COMBAT textes pour le débat Comité de Paris « Domingos
Teixero » ____________________
LIGNE ROUGE No 6 avril 1984 __________ Sommaire : Entretien
avec Fernando Arenas, Secrétaire Générale du Parti Communiste d'Espagne (reconstitué). _____
ENTRETIEN AVEC FERNANDO ARENAS
Introduction du P.C.E.(r) Peu après larrestation de notre Comité Central, Fernando Arenas Secrétaire Général du P.C.E.(r) , depuis la prison de Carabanchel répondit à une intervieuw que lui demandait une revue légale. Cette revue nen publia quune petite partie et, en général, les questions les plus « sensationnelles » et les moins importantes. Dans ses réponses, Arenas a abordé les thèmes les plus importants concernant notre Parti et lensemble du mouvement de résistance. Il analyse larrestation du Comité Central et toutes les arrestations que nous avons subies comme « un phénomène inhérent à la lutte », la façon dont ces arrestations ont affecté le Parti, la vitalité dont il fait preuve et son développement constant malgré elles. Dans linterview mentionnée, on évita de se référer expressément à la participation des services secrets du Gouvernement algérien dans larrestation de notre C.C. à Benidorm, en attendant davoir pu accumuler suffisamment de preuves. Au moment de publier cette brochure une série de faits se sont produits qui viennent renforcer ce que nous maintenons. Il est bien clair quavec la suppression de « La Voix des Canaries Libres », le Gouvernement algérien essaye dutiliser les mouvements révolutionnaires qui lui sont proches pour ses transactions et ses concessions avec limpérialisme, dans ce cas les impérialistes espagnols. Cette politique qui consiste à plier léchine, de la part dun pays qui jusquà maintenant sétait toujours signalé pour une politique conséquemment progressiste et anti-impérialiste, ne représente rien de bon pour le peuple algérien qui saura, sans tarder, empêcher toute nouvelle tentative de ses gouvernements dabandonner la voie de la lutte conséquente contre limpérialiste et la réaction. Dautre part, Arenas analyse clairement dautres thèmes de grand intérêt, comme le développement de la lutte de classes au sein du Parti, le rôle historique que jouent et vont jouer les organisations armées qui ont surgi en Europe et en Amérique Latine, la pleine vigueur du marxisme-léninisme, la stratégie, la tactique et les méthodes de lutte dont le moment historique implique lutilisation dans notre pays ; notre conception marxiste-léniniste du Parti du prolétariat, de lunité de la classe ouvrière et de tous les secteurs populaires et de la dictature du prolétariat, ainsi que les lignes générales pour réussir à atteindre ces objectifs. Dans ses réponses, Arenas aborde également la situation politique actuelle et le caractère des réformes fascistes, la situation syndicale et notre alternative dans ce sens. Tous ces thèmes traités avec la clarté et la précision qui caractérisent Arenas pourront énormément contribuer à éclaircir les idées de tous ceux qui la liront. Cest là la raison pour laquelle nous nous sommes décidés à publier et à diffuser dans sa totalité lentrevue avec le camarade Arenas.
Comment et pourquoi larrestation du 9 octobre a Benidorm a-t-elle pu se produire ? Larrestation du Comité Central du Parti est le point final dune gigantesque opération policière qui a commencé il y a déjà longtemps à laquelle ont participé, en plus des Brigades de la police politique, des Services dintelligence de lArmée. Il ny a eu aucun « mouchardage », ni même une infiltration, comme on a pu linsinuer. Contrairement à ce que certains « savants » semblent le supposer, il nest pas aussi facile de sinfiltrer dans notre Parti, bien quil soit exact que cela nous soit déjà arrivé. Il y a déjà longtemps que nous étions au courant des plans de la police dont le but était la désarticulation du Parti avant la fin de lété (ils avaient appelé cette opération « Vacances 77 »). Cest pourquoi, je veux vous assurer que nous avions pris toutes les mesures à notre portée pour léviter. Nous avons cependant été arrêtés. Et cest ce qui importe maintenant. La première et principale cause de cette arrestation, il faut la rechercher en Algérie, voilà la vérité. Notre Parti avait confiance dans les Algériens et ceux-ci nous ont vendus pour 30 deniers. Depuis un certain temps, le gouvernement algérien est en train dessayer de rompre laccord tripartite sur le Sahara, et Madrid a profité de ce fait pour obtenir des Algériens les contacts dont ils avaient besoin pour nous trouver. Le Gouvernement espagnol avait une impérieuse nécessité den finir le plus rapidement possible avec le mouvement démocratique et révolutionnaire. À la longue, la police serait bien parvenue à nous arrêter, mais il lui aurait été difficile de le faire en peu de temps. Les infiltrations quils ont tenté et les nombreuses arrestations de ces derniers temps ne leur ont donné que des maigres résultats. Dautre part, nous savions par des arrestations antérieures que la police était très sûre datteindre ses objectifs dans le délai fixé. Il ne fait aucun doute pour nous que cette assurance était cautionnée par la confiance excessive que nous avions mis dans les « amis » dAlgérie. Nous ne pouvions pas nous méfier des dirigeants dun pays progressiste. Nous avions confiance en eux, ils ne pouvaient pas nous trahir... et ils nous ont trahis ! Cest là le piège dans lequel nous sommes tombés. Nous pourrions donner quelques détails précis, mais nous ne le considérons pas opportun ni nécessaire. Cest là une leçon que nous les communistes dEspagne, noublierons jamais. Quant à la manière dont se réalisa larrestation, elle vaut la peine dêtre contée. Imaginez-vous un appartement denviron cent mètres carrés, quinze personnes y dormant entassées, lexplosion dans la maison de nombreuses bombes de gaz et de bombes lacrymogènes, le tout accompagné de rafales de mitraillette... Il ne restait plus un centimètre cube doxygène, on ne voyait plus rien du tout et on ne savait pas sil y avait des blessés ou des morts. On entendait seulement des tirs, des toux asphyxiantes et les paroles dinquiétude de certains camarades. Et la police était au courant de la présence dun enfant qui, à ce moment, devint la préocupation majeure de tous. Quelques secondes passèrent et comme il était impossible de rester dans la maison, nous avons décidé de sortir, absolument persuadés de ne pas atteindre la porte vivants. Là nous fûmes frappés, mais nous maintîmes la tête haute, disposés au pire.
Est-il vrai que dans lappartement se trouvaient les plans du palais de la Moncloa et que lon y préparait un attentat contre Suarez ? Dans la maison, il ny avait que des documents et des rapports politiques du Parti et nous nétions quen train de préparer un plan dagitation en faveur du boycottage aux « commissariats » dentreprises (élections syndicales) et pour développer le mouvement de solidarité envers les prisonniers politiques. Rien de plus. Lhistoire des plans de la Moncloa et dautres semblables ont été inventées, avec laccord de Suarez, cela ne fait aucun doute, par une revue qui depuis déjà longtemps mène une campagne de calomnies et de désinformation sur le P.C.E.(r) et les G.R.A.P.O. Lintention de cette revue nest pas seulement de nous cataloguer parmi les « terroristes » et les « fous », alors que leur tentative de nous faire endosser létiquette dextrême droite a échoué, mais encore dalimenter la campagne de crainte du « coup dÉtat militaire » au moyen duquel ils menacent afin de faire reculer encore plus la gauche domestiquée pour quelle accepte, sans rechigner, les décisions du Gouvernement ultra-réactionnaire de Suarez.
Et lhistoire du fusil de mire télescopique et au dispositif infra-rouge, ainsi que les uniformes militaires ? Je nevois pas, à moins quils aient confondu avec le balai ! car là-bas ils nont pu trouver la moindre « arme », si ce nest le fusil de plastique dont nous avions fait cadeau à Danïel, le fils de Cerdán Calixto et de Encarnación Martinez. Lhistoire des uniformes est un autre mensonge de la police. Vous comprendrez facilement que si le Parti avait ces uniformes en sa possession, nous ne les garderions pas dans un appartement loué pour y tenir une réunion. À Benidorm, chacun ne portait que les habits habituels de « vacanciers ».
La réunion en question etait elle un Plenum élargi du Comité Central, du Comité Éxecutif ou des G.R.A.P.O. ? Il sagissait dune réunion ordinaire du Comité Central. Comme au bon vieux temps, la presse espagnole sest faite le porte-parole des notes et informations de la police sans y ajouter une seule référence de sa part, sans manifester le moindre doute, malgré les nombreuses et profondes contradictions que contenaient ces nouvelles. lls parlèrent de larrestation de l« État-major des G.R.A.P.O. », mais ils ne publièrent pas de photos de larsenal qui accompagne généralement les rapports de la police ; les preuves de « terrorisme » ne sont apparues nulle part. Peut-être nont ils pas voulu exploiter pas à fond leur brillant service ? Le Gouvernement savait très bien, tout comme les directeurs des journaux, quà Benidorm on venait darrêter le Comité Central du P.C.E.(r) et que, là-bas, la police navait pas trouvé une seule arme, ni rien qui soit en relation avec les actions militaires que lon nous attribue. Cest également pour cette raison quils ont pu nous arrêter aussi facilement. Car les G.R.A.P.O., daprès ce que je crois savoir et lexpérience la prouvé, ne se laissent pas arrêter, ils opposent de la résistance et ceci parce quils sont armés. Jimagine que lorsque quelquun est armé, cest pour quelque chose, ce ne sera pas pour user de son arme comme dun ornement. Cest là une preuve de plus qui confirme ce que jai déjà dit à Benidorm, cest le Comité Central du P.C.E.(r) qui a été arrêté et il est totalement faux de dire que nous étions l« État Major des G.R.A.P.O. ». Cette réunion était la premiére que célébrait le Comité Central élu lors du II Congrès du Parti, qui a eu lieu en juin.
À partir de larrestation, comment se déroulèrent les événements ? Bon. De la façon dont nous avons été arrêtés, certains dentre nous sétaient déjà fait à lidée quils avaient monté toute une mise en scène pour nous faire effectuer la « promenade ». Cette impression a été en se réaffirmant, au fur et à mesure que le temps sécoulait, jusquau moment où nous sommes entrés dans les geôles de la D.G.S. [Direction Générale de Sécurité, à Madrid N.R.]. Jusquà ce moment, de nombreuses heures sécoulèrent dont la police profita pour faire avec nous une espèce dexperimentation de torture psychologique, dans le but de nous abattre moralement. Ils nous gardèrent toute la journée les yeux bandés et, autour de nous, ils élevèrent un mur de silence. On nentendait que les bruits de moteurs, grincements de portes, claquements de culasse des mitraillettes... Ceci à Alicante, où ils nous gardèrent ainsi pendant 8 heures, debout, menottés aux mains, dans une sorte de garage. Certains dentre nous lancèrent un défi à ce type de torture, en les dénonçant et en encourageant les camarades, ce qui attira la fureur des « grises » sur nos têtes et nos reins. DAlicante nous avons été transférés à la D.G.S., dans un grand déploiement de forces et dans des conditions inhumaines. Pendant les interrogatoires, malgré les tortures sadiques auxquelles furent soumis quelques uns de mes camarades ils nont rien réussi à obtenir. Toutes les déclarations ont été confectionnées sur la base dinformations obtenues sous la torture lors darrestations antérieures de militants ou de sympathisants du Parti, des déclarations qui nont aucune valeur mais que le juge a néanmoins considérés suffisantes pour nous emprisonner. Rendez-vous compte combien cette mise en scène était fausse : une fois le délai légal de 72 heures écoulé, et comme les déclarations faites et signées par nous tous ne leur permettaient pas de nous faire un procès ou de nous emprisonner, le juge ordonna que nous soyons à nouveau conduits à la D.G.S. afin d'y faire un « complément » de déclarations. Nous somme faibles, mais cette faiblesse ne nous affraye pas. La qualité, le caractère prolétarien et révolutionnaire de notre Parti, le militantisme politique de tous ses membres ne peuvent être mis en doute par aucune personne sérieuse. Vous devez tenir compte du fait que nous ne constituons pas un parti révisionniste ou social-démocrate où chacun ne fait que voter ou participer à une fête. Notre Parti est une force révolutionnaire en dévloppement, avec un programme et des plans à suivre. Dans ce sens nous sommes de beaucoup supérieurs à nimporte quelle « masse de militants » sociaux-démocrates. Atuellement nos forces sont petites, mais elles sont bien organisées et elles sétendent aux principales zones industrielles et agraires du pays et dans toutes les nationalités. Nous sommes conscients de notre faiblesse par rapport aux énormes tâches politiques que nous nous proposons de réaliser, mais nous savons que ce ne sera pas touhjoursd le cas, que notre influence croît de jour en jour et quil ne se passera pas longtemps avant que le P.C.E.(r) ne gagne la confiance et le soutien dont jouissait à une autre époque le Parti Communiste de José Diaz parmi les travailleurs. Tout cela est question de temps, de savoir attendre et de travailler dur et patiemment, sans abandonner à aucun moment la ligne politique et le travail commencé. Jusquà maintenant nous sommes parvenus à donner au mouvement sa première impulsion, ce qui est toujours le plus difficile.
Pendant 1977, les arrestations dans le P.C.E.(r) ont été constantes et très graves. Comment analysez-vous ce fait ? C'est là un bon moment pour répondre à cette question car, même au sein du Parti ce problème nest pas encore clair. Il est vrai quau cours de 1977 de nombreuses et importantes arrestations de militants et dorganisations du Parti se sont produites, qui se sont terminées par larrestation du Comité Central. Il sagit là dune question très sérieuse à laquelle nous prétons lattention qui se doit. Chacune de ces arrestations sest produite dune façon différente et pour des motifs différents. Nous nentrerons pas dans les détails. Ce qui nous intéresse cest de connaître la cause première et dernière de toutes ces arrestations, et de voir si, réellement, elles pouvaient être évitées, ou dans quelle mesure on peut les éviter. Pour être plus clairs, nous donnerons un exemple. Au cours de 1975, le F.R.A.P. a eu également de nombreuses arrestations. Maintenant, par contre, depuis longtemps, il nen a eu aucune qui puisse être qualifiée dimportante. Quelle est la cause de ce phénomène ? Pourquoi arrête-t-on les militants de notre Parti et pas ceux du F.R.A.P. ? Est-ce parce que ces dernières ont appris à bien faire les choses et que nous, nous les faisons chaque fois plus mal ? Je pense que si, dernièrement, le F.R.A.P. na eu aucune arrestation importante, cela est indiscutablement dû au fait que cette organisation a déserté le camp révolutionnaire. Cest évident, et il en va de même avec tous les autres groupes ou partis qui se considèrent communistes révolutionnaires. Et sils ne subissent pas darrestations cest parce quils feraient les choses comme doit le faire toute organisation communiste ou révolutionnaire. Mais cela ne justifie pas nos arrestations, qui trouvent leur cause dans notre travail lui-même. Parce que nous le réalisons mal ? Cest possible. Cependant pour autant que nous nous y efforcions, nous sommes incapables de trouver de graves erreurs de fonctionnement qui pourraient expliquer les arrestations et nous accepterions volontiers toutes les critiques ou apportations qui nous seront faites dans ce domaine. Ainsi sommes-nous forcés de conclure en disant que les arrestations de militants de notre Parti, tout comme les pertes et batailles perdues par toute armée qui combat, sont, en général, inévitables, elles forment partie dun phénomène inhérent à toute lutte. Nous avons travaillé et nous continuerons à le faire pour extirper de nos rangs tout culte à la spontanéité et à létroitesse de vue ; nous avons travaillé infatigablement pour créer une organisation de combat, de véritables professionnels au service de la révolution et de la cause du prolétariat. Personne ne peut nous reprocher davoir négligé cet aspect tellement important de notre activité et personne ne peut non plus dire que nous nous soyons précipités, sans cela, que lon nous donne un exemple de négligeance ou dinsouciance. Je disais que les arrestations sont inévitables dans tout Parti qui encourage et pratique la lutte de classes de façon conséquente, mais on ne doit pas en déduire que ces arrestations doivent paralyser lactivité. Sil en était ainsi, si après chaque arrestation lactivité du Parti disparaissait pour longtemps, il faudrait alors donner raison à ceux qui croient à la toute puissance de la police. Dans lexemple que nous avons donné auparavant, non seulement toute lactivité du F.R.A.P. et de ses protecteurs a disparu mais, lorsquils ont réapparu, ils lont fait dans la légalité et déjà ralliés aux tortionnaires. Est-ce là le cas de notre Parti ? Non, et ça ne pourra jamais lêtre, car chaque arrestation fait ressurgir le Parti avec plus de force et le réaffirme dans sa ligne politique.
