COMBAT textes pour le débat Comité de Paris « Domingos
Teixero » ____________________
Frédéric Oriach LA LUTTE ARMÉE, (1er mai 1985) __________ Le présent texte a été publié ensemble avec les communiqués de
1984-1985 des Cellules Communistes Combattantes dans le livre Textes de Lutte,
édité à Bruxelles en Octobre 1988 et distribué par lAssociation des Parents et
Amis des Prisonniers Communistes (A.P.A.P.C.) et par la revue/éditions Correspondances
Révolutionnaires.
TABLE DES MATIÈRES
II.
LUTTE ARMÉE ET ACTION POLITIQUE LÉGALE III.
ACTUALITÉ DE LA QUESTION DE LÉTAT IV.
LA LUTTE ARMÉE RÉVOLUTIONNAIRE ET LE MARXISME V.
LA LUTTE ARMÉE DANS LA STRATÉGIE RÉVOLUTIONNAIRE VI.
LA QUESTION POLITICO-MILITAIRE VII.
VERS LA GUERRE CIVILE RÉVOLUTIONNAIRE __________
INTRODUCTION
1. La Révolution nest pas un existentialisme mais un projet concret. Nous nous disons communistes, ce nest pas comme revendication dune identité ni comme affirmation morale la volonté de communisme peut dailleurs sans doute reposer sur des motivations philosophiques assez diverses , mais comme référence à un sens et, avant tout, à un projet concret, précis, bien matériel. Société sans classes donc sans État, réalisation de lhumanité dans le sens de sa vocation, par la résolution dialectique des contradictions qui maintiennent lhumanité potentielle dans une phase primitive où lhumain est nié par la domination et lexploitation de lhomme par lhomme. Cet espoir est le moteur et le but de notre combat ; laction révolutionnaire sur lHistoire est donc la pratique devant réaliser cet objectif. Nous précisons cela parce que, trop souvent, sous le poids de laliénation, la déliquescence des volontés, la médiocrité lasse et linstinct grégaire ont subverti lespérance et la volonté au profit dune fuite lâche et frileuse dans une sorte de syndicalisme du quotidien. Alors nous parlons de Révolution, en redonnant à ce mot tout son sens, tout son poids, son extrême précision et son absolue globalité. Notre objectif est de faire la Révolution et non pas d« être des communistes », mais dinstaurer le communisme comme nouveau rapport social. Cela détermine des choix politiques dordre stratégique. En effet, pour gagner notre libération de lexploitation et de loppression, il sagit de maîtriser notre situation au sein de lHistoire. Dans laction sur le présent, cest notre futur que nous construisons. Cest pour cette raison quil serait historiquement suicidaire de détourner les aspirations révolutionnaires vers une volonté passéiste (même inconsciente) de sopposer au sens de lHistoire. Or, cest ce qui se produit lorsque certains en arrivent à proposer comme alternative la régression vers des formes de production et dorganisation sociale pré-capitalistes ou bien (parmi les plus soi-disant radicaux) lorsque laction politique se contente dêtre contre tout ce qui marque le développement capitaliste. Nous évoquons là lanti-impérialisme, quand il se limite à vouloir sopposer aux effets de limpérialisme, lantimonopolisme, lantifascisme, lanti toutes sortes de choses faisant reposer toute la problématique sociale sur des idées gadgets en forme de monomanies obsessionnelles posant, par exemple, comme question principale la politique de lénergie nucléaire, ou le racisme, ou limpérialisme américain, ou la « préparation à la guerre », etc. Assez de gadgets ! La réalité ne se morcelle pas, soit on la comprend dans sa totalité complexe, soit on ne la comprend pas et on reste un réformiste en essayant de préserver on ne sait quels acquis faisant partie intégrante des mécanismes de la domination bourgeoise. « Droits de lhomme », « espaces de liberté », « Démocratie », « différences », « autonomie », etc..., longue litanie des valeurs bourgeoises. Nous ne disons pas quil ne faille pas défendre à loccasion ce qui peut parfois limiter la brutalité de loppression : cest nécessaire comme la lutte économique est nécessaire pour la classe ouvrière dans les entreprises ; simplement nous disons que faire de la défensive une politique (fût-ce de la défense « anti-impérialiste ») est objectivement réactionnaire. Être révolutionnaire, ce nest pas être contre le développement historique du capitalisme, mais au contraire pour le dépassement de celui-ci ; cest être pour la destruction du capitalisme par son dépassement historique, et non par la vaine tentative de ralentir son mouvement inexorable. Être révolutionnaire, cest être résolument futuriste, vivre un projet, construire un avenir, faire surgir de nouvelles valeurs forgées dans le combat.
2. La réalité impérialiste dans laquelle nous nous trouvons. Notre propos nest pas ici danalyser la situation actuelle et le fonctionnement de limpérialisme, mais dexpliquer le choix dune politique armée pour prendre le Pouvoir et faire la Révolution. Dailleurs, ce nest pas la situation objective du moment qui nous fixe nos choix stratégiques et nos projets ; cest seulement à partir de nos projets historiques quensuite nous étudions la situation du moment, afin dy adapter nos tactiques de la façon la plus efficace (beaucoup, groupes combattants y compris, font le contraire, en se laissant dicter leurs choix stratégiques par la situation du moment, ce qui fait quils présentent comme « projets stratégiques » ce qui nest que tentative plus ou moins partielle danalyser les problèmes de limpérialisme, etc..., et donc quils nont aucune perspective historique). Mais chacun nétant pas forcément au courant de lensemble de nos analyses et propositions, il peut être utile dans cette introduction de situer brièvement dans ses grands traits la situation impérialiste dans laquelle doit se dérouler notre combat. La phase actuelle du développement de limpérialisme se caractérise par une reconversion stratégique mettant prioritairement en avant laménagement des centres impérialistes eux-mêmes, alors que la phase précédente était tout dabord marquée par lexpansion du mode de production impérialiste vers la périphérie. Cela ne signifie évidemment pas un désengagement de limpérialisme hors du « Tiers-Monde » (=3/4 du monde), sauf lorsquil y est obligé face à la montée des luttes révolutionnaires et de libération nationale. Au contraire, on assiste dans les pays dominés au renforcement dun mode dexploitation toujours plus brutal, dont le caractère criminel apparaît dans toute son ampleur lorsque lon sait que, grâce aux structures socio-économiques de ce mode de production, la moyenne de vie dans le Tiers-Monde ne dépasse pas 54 ans ou que lon y compte plus de 300 millions de chômeurs complets. Le développement de limpérialisme, au sein duquel la France joue un rôle moteur, en particulier comme le second agent répressif après les U.S.A. et comme vecteur de limpérialisme américain, implique un accroissement continuel des inégalités. En effet, alors quau XVIIe siècle lécart entre le pays le plus riche et le pays le plus pauvre était de 1 à 2, il est maintenant de 1 à 40. Et cela ne fait que saggraver puisque selon la Banque Mondiale il faudra compter 700 millions dindividus dans un état de pauvreté absolue à travers les pays « en voie de développement » dici lan 2000. Ce qui, selon cet organisme, on ne peut plus officiel, se traduira par le fait que parmi les pays « en voie de développement » dont la croissance est la plus rapide, on ne peut compter que neuf pays qui puissent espérer rattraper les pays industriels, et cela au bout de 1000 ans ! À moins, bien sur, dun changement radical de mode de production. Si lon veut comprendre la nature réelle de la phase impérialiste actuelle de façon à y adapter les grandes lignes stratégiques que doit emprunter le mouvement révolutionnaire, il sagit de bien saisir que la ligne de démarcation ne passe plus seulement entre les formations dominées et les métropoles impérialistes, mais que cette même ligne de partage se prolonge au sein des centres impérialistes. Ce serait une grosse erreur de fonder une analyse révolutionnaire sur des critères purement idéologiques ou moraux, à partir du fait que lexploitation des peuples du Tiers-Monde paraît beaucoup plus féroce et que, comparativement, le statut du prolétariat en Occident paraît privilégié. Certains poussent même ce jugement idéologique jusquà nier lexistence même du prolétariat occidental, parce quil serait soi-disant partie prenante de lexploitation des peuples du Tiers-Monde, ce qui aboutit alors à réduire la lutte révolutionnaire à lexpression dune simple solidarité internationaliste, tiers-mondiste, hors du cadre principal pour chaque formation socio-économique nationale quest la lutte des classes à léchelle nationale. De telles positions caractéristiques de lintellectualisme petit-bourgeois rejoignent le crétinisme des thèses anti-scientifiques, subjectivistes, dun « embourgeoisement » de la classe ouvrière (que lon compenserait alors par la fascination du marginalisme). Ce ne sont là que des justifications purement culturelles de la passivité actuelle de ceux qui se prétendent révolutionnaires et qui ne visent quà sopposer à la radicalisation de la lutte des classes par une lutte armée communiste sous direction prolétarienne. Loin de se dissoudre dans un bien-être matériel qui aplanirait les différences entre les classes grâce à la redistribution équitable des super-profits extorqués aux peuples du Tiers-Monde, les inégalités sociales ne font que se renforcer à tous les niveaux. En France, par exemple, daprès lI.N.S.E.E., en 1980, ce sont 5 % des ménages les plus riches qui possèdent 69 % du patrimoine global, lécart entre la fortune des 125.000 ménages les plus riches et les 10 % les plus pauvres va de 1 à 1000, cet écart ne faisant dailleurs quaugmenter depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale. De plus, cette situation est sujette à des variations régionales très importantes (contribuant dailleurs à remettre en cause les velléités de considérer lEurope occidentale comme le champ unifié où pourrait se développer une politique révolutionnaire unique), quand on constate que plus de 5 % de la population dEurope du sud vit dans un état de pauvreté absolue. Cette situation saggrave régulièrement pour le prolétariat. En 1985, cette année donc, lI.N.S.E.E. relève que, sur le plan des salaires nets pour lannée 1984, 72 % des salariés des secteurs privés et semi-publics gagnent moins de 5.660 FF par mois. En quatre ans de « socialisme à la française », le salaire des 10 % de salariés gagnant le plus a augmenté plus vite que celui des 10 % gagnant le moins. Les femmes en 84 touchent toujours un salaire inférieur en moyenne denviron un quart à celui des hommes. Rien quen 84, le nombre dactifs occupés parmi les 15-24 ans a diminué de 226.686 personnes ; parmi 334.306 jeunes de moins de 24 ans devenus actifs entre mars 83 et mars 84, 140.193 sont devenus chômeurs et 124.889 travailleurs à statut précaire (seuls 69.224 sont devenus des salariés « normaux »). La lutte des classes comme expression naturelle du conflit entre Travail et Capital rencontre les mécanismes économiques réglant les lois du marché et de laccumulation-reproduction capitaliste ; cette confrontation sur le prix de la force de travail participe à la tendance naturelle à la baisse du taux de profit, qui na fait que saccentuer durant lactuelle période historique, puisque celle-ci sest caractérisée par le phénomène impérialiste, comme expression de la reproduction élargie du capital hors des centres de production originels, et quelle sest heurtée à la résistance du prolétariat mondial à travers les luttes de libération nationale et lextension des régimes socialistes. Afin de compenser cette tendance à la baisse du taux de profit, il sagit naturellement daugmenter le taux dexploitation. Cest ce qui est recherché par un déplacement du développement impérialiste du mode de production capitaliste vers les zones à fort taux de productivité, les métropoles impérialistes elles-mêmes, en y recherchant la mise en uvre dune exploitation plus intensive du travail et dune augmentation, donc, du taux de productivité. La correspondance de ce processus dans les pays dominés est alors le renforcement du sous-développement par lhyperspécialisation dans des industries légères (en sous-traitance des industries des métropoles impérialistes) avec un faible niveau de qualification et des salaires très bas. Ce redéploiement impérialiste se situe dans un cadre dessiné par la dite « crise » économique. Mais ne nous y trompons pas, il sagit dune « crise » de croissance plus que de lannonce dune faillite qui serait prochaine et spontanée. Ce nest pas pour rien que nous en sommes arrivés au point que les milieux financiers sinquiètent de la défaite des socialistes aux prochaines élections : en quatre ans de social-fascisme les échanges boursiers ont été multipliés par quatre, alors quils avaient régressé sous le gouvernement précédent ; la valeur densemble des actions de la Bourse de Paris est passée de 200 milliards de FF en 81 à plus de 500 milliards en 85, le montant des emprunts est passé de 580 milliards de FF en 81 à 1.212 milliards en 84, les valeurs françaises (actions et obligations) ont grimpé de 16,4 % en 84 et même de 56 % en 83. Tout ne va donc pas si mal pour le capital ! La crise ne signifie donc pas en loccurrence un réel affaiblissement du capitalisme parvenu dans sa phase impérialiste développée ; au contraire, lHistoire nous montre que le capitalisme progresse et se développe à travers les crises, qui manifestent le jeu de ses contradictions internes. Cest dans ce contexte que nous nous trouvons actuellement.
