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Mis à jour le
lundi 10 avril 2000
DANS une
déclaration sur l'évolution de l'enseignement
du français au collège et au lycée ( Le
Monde du 14 mars),l'Académie française
s'insurge contre un " recul des études
littéraires " et " s'alarme de l'amenuisement,
depuis plus de deux décennies, des filières
littéraires, au point de parvenir à éliminer
presque complètement de notre enseignement la
connaissance et le goût de la
littérature. "
Le texte, adopté à
l'unanimité et rendu public lundi 10 avril,
a été adressé préalablement au président de
la République, au premier ministre et aux
ministres de l'éducation nationale et de la
culture. " On a d'abord asphyxié les
langues anciennes, oubliant qu'elles servent à
connaître le français... Aujourd'hui, la langue
et la littérature elles-mêmes semblent être
devenues les ennemis à détruire ",
écrivent les académiciens. " Il est maintenant possible
d'arriver au baccalauréat sans jamais avoir lu
in extenso un seul de nos grands
classiques ", regrettent les
académiciens, déplorant que " tout soit mis en oeuvre pour
décourager la survie " de la
dissertation française au bac, un exercice " exigeant organisation de la
pensée, construction d'une argumentation,
maîtrise du raisonnement et de la
syntaxe ". Alors que moins de
7 % des lycéens choisissent désormais la
dissertation au profit notamment du commentaire
de texte, les académiciens s'insurgent contre " cet encouragement systématique
aux solutions paresseuses sous prétexte
d'égalisation des chances " et
affirment que " cet expédient se retourne contre
ceux qu'il prétend aider ".
LA CITOYENNETÉ
Cette évolution de
l'enseignement de la littérature est, selon les
académiciens, contraire à l'égalité des
chances. " L'égalitarisme idéologique
renforce ainsi les inégalités, juge
l'Académie française, puisque l'école ne
compense plus les infériorités éventuelles
dues à un milieu social peu imprégné de
culture tandis que certains élèves empruntent
des itinéraires privilégiés et sélectifs dont
seules les familles aisées connaissent les
accès et peuvent assurer les coûts. "
" C'est désespérer de l'école que de
la déclarer dans son principe incapable
d'initier les enfants et adolescents d'origines
diverses au plaisir de comprendre nos
chefs-d'oeuvres littéraires. " Les
Immortels dénotent dans cette évolution une " étrange conception de la
citoyenneté ".
Le Monde daté du mardi 11 avril 2000
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