Après ce coup, le P.C.E.(r) peut-il être donné pour mort ? (Linterviewé éclate de rire et répond avec confiance.) Combien de fois ont-ils tué le P.C.E.(r) et nous ont-ils laissés pour mort ! Et cependant, nous sommes ressuscités autant de fois quils nous ont désarticulés, plus vigoureux quavant. Cest pour cette raison que lorsque nous lisons dans la presse une affirmation de ce genre, un éclat de rire secoue nos rangs dun bout à lautre. Il ne fait aucun doute que larrestation du Comité Central a été pour le P.C.E.(r) un des coups les plus durs reçus jusquà maintenant. Mais, immanquablement, lexpérience prouvera jusquà quel point il nous a affecté. Croyez-moi, notre arrestation fera plus de mal au Gouvernement quà nous-mêmes. Vous allez être surpris par ce que je vais vous dire. Lorsque nous sommes arrivés en prison, les camarades qui y étaient nous reçurent avec force embrassades, mais ils ne pouvaient dissimuler leur tristesse. Comme nous, ils étaient déjà habitués à être arrêtés, à ressentir les effets dautres arrestations de militants du Parti et, également, à voir les résultats finals de ces arrestations. Mais le Comité Central du Parti, cela leur avait paru trop fort. Mais quelle ne fut pas leur surprise de nous voir arriver tous animés et pleins doptimisme. « Ce nest pas possible ! » nous disaient certains dentre eux. « Mais vous êtes inconscients ! » sécriaient-ils, en se prenant la tête dans les mains ? Très rapidement, en apprenant que lactivité du Parti se poursuivait dans la rue, la formation dun nouveau Comité Central provisoire, la parution normale de nos publications et dautres activités du Parti, ainsi que la déclaré la propre presse pendant les événements de Cadiz, ils étaient victimes de la contagion.
Ny a-t-il pas plus de cadres politiques à lintérieur que hors de prison ? Cela dépend de quel point de vue on se place. Maintenant, la plupart de la « vieille garde » du Parti se trouve en prison, si lon peut sexprimer ainsi. Cest là effectivement un capital de grande valeur. Mais il faut tenir compte du fait que cette vieille garde na pas passé son temps à courir à droite et à gauche ou à se tourner les pouces, mais quelle sest employée à fond dans la reconstruction du Parti, avec tout ce que cela signifie ; elle a créé une structure organique, elle a tracé une ligne politique ; elle a resserré les liens avec les masses, elle a montré lexemple et fait école. Si lon considère la question sous cet angle, on comprendra immédiatement que limmense majorité des cadres du Parti, cadres en puissance du moins, se trouvent hors des prisons. Nous avons pleine confiance en eux. Sil nen était pas ainsi, à quoi aurait donc servi tout notre travail ?... Je ne suis pas comme Carrillo qui narrête pas de répéter quil na pas de remplaçant et quil est indispensable à son Parti. Pour ce quil a fait et continue à faire, il est bien possible quil nait pas de remplaçant. Notre cas est différent. Nous avons et nous aurons toujours de nombreux remplaçants et continuateurs. Et malgré les regrets de la grande bourgeoisie, nous sortirons de prison, car la classe ouvrière et les larges masses populaires nous libéreront. De cela nous sommes également sûrs.
En ce moment, que représente quantitativement et qualitativement le P.C.E.(r) ? En analysant lexpérience acquise au cours des cinq dernières années il faut tenir compte du fait que ce nest pas quen 1977 que nous avons eu des arrestations , on pourra se rendre compte de la justesse de ce que javance. En résumé, la pratique de la lutte de classes avec toutes ses conséquences naffaiblit pas lorganisation révolutionnaire, au contraire, elle la fortifie et permet une accumulation dexpérience plus importante.
Pouvez-vous expliquer, une fois pour toutes, sans avoir recours au topique habituel, les veritables relations entre le P.C.E.(r) et les G.R.A.P.O. et comment elles sétablissent ? Je ne sais pas ce que vous entendez par « topique habituel ». Le P.C.E.(r) a toujours déclaré son indépendance des G.R.A.P.O. ou de nimporte quelle autre organisation et jusquà maintenant, malgré toutes leurs tentatives, le Gouvernement et la police ne sont pas parvenus à nous identifier en quoi que ce soit aux G.R.A.P.O. Au plus sont-ils parvenus à établir la relation de quelques militants du P.C.E.(r) avec cette organisation, ce qui est facile si lon tient compte du fait que nous réaffirmions à chaque instant. Cette indépendance peut être devenue un « topique », mais quy pouvons-nous ! Cest là la vérité et pour démontrer le contraire, il faut des preuves, car les accusations abondent et sont très aisées à lancer. Le gouvernement et la police on eu une excellente occasion de démontrer ce dont ils nous accusent à loccasion de larrestation du Comité Central et des nombreux documents quils ont trouvés en notre possession. Et je vous dirai plus encore : ils ont saisi les actes enregistrés sur bande magnétique de la totalité des débats de notre IIe Congrès. Vous conviendrez avec moi que tout ce matériel est plus que suffisant pour nous accuser. Et savez-vous à quoi le juge a du recourir pour nous envoyer en prison ? Eh bien, il a du ressortir des archives de la police une brochure interne des G.R.A.P.O., dont nous ignorions totalement lexistence avant notre arrivé à la D.G.S., dans laquelle référence était faite aux relations de cette organisation avec le Parti. Cest tout. Et, si vous voulez mon avis, ces groupes qui ne veulent pas se séparer du peuple, ont besoin dune direction politique et ils pensent lavoir trouvée dans notre Parti, dans ses orientations et ses consignes. Dautre part, le fait que le P.C.E.(r) ait été le premier et presque le seul à les soutenir, que nous ne nous soyons pas joints à la campagne démagogique orchestrée par le Gouvernement et que certains de nos militants y soient entrés pour combattre au coude à coude avec ces combattants antifascistes, tout comme beaucoup dautres sont entrés dans des organisations de caractère populaire, tout cela leur permet de se sentir étroitement unis à nous et daccepter quelquesuns de nos conseils et de nos propositions. Mais la décision et la direction réelle et effective de ces organisations, dans ce cas les G.R.A.P.O., est une chose qui ne dépend pas de nous. Il ne fait aucun doute que nous exerçons une certaine influence sur eux, notre volonté est surtout de soustraire ces organisations des tendances anarchisantes ou purement militaires et, bien sûr, nous nous sommes solidarisés et nous continuerons à nous solidariser et à soutenir toutes leurs actions. Les critiques que nous leur avons faites ou celless que nous aurions à leur faire est une chose que nous nallons pas communiquer à lennemi commun. Nous comprenons que ces relations soient la cause de nombreux déboirs pour le Gouvernement et la réaction en général. Mais quy pouvons nous ? Ils voudraient que les G.R.A.P.O. se convertissent en un groupe d« extrême-droite », car ils auraient alors la garantie de pouvoir les contrôler pour les utiliser contre le mouvement ouvrier et populaire. Il faut se réjouir quil nen soit pas ainsi comme nous en avons de nombreuses preuves et que les G.R.A.P.O. soient une organisation véritablement indépendante qui serve le peuple et admette volontiers en leur sein nos militants et les conseils du P.C.E.(r). Mais la réaction ne veut en aucun cas admettre une vérité si simple, souvent répétée et démontrée : les G.R.A.P.O. sont les G.R.A.P.O. et le P.C.E.(r) est le P.C.E.(r).
Qui est Arenas ? Maintenant les biographies politiques sont à la mode. En ce qui me concerne, je ne crois pas quil vaille la peine doccuper lespace précieux que nous offre votre revue pour parler de choses aussi peu importantes. Mais puisque vous me le demandez et que lon a lancé toute sorte de mensonges et de calomnies sur le P.C.E.(r) et ses dirigeants, je vais vous répondre. Je me considère un militant ouvrier communiste qui connaît bien pour lavoir vécue dans sa famille, dans son travail et dans la rue la condition de sa classe ; qui depuis très jeune, encore enfant, a commencé à sympathiser avec les idées socialistes et qui, plus tard, est arrivé à en être pleinement convaincu que seul le communisme apportera une solution à toutes les souffrances, et les problèmes. En peu de mots, je suis comme beaucoup dautres, un produit de laprès-guerre qui dure encore dans notre pays. Je suis né dans un de ces foyers comme des milliers dautres, sans pain et sans lumière, que nous a légué le « glorieux » soulèvement. Mes parents émigrèrent du Maroc à Madrid en 1957, avec ce quils avaient sur le dos et une famille nombreuse. Après avoir erré de nombreux jours dans les rues et avoir frappés à un grand nombre de portes, lAssistance Publique nous concéda une baraque de 10 m carrés dans le « Pozo dello Raimundo ». Mes parents y vivent encore ainsi que quelques-uns de mes plus jeunes frères. Mes deux filles de 6 et 8 ans vivent également dans une baraque du « Pozo » avec leur mère. Jai milité activement dans le parti carrilliste. Après mon service militaire, je fus convaincu que Carrillo et son groupe trompaient les ouvriers de la façon la plus misérable qui soit. Il me fut alors très dur dabandonner ce parti pour lequel, avec mes capacités limitées, javais tellement fait et dans lequel javais déposé tous mes espoirs démancipation de la classe ouvrière. Mais je ne voulais pas continuer à être complice de Carrillo et, avec toutes les conséquences que cela représente, je rompis avec le révisionnisme. Depuis lors, jai mis le même acharnement et lardeur que javais mis au travail et à la défense du parti carrilliste à le combattre. Jai beaucoup appris au cours de cette période. Plus tard, je me suis intégré au mouvement de gauche, en y combattant également les tendances politiques et idéologiques opportunistes et petites-bourgeoises. Dans ce mouvement de groupes et « partis » qui surgirent dans les années soixante comme conséquence de la crise du révisionnisme, tout nétait pas mauvais. Ce mouvement était très hétérogène et alors, les camps nétaient pas aussi clairement délimités quils le sont aujourdhui. Cest pour cette raison que parmi les éléments opportunistes et petits-bourgeois on trouvait mélangés de nombreux hommes et femmes honnêtes et de valeur, véritables communistes. À leurs côtés, au cours de ces dernières années, jai centré toute mon attention et mes efforts dans la tâche de reconstruction du véritable Parti dont la classe ouvrière dEspagne a besoin et dans lélaboration de sa juste ligne marxiste-léniniste.
Arenas a été accusé dexercer une dictature personnelle dans le Parti, déliminer toute personne qui ne partage pas ses opinions. dans ce contexte, comment sexplique le cas de Pio Moa, expulsé pour être en désaccord ? Il est vrai que jai été accusé de dictateur et dautres choses, non seulement ces derniers temps mais depuis le moment même où jai commencé à défendre clairement et ouvertement mes opinions. Mais vous oubliez un « petit détail ». Tous ceux qui ont lancé cette accusation contre moi sont sortis du Parti eux-mêmes, tous seuls, personne ne les a accompagné, doù lon peut en déduire clairement que je nétais pas le seul à exercer la « dictature », mais tout le Parti contre un seul élément opportuniste ou perturbateur. Si on peut appeler cela une dictature !... Ce nest quaprès être sortis du Parti que tous ces éléments ont commencé à dire que je suis un dictateur. Pour tous ces gens, si le Parti cest-à-dire limmense majorité des militants naccepte pas leurs opinions après les avoir amplement discutées, pour eux, alors, le Parti nest plus le Parti, mais un groupe de crétins qui se soumet à la dictature de quelquun. Qui est ou aspire à devenir dictateur ? Celui qui défend les idées justes et se joint à la majorité ou, au contraire, celui qui a tort, prétend embrouiller, semer la discorde, et qui veut faire de lorganisation communiste une bande de bons amis ? Le cas de Pio Moa nen est quun parmi beaucoup dautres, avec la seule différence que cet individu a fait plus de bruit que les autres, en voulant justifier ainsi sa mesquinerie et sa lâcheté. Il commença par parler de petites erreurs, nous avons prêté attention à ses raisonnements et nous avons discuté avec lui pendant deux ans ! Comme quoi la liberté de discussion nexiste pas dans nos rangs ! Mais en même temps que la totale liberté de discussion, pour que les choses se sachent et que nous ne dégénérions pas en un groupe dopportunistes, il doit également y avoir unité daction ! Ainsi lorsque Pio Moa acquis la conviction quil ne réussirait pas à nous orienter sur une fausse voie et que lui-même était entraîné là où il ne voulait pas aller, à partir de ce moment, il commença à perdre les pédales. Nous lavons alors rappelé à lordre. Sa réponse fut la démonstration de son profond mépris envers tous les camarades, la manifestation la plus claire de son individualisme petit-bourgeois et de son anarchisme « señoril ». Vous comprendrez que dans nos rangs nous ne puissions pas transiger avec ces choses et encore moins dans les organes dirigeantes du Parti. Aussi avons-nous décidé de lui retirer toutes ses responsabilités et de le soumettre à une période dobservation jusquà ce quil donne la preuve de sa volonté dunion et de corriger ses fautes à fond. Moa attendait cette décision, il lattendait pour pouvoir lancer ses attaques directes contre le Parti, contre sa ligne politique, contre sa direction et contre moi, ce quil navait jamais fait auparavant. Dans le fond, dans toute cette affaire on trouve une question que Pio Moa partage avec tous les opportunistes et cest ce qui la amené à choquer avec le Parti : son renoncement à soutenir, en tant que principe fondamental, la nécessité de la lutte armée révolutionnaire pour développer le mouvement de masses et abattre le fascisme, la repoussant aux calendes grecques « lorsque le Parti et le mouvement de masses seront plus développés », lalibi quemploient tous les opportunistes pour couvrir leur désertion du camp révolutionnaire.
Quelles sont les différences et les points communs qui existent entre le P.C.E.(r) et des organisations telles que les Tupamaros, les Montoneros ou le groupe « Baader-Meinhof » ? De ces organisations et dautres qui leur sont semblables, nous ne connaissons que ce que daigne publier la presse légale et vous comprendrez que ceci soit insuffisant pour émettre un jugement en cannaissance de cause. Mais il y a cependant certaines choses qui sont bien claires et sur lesquelles nous pouvons donner notre avis. Ni les Tupamaros, ni les Montoneros, ni la Fraction de lArmée Rouge allemande ne sont des partis ouvriers marxistes-léninistes et ils ne se considèrent pas non plus comme tels. Ce dont ils se rapprochent le plus cest dun mouvement de caractère populaire révolutionnaire. Il reste encore à voir ce que deviendront ces mouvements, bien que lon ne puisse écarter la possibilité quune partie dentre-eux, au moins, se transformeront en véritables partis davant-garde. Nous considérons que lorsquen Allemagne, en Uruguay et en Argentine surgira le nouveau parti révolutionnaire de la classe ouvrière, ce processus ne sera pas totalement indépendant de ces mouvements, car il ne fait aucun doute que ceux qui les forment constituent déjà aujourdhui, dune certaine façon, lavant-garde de la lutte de ces peuples. Ils ont compris un des principaux problèmes de notre époque Que seule la lutte armée rendra ces peuples véritablement libres et que seule cette forme de lutte instruit et clarifie les rangs révolutionnaires. Notre Parti comprend parfaitement le nouveau phénomène de lapparition de détachements armés dans des pays au développement économique relativement élevé. Ce qui nous différencie fondamentalement de ces détachements, cest que nous avons constitué un Parti qui a pour base la classe ouvrière, qui se guide sur le marxisme-Iéninisme et qui fomente et tente dorganiser le mouvement de résistance populaire. Nous avons commencé par les fondements, alors que ces organisations lont fait à lenvers. Cela est peut être dû au fait quelles nont pas bien compris et ceci est dune importance cruciale les nouveaux problèmes qui se présentent au mouvement révolutionnaire contemporain ; elles ont compris ce que sont les soi-disant partis communistes et elles veulent faire la révolution, mais en le tentant, elles se sont séparées (souhaitons que ce ne soit que momentanement) du marxisme-léninisme, de la seule doctrine qui puisse nous conduire à la victoire.
En parlant du groupe « Baader-Meinhof », ton suicide et celui de certains dentre vous dans les prisons espagnoles serait-il possible comme ceux des révolutionnaires allemands ? Oui, pourquoi pas, un « suicide » est possible. Et encore plus si lon tient compte du fait que les « grises » ont occupé la prison et se promènent dans les couloirs mitraillettes en main et que nous sommes continuellement menacés de leur intervention à la moindre manifestation de désaccord que nous émettions avec le Règlement nettement fasciste qui régit la prison. Dans ce sens, un « suicide » individuel ou collectif pourrait être présenté sous une autre forme bien quil ne faille pas en écarter un du type de celui inventé par les nazis qui gouvernent lAllemagne. La seule chose que lon puisse dire là-dessus, cest répéter ce quon déjà déclaré les martyres de la révolution de la résistance anti-nazi allemande : « Si la nouvelle dun suicide était publiée, ne la croyez pas. » Les révolutionnaires peuvent commettre certaines « folies », selon le sens commun, mais jamais celle de mettre fin à leur propre vie, car ceci nest pas révolutionnaire, mais un acte de lâcheté.