LUTTE ARMÉE ET ACTION POLITIQUE LÉGALE
1. La lutte armée ne peut être le produit spontané du mouvement de masse. Tout dépend de ce que lon entend par lutte armée et du rôle que lon veut lui donner. Il peut sagir dune simple forme de lutte, dont la spécificité serait seulement de se situer là où lon perçoit un niveau de violence supérieur ; la structure armée viserait alors à être le bras armé du mouvement de masse, en assumant les niveaux de confrontation trop élevés pour les structures légales. Dans ce cas, la structure armée serait issue de la structure légale et donc dun processus de radicalisation au moins partielle de celle-ci, ce qui implique au départ des liens étroits entre les deux et la conservation de ces liens par une interpénétration des deux structures. Dans cette perspective, on peut donc se fixer comme tâche principale doccuper au maximum les espaces définis par la légalité. Le développement de la guérilla se fait alors sous la forme dun « mouvement » armé prolongeant le mouvement légal ; de façon schématique, cest un peu le choix que faisaient des groupes comme Prima Linea à partir du mouvement autonome, le Mouvement du 2 juin, la fraction dissidente des Napap qui nous était opposée, Action Directe (au départ, leur problème cest que cela a rapidement raté), etc... Ces conceptions de la lutte armée correspondent en fait, du point de vue théorique, à ce quétaient les théories du mouvement autonome (dans ses versions subjectivistes comme dans ses versions ouvriéristes). Ce qui, au niveau le plus fin, correspond aux pensées (du genre Guattari-Deleuze) dune molécularisation des luttes à travers un réseau de failles et despaces de liberté, définis par des flux de désir que lon pourrait traduire sociologiquement par la revendication de différences à remplir (autovalorisation de telle ou telle catégorie, etc...). Il sagit là dune volonté de décodage, cest-à-dire, de mise à côté des territorialités assignées par les structures dominantes. Ce qui peut séduire, mais il faut voir que cette déterritorialisation ne peut reposer que sur des désirs et des réalités qui sont produits ou constituants du fonctionnement structurel lui-même (à moins dêtre philosophiquement complètement idéaliste). Ce qui fait que loccupation des espaces soi-disant décodés ne correspond en fait quau remplissage et renforcement des lieux structurellement définis par le système dans le but de répondre à ses propres nécessités de fonctionnement (lieux de pouvoir ou dexploitation). Ces choix me semblent donc en parfaite adéquation avec les intérêts du système actuel et de son processus historique permanent de développement et daménagement. Cela dans lévolution préconisée par les économistes, sociologues, politiciens et prospectivistes divers du Pouvoir bourgeois, vers ce quils appellent une société « duale » (dans un redéploiement des pouvoirs quen termes militaires on pourrait dire être une centralisation stratégique et une décentralisation tactique). Bien sûr, sous un langage « marxien » accompagné de néologismes abscons et ditalianismes nayant aucun sens compréhensible hors dItalie, tout cela prône un parfait interclassisme fondé sur la primauté du comportement culturel. Mais la lutte armée conçue de façon subjectiviste, comme comportement socioculturel qui serait lexpression dun « espace » particulier parmi une mosaïque dautres, comme une « différence », un des « mille plateaux », ne peut être quune pratique ghettisante et suicidaire. Aussi nous cherchons tout au contraire lémergence et le développement dun processus évolutif, organisé et politiquement centralisé, qui ne réponde pas à des espaces morcelés, mais traverse au contraire lintégralité de la formation historique. Nous posons la lutte armée comme instrument de stratégie révolutionnaire, de classe, organisée, à fonction historique, chacun de ces termes devant être compris dans son acception la plus complète. Cela veut dire quelle nest pas une forme de lutte parmi dautres, mais quelle se veut lexpression dune politique visant à la transformation globale de la société. Cest donc très différent dune démarche revendicative limitée et, au lieu de coller au morcellement structurel, elle cherche à recentrer les multiples contradictions en signifiant ce qui est en dernier ressort le moyen principal de résolution de la contradiction sociale. Cela dans la compréhension totalisante de la realité, non pas par schématisme ou par un dogmatisme réducteur, mais parce que la vérité est dans cette totalité de la réalité objective, totalité qui lui est donnée par le fait quil ny a pratiquement plus un aspect de lexistence qui échappe au mode de production capitaliste. Lautre source de totalisation étant, bien entendu, le mouvement de lHistoire (et on peut encore trouver au-dessus de lHistoire une autre force de totalisation, mais ça cest un autre problème !), et le propre de ce mouvement de lHistoire est de poser les questions en termes de classe, daffrontements entre classes, de pouvoir à subir ou à exercer. Précisons toutefois que cette conception nentraîne aucun sectarisme quant à la diversité des pratiques et des opinions, car nous pensons que le mouvement organisé de lutte armée napparaîtra pas par la désagrégation des courants existant aujourdhui, mais par lémergence parallèle dun processus réellement nouveau ; de la même façon que le mouvement bolchevique na pas eu besoin de lextinction de la social-démocratie révisionniste et des courants socialistes-révolutionnaires ou libertaires, même sil sest appuyé sur la critique de ceux-ci, mais sest développé comme alternative nouvelle par le recours à la méthode scientifique dun marxisme authentique comme instrument danalyse de la totalité de la réalité russe de lépoque.
2. Les problèmes du passage du légal à lillégal. Le rapport entre lespace du travail politique légal et les structures illégales nest pas à considérer comme fixé a priori, mais dans la perspective dialectique du mouvement propre à chacun des deux types de structures. Ce qui permet de dégager trois schémas possibles : 1. que la guérilla apparaisse comme aboutissement de lévolution des contradictions internes du mouvement légal et du processus de radicalisation/conscientisation de celui-ci ; 2. que le mouvement légal soit la périphérie du noyau le plus radical, donc organisé et armé, et quil se développe autour de la guérilla ; 3. que le mouvement légal et la structure armée se développent parallèlement, dans une interaction dialectique organisée que nous préciserons au long de ce texte. La deuxième perspective semble difficile à réaliser, dans la mesure où la guérilla est de fait historiquement secondaire au mouvement légal et il faudrait donc une désagrégation de celui-ci pour que la guérilla soit lespace central autour duquel il se développerait. De plus, il est évident que le développement de la lutte armée doit entraîner la conscientisation, la transformation idéologique et politique, lextension des idées révolutionnaires, mais il nest pas certain que cette extension se traduise par un développement du mouvement légal, puisque si la guérilla agit sur le rapport de force cest en exacerbant les contradictions, donc en favorisant lélévation du niveau de violence de laffrontement. Ce qui implique accroissement de la militarisation générale et de la répression, restreignant par là lespace des libertés légales et entraînant donc la limitation objective des capacités de développement du mouvement légal. La première perspective, que la guérilla soit un aboutissement de la radicalisation (partielle ou générale) du mouvement légal, constitue loption qui nous est la plus souvent opposée. Si le mouvement légal peut donner le jour à la lutte armée, directement, ce ne peut être quà travers un processus insurrectionnel, on retombe alors dans lillusion des groupes gauchistes pensant que le schéma léniniste de 17 est transposable à nimporte quelle situation historique et quil sagit de préparer les masses grâce au militantisme légal (ce quils font depuis soixante ans sans avoir progressé dun iota) jusquà ce que la situation soit miraculeusement mûre pour le Grand Soir. Si dans cette perspective il ne peut y avoir de projet autre quinsurrectionnel, cest parce que lon voit mal comment la guérilla, impliquant une structuration politico-militaire clandestine, pourrait se développer sur le même plan que le mouvement légal, dans la mesure où le caractère ouvert de ce dernier rendrait la guérilla trop perméable aux activités de renseignement et attaques de lennemi. Ensuite, il y a deux blocages, lun est idéologique, lautre est politique. Sur le plan idéologique. La différence entre lutte armée et action légale nest pas quantitative, mais qualitative. Le passage de lune à lautre ne peut donc se faire par une évolution linéaire et homogène, mais uniquement par bonds. Ce qui fait que sur chaque problème il peut y avoir deux choix, lun illégal, lautre légal. Il ne faut jamais oublier que nous vivons dans un système de libéralisme politique, la forme politique de la dictature bourgeoise est ici la Démocratie ; alors lorsque quelque chose nous mécontente il existe tout un choix de moyens légaux pour nous exprimer : manifs, tracts, journaux, bulletins de vote, etc... Aussi la lutte armée est tout autre chose quun moyen ultime qui serait employé en désespoir de cause. Robespierre disait justement que tuer Louis XVI ne relevait pas dun acte de justice ou dune impossibilité de faire autrement, mais dune « décision politique » ; cest ainsi quici il nous faut considérer la lutte armée : non pas un ultime recours, mais une pure décision politique, froide, choisie scientifiquement pour sa fonction dans une stratégie révolutionnaire rationnellement réfléchie. Dautre part, nous ne pensons pas que lon puisse valablement ne pas voir la lutte armée dans sa fonction stratégique générale et limiter ainsi laction illégale comme réponse ponctuelle à des problèmes bien circonscrits (antifascisme, antiracisme, antinucléaire, etc...), parce quà moins davoir une vision étroite et morcelée de la réalité, on voit que ces questions ne peuvent être isolées de leur contexte et que cest donc se résigner à limpuissance que de limiter une approche radicale à des secteurs particuliers. Il existe une multitude de structures évoluant dans lespace de la légalité, plus ou moins radicales, de contestation ou de revendication, qui peuvent être caractérisées par le fait de ne pas poser la question du Pouvoir, mais uniquement du degré dautonomie et daménagement à lintérieur des cadres actuellement en place. Dans la mesure où il sagit despaces morcelés, sattachant chaque fois à un problème très spécifique, il ne peut y avoir en leur sein de transformation en vue de la lutte armée (si lon sentend sur celle-ci comme fonction dune stratégie révolutionnaire réelle, cest-à-dire incluant la prise du pouvoir dÉtat). Ces espaces légaux, à travers lesquels sexprimerait la soi-disant « société civile » contre lÉtat, sont un peu comparables aux syndicats, ceux-ci sont des lieux majeurs de la résistance ouvrière, ce qui est une fonction nécessaire qui peut être maintenant étendue dans les secteurs autres que producteurs, étant donné lextension actuelle du mode capitaliste sur tous les aspects de la vie. Mais, de la même façon quautrefois les syndicats ne pouvaient ni se confondre avec le Parti ni être la structure destinée à lui donner le jour, lensemble des organismes légaux ne peut être porteur de lexpérience, de la capacité de synthèse et de structuration organisationnelle qui sont nécessaires au développement dune lutte armée à fonction véritablement stratégique. Comment, en effet, un collectif réuni par antifascisme ou contre la répression ou pour soutenir des prisonniers ou autre chose, pourrait-il, dans le cadre de cette activité spécifique, mener lanalyse historique nécessaire à un véritable projet révolutionnaire ?
