds d'exister.

En toute logique, les seules informations l�ch�es d�s aujourd'hui par les m�dias suffisent � alimenter tous les refus. Pourtant, les gens continuent � accepter. Et qu'on ne vienne pas nous parler des r�sultats des sondages ! Dans les faits, en quoi les personnes confront�es � l'implantation des centrales s'y sont-elles oppos�es ? La r�gion nogentaise s'est -elle d�peupl�e ? Ces personnes sont-elles pour autant inconscientes du danger ? Ou devant tous les autres refus que devrait entra�ner celui du nucl�aire... craignent-elles un saut dans l'inconnu ?

D'ailleurs, les gens sont-ils moins ali�n�s, moins soumis,... dans les "autres pays occidentaux o� se d�roulent r�guli�rement des consultations d�mocratiques pr�c�d�es de d�bats contradictoires" (cf. Combat Nature N�79).

 

3- Quel cr�dit accorder aux administrations, institutions, et aux diff�rentes repr�sentations du pouvoir dans la lutte contre le nucl�aire ?

 

Combien de fois n'avons nous pas entendu dire que le gouvernement, les instances supra-nationales... ou la commission-machin, devraient prendre des mesures contre l'aggravation de la pollution nucl�aire. Autant demander aux incendiaires d'�teindre les incendies. Les parlementaires, dirigeants syndicaux, piliers de commissions divers, n'existent que par le r�le que leur octroie l'Etat nucl�aire. Quelque soient les oppositions de fa�ade qui leurs permettent de se donner en spectacle, leurs solidarit�s sont plus profondes.

Il y a dans tout appel au pouvoir un r�flexe s�curitaire qui n'est pas sans en rappeler d'autres. Face � l'impossibilit� de prendre en charge sa propre vie, on fait appel aux repr�sentants de l'Etat pour policer la situation.

 

4- Le nucl�aire est-il un corps �tranger parasitant la soci�t�, ou la "plus belle" expression de celle-ci ?

 

Lors de la r�union du 28, le repr�sentant du GSIEN semblait s'�tonner que pour certains officiels ce qui paraissait intol�rable pour l'individu soit par contre tout � fait acceptable pour la soci�t�. Mais o� est la contradiction ? Depuis quant les individus sont-ils pour cette soci�t� autre chose que des chiffres, des objets,... Est acceptable pour la soci�t� tout ce qui lui permet de continuer � se reproduire (donc aussi le nucl�aire). Quant aux �tres humains, ce n'est pas son probl�me... � condition qu'ils ne deviennent justement pas trop humains pour elle !

 

5- Finalement, � quoi sert le nucl�aire ?

 

Est-ce un moyen parmi d'autres de produire une �nergie dont nous aurions affectivement besoin ? Ou:

- est-ce le moyen adapt� � un monde �tatique, sur-industrialis�, pour accro�tre -au travers de la production d'�lectricit�- notre domination, notre ins�curit�, notre d�pendance au pouvoir;

- est-ce le moyen de la surproduction �nerg�tique n�cessaire � la production en masse de camelotte et gadgets divers, base de "notre" monde moderne et d�mocratique.

 

En conclusion, nous pensons que le nucl�aire est l'expression d'un mode de relation entre les �tres humains, et entre ceux-ci et le reste de la nature, qui nie ce qui est vivant (� commencer par nous m�mes) au profit de ces modernes divinit�s que sont l'argent, le travail, la performance, la comp�titivit�,...

mai 1988

 

5. "Les revendications en faveur d'une sexualit� sans risques et des pr�servatifs m'�voquent celles en faveur du recyclage comme une solution � la crise de l'environnement, ce qui n'est pas surprenant car je pense que nous devrions commencer � penser au SIDA dans le contexte de la crise de l'environnement, c'est-�-dire, dans le contexte d'une autre menace interconnect�e � la survie de notre esp�ce...

Il semble que plus le pr�sent syst�me social (le capitalisme, la civilisation, ou quelqu'autre nom qu'on voudrait lui donner) continue, plus il se r�v�le. La crise du SIDA n'est que l'exemple le plus r�cent et le plus �vident des pr�suppositions sur lesquelles se fonde la soci�t� dominante.

La revendication d'un rem�de � la maladie est l'autojustification de notre syst�me social, de sa hi�rarchie, de sa technologie, de son mythe du progr�s. C'est de fa�on quasi-religieuse que les gens attendent de l'�tat, des mondes des affaires et de la haute technologie, de l'industrie, leur salut, la promesse d'une vie apr�s la mort (apr�s avoir �t� diagnostiqu�s HIV positifs). L'�tat moderne se justifie lui-m�me en tant que notre sauveur, et notre d�pendance s'en trouve renforc�e...

Mais quelles sont les cons�quences du boom sur les pr�servatifs ? Quel morceau de plan�te co�te notre sexualit� sans rique ? Que nous ayons des ressources sans limites pour la production de pr�servatifs n'est qu'une autre pr�supposition que les activistes oublient de reconsid�rer. Ce n'est qu'un autre exemple �clatant de la fa�on par laquelle le capitalisme (et la civilisation) perp�tue ses propres mythes (avec une aide importante des bien-pensants)...

Peu importe si je n'ai jamais eu le m�me plaisir sexuel avec des pr�servatifs que sans, de toute fa�on les activistes du SIDA tentent de diminuer la diff�rence de plaisir et de cr�er le mythe que le sexe avec des pr�servatifs est vraiment meilleur. Leur campagne pour �rotiser la marchandise "pr�servatif" est meilleure que celle que pourrait mettre en oeuvre n'importe quel publiciste.

Le sexe avec des pr�servatifs est en train de devenir tout autant une affirmation de l'�tat que le fait de voter. Et, si quelque chose est r�ellement justifi�, c'est le d�sespoir croissant de l'humanit�. J'esp�re plus de d�bat sur le sujet."

Traduction partielle d'une lettre de JM (Montr�al, Qu�bec) parue dans The Fifth Estate, Vol 28, N�1.

 

1
Hosted by www.Geocities.ws