On a limpression quune série de « vérites indiscutables » du marxisme sont en révision profonde et en crise objective. le marxisme-léninisme est-il encore pleinement en vigueur ? Marx, Engels, Lénine ne se sont-ils jamais trompés ? Toutes les citations des livres sont-elles indiscutables ? Beaucoup de monde parle de la « crise du marxisme », mais très peu sarrêtent sur la crise réelle dont souffre le capitalisme et le révisionnisme. ll ne fait aucun doute que toute une série didées et de thèses marxistes ont perdu leurvi gueur. Mais, dun autre côté, aucun marxiste na dit ni ne pourra dire que les grands maîtres du socialisme scientifique ne se soient jamais trompés ni que les citations de leurs livres soient indiscutables, car personne plus que leurs propres auteurs ne les ont remises en question et les ont révisées à de nombreuses reprises. Il ny a rien qui ne soit plus contraire au marxisme que le dogmatisme ; pour cela, nous, marxistes, plus quau texte imprimé dans les livres, nous nous attachons à son esprit révolutionnaire. Le marxisme-léninisme est en vigueur dans ses principes fondamentaux parce que les conditions objectives sur lesquelles il se base nont pas fondamentalement varié, du moins dans la société capitaliste dans laquelle nous vivons. Mais la vie et la société changent, elles ne sont pas immuables et cest pour cela quil est nécessaire que le Parti révolutionnaire adapte toujours ses principes aux conditions qui sont en changement constant. Cest pour cela que je dis quil y a une série de choses quil devient nécessaire de réviser ; mais cela, il faut le faire du point de vue et de la position révolutionnaire du marxisme, non de positions révisionnistes bourgeoises. Nous, le P.C.E.(r), nous sommes en train de réviser le marxisme, non pas à la manière bourgeoise, mais comme de véritables marxistes révolutionnaires, comme Marx et Engels, comme Lénine, Staline et Mao Tsé-toung révisèrent la doctrine lorsque cela fut nécessaire pour ladapter aux temps nouveaux et aux conditions nouvelles.
Dans lEspagne de 1977, la prise du Pouvoir comme en Russie en 1917 est-elle possible ? Non, ce nest pas possible et vous avez là un exemple de révision révolutionnaire du marxisme. On sait quen Russie, la question du Pouvoir qui est le problème fondamental de toute révolution sest résolue par une action insurrectionnelle. En Espagne, par contre, les masses populaires arriveront au Pouvoir après avoir livré une longue guerre révolutionnaire ; cest là un principe qui est intangible. Mais les conditidns ont changé et, par conséquent, la forme de cette violence. Ce changement est dû aux conditions économiques et politiques dans lesquelles domine le monopolisme et sa forme de pouvoir militariste, policière et réactionnaire. Nous navons pas inventé ces conditions, pas plus que les formes de résistance des masses populaires quelles engendrent. On peut comprendre que dans ces conditions, la tactique, la stratégie et les méthodes de lutte révolutionnaires du prolétariat doivent nécessairement changer. Et ceci parce quil ny a plus de révolution bourgeoise à réaliser, car la réaction ne se laissera pas surprendre par une insurrection générale qui éclaterait à un moment donné et parce quelle ne permettra pas non plus que les masses sorganisent et concentrent pacifiquement leurs forces en utilisant la légalité bourgeoise qui dautre part, est déjà totalement hors dusage pour le prolétariat.
Le Parti unique est-il un concept applicable à la réalité complexe actuelle ? Cela dépend du type de parti. Ce concept est inapplicable aux partis fascistes, mais pas au Parti du prolétariat, car si la forme dexistence de la bourgeoisie se caractérise par la concurrence et légoïsme, pour le prolétariat lunité est toujours plus nécessaire. Pour la classe ouvrière, unir ses forces est une question vitale et elle a réellement intérêt à faire éliminer toute concurrence en son sein. Cest dans la mesure où la classe ouvrière atteindra cet objectif que la création du parti fasciste unique sera plus difficile et ce nest quainsi quelle pourra en finir avec le capitalisme et construire un société mille fois plus juste. Le fait que nous soyons pour lunité de la classe ouvrière en un Parti unique ne veut pas dire que nous nions lexistence dautres partis qui encadrent des ouvriers et avec lesquels, un jour, nous pourrons parvenir à un certain type daccord. Nous pouvons dire la même chose au sujet dautres forces politiques qui ne sont pas prolétariennes, qui sont daccord de marcher aux côtés de la classe ouvrière pour abattre le monopolisme et créer ce nouveau type de société plus juste. Dans ce sens on peut dire quaprès la révolution, pendant une certaine période au moins, le Parti de la classe ouvrière ne devra pas monopoliser le pouvoir ; il devra le partager, mais en sassurant toujours lhégémonie. Après cette période, tôt ou tard, lélimination de la bourgeoisie en tant que classe conduira à lextinction de ses propres partis, le prolétariat restant lunique détenteur du Pouvoir. Nous ne sommes pas partisans de la théorie révisionniste dun socialisme dans lequel les classes exploiteuses et la classe ouvrière cohabitent, car cest là un attrape-nigaud.
Le centralisme démocratique et la discipline interne ne sont-ils pas des concepts au nom desquels on écarte des militants de la prise de décisions ? Écoutez, la bourgeoisie semble très préoccupée par cette « marginalité dans les décisions des militants de base » et elle accuse les véritables partis communistes denfreindre les principes de la démocratie. Cette préoccupation ne vous semble-t-elle pas suspecte ? On nous accuse dêtre des dictateurs et dexclure les militants de base des décisions les plus importantes du Parti, mais voyez la participation que les dirigeants des partis dits « démocratiques » ont donné à leurs militants dans la fameuse « magouille de la Moncloa ». Et ce nest là quun exemple. Ce sont ces mêmes partis qui, avec leurs pactes honteux, non seulement nont absolument pas tenu compte de lopinion de leurs bases, mais qui se sont moqués du peu de confiance quauraient pu avoir en eux ceux qui votèrent pour leurs candidats lors de la dernière mascarade électorale. Les Cortes, elles mêmes, quont donc fait ces messieurs des Cortes ? Ces Cortes qui, daprès les programmes, allaient être quelque chose comme le centre de toutes les décisions importantes prises dans le pays. Elles ne jouent même pas le rôle de caisse denregistrement des décisions des monopoles ! Et la fameuse Constitution, quelque chose daussi important et qui affecte de façon aussi directe tous les citoyens, les ont-ils consultés ? Que savons-nous delle ? Et il en va plus ou moins de même, non seulement dans tous les pays capitalistes. Le centralisme démocratique, appliqué au fonctionnement du Parti révolutionnaire de la classe ouvrière et même aux relations des gouvernants avec les masses dans une société socialiste, voilà le seul principe qui puisse garantir la pleine participation et le contrôle des dirigés sur les dirigeants et empêcher que ceux-ci ne deviennent une clique de politicards séparés et opposés au peuple. Il est vrai que certains partis communistes et pays socialistes ont gravement attenté contre ce principe de la démocratie prolétarienne, mais cela ne met pas en question la justesse du principe de lassujetissement de la partie au tout, de la liberté de discussion et de lunité daction pour atteindre les objectifs révolutionnaires et socialistes. Comme nous lavons dit en dautres occasions et la pratique la démontré, notre Parti est mille fois plus démocratique que le plus démocratique des partis bourgeois.
Comment juges-tu la situation politique actuelle après le « Pacte de la Moncloa » et quel rôle y jouera le P.C.E.(r) ? Le « Pacte de la Moncloa », les élections du 15 juin, le référendum et la constitution quils sont en train de préparer font partie de la même mise en scène pensée et réalisée par la droite et les monopoles, avec la participation active de lopposition domestiquée. Cest dans cette mise en scène que loligarchie espagnole et limpérialisme fondent la continuité du régime issu du soulèvement du 18 juillet. Pour le P.C.E.(r), dès le début les choses furent très claires. Nous étions convaincus que rien dessentiel nallait changer ni ne changerait tant que le fascisme ne serait pas abattu et que les ressources économiques fondamentales nauraient pas passé aux mains du peuple. Mais si pour nous ces choses sont claires, cela ne veut pas dire quil en soit de même pour de larges secteurs populaires qui ont pu croire aux promesses de changement. Maintenant, après le « Pacte de la Moncloa » une grande déception se fait jour, certains pensaient que lEspagne aurait au moins un parlement et que personne ne serait plus poursuivi pour ses opinions politiques. Mais on nen est même pas arrivé là. Le soi-disant parlement joue le même rôle que celui que jouèrent les Cortes du temps de Franco. Le P.C.E.(r) et dautres organisations véritablement démocratiques et patriotiques continuent à être interdites et Ieurs dirigeants emprisonnés et ne parlons pas des mesures économiques, du chômage, des bas salaires, de linflation, des lois « anti-terroristes » quils préparent. Le résultat de ce décillement se verra très rapidement. On peut déjà lobserver. Sil a été relativement aisé pour les monopolistes et leurs laquais dorganiser leur mise en scène démagogique et de parvenir à quelques accords entre eux, aux dépens des intérêts des masses, dorénavant, contrairement à ce quils ont pu croire, cela ne Ieur sera pas si facile de maintenir cette mise en scène sur pied ; ils ne vont pas pouvoir non plus remplir les engagements quils ont pris. Le développement de la lutte de masses va le leur interdire. Comme déjà beaucoup dautres choses les en ont empêchés antérieurement. Il faudra prêter une grande attention au résultat des élections syndicales et municipales. Elles seront le banc dessai de la toute nouvelle démocratie quils ont cuisinée au palais, avec laccord des états majors, de lArmée et de la banque. Dans ce contexte, le rôle du P.C.E.(r), et dautres forces révolutionnaires et démocratiques ne peut qualler en augmentant. Du point de vue politique, le P.C.E.(r) est ressorti très à laise et plus uni du plus mauvais moment ; il a su surmonter la période où la démagogie et lavalanche dillusions fabriquées par les politicards innondaient tout et alors quil était vraiment difficile daller à contre-courant. Le P.C.E.(r) a rempli sa mission en démasquant les manuvres politiques de la grande bourgeoisie quil a combattues de façon conséquente. Nous continuerons sur cette voie, persuadés que ce nest quainsi que nous parviendrons à gagner la symphafie et le soutien des grandes masses, ce qui est, en fin de compte, la seule chose qui nous importe.
Comment voyez-vous la situation syndicale ? Contrairement à ce que lon pourrait croire, la situation du mouvement syndical de la classe ouvrière est très favorable. Il nexiste pas de Syndicat puissant qui permettait aux ouvriers de faire pression sur le capital pour défendre leurs véritables intérêts. Mais pourquoi se leurrer ? Lexistence dun syndicat ayant ces caractéristiques est impossible dans les conditions du monopolisme et cest pourquoi la classe ouvrière a adopté les formes de lutte et dorganisation adaptées à cette situation. Les centrales et autres petits syndicats que sefforcent avec acharnement de créer les partis opportunistes avec laide du gouvernement, du patronat et de limpérialisme, ne représentent rien et, en réalité, ils ne peuvent quaspirer à jouer le même rôle de policiers que la défunte C.N.S. Ces petits syndicats ne donneront aucun résultat à la bourgeoisie. Si, à une autre époque, la division syndicale de la classe ouvrière lui fut préjudiciable, aujourdhui, par contre, cette extraordinaire atomisation syndicale lui est favorable, car elle démontre, entre autre chose, le manque defficacité des syndicats conçus selon les patrons traditionnaux, adaptés à des conditions totalement différentes ; elle prouve que les patrons de ce type sont passés de mode et que, par conséquent, le mouvement spontané des grandes masses est en train de se doter de nouvelles formes de défense et daction supérieures aux antérieures et dans lesquelles le problème de lunité napparaît pas, parce que cette unité est la base de ce nouveau mouvement. En Espagne, sur ce plan, nous nous trouvons en avance par rapport à dautres pays capitalistes et ceci favorise extraordinairement le travail du communisme à lintérieur du mouvement ouvrier.
Que va-t-il se passer avec les élections syndicales ? À mons avis, il se passera la même chose quen dautres occasions, cest-à-dire que les véritables résultats ne seront visibles quaprès le décompte des votes : il se verront dans lessort du mouvement de grève et dans les manifestations de rue pour lobtention de véritables améliorations, mouvement comme cest le cas que les soi-disant centrales ne vont pas diriger. Ceci ne va pas cependant empêcher ces centrales de le torpiller de toutes les façons possibles afin de livrer les ouvriers pieds et poings liés. Croyez-moi, les possibilités quoffrait ce syndicalisme sont épuisées, tout comme lest le parlementarisme. Bien sûr, la lutte de caractère syndical va se poursuivre, mais en adoptant des formes différentes, toujours plus politiques et de méthodes dorganisation correspondantes.
Quelle alternative presentez-vous et quelle est votre force dans les fabriques ? Le P.C.E.(r) a toujours préconisé le boycottage des élections au Syndicat vertical fasciste et nous ferons la même chose maintenant. En ce qui concerne le nombre incalculable de centrales et de syndicats qui cherchent à diviser les ouvriers, lexpérience a prouvé que nous avions raison. Que reste-t-il du syndicat vertical ? Il nen reste rien. Je peux vous assurer que quelque chose de semblable va se passer avec ces centrales organisées sous la protection et avec le soutien officiel afin quelles occupent la place laissé vide par la C.N.S. Les ouvriers doivent boycotter activement ces mises en scène de la bourgeoisie et du gouvernement et poursuivre la magnifique tradition qui consiste à tenir des assemblées démocratiques et à élire des commissions de délégués qui négocient avec le patronat en position de force. Autrement, jamais on obtiendra de véritables améliorations des conditions de vie et de travail. Mais il faut être conscients quaussi bien les assemblées que les commissions de délégués ne constituent pas de formes dorganisations car elles apparaissent et elles se dissolvent avec chaque conflit. Les assemblées et commissions de délégués sont plutôt un procédé démocratique de lutte syndicale, procédé qui a déjà plus que fait ses preuves. Dans lapplication et le développement de ces procédés, les ouvriers et ouvrières les plus avancés de chaque usine ou lieu de travail jouent un rôle de premier ordre. La classe ouvrière et notre Parti ont intérêt à ce que ni les centrales, ni la police ne parviennent à contrôler ces hommes et ces femmes de premier plan. Par conséquent, ils ne doivent pas présenter leurs candidatures aux « commissariats dentreprise », ce qui est, plus ou moins, ce quils tentent de créer. Contre de tel commissariats, nous proposons lorganisation de lavant-garde prolétarienne de chaque fabrique en cercles restreints douvriers, étroitement liés au Parti, cercles desquels nous pourrions donner sa continuité au mouvement syndical et faciliter, en même temps la réalisation des tâches politiques du Parti. En ce qui concerne nos forces dans les fabriques, comme je lai dit antérieurement, elles sont faibles, bien que, pour le moment, ceci ne nous préoccupe pas outre mesure. Justement, dans létape actuelle, un de nos principaux objectifs est de pénétrer et de créer des organisations du Parti dans les principales fabriques du pays et nous sommes bien persuadés dy parvenir en appliquant la ligne que nous nous sommes fixée. _____
BRIGADES ROUGES POUR LA CONSTRUCTION DU PARTI
COMMUNISTE COMBATTANT :
À tout le mouvement révolutionnaire. Ce nest pas un hasard si ce procès a été préparé en toute hâte à la suite de la libération de Dozier, des trahisons et des arrestations de masse, alors que jusque-là, il semblait quil ne devait jamais se dérouler. LÉtat qui, avant cela, navait pas la force politique daffronter le procès du moment le plus significatif de 12 ans de lutte armée, saisit loccasion pour tenter de sanctionner de manière éclatante la défaite des Brigades Rouges et, avec elles, de la lutte armée pour le communisme. Cet objectif a envahi tout raisonnement mis dans la bouche des traîtres, toute intervention des parties civiles : il est le cur même de chaque acte du procès et des déclarations du Procureur Amato. Un refrain obsessionnel qui devait devenir un lieu commun, une vérité indiscutable acceptée par tous. La nature de cet objectif est cependant dune plus vaste portée. Il est une importante partie dune attaque bien plus complexe que la bourgeoisie a menée contre la classe ouvrière et le prolétariat métropolitain. En ce sens, la ratification de la défaite des B.R. devait représenter un moment important pour réussir à effacer de la mémoire historique même du prolétariat la conscience de la révolution comme événement nécessaire et possible, le seul qui soit capable de donner une solution réelle aux intérêts et aux besoins prolétariens. La plus grande publicité au refrain de la défaite se trouve garantie par lénorme amplification de tout, même le plus petit bégaiement du traître de service. La thèse qui rassemble tous les vautours qui se sont jetés sur la « pâture » politique que représente ce procès, est celle selon laquelle les « B.R. sont un groupe au service de quelquun de bien plus impodant ». Chacun tente dapporter de leau à son moulin. Et, actuellement, même lhistoire, le patrimoine, les militants eux-mêmes de la lutte armée constituent un butin sur lequel les diverses forces de la bourgeoisie mettent les mains pour en tirer tout ce qui peut être utile à leurs propres jeux de pouvoir. Nous avons donc entendu une anthologie de thèses complotardes, selon lesquelles les B.R. seraient des marionnettes au service des projets les plus divers. À en croire les socialistes et une partie de la D.C., nous ne serions rien dautre que des Russes parlant bien litalien, parce que, comme le disait alors déjà Craxi 1, « il nest pas pensable que les B.R. sentrainent dans les basse-cours ». Pour le P.CI., nous étions évidemment des agents de la C.I.A. parce que Moro avait été lartisan suprême de son insertion dans laire du consensus de la majorité gouvernementale. On a fait parler différents traîtres afin de soutenir, partiellement, les thèses complotardes sur le tapis, mais même eux nont pas été très utiles sur ces points. Cest ainsi que chaque parti bourgeois a continué à fournir sa propre vérité. Ce sur quoi les traîtres ont été le plus utilisés a par contre été la construction dune campagne diffamatoire et provocatrice contre le peuple palestinien et les forces révolutionnaires qui luttent en Europe et en Méditerranée contre limpérialisme américain. Ce nest pas un hasard, et nous lavions dénoncé dans cette salle daudience avant que cela ait lieu, si la campagne menée en Italie et en Europe contre le peuple palestinien a précédé linvasion génocide du Liban par limpérialisme au moyen des bouchers sionistes et phalangistes. Dans les faits, donc, ce procès est un procès de guerre, une attaque non seulement contre les B.R., mais aussi contre toute hypothèse politique révolutionnaire présente en ce qui, dans les projets de limpérialisme américain, doit être un terrain dopérations pacifié à lintérieur et agressif vers lextérieur. Cest un procès de guerre parce que toutes les « entorses » faites à la législation courante, avec les diverses lois spéciales, ont trouvé un champ dapplication dans ce procès et ont, par là, ratifié un bouleversement global de la sphère juridique, en direction dune législation de « guerre civile ». Cest un procès de guerre parce que, dans cette salle daudience, la torture et la disparition des prisonniers comme méthode « légale » denquête ont été officialisées, reconnues et revendiquées par lÉtat. En effet, alors quun de nos camarades inculpé dans ce procès était séquestré et torturé durant plusieurs jours dans les locaux de la D.I.G.O.S., la Cour et le Procureur, tout en le sachant, continuaient le procès en couvrant de la loi du silence ce qui était entrain de se passer. Le fait que la Cour ait disposé une soi-disant enquête sur cet épisode na été quune couverture consécutive à tel point que les photographies qui témoignaient des lésions subies par le camarade ont déjà disparu du dossier. Cest un procès de guerre parce quil est devenu évident dans cette salle quel est le rapport que lÉtat établit avec la société civile et les prolétaires en particulier. Ce système ne peut plus offrir aucune perspective dexpansion de la richesse sociale ni dévolution des valeurs morales et culturelles. La barbarisation politique marque lisolement progressif de la bourgeoisie et de son État. Son retranchement en défense du pouvoir et des privilèges. Il ne peut plus rien garantir au prolétariat. Lunique rapport que la bourgeoisie réussit à établir est représenté par les misérables figures qui servent à jeter de la boue sur lhistoire de la révolution prolétarienne : la trahison ! LÉtat bourgeois « acquiert » quelques traîtres afin quils « parlent » à la classe, quils la dissuadent de la possibilité de la révolution prolétarienne. LÉtat bourgeois encense la figure de lespion, en fait le type idéal utile, le « modèle de vie » ; la misère humaine que cette politique révèle ne peut que renforcer la conscience prolétarienne de la nécessité dabattre cet État.
