Compte rendu de la réunion du 30 Novembre
Nous étions environ soixante dix, à la Bourse du Travail,
mardi dernier, pour rendre compte des réactions des collègues
après la publication des rapports qui doivent « moderniser
» notre métier et nos statuts. En langage clair, nous faire
travailler davantage pour produire un enseignement de moins bonne qualité,
mais qu'on puisse fourguer à davantage de clients pour un prix de
revient moins élevé.
La mobilisation dans les établissements
• Dans la plupart des cas, ce n'est ni la résignation,
ni la révolte, mais plutôt la résistance à l'application
des réformes. Des grèves locales ont déjà eu
lieu ( à Goussainville, notamment) devant la dégradation
des conditions d'enseignement, et une rentrée pire que les précédentes.
Dans la plupart des cas, les collègues ressentent cruellement les
allégements d'horaire en seconde : ils ont l'impression de ne pas
avancer dans les programmes ; bien souvent, les heures d'aide individualisée
sont tournées ou simplement ignorées, avec la complicité
d'administrations et de parents qui sont ravis que les enseignants prennent
l'initiative de limiter les dégâts.
• Trois lycées ont déjà lancé un
mot d'ordre de grève d'une journée pour protester contre
les rapports Bancel & C° : Montaigne et Dorian à Paris,
René Cassin à Gonesse.
• Tout le monde, à la réunion, était conscient
que la lutte sur les statuts est cruciale : car la dégradation de
l'école telle que la souhaite Allègre n'est possible que
si les professeurs sont, à tous les sens du terme, dégradés
: dans leur dignité disciplinaire, dans leur compétence professionnelle,
dans leurs conditions de travail. La réforme de l'an dernier n'est
donc possible que si le statut de 1950 est cassé.
• C'est dans ce sens que des collègues ont dénoncé
l'afflux massif de personnels précaires dans les établissements
: des CES aux vacataires « 200 heures» (engagés par
contrat privé pour remplacer un professeur titulaire absent, et
qu'on peut congédier au bout d'une semaine si le professeur revient
ou si le proviseur trouve une autre solution), en passant par les emplois
jeunes, c'est maintenant, dans de nombreux établissement, plus de
la moitié du personnel qui n'est pas titulaire. On imagine ce que
devient le rapport de force social et pédagogique dans une telle
situation.
Les propositions d'action
1 - Grève le mercredi 15 Décembre (début
des discussions sur les statuts), et rassemblement devant Matignon pour
exiger
• Le maintien des statuts qui régissent les emplois dans
l'éducation nationale.
• Le refus des allégements de programmes et d'horaires
qui dévalorisent l'école et diminuent les chances de réussite
des élèves.
• Le recrutement de personnels titulaires et qualifiés
pour permettre une progression qualitative de l'enseignement, et
non un élargissement quantitatif de la garderie jusqu'à dix
huit ans.
• Et plus que jamais, la démission dAllègre,
qui reste l'incarnation de ce désastre.
2 - Lancer une souscription nationale afin de publier un
placard dans Le Monde pour:
a - expliquer notre position
b - lancer un appel à tous les enseignants de France
pour qu'ils refusent d'appliquer une réforme qui casse un système
scolaire que nous envie le monde entier.
b - annoncer une grande réunion en Janvier (ou mars ?)
point de départ d'une radicalisation de la lutte.
Les collègues de l'académie de Paris, auxquels
aucune journée de grève n'a été retenue l'an
dernier, ont proposé d'aider ceux de Versailles (à qui pas
une heure n'a été épargnée : retraits allant
jusqu'à 14000 frs !) : leur solidarité permettrait de financer
en partie l'achat de cette page. Car cela représente plus de 100.000
frs. Mais, a suggéré un comptable optimiste, cela représente
100 personnes qui donneraient 1000 frs, ou 1000 personnes qui enverraient
100 frs. Dans ce but, nous nous déclarons en association, auxquels
les dons pourront être versés.
3 - Lancer des pétitions dans lesquels les professeurs
s'engagent nommément à ne pas appliquer les textes
officiels. On a objecté à cette proposition que lutter était
une chose, s'offrir individuellement au martyr en était une autre.
4 - Grève des manuels. Parce que nous n'aurons
plus besoin de manuels pour faire de la garderie, et qu'il sera donc inutile
d'engraisser les éditeurs. Parce qu'en plus, l'inspection générale
a affirmé que si les élèves ne réussissaient
pas, c'étaient que les manuels étaient mauvais, et que si
les manuels étaient mauvais, c'était à cause des demandes
des professeurs. Soyons donc disciplinés et refusons ces manuels
fauteurs d'échec scolaire. Il y a fort à parier que les éditeurs
s'alarmeront assez vite d'un tel mot d'ordre ; et Allègre verra
dans son bureau une nouvelle corporation de protestataires.
5 - Continuer à faire signer les pétitions disciplinaires
qui circulent (Math, Histoire - géo) ; élargir aux autres
matières (mais c'est difficile lorsque les textes restent vagues)
; faire des réunions disciplinaires dans chaque établissement
pour analyser les instructions officielles parues, et envoyer des
protestations aux inspections ou aux rectorats.
Le nombre des collègues présent à la réunion
montre en tout cas que la colère n'est pas tombée, et que
les capacités de mobilisations restent intactes, et les actions
résolues envisageables. Preuve en est la présence des membres
du S4 du SNES, qui ont annoncé qu'ils envisageaient (eux aussi)
d'appeler à prendre l'heure syndicale sur les rapports et qu'ils
allaient appeler (eux aussi) à une journée de grève.
Il n'est pas possible que le train des réformes continue
à écraser les contenus et les enseignants sans qu'éclate
la révolte.
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