APPEL A LA VIGILANCE

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La perspective des vacances ne doit pas nous faire oublier que la période estivale est propice aux mauvais coups…

A l'instar du questionnaire des collèges, les mesures Allègre-Royal annoncées par Ségolène se présentent comme anodines.

 

LES MOYENS ? QUESTION CADUQUE !

Les moyens c'est nous ! L'étalement des emplois du temps permettra « naturellement » d'occuper les professeurs à de nouvelles tâches dont nous serons les volontaires contraints. Ces tâches seront de moins en moins d'enseignement .

Recours sera largement fait aux heures supp. (33000 pour l'année scolaire prochaine). L'unicité de l'heure supp. obligatoire n'est qu'effet d'annonce : les DHG comportent toujours les 2 heures ! Les chefs d'établissement ventileront largement : ceci pourra aboutir à une dérégulation « naturelle » des emplois du temps et à terme de nos statuts (certains collègues pourront faire bien davantage que 2 heures supp.).

Quand ils n'éludent pas bonnement la question, ROYAL-ALLEGRE-JOSPIN font toujours explicitement savoir qu'il ne sera pas besoin de créer des postes : leur objectif est d'optimiser le rendement ; de nous faire travailler encore plus pour réussir moins : en un mot nous désespérer.

 

LES CONSEQUENCES

Nos prévisions se vérifient : il s'agit bien de CASSER («déréguler») un système éducatif qui PLAÇAIT l'élève en son centre en ce que l'enjeu était de l'aider à se construire par l'INSTRUCTION, L'EXERCICE DE SON ESPRIT CRITIQUE ET CREATEUR, pour le rendre intelligent, c'est à dire apte à penser lui même ses actes.

Il s'agit d'adapter les générations de demain aux données économiques nouvelles « recommandées », aux pouvoir étatiques par des organismes économico-politiques européens ou mondiaux : de moins en moins de travail, de plus en plus de postes intermittents sous qualifiés et précaires. (1)

La tactique est de faire passer sans douleur un statut inédit pour « l'enseignant ». Il sera désormais un agent d'éducation généraliste, polyvalent, coordinateur, animateur et tuteur. Serait-il pétri de la spécialité qu'il enseigne, l'aimerait-il et la pratiquerait-il qu'il serait tout juste bon dorénavant pour l'enseignement supérieur ! Peu veulent considérer qu'une grande compétence est requise pour enseigner les « petites » classes. C'est toujours vrai aujourd'hui. Abaisser les exigences au collège c'est aller à la ruine. On ne saura oublier que l'emploi du temps du professeur lui permettrait ¯hors ses corrections- de poursuivre son étude pour enrichir son enseignement ET sa pédagogie qui vont de pair.

Un glissement funeste a été opéré, renforcé par les IUFM : notre métier consisterait à faire de la pédagogie pour elle même. On tente aujourd'hui d'objectiver coûte que coûte ce qu'on veut contrôler : pédagogie et éducation deviennent de fausses sciences pour mieux être réfutées comme art. Il sera profité de l'occasion pour évacuer du système éducatif toute présence d'art comme discipline à part entière, au titre de sa contreproductivité.

Le contrôle se généralise et s'affine : tout comme les surveillants généraux étaient devenus conseillers d 'éducation, les inspecteurs disciplinaires deviendront des conseillers généraux ! Des audits seront engagés dans l'éducation nationale comme dans le secteur industriel de production. Sous prétexte de dynamisation, les établissement seront surveillés globalement ce qui permettra de mieux repérer les récalcitrants que ne le faisait l'ancienne inspection individuelle.

S'il ne suffisait pas, le travail d'équipe (terme hélas déjà passé dans le langage habituel) y pourvoira : auto-contrôle et contrôle mutuel auront belle place dans la cordée où l'autonomie de chacun se verra d'abord progressivement réduite puis rendue inutile : les disciplines se trouveront diluées à terme dans un concept d'ACTIVITE GLOBALISANTE INACTIVEE.

 

BILAN DE SIX MOIS D'ACTION.

Les proportions de l'enjeu et le caractère inédit dans nos démocraties de la tentative d'appropriation (d'industrialisation) de l'école (après celle de la culture) comme source de profit et de maintien de leur ordre par les puissances économiques conduisent à envisager une longue résistance.

Malgré le multiples tentatives de verrouillage (toujours à l'œuvre) avérant les intentions réelles du ministère, malgré l'inertie syndicale , le débat est devenu public et éclairera chaque fois que nécessaire une situation rendue confuse à dessein. Il contrera les effets destructeurs d'une réforme scélérate.

Contrairement à la logique marchande (il faudrait être gros pour être fort) nous sommes forts de notre incapacité au mensonge, de notre pulsion à naître à nous-mêmes et à y aider nos élèves par la diffusion de la connaissance et du goût de penser librement.

 

IL SERAIT GRAVEMENT ERRONE DE CROIRE QU'IL Y A RIEN DE NOUVEAU DANS LA REFORME DES COLLEGES.

C'est justement ce que ses instigateurs veulent nous amener à penser. E n des termes habilement flous et allusifs prêts à être repris (communicants) et repris comme tels par diverses instances (syndicales, fédérations de parents…), le projet de réforme des collèges poursuit de fait la dérégulation du système éducatif entamé par la droite et comble le chaînon manquant entre la charte pour l'école du XXI e siècle et celle du lycée.

L'école pour être publique n'est pas pour autant un service comme un autre. Elle n'est au service de la société que parce qu'elle contribue à la former et non pas le contraire, n'en déplaise à ceux qui voudraient pouvoir s'en passer. (2)

L'école doit rester le berceau de la démocratie républicaine. Sinon c'est à nous tous et à chacun que reviendra la funeste responsabilité de l'avoir abandonnée.

Il est désormais de notre devoir déontologique de défendre haut et partout notre rôle de maîtres. En cela nous ne collaborerons pas à la lente paupérisation intellectuelle (humaine) de tout un peuple.

 

7 juin 1999, Coordination enseignante du nord-parisien


(1) Angel Gurria, président de L'OCDE : « nous ne prêtons pas d'argent nous ne mettons pas sur pied des armées, nous avons un rôle que personne d'autre ne joue ; et ce rôle c'est de penser » (le monde 28 mai 99)
(2) Rapport OCDE 1998 sur les politiques d'éducation :
« La mondialisation économique politique et culturelle rend obsolète selon certains, l'institution implantée localement et ancrée dans une culture déterminée que l'on appelle « l'école » et en même temps qu'elle, « l'enseignant », etc.»


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