Mais quelle est la vérité sur Moro ? Nous pensons que lunique vérité soit la vérité historique, qui est légitimée aux yeux des masses par lavancement du processus historique réel. Tout le reste nest que bavardages, versions de parti, diétrologie dagitateurs. La vérité dAmato et de Savasta 2 peut-elle être considérée comme une nouveauté ? Que Moro ait été séquestré par hasard ? Soyons sérieux ! Ce nest là quune version pour les imbéciles, tout juste bonne à cacher lunique fait certain : la « Campagne de Printemps » a été lexplication dun projet politique révolutionnaire mis on uvre par des avant-gardes communistes combattantes, qui visait à désarticuler le projet politique développé par la bourgeoisie avec la « solidarité ». Ce projet bourgeois se donnait pour objectif la pacification réactionnaire de laffrontement social à travers lutilisation de lappareil politique révisionniste comme contrôleur, constructeur du consensus par la force et espion à légard de lantagonisme de classe. Combien cette farce de procès semble ridicule face à ces années de lutte de classe et de lutte armée ! Une farce construite autour de Via Gradoli 3, autour des fébriles réunions de parlementaires autour des tables bancales de quelque devin à la recherche de fortune, et en général autour des phantasmes créés par le « syndrome du complot ». Aujourdhui, la vérité historique incontestable est sous les yeux de tous ! Le projet de « solidarité nationale » est définitivement mort et enterré aux cotés de son inventeur, emporté non seulement et non tant par la simple action militaire que par les dynamiques de classe qui ont motivé cette action et qui, à partir delle, ont mûri un développement plus avancé. La mise en cage de la classe, de ses tensions et de sa force na pas été possible : le projet a failli. Et, avec cette faillite, sest toujours plus développé dans la conscience de la classe quaucun compromis nest possible entre exploités et exploiteurs, que lunique rapport entre prolétariat et bourgeoisie est laffrontement de classe ! Nous revendiquons cependant le fait que les B.R. ont participé et contribué avec un poids décisif à la destruction de ce projet politique antiprolétarien. Il est donc indéniable que la Campagne de Printemps constitue un moment important du processus révolutionnaire en Italie et en Europe. Le nier maintenant est lobjectif de ce procès, et cela sest avéré impraticable. Nous voulons être clairs sur un autre fait, relatif au mandat assigné à lun de nos avocats de confiance dans ce procès. Chacune de nos pratiques a pour effet de produire préoccupation et confusion à la bourgeoisie. Cela sest répété au moment où quelque chose ne cadrait pas, après huit mois de déroulement des audiences. Ce quelque chose est constitué par la nouveauté du fait quun avocat, même de manière limitée, est mis dans la condition dintervenir sur des aspects déterminés que ce procès représente. Cette préoccupation et cette confusion se sont manifestées par la présence de notoires et hauts gros bonnets de la contre-révolution et par la diffusion officieuse du fait que ce que faisait notre avocat de confiance dans la salle daudience constituait un délit. Cela est significatif du peu de solidité de nerfs face à quelque chose qui va dans une direction opposée à celle de la bourgeoisie. À partir de là, deux questions se sont posées : si le fait constituait une nouvelle « stratégie » des B.R. dans les procès ou bien sil était un retour en arrière par rapport à la pratique du « procès guérilla ». Disons tout de suite que les B.R. nont jamais eu de stratégie de procès, mais appliquent dans les situations concrètes et spécifiques, et donc aussi dans les procès, leur ligne politique. Ligne politique qui na jamais été et ne peut pas être la somme de stratégies singulières. De fait, dans la phase où lavant-garde doit affirmer la lutte armée comme rupture politique et la guérilla comme moment de cette rupture, nous développions dans les tribunaux une pratique qui tendait à la désarticulation de lappareil juridique de lÉtat. Une pratique que nous avons appelé du « procès guérilla », répondant aux objectifs fixés par la ligne politique dans la phase de la « propagande armée ». Le changement du cadre politique général, et les tâches différentes qui découlent de la lutte entre prolétariat et bourgeoisie imposent une redéfinition de la ligne politique et de lagir de lavant-garde dans toute situation concrète, et donc aussi dans les procès. Face à cette situation, et en présence de nouvelles tâches, le « procès guérilla » ne parvient pas à incider efficacement ni sur le plan de la disfonctionnalisation du procès, ni sur le plan de la propagande et de lagitation ; il se réduit ainsi, justement parce que les conditions ont changé, à un simple témoignage du passé. Au contraire, dans les procès, tout en étant conscients de leur rôle secondaire, nous ne devons pas manifester un antagonisme idéaliste et abstrait, incompréhensible à la classe, mais être un point de référence concret, politiquement clair et reconnaissable par le prolétariat, une force révolutionnaire qui sait utiliser sa capacité antagoniste non médiable avec les intérêts de lÉtat, pour être une indication de lutte et de programme. Donc, dans les nouvelles conditions aussi, les procès peuvent être un moment significatif de laffrontement politique avec la bourgeoisie. À cette fin, il est nécessaire dassumer la pratique de la politique révolutionnaire, en exploitant toutes les possibilités pour rappeler lattention de la classe sur les problèmes concrets de la lutte de classe et de son développement. Lavant-garde se sert donc aussi des procès pour intervenir efficacement et désarticuler la manière dont laquelle la bourgeoisie voudrait actuellement les mener, en cherchant à donner delle-même une image de puissance et defficacité. Et, vice-versa, à donner une image de défaite de lavant-garde révolutionnaire et de la possibilité révolutionnaire même. Tout cela peut être poursuivi dans les procès par une présence politique active et articulée sur plusieurs niveaux, capable dentrer dans le vif des contradictions que justement la nature politique des procès produit. Nous clarifierons par la suite, afin quil ny ait pas déquivoques, quil ne sagit pas daccepter les lois de la bourgeoisie et de se perdre dans les mécanismes juridiques et de procès, mais de déterminer, à chaque fois, lopportunité dintervenir dans les diverses contradictions qui se présentent. Le processus révolutionnaire, dans chaque pays et à chaque époque, ne suit jamais un parcours linéaire, géométriquement croissant sur lui-même, mais est continuellement marqué par des sauts politiques qui se traduisent par des ruptures avec les précédentes formes de laffrontement. Des moments où la classe et son avant-garde, portant un patrimoine consolidé de luttes et dinitiatives, doivent affronter une phase nouvelle de recherche, de bataille politique, dexpérimentation. Cest aussi notre expérience. La lutte armée naît en Italie aux débuts des années 70 comme hypothèse révolutionnaire pour le communisme. Elle naît donc comme rupture subjective de quelques avant-gardes communistes avec vingt ans de lâche révisionnisme, comme construction dun point de référence stratégique révolutionnaire enraciné dans la classe. La légitimation de ce choix subjectif venait de la maturité de laffrontement de classe qui, après les deux années 68/69, avait vu, dun côté, croître le besoin stratégique de la classe de donner une réponse au problème du pouvoir et, de lautre, avait vu la nécessité de répondre à la violente contre-attaque bourgeoise mise en uvre contre le mouvement de classe par la répression, les licenciements davant-gardes dusines, les massacres dÉtat et les consécutives « chasses au subversif ». Ce choix de rupture se manifestait comme initiative combattante pour propager et enraciner dans le prolétariat la conscience de la nécessité et de la possibilité de la lutte armée pour le communisme. Il sagissait donc denraciner une idée-force parmi les avant-gardes de classe, dune bataille politique parmi les communistes pour définir les contours essentiels dun projet politique révolutionnaire absent depuis vingt ans. Dans ce cadre, les B.R. ont repris les catégories fondamentales du marxisme-léninisme et mis justement au centre de leur initiative lagir en Parti, tout en nétant évidemment pas un parti, et la centralité de la classe ouvrière, comme expression du plus haut niveau dantagonisme contre le capital. Cela nétait pas une nostalgie livresque, mais une réalité quotidienne et visible. Cest en effet à partir du potentiel de lutte et de la conscience politique du nord, de la Pirelli et à la Fiat, que sexprime et se concrétise le saut à la lutte armée, le passage nécessaire pour porter cette force à un stade supérieur, à se mesurer au problème du pouvoir. Centralité ouvrière, donc, comme synthèse de deux éléments de fond de notre analyse : la méthode marxiste-léniniste qui considère la production capitaliste de plus-value comme centrale, et donc la classe ouvrière comme centrale à lintérieur du prolétariat métropolitain, et le matériel amassé de force et de proposition politique exprimé par les luttes au cours de ces années, à leur point le plus élevé. Cette capacité de rupture et daffirmation dune idée-force a depuis marqué toutes ces douze années de lutte. Cette capacité, que nous avons appelé « propagande armée », est un patrimoine prolétarien que personne ne peut nier ou liquider. Laccumulation de force atteinte à lintérieur de lusine par la rupture avec le révisionnisme imposait un nouveau saut politique qui mène cette force accumulée à un stade supérieur. Un saut capable de dépasser les limites des thématiques dusine et les diverses déviations de lopérisme et du syndicalisme armé qui existaient dans le mouvement révolutionnaire au cours de ces années aussi. Un saut politique qui transforme ce potentiel en projet global de pouvoir contre lÉtat. La détermination du projet néo-gaulliste et la séquestration de Sossi matérialisèrent pour la première fois le mot dordre de « attaque au cur de lÉtat », dans lequel la lutte armée dépassa lidée-force pour devenir une hypothèse politique stratégique, un point de référence révolutionnaire pour lensemble du prolétariat, en plus que pour la classe ouvrière. Si lon doit relever laspect positif de cette période de propagande armée, celui davoir posé au centre de linitiative laxe stratégique de lattaque au « cur de lÉtat », dans le même temps fut négligé le problème de la tactique et dune stratégie révolutionnaire qui puisse, dans ce contexte, orienter concrètement laffrontement de classe. Ou bien lon se limitait à sopposer au coup par coup aux projets de lennemi, sans cependant expliciter aucun projet prolétarien. Durant ces années, cette limite était peu perceptible, du fait de la nature même des tâches que la guérilla se fixait. Elle est devenue explosive après 1978. Les années qui précèdent la Campagne de Printemps sont des années au cours desquelles lon vit un développement croissant de lantagonisme prolétarien. Dans toutes les plus grandes villes italiennes, ce développement se déroula hors des formes dorganisation prolétarienne traditionnelles et institutionnelles. Ce phénomène, que nous avons appelé « autonomie ouvrière », allait bien au-delà du mouvement politique autonome. Ce sont des années au cours desquelles la propagande armée crée une ample dialectique avec les avant-gardes prolétariennes de tous les secteurs de classe, en influençant le débat, la formation politique, les pratiques politiques de lutte. Les luttes ouvrières qui sortaient fréquemment des limites de lusine, et aussi le mouvement de 77, avec la multiplicité et la radicalite de ses formes, donnaient corps et vitalité à un mouvement antagoniste et à un mouvement révolutionnaire de vastes dimensions. Dans le même temps, la bourgeoisie, aux prises avec la crise économique et avec la forte présence de lantagonisme prolétarien, mettait au point un projet politique articulé qui permette daffronter la nécessité dune restructuration globale de la production en cherchant à contrôler, avec toutes les médiations possibles, laffrontement de classe. Cest à cela que servait limplication des révisonnistes, à qui était confiée la tâche de construire le consensus prolétarien aux choix du capital, en échange dun « parfum » de participation au gouvernement. En dautres mots, en plus que dans la conscience subjective des B.R., cest la réalité même de laffrontement qui mit sur le tapis lexigence prolétarienne de « faire sauter » le projet néo-corporatif appelé « solidarité nationale » et de construire la force politique révolutionnaire de toute la classe, capable daggréger autour dune stratégie tout le potentiel révolutionnaire présent. Avec la Campagne de Printemps, les B.R. opèrent la synthèse politique et la rupture subjective nécessaires qui permettent de donner une solution aux deux exigences. La D.C. est lâme noire du système dexploitation et de pouvoir en Italie, lennemi reconnu et attaqué par trente ans de lutte prolétarienne. Moro était le plus important stratège du projet de « solidarité nationale ». Comment la bourgeoisie a-t-elle réagi durant la Campagne de Printemps ? Elle était coincée entre deux possibilités qui étaient toutes deux des défaites. La Campagne de Printemps avait déjà détruit le projet de « solidarité nationale ». Pour cela, toute possibilité de « sauver ou de ne pas sauver Moro » nétait rien dautre que le profit des différentes batailles en cours entre les partis pour récupérer à leur propre avantage le « cadavre » de la « solidarité nationale ». Avec la Campagne de Printemps, la capacité de désarticulation atteinte est telle quelle exalte et amplifie le rôle politique de la lutte armée à tel point que de nombreuses avant-gardes au sein desquelles sont représentées diverses couches du prolétariat métropolitain font leur la pratique combattante comme forme de lutte avec laquelle donner une plus grande force à leur propre « capacité contractuelle ». Lample développement de la pratique combattante et des luttes autour des B.R. crée un climat de large attente politique. À la lumière de la Campagne de Printemps, les thèses qui défendent la lutte armée pour des secteurs de classe antagonistes particuliers, ou bien comme coordination de la « guérilla diffuse », apparaissent clairement comme inadéquates. Mais, plus que la bataille politique interne au mouvement révolutionnaire, le fait qui compte est que la critique de masse au révisionnisme et à la ligne liquidatrice du « compromis historique » posait le problème de la construction du Parti Communiste Combattant et de la définition dune stratégie qui, en mettant au centre lintérêt général de la classe, produise une tactique révolutionnaire adaptée au nouveau contexte. Elle posait donc le problème de dépasser la conception limitative dOrganisation communiste combattant, pour que soit assumée la tâche de commencer à recouvrir, avec une stratégie et une tactique révolutionnaires adéquates, lespace politique que la conscience de classe elle-même à des niveaux de maturité divers, avait contribué à ouvrir. Lespace dune force politique révolutionnaire et combattante en mesure de diriger lensemble de la classe, et non seulement les avant-gardes déjà militantes. Paraphrasant Lénine, disons quune force politique démontre son sérieux en déterminant sans réticences les erreurs commises, sans craindre les possibles instrumentalisations que lennemi peut faire de cette autocritique. Notre devoir révolutionnaire à légard du mouvement de classe est de faire ce bilan, afin que se construise une dialectique qui fasse vivre les contenus les plus avancés de cette expérience politique. Il est de notre devoir de défendre ce patrimoine contre tous ceux qui veulent le liquider, quand bien même en se cachant derrière une phraséologie pseudo-transgressive-extrêmiste, néo-anarchiste. La conclusion de la Campagne de Printemps nous a mis face à un très vaste antagonisme de classe, différencié dans ses niveaux de conscience, ses pratiques de lutte et ses formes organisées, qui nous déterminait comme moment de référence et comme possible direction révolutionnaire. Un mouvement qui nous demandait : « Que faire ? » Nous avons répondu à cette question en lançant le mot dordre : « Conquérir les masses sur le terrain de la lutte armée ». Ou plutôt, nous avons proposé à toute la classe les mêmes critères et formules organisationnels qui avaient caractérisé notre bataille politique parmi les avant-gardes communistes. Nous avons proposé la simple extension quantitative de la lutte armée, comme conception essentiellement guérillera du développement du processus révolutionnaire dans notre pays. La lutte armée dans les métropoles recouvre certainement la forme guérillera, mais ne doit pas en assumer la conception. Lassumer dans notre pays a été une erreur.