3. Limites de la légalité et position de classe. Une compréhension historique révolutionnaire ne peut apparaître quà partir dune position de classe. Voilà sans doute le problème principal, vouloir transformer radicalement lensemble des structures sociales par la destruction de lÉtat bourgeois et la prise du Pouvoir, aller vers le communisme ; cela implique davoir compris le mouvement de lHistoire et sy situer. Ce mouvement étant celui de la lutte des classes, il sagit donc de se positionner en tant que classe, cest-à-dire se donner les moyens pratiques et théoriques de cette dialectique qui fait de la réalisation du prolétariat en tant que classe la condition de son abolition, réalisation qui implique : identité de classe, conscience de classe, position de classe. Puisque les forces qui font lHistoire sont les classes, le projet révolutionnaire ne peut que se confondre avec le processus dacquisition de la conscience de classe par le prolétariat. Et on voit mal comment ce processus pourrait être constitué par le jeu de structures légales morcelées, limitées, généralement nadoptant aucune position de classe, prônant au contraire linterclassisme grâce à des confusions plus ou moins opportunistes visant à remplacer lantagonisme des intérêts objectifs de classe par des contradictions entre des catégories déterminées par de simples comportements socio-culturels (l« individu » contre lÉtat, le « jeune », une sensibilité individuelle à tel ou tel problème particulier, etc...). Les exemples les plus comiques peuvent en être trouvés dans ce quétait la « mouvance autonome » et les influences qui en restent, lorsque nous voyons inventer un concept de « jeune prolétaire » (ou, plus récemment et encore plus drôle : le « prolétaire urbain », ce qui ne veut strictement rien dire), concept incluant, pour ceux qui le manient, le jeune travailleur (comme sil avait dautres intérêts que le travailleur plus âgé !), le zonard, le lycéen en phase de rupture adolescente, létudiant travaillant pendant ses vacances et aux comportements culturels un peu différents de ceux quil adoptera quand quelques années plus tard il aura acquis sa situation de cadre ou de patron. Cet espace de lactivité politique légale est donc morcelé par des spécialisations interclassistes, alors que la lutte armée doit être lexpression dun projet révolutionnaire organisé, dont lexistence ne peut reposer que sur des positions de classe, dans la construction de la conscience de classe. Sur le plan politique, les limites de lévolution des structures légales ont des causes externes et des causes internes. Les causes externes sont dues en particulier à lévolution des mécanismes du pouvoir social selon les nécessités du développement de limpérialisme. Nous y voyons les extraordinaires capacités dabsorption et de récupération par le pouvoir bourgeois (si les sociologues, psychologues, etc..., sont payés par lÉtat pour étudier et impulser mouvements « alternatifs » et « nouveaux mouvements sociaux », ce nest pas pour rien...). La tendance est à lextension du salariat et de la prolétarisation, vers une bipolarisation sociale croissante. Le pouvoir politique doit sadapter à cette réalité dont la caractéristique est de nécessiter (pour éviter la fracture) un commandement renforcé, une domination plus complète et efficace ; cela passe par la volonté déclater la lutte des classes en brisant lhomogénéité interne des ensembles de classe. Le Pouvoir bourgeois cherche à remplacer le concept de classes dans la conscience collective par une notion dappartenance à des catégories de comportements socio-culturels (« jeunes », écolos, homosexuels, punks, « peuple de gauche » et tutti quanti). Un parfait exemple est linvention, par les managers du social-fascisme et du sionisme, de la notion de « Beurs », afin de tenter dune part de briser lidentité arabo-islamique et dautre part de briser lidentité sociale de classe du prolétariat immigré arabe. Quand ce nest pas par le comportement culturel ou par la sensibilité idéologique, ces catégories peuvent se faire fabriquer par une caractéristique économique secondaire mais érigée de telle sorte quelle soit considérée comme prenant le pas sur les rapports de production. Dans lorganisation par la dictature bourgeoise (ses mass-media et structures de pouvoir intellectuel) de la suprématie du sociologique sur léconomie politique, lespace de la légalité, parcouru par la nébuleuse des collectifs associatifs et des mouvements dits alternatifs, se voit confier la tâche dhétérogénéiser les intérêts de classe, dabsorber les contestations, en leur fournissant des espaces de liberté où sébattre, de paralyser les tendances subversives en les réorientant dans le sens de lordre établi. Alors que limpérialisme organise la grande concentration monopoliste et la mondialisation du mode de production capitaliste, il peut se permettre de dégager des espaces sociologiques et idéologiques livrés à des formes dautogestion (excluant de toute décision quant aux questions fondamentales). Espaces dexpression et de défoulement qui peuvent être occupés à linfini, puisque lorsquun groupe ou un courant ne satisfait plus il suffit den créer un autre à côté, accroissant ainsi lhétérogénéité et limpuissance. Alors il faut saisir que lespace dexistence politique délimité par la légalité est précisément celui par lequel fonctionne, se développe et évolue le Pouvoir impérialiste lui-même. Aussi, plus lespace de la légalité sera rempli, plus sa fonction sera réalisée et donc moins il sera le lieu possible dune subversion réelle. Il y a également des causes internes expliquant limpossibilité dun passage évolutif du mouvement légal à la lutte armée. Cest que le dit espace de la légalité fonctionne en instaurant et en distribuant des pouvoirs, pouvoirs qui ne peuvent se perpétuer, donc, que grâce au fonctionnement de la légalité. Cest ainsi lespace privilégié de la petite-bourgeoisie, là où elle peut remplir la fonction politique spécifique qui lui est assignée, cest-à-dire, où se joue la gestion de lidéologique et du politique de la dictature bourgeoise. La petite-bourgeoisie est la courroie de transmission politique entre la bourgeoisie capitaliste et les masses prolétariennes, elle est pleinement dépositaire et gardienne des intérêts du capital. Et cest bien ainsi la petite-bourgeoisie intellectuelle qui gère les mouvements légaux, tous les mouvements « alternatifs », anti-répressifs, les groupes gauchistes, les mouvements de solidarité, de création culturelle, de réflexion, tous les organes dexpression. Comment imaginer que les détenteurs dun tel pouvoir politique et idéologique pourraient labandonner avec le sourire? Car le passage à la lutte armée implique labandon de ce pouvoir, non pas quelle exclue la hiérarchie ou la participation de petits-bourgeois, mais uniquement parce que, dans lespace de la légalité, le pouvoir de cette catégorie sur les mouvements idéologiques et politiques fait partie intrinsèquement de sa fonction officielle, attribuée par les rapports de production et rétribuée généralement par lÉtat, rapport évidemment impossible quand on mène une lutte armée ! Chacun a alors en tête dinnombrables exemples qui montrent bien, pour les raisons que nous venons dévoquer, limpossibilité de se libérer progressivement du pouvoir de la petite-bourgeoisie dans les structures légales. Dès que cette catégorie voit le pouvoir lui échapper, elle réagit en sopposant, en sabotant, en trahissant, en détruisant les structures dont elle a la direction effective. Ce pouvoir lui échappe dans lillégalité, ne serait-ce que par la nécessaire clandestinité de laction qui entraîne la rupture entre lactivité professionnelle et para-professionnelle publique, dune part, et lactivité politique, dautre part (alors que la singularité existentielle de la petite-bourgeoisie intellectuelle se fonde justement sur la non-séparation entre lactivité sociale salariée et lactivité sociale gratuite). Cest sans doute dailleurs pour cela que la caractéristique psychologique de la petite-bourgeoisie intellectuelle confrontée aux questions de la lutte armée, cest la paranoïa aiguë, se croire lobjet dun complot, adopter une vision policière de lhistoire, en voyant partout des infiltrations et des manipulations, se croire menacée par le fascisme, la guerre ou on ne sait quoi encore, se complaire dans lanalyse descriptive des pratiques de la répression pour mieux se persuader quil est préférable de rester chez soi. Voilà donc une nouvelle raison pour laquelle le passage du mouvement légal à la lutte armée ne peut correspondre à une progression linéaire ; de trop nombreux blocages politiques, idéologiques, mais aussi psychologiques et policiers, sopposent à une radicalisation progressive, au sein dun cadre légal, qui puisse conduire à un processus véritablement révolutionnaire, donc de lutte armée. Ces lignes ont un objectif précis, parler de la fonction de la lutte armée telle quelle est nécessaire ici et aujourdhui ; aussi nous nallons pas discuter du travail politique légal ou ne lévoquer que par rapport à la lutte armée. Laction politique légale fait lobjet dautres discussions. Nous situerons simplement, avant de les retrouver plus précisément, les grandes caractéristiques de laction légale dans son rapport à laction armée et dans sa nécessité générale : Cest le cadre dans lequel le combattant communiste doit acquérir lexpérience politique militante qui est nécessaire à son efficacité dans la guérilla. Laction légale favorise la prise de conscience révolutionnaire des masses populaires, qui sont ainsi plus sensibles aux objectifs de la lutte armée révolutionnaire et, bien entendu, aux nécessités de son développement quantitatif (sans articulation à une action politique légale, largement publique, une guérilla serait condamnée à lisolement par rapport aux masses, donc à végéter, à ne pas se développer et à voir son sort uniquement déterminé par les aléas de la répression). Laction politique légale constitue lespace à travers lequel les forces communistes combattantes peuvent construire leur ligne politique, adopter de justes orientations stratégiques et suivre une pratique correcte répondant aux intérêts objectifs et subjectifs des larges masses prolétariennes. Car laction politique légale est le cadre principal dapplication de la ligne de masse : partir des masses pour retourner aux masses ; par lenquête politique systématique doivent être saisis les besoins et capacités réels des masses populaires ; il doit en être tiré une ligne daction représentant la synthèse des idées les plus avancées des masses (car les idées justes viennent des masses, uniquement des masses, et pas de lanalyse de ce que racontent les gestionnaires ennemis ; on en apprend plus au comptoir dun café populaire que dans les derniers rapports de la Trilatérale, de lO.T.A.N. ou autre, du moins si on veut faire la Révolution). Cette synthèse doit être effectuée grâce aux divers instruments à notre disposition, en particulier le marxisme-léninisme, mais aussi lintuition de ce qui est juste et du sens profond de notre longue marche. Cette synthèse doit ensuite être restituée aux masses par linformation, lagitation, la propagande militante, les actions révolutionnaires. Puis limpact de lintervention politique, armée ou pas, doit être évalué au sein des masses et donner lieu à une nouvelle synthèse, et ainsi de suite, selon un cheminement dialectique. Laction politique légale est le cadre où le combattant acquiert ses motivations et sa détermination idéologique, ce quil ne peut faire quen connaissant les conditions réelles de la vie des prolétaires, connaissance qui pour être objective nécessite de partager les luttes des masses. Le cadre daction légale à privilégier pour les combattants communistes nest pas celui des structures « alternatives » ou de contestation de telle ou telle institution, dans la mesure où ces structures sont le plus souvent interclassistes et concernent surtout des catégories petites-bourgeoises ou marginales qui pour être remuantes nen présentent pas moins un intérêt nul pour la Révolution. Le cadre de laction politique légale doit donc être uniquement déterminé par lanalyse de classe, par lanalyse objective de la composition sociale du milieu où lon intervient, à qui on sadresse. Par conséquent ce cadre doit être prolétarien, nous devons nous adresser à la classe ouvrière et aux autres couches authentiquement prolétaires, ce qui doit être considéré objectivement et non pas subjectivement. Le prolétariat est déterminé par sa place objective dans les rapports de production et non pas par des critères subjectifs tels que la « révolte », la délinquance ou autres comportements minoritaires, dautant que ce type de critères subjectivistes désignent généralement des catégories de la petite-bourgeoisie ou du lumpenproletariat, cest-à-dire des catégories qui pourront peut-être suivre en partie la Révolution, mais qui ne pourront en aucun cas y jouer un rôle autre que totalement secondaire.
