Communiqué de presse

Collectif Sauver les lettres

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Communiqué de presse

Le 10 juin 2001

 

 

Comment transformer un examen en rite de passage,

le bac en première communion.

 

La note du 11 avril 2001, parue dans le B.O. n° 16 du 19 avril 2001, modifie les règles de notation des épreuves anticipées des baccalauréats général et technologique. Elle indigne les professeurs de lettres car elle constitue une nouvelle atteinte au sérieux de l’examen, et une nouvelle étape vers la suppression progressive du baccalauréat, peu à peu vidé de toute fonction d’évaluation réelle.

En voici l’essentiel :

" Les épreuves anticipées de l’examen du baccalauréat ne seront plus suivies de l’organisation d’un jury spécifique à compter de la session de juin 2001 de ces épreuves.

Il appartiendra donc aux jurys réunis à l’issue des épreuves terminales d’arrêter la note des épreuves anticipées (soit un an après l’épreuve).

Des commissions d’harmonisation (…) attribueront des notes qui seront arrêtées par les jurys organisés après les épreuves terminales. (…) Les correcteurs et examinateurs des épreuves anticipées n’y seront pas obligatoirement présents.

Ces commissions d’harmonisation sont organisées à la fin de la période de correction et à l’issue des épreuves orales. (…) Elles travailleront à partir de l’édition des notes saisies préalablement par chaque correcteur et examinateur membre de la commission. À l’issue des travaux les éventuelles modifications de notes seront apportées par les correcteurs.

Bien qu’étant réglementairement des notes provisoires, les notes attribuées par les correcteurs des épreuves anticipées après harmonisation, seront communiquées aux candidats. En effet, il n’y a pas lieu de les laisser dans l’ignorance de leurs résultats pendant une année, les jurys ne pouvant qu’éventuellement, au vu des résultats scolaires, décider d'une modification favorable au candidat. "

Aucune justification n’est donnée à une telle modification des procédures de notation, qui remplace les " jurys spécifiques " à l’épreuve anticipée de français (qui réunissait les correcteurs de plusieurs centres d’examen à l’issue des épreuves de première), par une double procédure très lourde : des " commissions d’harmonisation " à la fin des épreuves anticipées, puis le jury de bac à la fin de l’année suivante ; pourquoi supprimer une procédure décentralisée, qui fonctionnait à la satisfaction de tous, qui permettait une double correction réelle et efficace, susceptible de prendre en compte, par la consultation du livret scolaire, le cas particulier de chaque élève ?

Parce qu’il ne s’agit pas de mieux évaluer, mais de moins évaluer, afin d’améliorer les statistiques de réussite au bac. Or, une telle finalité est totalement inavouable.

I – Le dernier mot au contrôle continu

Reculer l’examen des copies et la consultation des livrets scolaires à l’issue des épreuves terminales marque en fait la fin de la double correction issue d’une consultation entre collègues de la même matière, comme permettaient de le faire les jurys spécifiques :

  1. Le professeur de français présent au jury de terminale devra modifier une note sans demander l’aval du premier correcteur qui ne sera pas présent au jury: c’est une substitution de correction, non une double correction.
  2. L’arbitraire est encore plus flagrant en ce qui concerne l’oral : le professeur présent au jury n’aura même pas, comme pour l’écrit, une copie sur laquelle s’appuyer pour modifier la note ; sur quel critère objectif pourra-t-il alors se fonder ?
  3. Le livret scolaire devient donc l’élément essentiel de jugement pour déterminer la note de l’élève. C’est donc de fait l’introduction du contrôle continu ; car les consignes antérieures précisaient bien que le livret scolaire ne devait être pris en compte que dans les cas d’écart flagrant entre la note de l’examen et la moyenne annuelle, et qu’il n’était pas question de relever une note que les deux correcteurs jugeaient conforme au niveau de la copie d’examen. Or, sans contrôle sur la prestation réelle de l’élève à l’examen, c’est donc le livret scolaire qui sera déterminant.

S’agit-il de préparer les esprits à la suppression des épreuves finales ? N’était-ce pas, précisément, l’intention du précédent ministre de supprimer le bac pour le remplacer par le contrôle continu ?

II - Une notation " au mieux disant "

Plus grave, si les " commissions d’harmonisation ", à l’issue des épreuves anticipées, délibèrent sans les livrets scolaires des candidats, on peut se demander quels paramètres autres que statistiques pourront être utilisés pour ces " modifications éventuelles de notes ". Tel correcteur pourra ainsi être obligé de relever ses notes parce qu’elles seront, par exemple, en dessous de la moyenne académique, sans que soit tenu compte de la qualité réelle du paquet de copies qu’il a corrigées.

Certes, c’est déjà le cas en éducation physique depuis 1991, au grand dam des professeurs d’EPS. Mais l’évaluation des compétences en français, si cruciales pour la suite des études, peut-elle relever des mêmes critères que les performances sportives, au coefficient très faible ?

Comme il est évident qu’il ne sera jamais question de faire baisser les moyennes d’un correcteur particulièrement indulgent, on comprend que cette note de service ne poursuit qu’un seul but : augmenter les taux de réussite, notamment dans les bacs généraux, pour lesquels le pourcentage d’admis n’a guère changé depuis quelques années. On instaure donc une notation au mieux disant, qui vise à retirer tout sérieux à cet examen anonyme, démocratique et national, et qui, in fine, abuse les candidats plus qu’elle ne les aide.

III – Une procédure illégale.

Enfin, une telle procédure pose de sérieux problèmes juridiques, puisque " bien qu’étant réglementairement des notes provisoires, les notes attribuées par les correcteurs des épreuves anticipées après harmonisation, seront communiquées aux candidat. "

On voit combien la légalité importe peu du moment qu’on peut gonfler les statistiques de réussite :

  1. Si la note est publique, la délibération est en principe secrète, pour éviter toute pression sur les jurys.
  2. Comment justifier alors qu’on puisse communiquer à l’avance une note qui n’est pas définitivement arrêtée ? Comment les candidats comprendront-ils que leur note n’ait pas été relevée, alors que celle de tel autre l’a été ?
  3. Ne risque-t-on pas de voir augmenter les contentieux, que la double correction des jurys spécifiques permettait d’éviter ?

 

 

 

 


Le Collectif Sauver les lettres

dénonce donc cette nouvelle atteinte au baccalauréat.

Nous réaffirmons que la massification de l’enseignement secondaire ne pourra être considérée comme un succès que si l’effort politique porte sur l’amélioration du niveau, et non sur la baisse des exigences, que ce soit dans les programmes, dans les épreuves ou dans la notation aux examens.

 

 

 

 

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