Sur quoi reposait cette erreur ? La lourde désarticulation du projet politique de la « solidarité nationale » avait remis en discussion les équilibres entre les bourgeois et entre les classes. Au-delà des déclarations belliqueuses des notables D.C., il apparaissait clairement que personne nétait en mesure de se proposer comme médiateur des coteries internes, mais surtout que personne nétait capable de formuler une proposition politique de longue haleine. Au cours des années suivantes, la « solidarité nationale » a en effet toujours plus été un « esprit » qui évoquait un projet politique mort et enterré. Cétait là un fait concret et indiscutable. Tout comme létait la fin de lillusion berlinguerienne. Une donnée de fait que nous interprétions cependant comme lépuisement de lusage de la médiation politique interclassiste par la bourgeoisie. Nous en arrivions à dire que : « Dans les nouvelles conditions crées par la Campagne do Printemps, la bourgeoisie est contrainte à transférer ouvertement sur le terrain militaire le même contrôle quelle réussissait jusque là à exercer à travers les appareils politico-syndicale-idéologiques. » Cette manière de raisonner équivalait à nier que lÉtat, même gravement défait sur un projet politique précis, nen continuait pas moins pour autant à assumer la fonction de régulateur bourgeois de laffrontement social, à travers un calibrage dinterventions tant politiques que militaires. À tel point que la bourgeoisie, tout en ne réussissant pas à définir un nouveau projet politique global, réussissait malgré tout à prendre des initiatives, quand bien même contradictoires et à court terme, sur les nuds de la politique économique et de la politique institutionnelle, et en retrouvant lunité des forces politiques sur les soi-disant lois « anti-terrorisme » ou bien sur lensemble des mesures dattaque tant contre la lutte armée que contre les formes consolidées de lantagonisme prolétarien (comme la mobilisation de rue.) De cette manière, nous avons perdu la capacité de déterminer et dattaquer le projet politique qui constitue le vrai « cur de lÉtat » et nous nous sommes engagés sur la voie de lattaque aux structures de lÉtat, au réseau de ses articulations et de ses appareils. Une telle conception a produit deux erreurs symétriques et complémentaires sur le terrain de la pratique combattante où elle a fragmenté et intensifié linitiative en la menant à reproposer lintervention sur la D.C., les corps militaires et les chefs dateliers, sur le terrain de la direction du mouvement antagoniste où elle a limité la possibilité concrète de dialectique politique qui soffrait à nous uniquement aux niveaux de mouvements qui pratiquaient déjà des formes de lutte armée. De ce fait, nous ne situions pas au centre de notre activité politique tous les niveaux de conscience et dorganisation prolétarienne qui, tout en nassumant pas encore la pratique armée, se situait toutefois comme mouvement hors et contre les représentations parlementaires actuelles, hors et contre la politique bourgeoise. Le rapport entre qui, comme les B.R., agissait en parti révolutionnaire et la classe se dégradait et se limitait au rapport organisation-mouvement révolutionnaire, un rapport qui ne réussissait pas à voir le rôle décisif des masses dans laffrontement politique général. À cela, lanalyse erronée de la crise capitaliste contribuait organiquement. La vision de la crise comme crise irréversible, permanente, servait de fond à la fin de lexistence de la politique dans le rapport daffrontement entre les classes. La précipitation imminente des conditions de vie aurait contraint la classe à empoigner spontanément les armes pour défendre leurs besoins immédiats. Cela mène finalement à la vision de la lutte armée comme le tout de la politique révolutionnaire dans la métropole. À la fin de cette pente idéaliste, se situe la conception déformée de la réalité actuelle comme « guerre sociale totale », si bien illustrée par la pratique du « Parti-Guérilla ». Cest à ce point que lidéalisme subjectiviste trouve laccasion pour saffirmer aussi au sein des B.R. Une fois perdue la possibilité de déterminer le projet politique dominant de la bourgeoisie, la ligne politique « conquérir les masses sur le terrain de la lutte armée » se concrétise comme pratique combattante sur les besoins prolétariens particuliers, comme propagande pour vaincre sur les besoins. Un tel dispositif théorique a produit la conception appelée « système du pouvoir rouge ». La caractéristique commune à toute cette construction théorique était la pratique armée, ce qui nous a amené à osciller continuellement entre le fait dassumer comme unique référent les aires de mouvement déjà combattantes et le fait de considérer comme « sur le point de sarmer » les mouvements de masse qui sopposaient et qui sopposent aux procès de restructuration de la bourgeoisie. En dautres termes, en parlant à tort et à travers de masses armées, nous nous sommes limités à des structures combattantes plus ou moins restreintes, ou nous voyions ces dernières comme lanticipation du parcours que les masses auraient dû parcourir. Ce nest pas là le parcours de la révolution dans les métropoles ! Concevoir la lutte armée comme « forme de lutte », comme une manière de vaincre sur les besoins particuliers, a été la base théorique qui a dabord mené au morcellement des initiatives politiques, puis aux scissions organisationnelles. Voyons pourquoi. Le prolétariat métropolitain nest pas une totalité homogène, une somme de figures indistinctes et équivalentes, mais un ensemble de figures différenciées par leur propre position dans le procès de production et reproduction des rapports sociaux capitalistes. Ce sont des différences qui pèsent dans la compréhension des réels rapports existants, de sa propre disposition comme couche de classe particulière. Chaque couche du prolétariat a donc un ensemble dexigences matérielles, culturelles et politiques (que lon appelle généralement besoins), qui, dun côté, lidentifient et la socialisent de manière précise et, de lautre, la différencient de toute autre couche. Le fait de mettre au centre de linitiative les « besoins » plutôt que lattaque au projet politique dominant mène à diviser les initiatives elles-mêmes, en les claquant sur les différentes particularités. Et cest ce qui sest vérifié. À partir de 1980, chaque colonne de lOrganisation située dans les pôles métropolitains a affronté le problème de lenracinement dans les situations en assumant certaines contradictions qui sexprimaient localement, contradictions différentes dune ville à une autre. Un plus grand enracinement et la désagrégation de la ligne politique sont allés de pair. Privée dune ligne politique qui saisisse la contradiction principale (celle entre mouvement de classe et pratiques de la bourgeoisie) et laspect principal de cette contradiction, cest-à-dire le projet politique dominant dans une conjoncture donnée, privée donc dune identité de ligne, de stratégie générale, mesurée sur la situation concrète, lOrganisation Brigades Rouges a fini par assumer autant didentités quil y avait de pôles principaux dintervention. Les scissions de 1981 sont le couronnement organisationnel dun processus de fragmentation politique en uvre depuis longtemps. Pour renverser ce processus de désagrégation, il était donc nécessaire détablir le rôle politique de direction qui se fonde principalement dans la détermination du projet politique dominant de la bourgeoisie. Celui-ci se saisissait dans laggravation de la crise de limpérialisme qui le contraignait à une fonction toujours plus agressive dans les différentes aires de la chaîne impérialiste. En déterminait dans le rôle de lO.T.A.N. en Europe et en Italie et de ses liens politico-militaires, en particulier dans notre pays, rôle qui devenait par conséquent celui daugmenter les dépenses militaires aux dépens des dépenses sociales et, en général, celui dattaquer les conditions dexistence du prolétariat. Il a certainement été correct dexercer, avec lopération Dozier, la fonction davant-garde qui a restitué une identité politique au « B.R. pour la construction du P.C.C. », aussi parce quelle se situait en stricte dialectique avec les initiatives combattantes développées par les autres forces révolutionnaires dans toute lEurope. Mais, en attaquant lO.T.A.N., en privilégiant le seul aspect de désarticulation du projet ennemi, selon la vieille conformation, sans se rapporter concrètement et politiquement à lactivité générale des masses, nous avons épuisé notre initiative dans un affrontement frontal (et dans ce cas perdant) avec lappareil impérialiste. Et sans assumer, vice-versa, aussi la direction des mouvements de lutte qui, dans les usines et dans les rues, commençaient à recouvrir une physionomie précise, objectivement anti-impérialiste. Lopération naît et meurt dans la mer de problèmes mal posés qui laccompagnait. La défaite subie avec lopération Dozier et la vague darrestations qui la suivi grâce aux traîtres, la disparition contemporaine dautres hypothèses guérilleras, nous a imposé de remettre en discussion, comme organisation communiste combattante, la vieille configuration politique générale, des nuds théoriques à la ligne politique. En bref, la définition du rôle que doit avoir la lutte armée dans lorganisation et la direction du processus révolutionnaire en Italie. Au cours de la dernière année, les « Brigades Rouges pour la construction du Parti Communiste Combattant » ont commencé à prendre conscience de lépuisement de la validité et de linadéquation générale dune configuration théorico-politique qui, dans la pratique sociale, a donné place aux principales variantes de lidéalisme subjectiviste. Elles ont donc commencé à rechercher le « Que faire ? » pour construire la nouvelle configuration, en critiquant dans les faits une configuration linéariste et progressive et en retrouvant le concept de processus révolutionnaire ininterrompu et par étapes. Un processus qui comprend des victoires et des défaites, des reculs et des avancées : un procesus qui ne peut être mesuré uniquement avec le développement de la forme-guérilla. De manière générale, nous navons pas placé au centre de lautocritique les « écrits de lOrganisation », mais nous avons plutôt relu notre pratique sociale, notre rapport avec les masses, notre élaboration théorique, à partir de la récupération révolutionnaire du marxisme-léninisme. Linitiative combattante est, aujourdhui plus que jamais, la condition de lexistence et du déploiement de la politique révolutionnaire, justement parce que linitiative armée, si elle se réfère exclusivement à la forme-guérilla, à ses projets et contenus révolutionnaires, na pas de capacité offensive concrète. À la longue, elle devient endémique et peut donc être facilement anéantie par lÉtat. Ce nest pas par hasard que toutes les formes de guérilla qui ont dérapé sur la pente de lidéalisme subjectiviste, si ce nest tout bonnement sur celle du terrorisme pur et simple, ont non seulement été complètement anéanties, mais leur activité a été durement critiquée par le mouvement révolutionnaire et considérée comme étrangère par le mouvement de masse antagoniste. Pour pouvoir construire une configuration théorico-politique et une nouvelle ligne, les « B.R. pour la construction du P.C.C. » ont proposé la « retraite stratégique » 4 pour replacer au centre de linitiative lactivité générale des masses. La proposition de « retraite stratégique » était cependant adressée aux organisations communistes combattantes et non à la classe, justement parce que lon avait constaté larrièration, et donc labsence de réelle direction de ces organisations, à lintérieur desquelles, comme le dit Lénine, « il y a des gens qui sont prêts à présenter les insuffisances comme des vertus, et même à tenter de justifier théoriquement leur propre soumission servile à la spontanéité ». Une retraite, donc, dune position qui nétait pas réellement avancée (comme quelquun la bêtement pensé), qui était une position concrètement inadéquate aux nouvelles tâches de la phase et donc, en dernière instance, à la traîne des masses. Se retirer dans les masses na cependant jamais signifié « se dissoudre dans le mouvement pour repartir à zéro », ni abandonner la stratégie de la lutte armée pour le communisme. Cela a au contraire signifié reconquérir la confiance et la solidarité de la classe, cela a signifié reconstruire la direction politico-militaire à lintérieur de la classe, en se rapportant aux différents niveaux de lantagonisme, sans pour autant perdre lautonomie relative de notre Organisation. Cela a signifié éviter des erreurs encore plus graves que celles commises précédemment : abandonner une configuration qui, en ne plaçant pas au centre lactivité générale des masses, était évidemment arriérée par rapport à la demande croissante de direction révolutionnaire posée objectivement par le mouvement antagoniste. En ce sens, lOrganisation a entamé un processus de critique - autocritique - transformation au sein du mouvement révolutionnaire et du mouvement antagoniste du prolétariat métropolitain : elle a analysé la nature des erreurs pour chercher à les dépasser et pour se mesurer, à travers la définition dune politique révolutionnaire, à la réalité concrète dans laquelle vit, et dans laquelle est possible et nécessaire, le développement de la révolution prolétarienne. Dans la dialectique continuité-rupture par rapport à la pratique sociale, dans les dernières années, lOrganisation a donné la priorité à la rupture pour abandonnor une configuration théorico-politique traversée par de profonds vices didéalisme subjectiviste, et qui nétait pas basée sur lanalyse concrète de la réalité concrète. La rupture avec les erreurs du passé implique aussi de récupérer la continuité avec lhistoire des B.R., avec leur pratique sociale de combat, qui a marqué ces dix années de lutte de classe en Italie, en récupérant en particulier cette pratique plus significative et plus efficace politiquement quest la Campagne de Printemps, qui a donné force et originalité au développement possible du processus révolutionnaire dans la métropole impérialiste. Ceci ne veut pas dire continuer sur la ligne de la propagande armée, pratique qui sest objectivement épuisée avec cette Campagne, mais réévaluer et exalter la force politico-militaire que représente le fait de porter lattaque « au cur de lÉtat » dans cette conjoncture, de désarticuler un cadre politico-institutionnel. Ce patrimoine ne peut être annulé par la reddition dune poignée de traîtres, ni encore moins par la ligne liquidatrice portée par une patrouille de « santons » convertis au rôle de « nouveaux philosophes ». On ne peut pas annuler un parcours historiquement déterminé de la lutte de classe que lon ne peut effacer de la mémoire historique du prolétariat. Cela a été la signification de notre choix de « retraite stratégique », pour reproposor aujourdhui un dispositif actif et combattant au sein de ces tâches nouvelles et complexes de cette phase du processus révolutionnaire. Les éléments acquis au cours de ce débat suffisent à permettre la reprise dune initiative politique et combattante qui place au centre lactivité générale des masses. Avant de poser des points de référence pour un projet politico - révolutionnaire, il faut entrer au cur de lanalyse de cette phase, en analysant les vieilles confusions et approximations. La crise actuelle est une crise générale du mode de production capitaliste, elle est une crise de surproduction absolue de capital qui dure depuis plus dune décennie. La crise générale caractérise donc la phase historique actuelle, dans laquelle lexigence capitaliste de reprise de laccumulation, et le saut en conséquence de la composition organique du capital, qui soit capable de valoriser au maximum la révolution technologico-industrielle contemporaine (qui est, du reste, déjà en uvre), ne peuvent être donnés que par la destruction des forces productives surproduites et des moyens de production dépassés, tant en termes de valeur quen termes physiques. Les exigences du capital, mises à nu par la crise, induisent dans le système impérialiste une série de réponses économiques, politiques et militaires : en un mot, de projets politiques globaux qui visent à dépasser la crise même. La mise en pratique de ces réponses globales provoque des oppositions et des affrontements qui témoignent de laiguisement de la contradiction principale entre bourgeoisie impérialiste et prolétariat international, et de toutes les contradictions interimpérialistes et, parmi celles-ci, surtout celle entre laire à domination américaine et le social-impérialisme. Une fois encore, la tentative bourgeoise de dépassement de la crise générale du capital prend la forme de la guerre. Et donc, aujourdhui, comme perspective de la guerre interimpérialiste. Si cest là la tendance, cest-à-dire lissue obligée, la perspective dans laquelle se meut lensemble des dynamiques de restructuration capitalistes dans cette crise, cette affirmation doit cependant être précisée, en clarifiant à quel stade du processus de mûrissement de la perspective de guerre lon se trouve. En effet, la guerre nest pas une explosion de violence improvisée et imprévisible, mais la conclusion obligée dun processus complexe au cours duquel les caractéristiques fondamentales de chaque formation économico-sociale se modifient globalement. En dautres termes, chaque guerre mûrit dans cet ensemble de modifications même si le motif de déclenchement ou le lieu dexplosion sont fortuits, non prédéterminés par les parties en cause. Il est fondamental de définir en termes conjoncturels létat concret de mûrissement de