ACTUALITÉ DE LA QUESTION DE LÉTAT
1. Lutte des classes ou lutte contre lÉtat ? Une question très importante que nous rencontrons souvent chez nos contradicteurs, que ce soit ceux qui sopposent à la lutte armée ou que ce soit ceux qui, comme Action Directe ou certains groupes anarchisants, ont des pratiques de lutte armée mais sur des bases non-marxistes, cest le problème de lÉtat, la conception que lon en a et comment celle-ci sinsère dans notre combat. Objectivement, lÉtat nest rien dautre que linstrument de la dictature dune classe, donc aujourdhui linstrument de la bourgeoisie. Bien sûr, en tant que communistes, nous voulons aboutir à labolition de tout État, puisque nous combattons pour une société sans classe et que lÉtat ne sexplique que par lexistence des classes. Cependant, nous ne confondons pas les causes et les effets, un système de société et un simple rouage de celui-ci, une classe dominante et son organe politique, administratif et militaire de domination. Lennemi principal nest certainement pas lÉtat, et, bien sûr, encore moins les quelques structures bureaucratiques transnationales par lesquelles les États de limpérialisme tentent vainement dintroduire un peu dordre gestionnaire dans lanarchie qui caractérise leur système (mais cela, nos nouveaux socialistes-révolutionnaires, luxemburgistes et néobundistes, version armée, ne le comprennent pas, cest à se plier de rire...). Nous nallons pas non plus remplacer lidée dun grand méchant loup dÉtat par celle dhorribles bourgeois égoïstes et avides : ce qui est en cause ce ne sont pas en premier lieu des individus ni leurs appareils bureaucratiques, ce qui est en cause cest fondamentalement un mode de production, le mode de production capitaliste, qui est à la base de lensemble du système de domination, dont lÉtat, etc... Considérer comme « ennemi principal » lÉtat en soi ou la bourgeoisie en soi, revient à ne considérer que des symptômes, car on ne détruira ni la bourgeoisie ni lÉtat si on ne détruit pas lactuel mode de production. Mais il est vrai quest actuellement très répandue la tendance à concevoir lÉtat comme une sorte dogre, responsable universel de tous les maux. Si on ne considère pas lÉtat comme produit dun certain mode de production, cest quil serait le fruit dune imaginaire « nature humaine » se traduisant par un goût du pouvoir chez certains individus, thèse qui se manifeste alors par des théories utopiques ou alors par le réformisme. Réformisme qui sexprime sous les trois tendances suivantes, principalement : La dite extrême-droite, néo-libéraux et « nouveaux philosophes », souvent gauchistes recyclés dans lanti-communisme et le sionisme fanatique au service de la défense de la Démocratie, dont la thèse est de proposer un État du moins dÉtat possible, comme dit Bernard-Henri Lévy. La deuxième grande tendance est celle du « centre » traditionnel, cest-à-dire le social-fascisme tel quil règne en France (la social-démocratie caractérisait déjà les régimes précédents, en particulier celui de Giscard qui était peut-être même encore plus social-démocrate que la bande à Mitterrand, et la social-démocratie sera encore le caractère principal du régime politique français après 86 et 88). Dans ce courant nous pouvons placer tous ceux qui sont des parasites du pouvoir bourgeois, ceux qui sont « à la gauche de la gauche », les groupuscules gauchistes dont le néo-révisionnisme se concrétise par leurs reptations de misérables quémandeurs de strapontins au sein de la social-démocratie ; ceux-là ont contribué à la victoire électorale du Porc Suprême, Mitterrand, au nom dun « moindre mal », et nous les verrons, éternels prostitués, voter en 86 et 88 pour la Gauche sous prétexte de barrer la route à la soi-disant Droite et au soi-disant « fascisme ». Il y a enfin un troisième courant, dont limage est dextrême-gauche, mais que nous désignons sous le concept de radical-réformisme. Ce sont des autogestionnaires, des courants « alternatifs », des groupuscules relevant consciemment ou non des théories de lAutonomie, dont lobjectif est de saménager des espaces morcelés et interclassistes définis par des comportements culturels, des « désirs » se déconnectant de la lutte des classes et du mouvement de lHistoire, recherche donc daménagements et mentalité dassistés, contestant lÉtat, mais sans cesse revendiquant des statuts reconnus par lÉtat, davantage de services, de salaires indirects, etc... Toutes ces tendances, y compris celles qui font de l« anti-impérialisme » sans ligne de classe concrète et donc sans viser à la prise du Pouvoir, se rejoignent finalement en ce quelles font de lÉtat lobjet central, quelles veuillent le diminuer, le renforcer ou le gérer, en faire un meilleur distributeur de services ou développer des espaces dautonomie isolant lÉtat. Le principe est le même : voir les institutions comme ce qui est premier (lO.T.A.N. ou lE.D.F. ou ladministration pénitentiaire ou lécole etc...), ne pas poser comme principale la question du mode de production, ne pas tenir compte du mode de développement des contradictions constituant le sens de lHistoire, ignorer la lutte des classes et la remplacer par des aspirations de catégories socio-culturelles, comportementales, subjectivistes, de supposées contradictions gramsciennes entre « pays légal » et « pays réel », État contre « Société », « classe dirigeante » contre « peuple », ou autres conceptions idéalistes qui marquent profondément jusquà certains groupes de guérilla en Europe de lOuest.
2. Il faut tenir compte de lévolution des formes de lÉtat, dans le combat pour nous en emparer. Notre critique est donc tout à fait radicale contre les thèses considérant lÉtat comme étant en soi lennemi principal. Cependant, il convient daller un peu plus loin, car il ne faudrait pas tomber dans lexcès inverse. En effet, dans la mesure où lon veut abolir lactuel mode de production et renverser la bourgeoisie, on se trouve forcément confrontés aux instruments de contrôle, gestion, répression, donc à lÉtat. La Révolution implique de briser tous les instruments de lancienne société, en particulier de détruire son État. Pour le prolétariat, prendre le Pouvoir, cest aussi prendre les pouvoirs actuellement gérés par lÉtat bourgeois. Cest peut-être une évidence, mais elle est à rappeler, car il ne sagit pas de considérer non plus lÉtat comme un instrument quasiment neutre, qui changerait simplement de mains ou qui sécroulerait automatiquement au cours du processus révolutionnaire (au contraire, il se renforce au fur et à mesure quavance le procès révolutionnaire). Dautant que le caractère dune pure instrumentalité de lÉtat légitimerait lutilisation de celui-ci par les forces communistes durant la phase pré-révolutionnaire, donc il faudrait admettre lélectoralisme, le parlementarisme, la possibilité dune conquête pacifique du pouvoir dÉtat. Ce contre quoi nous navons rien a priori, ce serait parfait si des élections pouvaient remplacer la guerre civile ; mais aujourdhui et ici ce nest pas le cas, la révolution prolétarienne exige la totale et violente destruction de lappareil dÉtat bourgeois. Il faut bien voir que le choix ou le rejet du parlementarisme ne relève pas de questions de principes, mais de positions dictées par lanalyse objective de la réalité actuelle. Par exemple, la situation était différente et permettait des formes de parlementarisme dans la Russie préparant 17, car on sy trouvait alors devant un processus de double révolution, cest-à-dire une révolution démocratique (impliquant donc démocratie, parlementarisme, légalisme, etc...) servant de tremplin à une révolution prolétarienne, ce qui nest évidemment pas le cas ici et maintenant, où la révolution démocratique bourgeoise est achevée depuis pas mal de temps. Cette réalité actuelle nous montre également que, si le système socio-économique est toujours le même par son fonctionnement quà lépoque où Marx en expliquait les mécanismes, il nen a pas moins subi depuis ce temps de profondes modifications correspondant à son développement naturel, à sa maturation. La description que Marx ou Lénine pouvaient donner de la fonction de lÉtat est toujours juste et se confirme même toujours davantage à travers le temps. Cependant, ce qui est exact est lexplication du fonctionnement et non pas la description dune forme historiquement donnée qui se perpétuerait immuablement. Car la forme de lÉtat bourgeois est constamment mouvante en fonction du développement du mode de production capitaliste. Aussi, si nous pouvons penser que lutilisation révolutionnaire de lÉtat bourgeois est aujourdhui à exclure et quil semble nécessaire de nuancer quelque peu la conception de lÉtat comme simple instrument de domination et simple expression politique du pouvoir de la classe dominante, cest que cette analyse, restant toutefois exacte dans labsolu, se doit dêtre précisée devant les transformations objectives intervenues dans la nature de lÉtat au cours du développement capitaliste, aujourdhui dans sa phase impérialiste moderne.
3. LÉtat impérialiste, fonction du capital. En effet, aujourdhui moins encore quautrefois, on ne peut séparer le combat anticapitaliste, qui relèverait de la lutte des classes en général, et un combat contre lÉtat, qui serait lutte politique ou politico-militaire, comme si lÉtat nétait quun simple instrument comme la police ou larmée, un obstacle sur le chemin du pouvoir prolétarien. Car si lon admet, dune part, que lÉtat est une production de lorganisation des rapports de classes à un moment historiquement déterminé de leur développement et que, dautre part, le mode de production donnant naissance aux rapports sociaux (donc aussi à lÉtat) se développe, donc se transforme, alors il faut admettre que lÉtat évolue relativement à cette transformation, se développe, mûrit, se transforme. Dans quel sens a lieu cette transformation ? Elle est la traduction, au niveau de lÉtat, de lextension du mode de production capitaliste dans toutes les directions et profondeurs du tissu social. Chacun peut constater à quel point les moindres manifestations de la vie sociale et même individuelle sont de plus en plus conditionnées par lactuel mode de production, un mode de production dont lexistence est inséparablement liée aux mécanismes de laccumulation/reproduction du capital. Mécanismes dont la contradiction interne se manifeste par la tendance à la baisse du taux de profit, baisse tendancielle provoquant une extorsion de la plus-value relative de plus en plus croissante par rapport à celle de la plus-value absolue. Cet accroissement de limportance de la production de la plus-value relative est la base économique de la plupart des phénomènes décrits comme spécifiquement afférents à létape actuelle de la société occidentale, cest-à-dire toutes les formes que daucuns ont désignée sous le concept de « société de consommation » (notion évidemment trompeuse, mais qui a acquis un sens familier que chacun comprend) ; recherche du profit jusque dans les plus petits gestes quotidiens, totale suprématie de la valeur déchange sur la valeur dusage, production non seulement de biens dusages plus ou moins fétichisés, mais aussi production de besoins et même, en quelque sorte, de besoins de besoins ; rentabilisation par le gaspillage, rentabilisation de lensemble des activités humaines, donc aussi de tous les plaisirs, des sentiments, de tout ce qui relève du psychologique et du culturel ; extension galopante de laliénation et de la réification. Et cest dans le cadre de ce développement de laliénation et du renforcement de lextorsion de plus-value relative que lÉtat se voit attribuer un rôle plus étendu que ne le serait celui dun simple instrument ; un rôle plus étendu, mais aussi plus diffus, dans le sens de la fusion et de larticulation générale de tous les appareils organiques ou de commandement du capitalisme, cest-à-dire, de ce complexe social, économique, idéologique, politique, militaire qui fait que le capital nest pas une simple catégorie économique, mais, selon la formule de Marx, un rapport social. Linterpénétration du capital et de lÉtat correspond alors au sens du développement capitaliste historique, ce qui correspond un peu à ce quen dit Mario Tronti 1 : « Plus le développement capitaliste avance, cest-à-dire, plus la production de la plus-value relative pénètre et sétend partout, plus le circuit production-distribution-échange-consommation se parfait inéluctablement ; cest-à-dire que le rapport entre production capitaliste et société bourgeoise, entre usine et société, entre société et État, devient de plus en plus organique. Au niveau le plus élevé du développement capitaliste, le rapport social devient un moment du rapport de production, et la société tout entière devient une articulation de la production, à savoir que toute la société vit en fonction de lusine, et lusine étend sa domination exclusive sur toute la société. Cest sur cette base que la machine de lÉtat politique tend de plus en plus à sidentifier à limage du capitaliste collectif ; elle devient de plus en plus une propriété du mode capitaliste de production et donc une fonction du capitalisme. » Concrètement, cela va plus loin que la fonction keynésienne de lÉtat bourgeois à travers les modes de planification et dintervention dÉtat dans léconomie ; cest lié à la croissance de la part du capital financier donc des mécanismes étatiques monétaires transnationaux également, le rôle croissant de la fiscalité, celui de lÉtat-patron dans le secteur public qui prend toujours plus dimportance, exercice de monopoles capitalistes directement par lÉtat, rôle de celui-ci dans la formation de grands monopoles impérialistes. Cest évidemment dans le même sens que se situent les rapports de lÉtat aux médias, le rôle central de lÉtat dans la manipulation de masse, non seulement pour protéger lordre capitaliste, la paix sociale et la reproduction des institutions superstructurelles, mais aussi comme vecteur directeur de constitution ou dextension des espaces socio-économiques et idéologiques, où se joue (en particulier par la création de besoins artificiels) lextorsion de la part de la plus-value relative indirecte, cest-à-dire, non-issue de lactivité salariée de production. Un autre phénomène majeur de cette évolution de la fonction de lÉtat cest, bien entendu, son rôle dans la régulation du marché du travail, mais aussi et surtout dans la répartition des revenus ; il faut en effet savoir que le quart des revenus de la population active salariée est constitué par le « salaire indirect », cest-à-dire, par lensemble des prestations sociales dÉtat. Par conséquent, lÉtat bourgeois moderne joue de plus en plus le rôle dun capitaliste, il tend toujours davantage à se confondre avec le capitalisme lui-même, à être une fonction du capital. Aussi, on ne peut plus se contenter de le considérer comme un simple outil de domination bourgeoise, dont le caractère dinstrument lui confèrerait une sorte de neutralité défensive, qui pourrait dans ce cas permettre dinvestir cet État-instrument pour lutiliser contre la bourgeoisie, au même titre quun canon est neutre et peut servir autant contre la bourgeoisie que contre le prolétariat. LÉtat moderne est beaucoup plus que le « conseil dadministration » que la bourgeoisie sétait donné pour gérer ses intérêts politiques. Il nest plus seulement « capitaliste » par le fait dêtre au service du capitalisme, mais parce quil fonctionne lui-même comme capitaliste. Et cest comme tel quil nous faut lattaquer, non comme simple obstacle au mouvement révolutionnaire et parce quil serait répressif, mais parce quil est partenaire à part entière de la lutte des classes. Lattaquer, donc, de la même façon que dans lusine on sattaque au patronat, sans en faire pour autant une cible symbole et obsessionnelle qui personnaliserait, en quelque sorte, le capitalisme, alors quil est évident que cest lensemble du système et donc, à la base, le mode de production capitaliste lui-même quil nous faut détruire historiquement. Et le processus de cette destruction passe par lattaque dès aujourdhui contre lintégralité des articulations et fonctions de la domination bourgeoise.