la tendance à la guerre pour esquisser une stratégie révolutionnaire et une tactique qui se base sur lanalyse concrète dune situation concrète. En parlant de « tendance à la guerre », nous entendons la guerre entre limpérialisme à dominante américaine et laire à dominante soviétique. Nous estimons donc que toute conception qui parle dune guerre entre « système impérialiste mondial » et « prolétariat mondial » est absurde et déviante. Non parce quun impérialisme serait préférable à lautre, mais plutôt parce que lessence de limpérialisme est dêtre « lépoque de la guerre entre les grandes puissances pour lintensification et laccroissement de lexploitation des peuples et des nations » (Lénine). En regardant les éléments qui caractérisent la conjoncture internationale actuelle, nous voyons que la récession productive constitue le principal phénomène économique. Récession veut dire mise à zéro ou, carrément, inversion des taux de croissance des activités productives. Et donc, diminution relative et absolue de la masse de marchandises produites, dusines ouvertes, douvriers employés, de capital opérant comme tel. Une récession aggravée par la restructuration technologique contemporaine et par les politiques de réduction de linflation. La gestion contrôlée de la récession constitue actuellement le « credo » économique de limmense majorité des pays à capitalisme avancé. Mais, comme toutes les politiques « anticycliques », elle peut aussi constituer un élément freinant dans limmédiat, mais elle amplifie et multiplie, sur le long terme, les caractères fondamentaux de la tendance dominante : la guerre impérialiste. La plus grande partie des procès de restructuration en cours qui opèrent dans tout lOccident constitue un ensemble contradictoire dinitiatives dont la réalisation fait de toutes façons effectuer des sauts en avant concrets dans la perspective de la guerre, et que nous définissons comme « procès de restructuration en cours pour la guerre impérialiste ». Cest donc un procès qui naît de la nécessité, pour chaque capital particulier, de découper sa propre part de marché et de profits dans les marges dune concurrence plus impitoyable et, pour cela, dabaisser le niveau des coûts à un niveau moyen qui permette de continuer à exister comme capital. Mais, dans le même temps, ce procès nest pas seulement spontané, mais se ressent dune concertation internationale sur les éléments fondamentaux du flux des commerces et des marchés financiers. Les États sont donc les centres névralgiques où les diverses fractions de la bourgeoisie, autochtone et multinationale. et les représentations plus ou moins institutionnalisées du prolétariat médient leurs intérêts contradictoires en définissant les conditions générales, le « milieu économique » le plus adapté à exploiter la classe et à étendre la concurrence. La « restructuration pour la guerre impérialiste » nest donc pas exclusivement économique. mais globale : elle bouleverse tout léquilibre des formations économico-sociales de laire impérialiste. En Italie, les nuds sur lesquels se définit le sens général de ces procès sont représentés par une restructuration de lÉtat : sur le plan économique : ladoption dune politique déflationniste, qui détruit les mécanismes de défense automatique des conditions dexistence du prolétariat (comme léchelle mobile), une politique économique qui inverse la priorité des dépenses, en réduisant de manière drastique toutes les dépenses dassistance, de la santé aux retraites, des allocations à la cassa integrazione, dans le cadre dune réduction des dépenses publiques, mais dune augmentation, dans le même temps, des dépenses militaires et des investissements pour les restructurations. sur le plan militaire : le fait dassumer une fonction impérialiste active en Méditerranée, au Moyen-Orient et dans la Corne dAfrique. Ce qui implique, en plus de laugmentation des dépenses militaires, la redéfinition dune stratégie internationale de lItalie. sur le plan institutionnel : où interviennent des modifications cohérentes avec la nécessité de rendre de telles transformations générales opérationnelles. Ce qui veut dire la fin de la poIitique de médiation interclassiste entre accumulation et distribution sociale : ce qui se traduit immédiatement par une attaque générale contre la classe, pour la battre tant sur le terrain des conditions de vie que sur le terrain politique. Cet aiguisement de laffrontement a des conséquences sur le cadre politico-institutionnel et bouleverse la structure même des institutions étatiques, la sphère juridique, le rôle des appareils préventivo-répressifs, etc. En conséquence, le scénario politique subit lui aussi une polarisation autour des stratégies possibles. Dun côté, nous voyons apparaitre toujours plus clairement un tas de coteries qui saggrègent autour dune ligne politique globale, en harmonie avec les exigences générales de limpérialisme. Le rapport entre cet ensemble et la politique reaganienne nest pas, comme nous lavons simplifié par le passé, un rapport de dépendance mécanique. Il consiste plutôt à faire siens les intérêts impérialistes globaux, à tenter dimposer dans la formation économico-sociale italienne les modifications déjà harmonisées avec ces intérêts, à mettre sur pied un projet politique articulé. Il ne sagit cependant pas dun groupe de « fonctionnaires de lempereur », mais dun personnel politique qui se propose comme régent et allié fidèle. Cest cet ensemble que nous appelons « parti de la guerre ». Non parce quil serait identifiable avec un parti ou banalisé en une série de structures et dinstitutions. Mais parce quil se polarise autour de quelques éléments généraux de projet politique, à travers lequel il est possible dharmoniser la politique italienne avec la perspective dominante accélérée par la politique américaine actuelle. Nous identifions dans les divers Merloni, De Mita, Craxi, Lagorio, Benvenuto 5, les chefs de file du « parti de la guerre », certes pas comme secrétaires dun « super-parti », mais comme principaux dirigeants politiques qui, autour du projet impérialiste, luttent, entre eux aussi, pour imposer lhégémonie dune ligne particulière. La conquête du leadership du « parti de la guerre » est une bataille où tous les coups sont permis, et qui trouve un terrain fondamental dans le rapport privilégié avec ladministration Reagan et une destination de pèlerinage quotidien dans la Maison Blanche. En cela, De Mita et sont équipe se font la part du lion, tout comme le P.S.I. en a même trop fait quant il a attisé la polémique sur les « pistes de lEst ». Sur le front interne, la D.C., alors quelle cherche un rapport organique avec le grand patronat et trouve en Merloni un répondant idéal, est à son tour contrainte à se restructurer comme parti et comme système de pouvoir, à pas comptés, puisquelle doit rompre avec dix ans de recherche de la gouvernabilité par le consensus. Dans ce passage, elle impose au P.S.I. de se situer sur le fond, en lattaquant et en lui soustrayant le terrain sur lequel Craxi et sa bande avaient fondé leurs prétentions au rôle de régents : le rapport privilégié avec la grande bourgeoisie financière et industrielle. Les contenus essentiels du programme sur lequel saggrège ce « parti de la guerre » sont sous les yeux de tous. Le gouvernement Fanfani lui-même, en effet, après une première fanfaronnade programmatique, na pas du tout fait marche arrière en opérant des médiations, mais a au contraire effectué, avec dopportuns dosages, un consistant pas en avant dans le démantèlement de lÉtat assistentiel. Si, dune part, ces dosages sont rendus nécessaires par la forte opposition de classe (avec qui laffrontement politique est toutefois anticipé et recherché), de lautre, ils jouent la médiation avec la nécessité de sélectionner avec soin les aires et les intérêts qui sont à frapper à lintérieur même des blocs sociaux qui soutiennent les partis de gouvernement. Laugmentation des dépenses militaires éclaire parfaitement la nature et la direction dans laquelle vont les procès de restructuration en cours. On cheche à construire une société « austère », où les coûts de reproduction sociale du prolétariat doivent être comprimés au maximum, et dont lunique perspective est la participation active à la guerre interimpérialiste. Larmée italienne elle-même est conçue, en perspective, comme armée d« expéditions », parfois sous létiquette de la « paix », et non plus comme « arrière-pays » de lO.T.A.N. et comme « défense des frontières ». Dans la logique du « parti de la guerre », la politique de la Confindustria et la politique du gouvernement tendent à coincider dans les finalités et à se coordonner réciproquement dans les gestions de leur compétence. Lirrésistible affirmation de la politique du « parti de la guerre » a contraint la gauche institutionnelle à régler ses comptes avec la défaite de la ligne du « compromis historique », ligne qui a provoqué des dégâts incalculables dans le tissu prolétarien, en se faisant complice dune furieuse attaque contre lantagonisme prolétarien et la politique révolutionnaire qui, dans cette conjoncture, orientait la classe contre la D.C. et le projet néocorporatif. Cette nouvelle disposition du cadre politique conformera et sera conformée par laffrontement de classe, et saiguisera sous la poussée des procès de restructuration. La « nouvelle » stratégie du P.C.I. est lalternative démocratique. Cette hypothèse dans son imprécision se base sur la possibilité technique que saffirme, dans le cadre dalliances de lO.T.A.N., une ligne autonomiste et de « gauche » européenne, capable de pousser à ce que prévale une politique de détente entre Est et Ouest, en mesure de rompre avec la bipolarisation. Sur le plan intérieur, les éléments de programme, de politique économique, etc., que soutient cette hypothèse, prétendent « faire face, en créant dans le même temps les conditions nouvelles pour le développement des forces productives ». En substance, alors que lon repropose les « réformes » (peut-être une nouvelle fois de « structure »), on va à la recherche dune nouvelle disposition des forces qui les soutiennent. Pour ce faire, on pousse dun côté à la recherchedun rapport unitaire avec le P.S.I., et de lautre, on met en uvre des initiatives qui visent à récupérer les tensions du prolétariat et des mouvements antagonistes qui en érodent la base sociale. Le P.C.I. se trouve entraîné dun côté à la reprise dun rapport avec le P.S.I. et, de lautre, à la tentative dhégémoniser, en soutien à son hypothèse, les mouvements contenus quils expriment. Et ceci tant sur le terrain de lopposition à la politique économique du gouvernement que sur le terrain des contenus antiimpérialistes (paix, désarmement, etc.). Ainsi, dans lhypothèse même dalternative, un ensemble de contradictions se meut dès le début, qui commencera bien vite à macérer à lintérieur du P.C.I., entre le P.C.I. et les autres forces de la gauche institutionnelle, mais surtout entre le P.C.I. et la classe. Du point de vue de classe, la nouveauté quune telle situation politique introduira dans laffrontement pour les prochaines années doit être comprise et suivie. En premier lieu parce que la défaite (historique, celle-ci) du compromis avec la D.C. imposera au P.C.I. et à une partie du syndicat une politique daffrontement sur les nuds principaux. Leffritement contemporain de la chape créée par la « solidarité nationale » créera des conditions favorables au développement de lautonomie ouvrière, en ouvrant des espaces objectifs pour une politique révolutionnaire qui sache définir son programme autour de ces nuds et déterminer la force prolétarienne avec laquelle se dialectiser sur les terrains de laffrontement actuel. Dans ce cadre général dattaque politique et matérielle portée par le « parti de la guerre » contre le prolétariat, laffrontement de classe va donc au-delà du différend sectoriel, de couches prolétariennes particulières, pour se situer au niveau auquel se redéfinit le rapport entre lÉtat et la classe. Cest là une donnée objective que la classe a saisi ces jours-ci, en déplaçant le terrain daffrontement du spécifique de lusine à lopposition générale à la bourgeoisie, pour construire un rapport de force qui pèse réellement sur lennemi principal de ce moment : la politique économique du gouvernement. Face à lattaque politique contre tout le prolétariat, la classe, et principalement la classe ouvrière, répond sur un terrain politique de pouvoir, fait apparaître dans la pratique la nécessité de sopposer comme classe et non comme secteurs particuliers et dispersés. Contre les aspects immédiats de la restructuration politico-militaire, et donc contre les conséquences concrètes qui découlent du rôle qui est confié à lItalie dans le dispositif de lO.T.A.N., un vaste mouvement de masse contre linstallation des euromissiles et le doublement des dépenses militaires sest aussi formé en Italie. Par sa valeur objectivement anti-impérialiste, ce terrain apparaît comme un important obstacle établi par les masses à la politique impérialiste dans la zone, et donc en opposition à lÉtat. De ce fait, il est dans le même temps un terrain fondamental de développement dune politique de classe révolutionnaire et anti-impérialiste, parce quil ne peut y avoir aucune stratégie révolutionnaire qui ne tienne pas compte de lappartenance à lO.T.A.N., et donc qui ne mûrisse pas en son sein et avec la classe la conscience que tout processus de libération du prolétariat métropolitain de lexploitation ne peut intervenir quà travers une dure et longue lutte contre la guerre et la barbarie impérialistes, qui mène lItalie hors de la chaîne impérialiste. Ce terrain est aussi le terrain sur lequel se reconstruit un authentique internationalisme prolétarien qui, par les caractéristiques de masse quil peut et quil doit recouvrir, ne peut être contenu et circonscrit dans les seules formes combattantes. Le procès de restructuration en cours traverse aussi, évidemment, la sphère répressivo-préventive, bouleversant le droit bourgeois lui-même, introduisant la torture et organisent la police et les carabiniers en bandes spéciales. Cette redéfinition des appareils répressifs et préventifs est aujourdhui tournée contre le mouvement révolutionnaire, mais ils seront dirigés, dans laffrontement de classe, en termes différenciés, contre toute la classe. Cette redéfinition dirige aujourdhui ses initiatives en particulier sur la prison et manuvre pour liquider lhypothèse révolutionnaire de la lutte armée pour le communisme. Le plan sur lequel se déroule laffrontement est donc un plan politique général. Par les contenus des politiques contre lesquelles la classe est en train de lutter, cest un plan qui est objectivement un plan de pouvoir. La conscience avec laquelle la classe descend sur ce terrain est cependant conformée par la position politique qui est encore hégémonique dans la classe, et donc par le P.C.I. qui tente dorienter la lutte prolétarienne sur le terrain démocratico-réformiste, destiné à la faillite, vu le cadre de relations intérieures et internationales actuel. Pour la classe, vaincre ou perdre dans cette conjoncture se mesure dun côté dans la capacité de généralisation de la résistance à lattaque, dentraver et de sopposer au projet de restructuration actuel afin quil ne passe pas. Dès aujourdhui donc, la spontanéité prolétarienne exprime son activité générale en luttant contre les mesures spécifiques de la restructuration pour la guerre : contre la politique économique de lExécutif, contre le doublement des dépenses militaires, linstallation des euromissiles et la perspective de la guerre. On peut prévoir laiguisement de laffrontement de classe sur ces terrains dans le proche futur, étant donné que les mesures contre lesquelles on lutte aujourdhui ne sont que des aspects dune restructuration qui est encore toute à déployer comme attaque à venir contre lemploi, le coût du travail et les dépenses sociales, mesures qui auront comme contrepartie la multiplication des bases de lO.T.A.N. et des bases de missiles, en même temps que la croissance de la militarisation et du contrôle social. Lautre aspect sur lequel se mesurent les victoires et les défaites de la classe est la capacité de lavant-garde communiste combattante à opérer dans cette résistance pour faire effectuer un saut au mouvement de classe contre la politique impérialiste. Opérer dans cette résistance signifie en premier lieu déterminer le projet politique dominant de la bourgeoisie impérialiste et la manière dont il se matérialise dans la conjoncture. Linitiative combattante doit être dirigée contre ce projet, pour recomposer tout lantagonisme prolétarien actuellement fractionné en divers mouvements aux contenus spécifiques et différenciés. On peut et lon doit réunifier et orienter le mouvement prolétarien antagoniste, afin quil soppose consciemment et unitairement contre ce même projet contre lequel il lutte actuellement de manière partielle et sur des aspects spécifiques. La politique révolutionnaire est alors précisemont cette capacité à exercer une direction politique en plaçant au centre lactivité générale des masses, et en opérant au niveau des contradictions à partir de la pratique combattante. Le travail parmi les masses ne part donc plus de lindication « conquérir les masses sur le terrain de la lutte armée ». Il se propose au contraire dorienter toutes les pratiques de lutte possibles et pratiquées par la classe, en généralisant et en reproposant les plus mûres dans leurs formes de masses, contre la contradiction de la conjoncture. La politique révolutionnaire est donc un ensemble complexe de pratiques différentes, qui comprend le combat, la critique, lélaboration théorique, lagitation, le travail dorganisation des masses aux niveaux et des manières historiquement possibles, etc. Mais elle est un ensemble de pratiques révolutionnaires parce quelles se situent toutes et unitairement dans une stratégie de conquête du pouvoir politique et dans la tactique de conjoncture qui en découle. Le caractère global des procès de restructuration est tel que sous la poussée de la sphère économique, le « politique » tend, avec toujours plus de force, à assumer le caractère dominant : ainsi, alors que le rapport entre classe et État se transforme, ce dernier se profile avec netteté dans le devenir et laffrontement, opposant avec clarté les intérêts impérialistes aux intérêts prolétariens. Cest pour cela que nous réaffirmons que, dans cette phase, la question de lÉtat se pose avec force et clarté, et donc la question de la construction dune stratégie révolutionnaire pour la conquête du pouvoir politique. Cest justement cette prédominance du caractère politique de laffrontement qui nous fait réaffirmer avec une plus grande force la validité et la nécessité pour la lutte prolétarienne révolutionnaire de construire le Parti Communiste Combattant. Avec ces points synthétiques, points danalyse de la phase et de la conjoncture, nous ne prétendons pas épuiser la compréhension des tâches révolutionnaires, et donc de les assumer nous seuls dans le cadre dun projet défini et articulé à lancer aux masses. Nous voulons plus simplement, avec tangibilité révolutionnaire, établir un rapport avec les masses, avec leurs avant-gardes de lutte et avec le mouvement révolutionnaire un rapport nouveau au sein duquel construire une proposition politique révolutionnaire adaptée à la phase, pour interpréter lantagonisme prolétarien et lorienter vers lunique solution positive et historiquement possible : la conquête du pouvoir politique. Nous voulons donc être extrêmement clairs sur ce point : notre Organisation ne constitue pas le « noyau fondateur » du Parti Communiste Combattant, même si elle agit, et veut agir, activement pour en promouvoir la constitution. Multiples sont les forces et les aires révolutionnaires qui reconnaissent la nécessité dun authentique parti du prolétariat métropolitain, et avec lesquelles la confrontation est non seulement possible, mais nécessaire. Les formes et les structures du Parti découlent des tâches stratégiques et tactiques dun processus révolutionnaire historiquement déterminé dans lanneau-Italie. Il sagit donc dun Parti dont la pratique sociale et combattante générale est basée sur la politique révolutionnaire nécessaire pour faire vivre le général dans chaque particulier de lactivité de la classe : cest-à-dire pour faire vivre dans le prolétariat métropolitain un programme général qui, faisant siens les intérêts politiques généraux posés par les masses, dirige et organise, dans chaque conjoncture, la lutte et le combat prolétariens contre les aspects principaux de la « restructuration pour la guerre impérialiste ». Un programme qui, dans chaque conjoncture, construise et atteigne une étape du processus révolutionnaire. En tant que militants des « Brigades Rouges pour la construction du Parti Communiste Combattant », nous proposons à une vaste aire de forces révolutionnaires et davant-gardes de la classe, une confrontation politique qui vise à redéfinir une politique révolutionnaire qui réussisse concrètement à généraliser et à réunifier les luttes prolétariennes, à développer et à renforcer les mouvements de masses, et à orienter lactivité générale des masses contre les piliers fondamentaux de la « restructuration pour la guerre impérialiste » et contre le « parti de la guerre ». En pratique, pour arriver à faire assumer un programme révolutionnaire et anti-impérialiste cohérent par les masses, et donc en réussissant à synthétiser ce qui émerge et vit, même de manière dispersée, dans les mille expressions de lutte et dans les mots dordre spontanés des cortèges prolétariens. Il sagit de contribuer à construire une politique révolutionnaire qui ait la capacité dintervenir avec un programme général dans les mille rigoles des spécificités dans lesquelles sexprime la conflictualité prolétarienne pour que rien ne soit dispersé des potentialités de la classe, précisément dans un moment où la bourgeoisie impérialiste cherche à fragmenter la résistance de la classe elle-même, pour que chaque miette de la résistance prolétarienne contribue à réaliser le maximum de force contre les pivots centraux de la politique de lennemi principal. TRAVAILLER À LUNITÉ DES COMMUNISTES POUR LA CONSTRUCTION DU PARTI COMMUNISTE COMBATTANT ! LUTTER ET COMBATTRE POUR REPOUSSER LATTAQUE CONTRE LA POLITIQUE RÉVOLUTIONNAIRE ! TRAVAILLER À UNIR, ORGANISER, ORIENTER LA LUTTE DE LA CLASSE ET LA PRATIQUE COMBATTANTE CONTRE LA POLITIQUE ÉCONOMIQUE DU GOUVERNEMENT, CONTRE LES POUSSÉES AU RÉARMEMENT ET LES DÉPENSES MILITAIRES, DANS LA PERSPECTIVE DE LA CONQUÊTE DU POUVOIR POLITIQUE ! Rome, le 17 janvier 1983 Brigades Rouges pour la construction Arreni Renato, Belle Enzo, Braghetti Laura, Gallinari Prospero, Iannelli Maurizio, Novelli Luigi, Padula Sandro, Pancelli Remo, Petrella Marina, Piccioni Francesco, Ricciardi Salvatore, Soghetti Bruno.
Notes : 1. Benito Craxi est Secrétaire général du Parti socialiste italien. 2. Amato est le Procureur de la République du « procès Moro », tandis quAntonio Savasta est un dirigeants des B.R. qui est passé aux carabiniers à linstant même où ceux-ci faisaient irruption dans la cache où était détenu le général américain Dozior. 3. Lors de la séquestration dAldo Moro, une cache des B.R. fut découverte via Gradoli, à Rome. 4. Le document par lequel les « B.R. pour la construction du P.C.C. » appelent à la « retraite stratégique » a été publié dans « Clash » numéro zéro, été 1982. 5. Il sagit de divers dirigeants politiques et syndicaux, de ministres, socialistes et démocrates-chrétiens. _____
GUÉRILLEROS FEDAYINS DU PEUPLE IRANIEN : Examen de Révolution dans la révolution de Régis Debray.
Comme nous avons dit, sous leffet dune série de préjugés, nous avons négligé de comprendre profondément les concepts fondamentaux que Debray avait présentés dans Révolution dans la révolution comme éléments internes de lexpérience cubaine. En fait, nous avons rejeté en pratique ces nouveaux concepts sans les avoir réellement compris. En réalité, nous navons pas dit que la voie décrite par Debray était incompatible avec les conditions spécifiques en Iran. Nous ne pouvions pas affirmer non plus quelle était impraticable dans les conditions dAmérique Latine, dautant que nous navions aucune connaissance précise de ces conditions ; cependant nous lavons rejetée. Ce rejet ne se fit pas sur la base dune série de considérations spécifiques objectives, mais plutôt sur la base des principes généraux du marxisme-léninisme. 13 Il nous semblait que la thèse de Debray niait le rôle du parti marxiste-léniniste comme la seule force capable dassurer lensemble de la direction pour réaliser la révolution. Il nous semblait que la thèse que Debray sous-estimait limportance de la théorie du marxisme-léninisme en tant que théorie révolutionnaire et guide de la pratique. Il nous semblait que Debray ignorait le rôle dirigeant du politique sur le militaire et même quil privilégiait le militaire par rapport au politique. Debray cite Castro : « Qui fera la Révolution en Amérique Latine ? Qui ? Le peuple, les révolutionnaires, avec ou sans parti ! » (Régis Debray, Révolution dans la révolution, p. 184, Éditions Maspero.) Ensuite il affirme lui-même : « Fidel Castro dit simplement quil ny a pas de révolution sans avant-garde ; que cette avant-garde nest pas nécessairement un Parti marxiste-léniniste ; et que ceux qui veulent faire la Révolution ont le droit et le devoir de se constituer en avant-garde indépendamment de ces Partis... Il ny a donc pas déquivalence métaphysique Avant-garde = Parti marxiste-léniniste, i/y a des conjonctions dialectiques entre une fonction donnée celle de lavant-garde en histoire et une forme dorganisation donnée celle du Parti marxiste-léniniste , conjonction qui résulte dune histoire antérieure et dépend delle. Les partis sont sur la terre et sont soumis aux duretés des dialectiques dici-bas. Sils sont nés, cest quils peuvent mourir, et renaître sous dautres formes. » (Ibidem, p. 184.) Ces phrases furent accueillies par les intellectuels libéraux et soi-disant anti-dogmatiques, car ils croyaient y trouver la réfutation du rôle référentiel et davant-garde de tout parti marxiste-léniniste. Ceux-là veulent dune part bénéficier du titre de révolutionnaire et davant-garde et dautre part, leur libération les empêche de renoncer à leur libéralisme idéologique et leur éclectisme pseudo-marxiste et à accepter le marxisme-léninisme comme la seule perception scientifique du monde, la seule idéologie capable de diriger une révolution persévérente ainsi que la discipline nécessaire pour travailler dans une organisation marxiste-léniniste. Ils abusent ainsi des phrases de Fidel et de Régis Debray alors quà travers tout le livre il apparaît quil nest pas question de nier le rôle de dirigeant et de guide du marxisme-léninisme. La question nest pas de nier le rôle dirigeant du prolétariat et de son idéologie. Ici, le parti marxiste-léniniste est conçu comme une forme spéciale dorganisation. Pour citer Debray, si un parti ne bouleverse pas radicalement et profondément son organisation appropriée aux réelles responsabilités dune véritable avant-garde, alors les révolutionnaires marxistes-léninistes ont le droit de mener la révolution en dehors de ce parti marxiste-léniniste, forme spéciale dorganisation, dessayer de créer une nouvelle organisation qui puisse assumer les responsabilités dune réelle avant-garde une avant-garde véritablement marxiste-léniniste, et devenir en pratique dignes de porter ce nom que les soi-disant partis marxistes-léninistes ont usurpé. En réalité, nous sommes ici témoins dune distinction entre la forme dun parti et son contenu. Le contenu du parti, cest la tâche de lavant-garde marxiste-léniniste dans lhistoire, la tâche dune organisation prolétarienne dans lhistoire. Et sa forme consiste en les différentes formes organisationnelles exigées pour accomplir une telle tâche historique. Alors que le contenu reste toujours le même, ces formes organisationnelles sont sujettes aux duretés dialectiques dici-bas. Ainsi le parti peut mourir et renaître sous dautres formes nouvelles, cest pourquoi nous sommes confrontés à la « reconstruction du parti », à la « renaissance du parti sous une nouvelle forme », etc... Debray lui-même réfute ces intellectuels petits-bourgeois qui veulent utiliser ces affirmations pour justifier leur libéralisme et il affirme dune façon déterminée : « Entendons-nous bien. Le moment est passé de croire quil suffit dêtre « au Parti » pour être révolutionnaire. Mais le moment est arrivé aussi de mettre un terme aux réflexes acrimonieux, obsessionnels et stériles de ceux qui croient quêtre « antiparti » suffit pour être révolutionnaires : ces réflexes ne sont que les premiers renversés, mais identiques dans leur fond. Le manichéisme du Parti (en dehors du Parti, pas de révolution) trouve son reflet dans le manichéisme antiparti (avec le Parti, pas de révolution) : les deux sont quiétistes. En Amérique Latine aujourdhui un révolutionnaire ne se définit pas par son rapport formel au parti : avec ou contre. La valeur dun révolutionnaire, comme celle dun parti, est celle de son action. » (Ibidem, p. 189.) Et lorsquil est question daction et particulièrement daction armée, ces mêmes intellectuels, retranchés dans leur tour divoire, reculent, et afin de justifier leur inactivité et leur propre existence, disent que la révolution a besoin de théorie et dune analyse complète des conditions socio-économico-politiques. Ainsi, ils ignorent que justement, du fait de leur absence de lien avec laction armée, ces partis sont déchus de leur position davant-garde, que lancienne organisation du parti marxiste-léniniste a perdu se relation avec la nouvelle responsabilité historique, que maintenant, une nouvelle organisation marxiste-léniniste, et une plus grande rigueur dans la discipline que celle de lorganisation précédente sont exigées et que la relation de chacun avec la révolution sera déterminée par sa relation avec la nouvelle organisation. Mais avant de nous occuper de lidée principale de Debray, à savoir la question de la relation entre le parti et la guérilla, et entre le politique et le militaire, il est bon de clarifier la question de la relation entre la théorie et la pratique du point de vue de Debray. Dans Les erreurs de la théorie du Foco, Clea Silva constate que Debray tente de détruire le principe selon lequel « sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire », lorsquil dit que « le meilleur professeur du marxisme-léninisme est lennemi dans laffrontement direct ; létude et lapprentissage sont nécessaires mais pas déterminants ». À mon avis cette conclusion de Clea Silva nest pas correcte. Cependant voyons ce que lon veut dire par théorie. Silva y répond elle-même : « ll y a lutte révolutionnaire seulement quand nous savons comment, contre qui et à quel moment nous devons lutter ». Est-ce que Régis Debray considère ces points comme des problèmes secondaires, sans importance ou pas nécessaire ? Je pense que non. Debray nessaie-t-il pas davancer une théorie et une série dacquis stratégiques basés sur lexpérience de la révolution cubaine ? Son livre nest-il pas une tentative consacrée essentiellement à répondre à cette question : comment et par quels moyens combattre lennemi ? Sil ne présente pas dans son livre une analyse complète des conditions socio-économiques de lAmérique Latine, cela indique-t-il quil considère ce problème sans importance et pas nécessaire ? Pourquoi considère-t-il alors labsence de lanalyse politico-économique de la part des partis communistes latino-américains comme une carence ? Cependant lattention illogique et excessive que Debray accorde aux formes et particularités spécifiques de la révolution cubaine, ou en réalité aux aspects exceptionnels de lexpérience cubaine, et sa tentative de les généraliser à travers toute lAmérique Latine, provoquent une série derreurs quil nous faut mentionner. Si les révolutionnaires cubains mettaient en pratique les principes stratégiques, même inconsciemment, devrions-nous aussi nous mettre à luvre sans avoir conscience de la stratégie, et sans une compréhension relativement claire des lignes générales de laction que nous avons devant nous ? Si nous voulons entreprendre une guerre populaire, ne devrions-nous pas avoir une compréhension claire de la stratégie des guerres populaires et des conditions spécifiques de chacun des pays dans lesquels ces guerres populaires ont eu cours ? Si ce nétait pas nécessaire, alors pourquoi Révolution dans la révolution lui-même fut consacré à cette tâche ? Et si cela est nécessaire, on ne peut résoudre le fait que les uvres théoriques concernant les guerres populaires « ont fait autant de mal que de bien » (Ibidem, p. 120) et quen réalité elles montrent la relation dialectique entre la théorie et la pratique, en procédant de cette façon superficielle et empirique, disant qualors, il ne faut pas les lire ou « cest une chance que Fidel nait pas lu les écrits militaires de Mao Tsé-toung » (Ibidem, p. 119). Sil faut suivre pas à pas la voie cubaine, ce qui est indispensable, et généraliser chaque cas exceptionnel, il faut dire que les révolutionnaires cubains eux-mêmes navaient pas initialement lintention dentreprendre une guerre de longue durée, alors que pour nous la longue durée de la guerre est un fait établi. (Ils voulaient renverser le régime de Batista en menant une série dactions militaires accompagnées dinsurrections urbaines. Au cours de laction ce plan échoua et une nouvelle voie fut adoptée). En réalité, la révolution seffectuant dans toutes les sociétés à partir dune série de lois générales, et étant donné que même les guerres populaires possèdent une série de lois générales, elles contiennent des leçons qui doivent être assimilées et qui, par là même, « font du bien ». Mais si lon considère que dans lanalyse finale, cest laction révolutionnaire qui est capable de découvrir la particularité des conditions objectives de chaque pays, de corriger et compléter la théorie de la révolution, il est hors de doute que les théories précédentes « font du mal » si elles doivent être généralisées dune manière mécanique. Cest uniquement par la clarté des lignes générales et de la stratégie générale de laction que lon peut établir un lien organique entre les expériences et entre les principes tactiques, en tirer des leçons, corriger et compléter les erreurs tactiques en relation avec la stratégie générale et par là même corriger et compléter la stratégie générale elle-même et indiquer précisément les formes spécifiques daction qui en dépendent. Debray dit : « La lutte armée révolutionnaire rencontre des conditions spécifiques dans chaque continent, dans chaque pays : mais elles ne sont ni « naturelles » ni évidentes. Elles le sont si peu quil faut à chaque fois des années de sacrifices pour les découvrir et en prendre conscience. » (Ibidem, p. 119.) Peut-on connaître les conditions spécifiques sans relation avec les conditions générales ? Et les expériences révolutionnaires ne sont-elles pas utilisables pour la connaissance de ces mêmes expériences générales ? Le fait que « Quelques années dexpériences militaires de toute sorte ont fait plus en Amérique Latine pour faire connaître la singularité de ses conditions objectives que des décennies de théorie politique recopiée » (Ibidem, p. 122), ne diminue en aucun cas limportance de la théorie de la révolution, mais veut dire uniquement que la théorie politique recopiée ne peut être un guide correcte pour laction révolutionnaire. Mais cette expérience ne peut être la source dune théorie nouvelle et dun guide nouveau de la pratique quen relation avec la théorie, avec les conditions générales et lanalyse des conditions spécifiques. Bref, cest la pratique qui confirmera finalement la justesse ou lerreur de notre théorie en faisant le bilan des théories et expériences précédentes. Avant de terminer sur cette question, il est bon de faire une remarque sur largumentation de ceux qui envisagent une étape relativement longue pour acquérir la théorie de la révolution et une connaissance complète des conditions objectives, une étape dont la caractéristique essentielle est lapprentissage théorique et la lutte idéologique et qui disent que nous avons besoin de théoriciens comme Lénine. Et bien évidemment, ils ne considèrent pas Lénine comme celui qui a été formé au cours dune lutte longue et active mais comme quelquun qui possède une vaste science théorique encyclopédique : Dans lhistoire des expériences révolutionnaires et du mouvement communiste international de ce siècle, nous sommes essentiellement confrontés à trois types de luttes : idéologique, économique et politique. Si lon considère la succession historique de ces expériences, on peut bien observer comment le rôle de la Iutte théorique et économique a de plus en plus diminué et comment la lutte politique a de plus en plus dominé toute la lutte révolutionnaire. Il suffit de jeter un coup dil sur les documents du mouvement communiste pour comprendre la diminution de limportance de la théorie par rapport à la lutte politique pratique : le Capital, lAnti-Dühring, Que Faire ?, Sur la Démocratie Nouvelle, etc... Bref, dans le mouvement communiste international, qui se déroule essentiellement aujourdhui dans les pays dominés, nous sommes rarement confrontés à des uvres théoriques comme le Capital, lAnti-Dühring, ou le Matérialisme et lEmpiriocriticisme. Ceci ne montre-t-il pas que le mouvement communiste international, en général confronté à laction directe révolutionnaire, na ni le temps ni le besoin de faire un travail théorique pure ? Ceci nimplique-til pas que plus que jamais nous avons besoin de praticiens plutôt que de théoriciens ? 