LA LUTTE ARMÉE RÉVOLUTIONNAIRE ET LE MARXISME
1. Le marxisme-léninisme, méthode vivante, ne rejette aucune forme de lutte. Comment vient se situer la lutte armée révolutionnaire ? Les critiques les plus dignes de considération qui nous soient adressées contre nos conceptions de la stratégie et de la tactique révolutionnaires sappuient ou prétendent sappuyer sur la référence aux anciennes solutions stratégiques que la méthode marxiste a suscitées dans lhistoire du mouvement ouvrier. Cest donc sur ce plan que nous nous situerons. Cependant, nous ne prétendons pas avoir réponse à tout ni clore le débat, il ne sagit que de présenter trop brièvement quelques grandes lignes quil faudrait évidemment détailler et approfondir bien davantage. Tout dabord il convient de ne jamais oublier que les grands théoriciens du marxisme ont décrit des mécanismes, des fonctionnements qui sont toujours actuels, dautre part ils ont élaboré le matérialisme historique et dialectique comme mode de compréhension active de la réalité objective et des processus historiques qui lexpliquent. Ensuite, ils ont formulé des solutions politiques, mais celles-ci nont certes pas de valeur universelle, contrairement au matérialisme historique et dialectique, ces solutions ne correspondent quà lapplication des méthodes danalyse marxistes à des situations historiquement déterminées et elles ne peuvent donc pas être reportées sans modification dune époque à lautre ou dune réalité nationale à une autre. Il est évident que les solutions valables à lépoque de la « révolution » industrielle ne sont pas les mêmes que celles qui sappliquent durant la phase du capitalisme monopoliste et encore moins que celles quil sagit de mettre en uvre à lépoque où limpérialisme est la forme hégémonique du mode de production capitaliste. Le marxisme-léninisme soppose radicalement à tout dogmatisme, à tout automatisme des solutions tactiques et stratégiques, il indique des méthodes vivantes pour trouver à chaque époque et dans chaque situation les méthodes qui conviennent, en dehors de toute application mécanique dune théorie qui serait alors transformée en dogme. Cest dailleurs ce quexplique lui-même Lénine : « Cest pourquoi le marxisme ne répudie dune façon absolue aucune forme de lutte. En aucun cas, il nentend se limiter aux formes de lutte possibles et existantes dans un moment donné, il reconnaît quun changement de la conjoncture sociale entraînera inévitablement lapparition de nouvelles formes de lutte, encore inconnues aux militants de la période donnée. (...) En second lieu, le marxisme exige absolument que la question des formes de lutte soit envisagée sous son aspect historique. Poser cette question en dehors des circonstances historiques, concrètes, cest ignorer labc du matérialisme dialectique. À des moments distincts de lévolution économique, en fonction des diverses conditions dans la situation politique, dans les cultures nationales, dans les conditions dexistence, etc..., différentes formes de lutte se hissent au premier plan, deviennent les principales et, par la suite, les formes secondaires, accessoires, se modifient à leur tour. Essayer de répondre par oui ou par non, quand la question se pose dapprécier un moyen déterminé de lutte, sans examiner en détail les circonstances concrètes du mouvement au degré de développement quil a atteint, ce serait abandonner complètement le terrain marxiste. » Cela signifie pour le moins que la lutte armée comme principale forme de lutte dune stratégie révolutionnaire ne peut être exclue a priori comme contradictoire avec la théorie marxiste.
2. Le terrorisme révolutionnaire est une forme de lutte utile et nécessaire, faisant partie de notre patrimoine communiste.
Se pose alors une question de signification, celle du terme « terrorisme ». Ce concept a subi un glissement de sens à travers lHistoire. Il est employé de façon très péjorative par les médias, il semble que ce soit ainsi depuis la dernière guerre mondiale à partir de lemploi négatif de ce terme par les propagandistes nazis. Avant cette époque ce mot était moins chargé dun jugement de valeur et démotivité, il désignait simplement une forme particulière daction politique : action violente destinée à provoquer la terreur de ceux quelle vise. Cest ce sens qui est utilisé par les théoriciens historiques du marxisme, qui ne désignent là que la forme de certaines actions, sans connotation péjorative. Pour eux, le terrorisme diffère des actions liées à linsurrection en ce quil peut accompagner lensemble du processus révolutionnaire sans être limité comme linsurrection à une phase ultime. Mais il nen reste pas pour autant limité à un simple rôle ponctuel et Engels en indiquait déjà une fonction stratégique : « Pour abréger, pour simplifier, pour concentrer lagonie de la vieille société et les souffrances sanglantes de lenfantement de la nouvelle, il existe un seul moyen : le terrorisme révolutionnaire. » Cest explicite ! Cependant, il faut reconnaître que cette citation peut être interprétée dans un sens restrictif, cest-à-dire posant le terrorisme comme une sorte dadjuvant, certes stratégique et non pas seulement tactique, puisquil a pour Engels une action générale, historiquement étendue, mais qui semblerait surtout destiné à lexacerbation des contradictions, à radicaliser et accélérer laffrontement des classes, sans pour autant octroyer au terrorisme une fonction sur le plan du développement politique proprement dit (lié à lorganisation, etc...). Dans cette citation, terrorisme et Parti napparaissent pas clairement liés, mais nous verrons quils le sont, que le terrorisme a sa place dans le processus de construction du Parti et que le terrorisme doit être dirigé, organisé, par le Parti. Le terrorisme révolutionnaire nest pas une forme de lutte individuelle et que lon pourrait simplement laisser se dérouler spontanément comme une forme de résistance immédiate du prolétariat. Lavant-garde doit en prendre la direction, disent Marx et Engels : « Bien loin de sopposer aux prétendus excès, aux représailles de la vengeance populaire sur des individus haïs ou des édifices auxquels sont liés des souvenirs odieux, il ne faut pas simplement tolérer ces représailles, mais prendre directement en main leur direction. » Les bolchéviks soutenaient fermement les actions de type terroriste, Lénine laffirme suffisamment, il suffit de voir son texte sur La guerre de partisans, ou bien le recueil de Textes sur la jeunesse, où il engueule les jeunes qui ne fabriquent pas assez de bombes et dit quil est juste de tuer des responsables de la répression, de récupérer de largent dans les banques comme le faisaient les bolchéviks (voir les fameux braquages de Staline à Bakou en 1904...). Mais, attention, il ne sagit pas pour nous dexpliquer lactuelle nécessité de la lutte armée en plaquant les analyses du début du siècle sur la réalité moderne. Dautant que pour Lénine lemploi du terrorisme ne pouvait être quune forme de lutte subordonnée à laction de masse et à laction politique non-militaire du Parti, et, ce qui est fondamental, dans le seul but de préparer linsurrection. Cela avec deux objectifs, le premier étant de faire pénétrer dans les masses la tactique insurrectionnelle : « La guerre de partisans, la terreur générale qui en Russie se répandent partout presque sans discontinuer depuis décembre, contribueront incontestablement à enseigner aux masses la juste tactique, au moment de linsurrection. Cette terreur exercée par les masses, la social-démocratie doit ladmettre et lincorporer à sa tactique ; elle doit, bien entendu, lorganiser et la contrôler, la subordonner aux intérêts et aux nécessités du mouvement ouvrier et de la lutte révolutionnaire en général. » (Lénine) Le deuxième objectif est de contribuer par cette tactique à la formation politique et militaire de lavant-garde (toujours en vue de linsurrection), cest ce que dit Lénine en 1905 pour saluer une attaque de commando contre une prison : « Voici que les pionniers de la lutte armée se confondent non seulement en paroles mais aussi en actions avec la masse, se mettent à la tête des détachements et des groupes de combat du prolétariat, forment par le fer et parle feu de la guerre civile des dizaines de chefs populaires qui sauront demain, au jour de linsurrection ouvrière, soutenir de leur expérience et de leur héroïsme des milliers et des dizaines de milliers douvriers. » On nous objectera quavec ces dernières citations intervient un glissement sémantique du concept de « terrorisme » (impliquant une certaine ponctualité de laction) à celui de « guerre de partisans » ; nous pouvons alors penser que cette différenciation introduit la notion de phases successives dans la fonction et lutilisation organisationnelles des formes de combat armées, conception qui apparaît encore aujourdhui parfaitement juste. Pour résumer de façon claire et incontestable la conception léniniste de laction armée, il faut lire les propositions de Lénine au Congrès dunification du P.O.S.D.R. en 1906 : « 1. Le Parti doit reconnaître que les actions armées des groupes de combat appartenant au Parti ou luttant à ses côtés sont admissibles sur le plan des principes et opportunes dans la période actuelle ; « 2. Le caractère des actions armées doit être adapté à la tâche qui consiste à former les dirigeants des masses ouvrières en période dinsurrection et à acquérir lexpérience des actions offensives soudaines ; « 3. Le but immédiat le plus important de ces actions doit être la destruction des appareils gouvernemental, policier et militaire et une lutte impitoyable contre les organisations cent-noirs 2 actives qui pratiquent la violence et la terreur contre la population ; « 4. Il faut admettre aussi les actions armées destinées à semparer de moyens financiers appartenant à lennemi, cest-à-dire au gouvernement autocratique, et à détourner ces moyens au profit de linsurrection ; ce faisant, il importe de veiller sérieusement à ce que les intérêts de la population soient le moins possible lésés ; « 5. Les actions armées de partisans doivent seffectuer sous le contrôle du Parti et de telle sorte que les forces du prolétariat ne soient pas gaspillées en vain, et quen même temps on prenne en considération les conditions du mouvement ouvrier dans la localité donnée et létat desprit des larges masses. » Il serait également possible de considérer la question militaire au niveau des points de vue du blanquisme, de lanarchisme, du foquisme guévariste, du maoisme, etc... ; si nous ne le faisons pas cest parce que les critiques qui nous sont adressées prétendent sappuyer sur des références marxistes traditionnelles, mais aussi parce que nos propres références sont 3 celles dun marxisme orthodoxe intégrant le considérable apport théorico-pratique de Lénine. Cest également parce quil est évident que la reproduction mécaniste des solutions élaborées par Lénine à son époque nous semblerait totalement erronée mais que celles-ci restent les plus théoriquement solides et cohérentes que lon puisse opposer à notre propre conception de la question militaire dans le processus révolutionnaire moderne.
3. La théorie léniniste de linsurrection est une forme historique juste mais actuellement dépassable. Les conceptions de Lénine sont justes, quant à la lutte armée, sur le plan des principes théoriques ainsi que sur le plan des nécessités historiques dune période donnée. Or, la période a changé, donc ces conceptions restent justes au niveau des principes mais doivent être réarticulées au niveau de la pratique politique. Des phases sont à resituer, dautres à fusionner dans leur dépassement, lépoque impose de nouvelles nécessités. Le changement fondamental concerne la notion dinsurrection, dont nous avons vu que la préparation était, pour Lénine, ce qui justifiait et déterminait les formes de la lutte armée (mais même cela serait rétorquable aux différentes sectes gauchistes qui ne font objectivement que du réformisme en ne présentant pas la plus petite différence stratégique ou tactique davec les sociaux-démocrates, en dehors dun radicalisme verbal et dune phraséologie rituelle périmée, tout en osant malgré cela se réclamer indûment de Marx, Lénine ou Mao, de façon mystique). Linsurrection reste, pour ceux qui se veulent des révolutionnaires prolétariens (donc visant à la prise du pouvoir par le prolétariat) tout en refusant la lutte armée aujourdhui, lobjectif principal, stratégiquement parlant, devant assurer le renversement des appareils de la domination bourgeoise. Ils peuvent dailleurs voir ce processus insurrectionnel de différentes manières, mais il nen reste pas moins que cest le principe même de linsurrection qui ne nous paraît plus pertinent dans lOccident moderne et dont la critique joue un rôle fondamental dans notre conception de la lutte armée. Aussi, lexposé sommaire de ce que nous voyons être les grandes lignes dune stratégie de lutte armée révolutionnaire intégrera la critique de la théorie insurrectionnelle. Et nous souhaitons, à travers ces quelques explications, faire comprendre à nos chers critiques quils sont dans lerreur lorsquils prétendent que pour nous « la résultante dune multiplication de gestes individuels ou de petits noyaux conduit à la révolution parce que ça va « éveiller » les masses ». Absurde. Nous navons jamais eu la moindre chose à voir avec lanarchisme ou avec une quelconque forme de radicalisme petit-bourgeois, ni théoriquement, ni pratiquement. Nous commençons dailleurs à être quelque peu excédés par les amalgames, confusions soigneusement entretenues, critiques contre des positions imaginaires. Nous disons donc aux groupuscules dultra-gauche de toutes sortes, ainsi que gauchistes divers, de faire porter leurs critiques contre nos positions réelles et précises, et non sur ce quen fidèles suiveurs de la propagande dÉtat ou fervents adeptes du radical-crétinisme ils simaginent absurdement (ou veulent simaginer) être ce que nous faisons, disons, pensons. Dautre part, pour permettre le débat, il faut sentendre sur les termes. Par exemple, ce qui sest toujours appelé la « question militaire » nest pas la même chose que la question de lautodéfense prolétaire. Il faut bien distinguer les deux. Lautodéfense ouvrière et populaire dans les luttes, est un problème important, auquel une pratique de lutte armée peut apporter certaines solutions mais certainement pas de façon systématique ou toujours souhaitable. Lautodéfense est importante pour le développement des luttes prolétariennes et le processus de la conscientisation, cest une notion qui ne soppose pas à la lutte armée mais ne limplique pas non plus. Lorsque nous parlons ici de la lutte armée, ce nest pas dans le cadre des problèmes tactiques immédiats du mouvement de masse (cest une question dont nous pouvons discuter par ailleurs), nous en parlons au niveau du processus révolutionnaire global, donc dans le cadre dune stratégie révolutionnaire historique. La « question militaire » désigne le problème général du rapport de force militaire, entre les forces du prolétariat et les forces impérialistes. Ce qui pose la question politico-militaire de la constitution de forces combattantes, du mode de construction du Parti, de la destruction de lappareil dÉtat bourgeois, de la prise du Pouvoir par le prolétariat sur le chemin du communisme.
LA LUTTE ARMÉE DANS LA STRATÉGIE RÉVOLUTIONNAIRE
1. Critique de la théorie de la préparation pacifique de linsurrection. Alors, comment voyons-nous cette stratégie ? Répondre à cette question exige de revenir au problème de la conception léniniste de la stratégie, pour dire en quoi nous ne pouvons partager les diverses lignes de ces courants politiques qui se veulent gardiens dune supposée orthodoxie marxiste, « intégrisme » ou « évangélisme » du marxisme, selon les cas, et qui, par leffet dun courage extraordinaire ou bien dune sclérose intellectuelle encore plus remarquable, sacharnent depuis maintenant soixante ans à se croire le Parti ou le futur Parti, vivant dans lincantation liturgique des textes sacrés et les excommunications mutuelles, sans jamais la moindre trace ni dimagination ni de réalisme ! Selon ces courants, il faudrait appliquer les méthodes qui ont plus ou moins réussi dans des pays semi-féodaux du début du siècle. Cela par la lutte politique, en cherchant à élever le niveau de conscience des masses par un patient travail dagitation et surtout de propagande, dexplication et déducation, jusquà ce resplendissant petit matin du Grand Soir où il ne resterait plus quà distribuer des fusils aux masses pour partir à lassaut des palais. Il nest pas étonnant que, devant le peu de résultat de cette stratégie, la plupart des courants gauchistes se soient dit quen désespoir de cause il était encore préférable de coller au cul de la social-démocratie afin den être les vigilants critiques ou de parvenir un jour à participer un peu au pouvoir dÉtat, tout en se disant, pour sauvegarder les apparences, quil sera alors question de déborder la social-démocratie sur sa « gauche » (comme au Chili, Portugal, etc..., je suppose ?). Deux problèmes traversent cette conception dune conscientisation et dune organisation des masses par le travail politique traditionnel uniquement, et cest sur la prise en compte de ces problèmes que nous avons à bâtir notre stratégie. Le premier problème est celui de la question dune possibilité de préparation pacifique à linsurrection. Le deuxième problème est celui de la possibilité de linsurrection elle-même. Examinons cela de plus près. La préparation pacifique à linsurrection est-elle possible ? En répondant négativement, nous ne disons évidemment pas que les luttes pour la satisfaction des besoins immédiats des masses, ainsi que la lutte politique non-armée pour la propagande et lémergence de formes dorganisation des masses, soient inutiles, bien au contraire elles sont tout à fait nécessaires, la question que nous posons ici est seulement de savoir quelle doit être aujourdhui la forme de lutte davant-garde, celle où doit se concentrer de la façon la plus aigüe et totalisante la stratégie communiste. Il faut considérer la réalité objective à travers les extraordinaires capacités de récupération, dabsorption et de détournement que possède aujourdhui la bourgeoisie ; cest lié aux transformations à tous les niveaux de la société au fil du développement capitaliste. Il y a de moins en moins despaces échappant à la rationalité du mode de production capitaliste et cela se manifeste par laccentuation de laliénation, la généralisation du contrôle par les organes de domination sur tous les aspects de la vie. La rationalité elle-même du système socio-économique et son omnipotence sont la première source de conditionnement idéologique et psychologique, aussi, plus cette rationalité est étendue et plus le conditionnement est profond. Les instruments de manipulation, de reproduction de lidéologie, nont jamais été aussi puissants et leur nature a évolué dans le sens dune plus grande efficacité. Autrefois lÉglise, la famille, etc., avaient une action répressive au premier degré par un simple rôle direct de refoulement et dinhibition par des tabous, alors quaujourdhui le système est beaucoup plus complexe, la répression psychologique sadaptant en permanence à chaque progrès du développement capitaliste, le refoulement passant par de multiples transferts (on abdique sa liberté mais le crédit fait passer la voiture neuve pour un cadeau...). Et, surtout, selon le même principe qui fait que la lutte des classes est aussi un moteur du capital, un certain niveau de contestation est nécessaire au système, cela entre dans son fonctionnement. Ne serait-ce que pour créer le besoin auquel il répond par une surinformation massive et anarchique, abrutissante, dont il a besoin pour anesthésier et nous matraquer alors de ses idées-forces. Alors, comment pourrions-nous parvenir par des tracts, petits journaux, chaulages et mégaphones, à concurrencer efficacement la puissance des mass-media étatiques et monopolïstes, mondialisés par limpérialisme ? Cette constatation suffit à fonder la déprime du gauchisme, en lacculant à cette seule alternative : intégration dans la soumission ou alors stérilité dîlots défensifs soudés soit par des dogmatismes rassurants, soit par la convivialité, et qui se donnent ainsi lillusion de sopposer alors quils ne font que tenter de vivre un peu à côté. Nous affirmons alors quaucun progrès nest aujourdhui possible sans une stratégie de rupture radicale sur tous les plans, nous disons quil ne sagit pas de faire de lautodéfense, de faire des groupes pour se tenir chaud en se disant différents de ce que souhaiterait loppresseur, autour dun langage, dun mode de vie, dune logomachie qui a dailleurs toujours le même fonctionnement sémantique quelquen soit la pensée de référence (libertaire, « alternative », « marxiste-léniniste », Témoins de Jéhovah ou même « lutte armée »...) sil sagit là dun mode dêtre, dun militantisme existentiel, en quelque sorte, plutôt quune stratégie de combat destinée à réaliser concrètement une révolution, un renversement du Pouvoir. Nous disons quil faut rompre avec la facilité des idées prédigérées et des autosatisfactions dans des modes de paraître contestataires (sous les santiags, les charentaises !). Ni victimes, ni complices, nous devons être ceux qui agressent. Il nest plus possible aujourdhui de penser quil serait possible délever la conscience du prolétariat, au point qui serait nécessaire à une insurrection, par un simple travail politique de persuasion. Dailleurs on peut se demander si ce fut possible un jour... Par exemple, noublions pas que la Russie pré-révolutionnaire nétait pas politico-idéologiquement comparable à nos démocraties bourgeoises de la fin du XXe siècle : distribuer lIskra cétait risquer la Sibérie, dans les manifestations on ne recevait pas les inoffensives lacrymos qui font ici hurler au fascisme mais des coups de sabre. Cela signifie quà chaque époque les mêmes formes de lutte nont pas les mêmes valeurs de rupture et de subversion ; à la limite, accrocher un drapeau rouge à lépoque tsariste était dune dissidence aussi radicale que poser une petite bombe aujourdhui. Et puis il ne faut pas prendre les gens pour des cons, aujourdhui les prolétaires savent réfléchir, lire, ils sont très informés et comprennent que ce système est pourri et nuisible, aussi, même si un travail dexplication et dinformation reste toujours nécessaire, notre action politique et idéologique doit sexprimer autrement, avoir dautres objectifs.