14. Et cest de même en ce qui concerne la lutte économique. Si lon considère le processus de la lutte révolutionnaire dans chacun des pays où elle a pris de limportance, nous nous rendons compte que la lutte économique devient de moins en moins importante. Cela aussi est la conséquence de la domination quotidiennement croissante de la politique sur léconomie, la conséquence de la domination de lennemi de classe par les moyens les plus répressifs dans des conditions de terreur et doppression, la conséquence de la domination mondiale impérialiste, en bref, la conséquence du fait que limpérialisme mondial se trouve dans sa phase dagonie. En réalité, le développement du processus révolutionnaire à léchelle mondiale a dune part mis de plus en plus à lordre du jour le problème de la conquête du pouvoir politique, le problème ardent qui est comment faire la révolution et briser la domination impérialiste, en bref, laction directe révolutionnaire, et dautre part, ce même processus révolutionnaire à léchelle mondiale est une sorte de préparation théorique pour la révolution actuelle. Maintenant, le contenu de la révolution est de plus en plus clair, alors que ce qui doit être clarifié, et qui ne peut lêtre que par laction directe révolutionnaire, ce sont les formes spécifiques que prend ce contenu dans des conditions spécifiques. La difficulté ne réside pas dans la préparation du programme de la révolution, la détermination des objectifs de la révolution, la connaissance des forces de la révolution et de la contre-révolution, mais dans la détermination des voies et des moyens qui doivent être mis en uvre pour mener la révolution à la victoire. 15 16
Notes : 13. Nous affirmons encore quil nest pas question de nier la généralité des principes généraux du marxisme-léninisme, mais de notre compréhension dogmatique et superficielle de ces principes, dune part, et notre compréhension incomplète des thèses de Debray, dautre part. 14. Pour mieux exprimer le sujet, il faut dire que si, il y a un siècle, des hommes comme Marx étaient nécessaires pour répondre aux besoins théoriques du mouvement communiste, avec sa science vaste, et si la réponse aux besoins théoriques requérait un travail théorique vaste et de longue haleine, aujourdhui ce nest pas le cas, car le contenu de la révolution est claire, les directives générales de laction ont été obtenues et la compilation de la théorie spécifique de la révolution dépend plutôt de laction révolutionnaire que du travail théorique. Mais évidemment le besoin de la théorie spécifique et générale de la révolution na pas diminué.*/* 15. Lénine dit : « Les économistes cachaient leur ignorance des tâches politiques immédiates en se référant aux réalités générales concernant la subordination de la politique à léconomie. » La conquête du pouvoir politique est un objectif évident et sa nécessité est une réalité générale. La question est de savoir ce qui est déterminant dans la conquête du pouvoir politique. Maintenant si, au lieu de répondre à ce besoin et de définir la ligne concrète de laction et le moyen principal de lutte, nous disons que lobjectif est la conquête du pouvoir politique et pas la destruction de larmée, quil faut intervenir intégralement à tous les niveaux, utiliser toutes les formes de luttes, etc..., nous aurons émis des généralités derrière lesquelles se cachent notre incompétence, notre lâcheté et notre ignorance politique. 16. Pour que Debray ne soit pas justifié, il paraît nécessaire de souligner ses erreurs. Dans son article intitulé : « Lexpérience du Vénézuela et la crise du mouvement révolutionnaire on Amérique Latine », Edgar Rodriguez énumère les erreurs de Debray comme suit : sous-estimation du travail dorganisation et suggestion dun point de vue spontanéiste, sur-estimation de laspect catalyseur de la lutte armée et sous-estimation des affaires préliminaires et préparatives de la lutte. À notre avis, tout ceci peut découler de la généralisation des aspects secondaires de la révolution cubaine à lensemble de la réalité de lAmérique Latine. On observe la même erreur en ce qui concerne la relation entre la ville et la campagne, le parti et la guérilla, la théorie et la pratique. Ainsi, Debray commet la même erreur quil critique : la construction de dogmes. Par exemple, alors que Debray lui-même montre que les différentes orientations au sujet de la relation entre le parti et la guérilla ou la ville et la campagne découlent dun désaccord fondamental, désaccord qui résulte du fait de considérer la guerre de guérilla « comme une autre branche de lactivité du parti », et non pas la branche déterminante de lactivité ou son cadre fondamental dans lequel et en relation avec lequel seulement, les autres formes de lutte prennent de limportance. Malgré tout cela il oublie ce point et commence à construire des modèles au sujet de la relation entre la ville et la campagne et à façonner une série de concepts métaphysiques : la campagne est équivalente au prolétariat et la ville à la bourgeoisie. La raison pour laquelle les dirigeants qui vivent dans la ville sont incapables de comprendre limportance des problèmes et des difficultés de la guerre de guérilla, ne découle pas du fait quils résident dans la ville, mais de leur croyance fondamentale qui est la sous-estimation de la guerre de guérilla en tant que voie déterminante. Mais le point qui doit être souligné est que nous avons examiné le livre de Debray en relation avec nos conditions et nos besoins et que nous nous sommes appuyés seulement sur les aspects du livre qui étaient fondamentaux et déterminants pour nous. À part une série de différences concrètes entre les conditions de notre patrie et celles de lAmérique Latine, le mouvement révolutionnaire en Amérique Latine est fondamentalement plus avancé quen Iran et ainsi, nous ne pouvons pas examiner complètement le livre de Debray sans tenir compte de ces conditions. Prenons par exemple la surestimation de laspect catalyseur de la lutte. En Amérique Latine de 1967 (lannée de la rédaction du livre de Debray) qui, suite à la révolution cubaine, a fait des expériences diverses de lutte armée, dans la région des coups détat et des instabilités continuelles, peut-être que la surestimation de laspect catalyseur de la lutte armée et la sous-estimation du travail dorganisation (en considérant lorganisation relativement avancée des révolutionnaires dans les organisations et les partis par rapport à lIran) est une erreur évidente. Mais en Iran, un pays appelé soi-disant l« île de stabilité » dans un océan agité, un pays soumis à une oppression apparemment inaltérable depuis dix-huit ans, un pays où toute organisation doit être détruite par une violence indescriptible, il faut donner limportance nécessaire à laspect catalyseur et stimulant provoquant lespoir. Actuellement cet aspect de la lutte est fondamentalement déterminant. Ou bien en ce qui concerne lorganisation, les révolutionnaires possédant là-bas une certaine forme dorganisation, la lutte armée aussi doit posséder une forme et une organisation comparables au niveau général dorganisation des révolutionnaires et des militants dAmérique Latine. _____
FÉDÉRATION SYNDICALE RÉVOLUTIONNAIRE AU
SALVADOR :
Bruxelles, le 26 avril 1984. Aux travailleurs belges, À tous les travailleurs dEurope et du monde, En ce 1er mai, journée internationale de la classe ouvrière, recevez, de la Fédération Syndicale Révolutionnaire (F.S.R.) et de toute la classe ouvrière salvadorienne, nos salutations fraternelles, combattives et révolutionnaires. Nous voulons également remercier les travailleurs belges pour nous avoir invitées à participer à cette fête du 1er mai. Comme vous le savez probablement, au Salvador, la situation politique, sociale et économique des travailleurs est particulièrement difficile. Les différents régimes qui ont été au pouvoir depuis 1932 nont apporté au peuple que répression, exploitation et misère. En 1980, cette répression sest institutionnalisée par une série de décrets anti-syndicalistes qui nous ont été imposés avec pour seul objectif darrêter lavance des organisations syndicales, pour intimider la classe ouvrière et pour lempêcher de lutter pour ses revendications immédiates. Je ne citerai que les plus importants de ces decrets : le décret no 507 qui légalise la détention arbitraire de citoyens, le décret no 296 qui supprime le droit à lorganisation syndicale, le decret no 44 qui militarise les centres de travail, le décret no 544 qui gèle les salaires, etc. Malgré tous ces décrets, qui violent le droit à lorganisation syndicale et les droits de lhomme, le niveau de conscience politique et dorganisation na cessé de sélever. La classe ouvrière lutte avec conviction pour ses droits les plus élémentaires comme, par exemple, le droit au travail et le droit à la vie. Cest ainsi quà partir du mois daoût 1983, nous, les travailleurs, nous sommes mis en grève pour exiger une augmentation salariale, car les misérables salaires que nous recevons ne sont même pas suffisants pour couvrir nos besoins élémentaires. Nous exigeons également lannulation de tous les décrets et la réintégration des ouvriers renvoyés injustement par les patrons. La seule réponse que nous donne le patronat face à ces exigences fondamentales est la répression, les arrestations, les assassinats, les disparitions. Ils arrêtent tous nos dirigeants. Au cours de lannée 1983, 113 ouvriers ont été assassinés et plus de 500 sont en prison ; beaucoup dautres ont disparu. Malgré tout son appareil de répression, le gouvernement na pas pu écraser notre mouvement syndical ; bien au contraire, nous nous sommes unis pour pouvoir donner des coups plus forts à la classe dominante. Par exemple, depuis le 3 anvier de cette année, 70.000 travailleurs sont en grève pour exiger un salaire équitable ainsi que la liberté des 9 dirigeants de la F.S.R. arrêtés le 19 anvier lors du 5e Congrès ordinaire de la Fédération Syndicale Révolutionnaire. Grâce à cette lutte énergique, les travailleurs de certains secteurs (banques) ont obtenu une faible augmentation (15 %) de leur salaire. Cependant nous poursuivrons notre lutte pour conquérir notre libération définitive et pour construire un Gouvernement Démocratique Révolutionnaire. De même quont lutté jadis les travailleurs de Chicago pour conquérir leurs droits et les droits de tous les travailleurs du monde, la classe ouvrière salvadorienne luttera jusquau bout ! Nous profitons également de cette opportunité pour lancer un appel à tous les travailleurs belges afin quils se solidarisent avec notre lutte. Nous remercions la Coordination Nationale des Comités de Solidarité avec le Salvador davoir organisé la campagne : « 100.000 francs pour les travailleurs en lutte au Salvador et pour soutenir les familles des camarades emprisonnés ». Nous vous demandons très fraternellement dy participer en soutenant cette campagne, car ce serait une preuve concrète de solidarité internationale. Vive le 1er mai ! Vive le Jour International de Travailleurs ! Luttons tous contre limpérialisme Yankee oppresseur ! Pour le droit au travail et à lorganisation syndicale, les ouvriers sur pied de guerre ! Nous triompherons grâce à la solidarité de tous les travailleurs du monde !
Christina Marin _____
Ligne Rouge est un projet militant dédition anti-impérialiste. Le collectif animant le projet des éditions Ligne Rouge limite les activités de Ligne Rouge à la seule production et distribution la plus large de recueils de documents anti-impérialistes offensifs dont il estime réel lintérêt apporté par ces derniers au mouvement communiste révolutionnaire. Si le choix de ces documents est partisan dans la mesure où lidentité politique des militants animant Ligne Rouge détermine globalement cet outil, il est néanmoins large puisque la publication de textes vis-à-vis desquels certains membres voire la totalité du collectif se démarque politiquement est parfaitement envisageable, Ligne Rouge nétant pas lexpression dune organisation mais un outil dinformation, de réflexion et ainsi de combat à la disposition de tous. Ces documents (textes, interviews, communiqués...) pris en charge par Ligne Rouge recouvrent donc des réalités multiples du combat anti-impérialiste, ils proviennent de pôles politiques différents, de plusieurs époques historiques, de divers pays et continents. Briser le black-out qui vise certaines facettes et non des moindres du combat anti-impérialiste, rompre davec les pratiques de censures et dautocensure dans lesquelles on se réfugie frileusement, extraire les textes hors des cercles dinitiés couvrant jalousement et stérilement leurs monopoles militants, fouiller dans le passé du mouvement révolutionnaire pour confronter sereinement les expériences hâtivement oubliées avec notre situation, bref, arracher du silence et porter massivement au grand jour notre patrimoine passé ou présent de révolutionnaires et laffirmer comme arme pour notre devenir. Voilà la tâche que sest fixée Ligne Rouge, à travers un premier outil : le cahier mensuel des éditions Ligne Rouge. Ces cahiers présenteront plusieurs documents dont les origines différentes seront volontairement choisies, afin de briser les fausses cloisons de sectes, et dobtenir des confrontations que nous espèrerons fertiles entre textes anciens et nouveaux, entre documents venant des centres impérialistes et de libération nationales, etc... Afin de nous restituer notre mémoire, de nous donner une vision plus large, plus précise et plus correcte de laffrontement aujourdhui, afin donc de nous donner ces armes dans notre combat présent et futur contre limpérialisme, le collectif des éditions Ligne Rouge lance un appel à tous les éléments anti-impérialistes offensifs, à toutes les organisations révolutionnaires, à travers cet outil qui est le leur. Contact : BP 1682 Bruxelles 1 Belgique
______________________ « Les communistes ne s'abaissent pas à
dissimuler leurs opinions et leurs projets. Ils proclament ouvertement que leurs buts ne
peuvent être atteints que par le renversement violent de tout l'ordre social passé. Que
les classes dirigeantes tremblent à l'idée d'une révolution communiste ! Les
prolétaires n'y ont rien à perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à y gagner.
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » « Il est absolument naturel et
inévitable que l'insurrection prenne une forme plus haute et plus complète, celle d'une
guerre civile prolongée embrassant tout le pays, c'est-à-dire d'une lutte armée entre
deux parties du peuple. Cette guerre ne peut être conçue autrement que comme une série
de grands combats peu nombreux, séparés par des intervalles assez grands, et une masse
de petites escarmouches dans l'intervalle. S'il en est ainsi, et il en est bien ainsi, la
social-démocratie doit absolument se proposer de créer des organisations aussi aptes que
possible à conduire les masses à la fois dans ces grands combats et, si possible, dans
ces petites escarmouches. » « Les flics peuvent mettre les
révolutionnaires en taule, les torturer et les assassiner, mais ils ne peuvent jamais
tuer la révolution et la mémoire des communistes. » [ Page principale ] [ Plan du site ] [ Ligne Rouge ]
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