2. Rôle idéologique de la lutte armée. Le système daliénation atteignant des degrés jamais vus, cela pourrait rendre pessimiste sur les potentialités de libération. Ce serait une erreur car loppression se développe en même temps quelle développe les moyens de la combattre et les raisons de sa disparition. En particulier, laliénation économique du travail saccompagne de lextranéation du travail par rapport au travailleur, qui perd toute satisfaction de son travail, ny trouve plus aucun plaisir moral ou créateur, il se détache donc du travail en ny voyant plus quune activité dont la justification nest en général guère apparente en dehors de la seule rationalité de lexploitation ; transformation qui ne peut que faciliter la rupture avec ce mode do production. Le système réagit à cette nouvelle fragilité, dûe au simple développement du capitalisme, en accroissant la répression par le conditionnement. Tout est alors fait pour isoler les individus les uns des autres, camoufler les démarcations de classes sous des conditionnements culturels en fonction des tranches dâge, des modes, etc., et surtout occuper massivement chaque instant du quotidien, jusque dans la manipulation de linconscient, pour créer une sensation décrasement, dinfériorité et de faiblesse de lindividu, quil se sente incapable et solitaire face à un système trop puissant qui lui aménage des espaces clos, décalquant en creux les interstices dessinés par le réseau de contrôle et de commandement. Espaces morcelés pour le travail salarié, les loisirs, pour apprendre, pour aimer, où la consommation se ritualise et où la légalité, plus que dêtre un gros bâton, se présente comme une multitude de portes (presse, partis, droit dassociation, de grève, dexpression, etc...) surmontées de la pancarte « Pour contester, entrez là » et qui ouvrent sur lédredon mou de la démocratie bourgeoise étouffant cris et coups. Mais si les paroles et les coups de poings ne font que senfoncer inutilement, désespérément, dans la mollesse du matelas qui est en fait le meilleur blindage de la dictature bourgeoise, par le fer et par le feu nous pouvons provoquer les déchirures doù séchapperont les plumes amortisseuses en une hémorragie de démocratie, ce qui, certes, signifiera réduction des « espaces de liberté », restriction des « libertés » formelles, radicalisation de la répression, mais ce sera aussi et surtout identification plus claire de lennemi, exacerbation des contradictions jusquau point de rupture, apparition du vrai visage de la dictature bourgeoise débarrassée de ses voiles illusoires, développement clair et direct du combat, force contre force, classe contre classe. Les défenseurs du capitalisme peuvent calomnier la lutte armée, la dénigrer, traiter les partisans de « terroristes », plaquer sur la guérilla leurs propres schémas de pensée en y voyant ce quils sont eux-mêmes : des mercenaires, et chercher ainsi à laffaiblir. Mais jamais ils ne pourront institutionnaliser, absorber lopposition armée alors quil ny a pas la moindre forme de contestation en dehors des formes de guerre révolutionnaire qui ne puisse être intégrée par le fonctionnement capitaliste. Parce quaucun système social de classe, donc étatique, ne peut accepter des actes visant à le détruire par la force. Donc, au niveau de cette phase qui autrefois était celle dune préparation non-armée à linsurrection, la lutte armée vise à être la seule réelle rupture du consensus, en portant la dissidence au-delà de la possibilité de fonctionnement du capital et de lÉtat. La guerre de partisans montre les faiblesses de lennemi que lon pensait tout puissant, elle montre que lon peut se battre et que lon peut vaincre. Le simple fait de pouvoir exercer des représailles, contre lennemi, joue un rôle idéologiquement libérateur extrêmement important. En effet, il suffit davoir un minimum dexpérience du militantisme de masse pour sen apercevoir : ce que nous disent les gens, au travail ou dans la rue, cest quil y en a marre et quil faudrait que cela change complètement, mais si chacun deux se dit facilement prêt à être révolutionnaire, il ajoutera cependant que cela ne sert à rien de sengager, de prendre des risques, dans la mesure où personne nagit réellement, que tous les autres sont des cons, etc... Alors il est politiquement et idéologiquement très important de prouver que lennemi de classe nest pas tout-puissant, que la solidarité populaire est possible dans les actes, que des coups douloureux peuvent atteindre les exploiteurs, que la police et la justice peuvent payer leurs meurtres et exactions, que les mercenaires colonialistes peuvent payer physiquement lassassinat de chaque frère dans le monde et chaque kilo de richesse pillée aux peuples dominés, que chaque patron peut physiquement et matériellement être empêché de sengraisser sur le dos de louvrier au prix de son épuisement, de son aliénation, de ses mutilations, au prix dune vie confisquée par labsurde rationalité dun système inhumain. Nous disons ainsi que la lutte armée peut se faire porteuse despoir, létincelle de dignité qui appellera la flamme de la libération.
3. Le combattant révolutionnaire doit être étroitement lié aux masses populaires. Mais cela nest que le rôle politico-idéologique général de la lutte armée, ce qui agit de façon globale en donnant lexemple de la résistance et de lattaque révolutionnaire, en transformant concrètement le rapport de force et lapparence de lennemi, en faisant naître dautres valeurs humaines que celles dont nous pétrifie la vieille société de domination. Il y a un rôle politico-idéologiquo plus précis, celui de lexistence de la lutte armée au sein des masses. Car nos critiques habituels nous accusent dêtre extérieurs aux masses populaires et cest effectivement limage qui est donnée par la propagande réactionnaire. Que certains actuels groupes armés soient socialement complètement marginaux et ne possèdent même pas le moindre relais politique de masse (si ce nest, occasionnellement, pour faire du misérabilisme antirépressif ou sassimiler, dans les prisons, à la délinquance de droit-commun du lumpenproletariat), cest une chose certaine. Que dautre part des militants soient individuellement obligés dêtre totalement clandestins pour poursuivre correctement leurs activités, voilà qui est normal et inévitable. Mais nest extérieur au peuple que celui qui le souhaite. La lutte armée nest un facteur dextériorisation par rapport aux masses que si on le veut (or, nous ne le voulons pas). Il est évident que des actions armées ne peuvont être menées aujourdhui que par des structures clandestines, mais ce nest pas pour cela quelles sont étrangères aux masses, ni par leurs militants, ni par leurs lignes politiques. Au même titre quun tract nest pas élaboré et diffusé par les larges masses mais par des éléments avancés de celles-ci, eh bien cest exactement la même chose pour la lutte armée, dans la mesure où elle doit être menée par des éléments avancés du prolétariat ou dautres couches populaires, non pas par des sortes dagents secrets révolutionnaires qui nauraient pas dintégration dans les masses. Aussi longtemps que leur propre sécurité le leur permet, les partisans doivent conserver un mode de vie conforme à celui des autres prolétaires, conserver leur identité de classe non seulement sur le plan idéologique et politique mais par leur propre situation sociale, entretenir des liens actifs, quotidiens, permanents, avec les masses populaires. Non seulement par lapplication dune ligne politique historiquement prolétarienne mais aussi en jouant leur rôle davant-garde objective dans les luttes quotidiennes du prolétariat, en particulier dans les luttes pour la satisfaction des besoins immédiats des masses. Et lorsque cette intégration sociale nest pas possible pour une toute petite minorité de militants, pour des raisons de sécurité ou à cause des tâches militantes particulières qui leur incombent, ceux-ci ne doivent pas être des marginaux, des rebelles, mais des permanents, des révolutionnaires professionnels et, même si le mot choque quelques idéalistes, des fonctionnaires de leur organisation.
4. Une ligne politique prolétarienne. Le deuxième vecteur de liaison aux masses est évidemment de mener une ligne politique prolétarienne, sappuyant sur une analyse de classe et une position de classe ; cest-à-dire une ligne correspondant à la fonction et au devenir, historiques, du prolétariat en tant que classe appelée, par son accession à lhégémonie, à permettre lémergence de la société sans classe la ligne communiste. Le troisième axe dintégration aux masses populaires est la ligne organisative. En effet, nous navons jamais pensé à de petites unités dispersées 4 dont laction aurait pour but de réveiller les masses, un peu comme pouvaient le penser les anarchistes du siècle dernier. Ce dont il sagit pour les communistes par rapport aux masses, cest dinduire par leur pratique politique la mutation du prolétariat de classe en soi en classe pour soi. Cest-à-dire en aidant à la recomposition de classe dun prolétariat dont limportance ne fait que saccroître (contrairement à ce que certains prétendent) mais qui est très parcellisé (différents statuts au sein de la classe ouvrière, prolétariat du secteur tertiaire, etc...), afin daccélérer la réalisation du prolétariat en tant que classe comme condition dialectique de sa propre disparition en tant que prolétariat dans laccession au communisme. Cela signifie accession du prolétariat à la conscience de classe. Et ce qui est porteur, expression et facteur de la conscience de classe cest lorganisation politique du prolétariat : le Parti.
Pour notre part nous pensons que le Parti ne peut sautoproclamer et que créer le Parti comme condition de lessor révolutionnaire revient à mettre la charrue avant les bufs. Le Parti est lexpression politique majeure du prolétariat, le lieu de sa centralité, le moteur et lincarnation de la conscience révolutionnaire de classe. On peut alors penser que défendre le Parti cest défendre le prolétariat, or, si ce dernier nest pas encore parvenu dans le mouvement de la lutte des classes à un niveau suffisant de recomposition, de centralité politique et dapparition dans la totalité du social comme étant objectivement et subjectivement la contradiction majeure, lévolution du Parti risque de sorienter vers la trahison de classe par les compromis avec la bourgeoisie dans le jeu politicien de celle-ci, ou alors ce sera lossification autour de principes « justes » et dune ligne qui fut juste en son temps mais dont les tentatives dapplication se heurtent aux transformations de la réalité objective. Aussi nous pouvons penser que le Parti exprime la dynamique organisationnelle de lavant-garde objective du prolétariat mais quil ne peut émerger en tant que Parti formellement constitué quaccouché par le prolétariat en mouvement, exprimant alors la centralisation politique, théorique et militaire de celui-ci dans lorganisation des éléments les plus avancés de son avant-garde (le Parti nétant ni une organisation de masse, ni un syndicat). Le Parti se constitue comme expression monolithique de la maturité du prolétariat à travers la confrontation politico-militaire et, par conséquent, à travers lapparition progressive de la nécessité dun instrument centralisé capable dêtre loutil politique principal du prolétariat pour la prise du Pouvoir. Les communistes russes eux-mêmes ne se sont pas constitués immédiatement en une organisation prétendant être seule à avoir une pratique correcte et se posant de jure comme centrale. Cependant le Parti en tant que tel pouvait peut-être y apparaître plus précocement dans la mesure où la centralisation prolétaire était plus immédiate : une petite classe ouvrière concentrée, lorganisation de lavant-garde de cette couche proportionnellement réduite pouvait légitimement se poser en parti de lensemble du prolétariat (dont les couches autres que la classe ouvrière étaient totalement hétérogènes et donc sans capacités politiques autonomes, alors que tel nest plus le cas aujourdhui). Cependant, nous ne sommes ni des subjectivistes ni des mécanistes, aussi nous ne pensons pas que le Parti surgira par génération spontanée ou progressivement au cours du développement de la lutte des classes, car il y a une interaction entre ce développement de la lutte des classes, et laction du Parti. Pour que Parti il y ait, il faut que sa volonté en existe, il doit se construire et cette construction doit répondre à une volonté politique consciente et à un patient travail dorganisation. Mais tout dépend également des conditions historiques nationales, cest-à-dire non seulement des conditions sociales objectives mais aussi de lhistoire propre à chaque mouvement ouvrier national. Par exemple, en Espagne lhistoire est marquée par une continuité ininterrompue du mouvement communiste, non seulement de lexistence communiste organisée dans la classe ouvrière mais même au niveau du mouvement communiste combattant puisque le combat communiste armé, au sein de la résistance antifasciste, na jamais cessé depuis 1937. La tâche des communistes modernes était donc la reconstitution politique du Parti Communiste et non sa construction ab nihilo. Cette tâche historique est luvre du Parti Communiste dEspagne (reconstitué). Il est évident que tel nest pas le cas en R.F.A., où le mouvement communiste est à faire renaître de toutes pièces puisquil nexiste aucune continuité de ce genre, le mouvement communiste y étant détruit depuis avant guerre. En France la situation est également différente (dailleurs ces différences fondamentales entrent aussi en ligne de compte dans le fait que la construction dun mouvement révolutionnaire unique à léchelle européenne est une ineptie, en plus du fait que les différences sociales, économiques, culturelles même dans lEurope de plus en plus unifiée au niveau impérialiste sont fondamentales, entre Londres et Athènes, Francfort et Naples, Bruxelles et Séville, il y a autant de différences quentre New York et Abidjan). De façon un peu schématique, nous pouvons dire que la situation de la continuité du mouvement communiste en France est meilleure quen Allemagne de lOuest mais moins bonne quen Espagne, dune part à cause des conditions de constitution du P.C.F., ayant présenté de grandes faiblesses dès ses origines, dautre part parce que les capacités de combat communiste armé ayant surgi dans le cadre de la résistance antifasciste de libération nationale ont été avortées en 1945 et nous nous trouvons donc avec quarante ans de destruction du mouvement communiste dans ce pays. Plus que dune reconstruction cest donc en France dune construction du Parti Communiste dont il doit être question pour nous. Ce qui est une longue tâche organisationnelle ; ceci dit nous parlions là du Parti avec une majuscule, tel que nous lavons défini plus haut, et cette progressivité de la construction du Parti ninterdit évidemment pas de penser quune étape importante sur cette voie serait la construction dun parti, cette fois sans majuscule, dans un délai relativement bref, un parti révolutionnaire présentant ces trois caractères : communiste, prolétarien, combattant.
6. La lutte armée comme pratique davant-garde dans la construction du Parti. Nous ne posons donc pas la lutte armée comme étant un ensemble dinitiatives de groupuscules cherchant à réveiller les masses et à susciter des réactions en attendant devoir ce qui se passe. La lutte armée ne peut se réduire non plus à constituer un « bras armé » des masses, nous récusons totalement cette notion qui ferait de la guérilla une sorte de fraction radicale et clandestine du syndicalisme, attendant que les masses manifestent un besoin pour aider à le satisfaire et ainsi de suite. Nous ne concevons la lutte armée ni comme lexpression dun bras armé des masses, ni dun bras armé dune organisation politique non-armée (comme ce pouvait être le cas entre la Gauche Prolétarienne et la Nouvelle Résistance Populaire ; schéma quaujourdhui nous estimons erroné). Dautre part, nous insistons sur le fait que la lutte armée nest pas seulement quune forme de lutte parmi dautres, un adjuvant particulier des luttes de masse. La lutte armée ne peut être dite communiste et révolutionnaire que si elle se situe dans la continuité de la stratégie historique du mouvement communiste mondial. Elle doit se faire lexpression concrète du processus démergence politique de lavant-garde organisée du prolétariat, avant-garde qui est le lieu où se catalyse la conscience de classe du prolétariat, ce qui est la fonction historique du Parti et place, par conséquent, la lutte armée révolutionnaire comme partie intégrante et indissociable du processus de construction du Parti. Concrètement, cela signifie entre autres choses que la lutte armée comme pratique politique dictée par une stratégie véritable (donc non conciliable avec le spontanéisme et le subjectivisme) doit sancrer dans le prolétariat et y fonctionner comme expression de plus haut niveau politique et militaire dune action politique globale centralement organisée, cest-à-dire incluant les fonctions traditionnelles des organisations qui se réclament du mouvement révolutionnaire sans se donner les moyens dêtre effectivement révolutionnaires. Ce qui signifie quautour de la lutte armée (cest-à-dire dans le même cadre de stratégie organisée que la lutte armée et non pas spécialement à travers elle) doivent se mener toutes les formes tactiques daction politique, de propagande, dagitation, de dénonciation, dexplication, dinformation, de constitution et de développement des organisations de masse.
LA QUESTION POLITICO-MILITAIRE
1. La prise du Pouvoir ne se réalisera que par une guerre révolutionnaire prolongée. Après avoir abordé le problème de la conscientisation à partir de la critique de la théorie insurrectionnelle, nous pouvons poursuivre cette critique en lévoquant cette fois sous langle militaire. Faire reposer la prise du pouvoir politique par le prolétariat sur une insurrection ponctuelle et massive, est aujourdhui impossible. Nous en avons vu les raisons politiques et idéologiques, les raisons sont également dordre militaire. Jamais les appareils répressifs nont été aussi puissants et efficaces, jamais il ny a eu une telle disproportion entre les potentialités militaires du prolétariat et les forces militaires de la dictature bourgeoise. Au niveau international, nous avons face à nous le système de lO.T.A.N., la coordination des polices, linformatisation du renseignement et donc lessor de son échange international, les virtualités d« espace judiciaire européen », la tendance active à la standardisation européenne des appareils policiers, judiciaires, carcéraux (plus ou moins), jusquaux matériels militaires. Bien sûr tout cela est inséparable de la tendance à lhomogénéisation qui se fait sur le plan socio-économique et politique sous légide de la social-démocratie. Au niveau national, il nest pas utile do sétendre sur la puissance militaire ennemie, nous sommes assez saturés dinformations sur cette question par les pleurnicheurs antirépressifs et autres démocrates (fussent-ils armés) obsédés par « Big Brother ». Il suffit de noter laccroissement considérable des forces militaires et policières, leur toujours meilleure adéquation technique et structurelle à la contre-insurrection, un quadrillage du territoire et un contrôle policier, tant des masses que des simples individus, dont lefficacité bénéficie de tous les acquis du développement scientifique et technique. Même dans léventualité totalement impossible où la nécessaire planification et préparation militaire de linsurrection échapperait au contrôle militaire ennemi et donc à sa répression préventive, les masses populaires nont pas la plus petite chance, dans lEurope occidentale actuelle, dassumer victorieusement des affrontements directs impliquant des formes de guerre de positions, dinstaurer des zones libérées, de tenir des concentrations urbaines autrement que ponctuellemont. Aujourdhui, une force quantitativement réduite, spécialisée et professionnelle, équipée de façon sophistiquée, peut assurer une offensive contre-insurrectionnelle totalement efficace. Et il faut tenir compte de la nouvelle décentralisation des commandements opérationnels et de leurs moyens de transmission, ce qui signifie quune offensive insurrectionnelle soudaine ne serait pas capable de paralyser le fonctionnement opérationnel ennemi car les moyens de commandement, de transmission, de Iogistique, de combat ne sont pas concentrés mais insérés dans des réseaux dune grande souplesse (la question ne peut plus être résolue aujourdhui par la prise de quelques casernes et de la poste centrale...). Dailleurs, si la crise de développement de limpérialisme se poursuivait de façon trop critique tout en ne cherchant pas à se débloquer momentanément dans une confrontation militaire entre les blocs, la bourgeoisie ne pourrait rien trouver de mieux quun soulèvement prolétaire, de façon à rééditer lécrasement de la Commune de 71, de la Commune de Shangaï, du mouvement spartakiste, etc... Le mouvement serait noyé dans le sang. En particulier grâce aux nouveaux systèmes dartillerie légère, aux capacités aériennes (principalement les forces dhélicoptères de combat), sans doute même grâce aux armes nucléaires tactiques dont lapplication contre-insurrectionnelle semble extrêmement réaliste puisque limitant relativement lampleur des destructions matérielles (ce qui est moins spectaculaire donc moralement plus acceptable), la souplesse demploi de ces systèmes darmes nucléaires tactiques porte dimportantes perspectives et est un grand progrès de la science militaire. Ce type de confrontation militaire présenterait pour la bourgeoisie les avantages des guerres inter-impérialistes classiques : brutale rénovation économique, élimination de la surproduction, etc... Cela permettrait aussi la liquidation de quelques restes de contradictions institutionnelles de la bourgeoisie par la mise en place de structures étatiques plus brutales, maîtrisant davantage les mouvements de restructuration impérialiste, et une fois encore ce serait, pour le prolétariat brisé, un demi siècle de paix sociale dans le renforcement de lexploitation et de loppression. Cest donc à cause de lactuelle impossibilité denvisager une révolution sappuyant sur une transition pacifique parlementariste (nous ne parlerons pas de cette solution tellement son absurdité est évidente) ou sur une insurrection massive et soudaine à préparer pacifiquement, que nous devons opter pour un processus révolutionnaire de longue durée, un processus de guerre révolutionnaire prolongée.
2. Les principaux caractères qui doivent sattacher au choix stratégique de la lutte armée. Affrontement entre forces dinégale puissance militaire, la guerre de libération prolétaire doit avoir pour forme principale la guérilla, car la guerre de partisans est le seul moyen militaire dassumer avec succès une confrontation avec des forces supérieures sur le plan quantitatif et technique. Cest une telle guerre prolongée qui permettra au soin du prolétariat le développemont dune avant-garde réelle (et non autoproclamée) et déterminée par la conscience de classe. Conscience de classe qui ne peut se fonder que sur la plus claire des positions de classe. Position de classe qui ne peut sacquérir dans sa totalité et se réaliser objectivement que par lengagement absolu dans la lutte des classes et cela à son niveau le plus élevé. La lutte armée pour le communisme a pour but de mener cette totalité combattante et donc de désigner lespace de la confrontation antagonique absolue comme étant le lieu où se forge la conscience révolutionnaire de classe en tant quelle est avant tout totalisation, conscience totalisante dêtre partie prenante de lHistoire en mouvement en tant que classe dont la lutte pour le pouvoir arrachera lhumanité à sa préhistoire danimalité et daliénation. Le Parti est à la fois ce qui porte la conscience de classe et ce qui en est le produit, puisquil doit exprimer la centralité du prolétariat en tant que classe et quil est la forme la plus avancée de lorganisation du prolétariat. Par conséquent, la lutte armée communiste devant être lexpression la plus élevée (puisque la plus totalisante) de la conscience de classe, mais le Parti étant à la fois porteur et produit de cette conscience de classe (comme en étant lexpression organisationnelle, alors que le concept de lutte armée désigne la manifestation plus que le mode de collectivisation de la conscience), la lutte armée apparaît alors suivant un développement qui tend à réaliser, après les avoir fait surgir, les fonctions inhérentes au Parti. Cest dans ce sens que la lutte armée est le combat de classe intégrant le cheminement de la construction du Parti. Ce qui impose à la guérilla des orientations bien précises quant à ses choix de développement. Voyons cela de plus près : Nous voulons le communisme. Pour y parvenir, le prolétariat doit prendre le pouvoir et lexercer sans aucun partage. Cest aujourdhui plus possible que jamais, étant donné lactuelle polarisation de la société, faisant du prolétariat limmense majorité de la population face à une bourgeoisie de plus en plus recentrée autour de loligarchie impérialiste, cela même si la composition interne du prolétariat est hétérogène (encore quil ne faille pas exagérer car, par exemple, la classe ouvrière est quand même beaucoup plus homogène quautrefois). Le « peuple », ici et aujourdhui, cest le prolétariat, ce sont uniquement les prolétaires. Et la petite-bourgeoisie ? Elle se meurt sur tous les plans et ne peut plus jouer le moindre rôle révolutionnaire, elle est aujourdhui historiquement totalement réactionnaire puisque ses intérêts objectifs (et quelle affirme parfaitement dans ses expressions politiques) sont à la fois de sopposer à la destruction du capitalisme (doù lanticommunisme de plus en plus violent de la petite-bourgeoisie dans son ensemble, même dans ses couches autrefois dites « progressistes » : les intellectuels de gauche, par exemple, sont les grands-prêtres de la croisade contre le communisme) et de sopposer au développement impérialiste, ce qui dans un cas comme dans lautre soppose au sens de lHistoire et est donc réactionnaire. Par conséquent cest fondamentalement dans le prolétariat que doit se développer la guérilla comme forme de lutte et comme type dorganisation, ne reposer sur aucune alliance de classe. Et nous nentendons pas le prolétariat comme le font certains subjectivistos qui définissent le prolétaire par des critères de conscience ou par des situations de marginalité, nous lentendons dans le sens marxiste du terme et, pour être très larges, nous ne pouvons considérer comme prolétaires que des individus dont les moyens de subsistance ne proviennent ni directement ni indirectement dune extorsion de plus-value. Nous ne parlons pas du prolétaire comme « figure sociale » où je ne sais quoi de défini par des critères socio-culturels mais purement et simplement par sa place objective dans les rapports de production. Cela ne veut pas dire que des marginaux ou des petits-bourgeois ne puissent sengager aux côtés de la guérilla, poussés par leur subjectivité ou leur réflexion intellectuelle. Cela veut simplement dire que le travail de développement organisationnel des combattants communistes doit uniquement se dérouler en milieu prolétaire, que la direction politique et militaire de lorganisation doit être strictement assurée par des prolétaires (et non par des petits-bourgeois ou par des prolétaires subjectifs). Lautre caractère de la guérilla, dans son cheminement de construction du Parti, cest de voir se constituer une organisation de cadres. Lorganisation menant la lutte armée na strictement rien à voir avec une organisation de masse, il ne sagit pas dun syndicat armé, ni dune sorte de fédération de fronts de lutte, de mouvements sociaux ou de groupes armés qui seraient politiquement autonomes, il ne sagit pas non plus (suivez mon regard...) dun groupuscule de clandestins reposant sur une mouvance de paumés, lumpenprolétaires ou petits-bourgeois à la dérive (qui sautent sur la première occasion pour se repentir et très activement collaborer avec la police, cest aussi un point commun entre certains groupes actuels et les groupes socialistes-révolutionnaires ou anarchistes dautrefois dont ils sinspirent jusque dans leur sigle). Au contraire, lorganisation communiste combattante doit être composée de cadres communistes, cest-à-dire de partisans expérimentés, hautement politisés, qui aient une ferme expérience de masse quant à lagitation, à la propagande et à lorganisation et qui aient chacun des capacités politiques et théoriques suffisantes pour que chaque militant soit le constructeur actif de la ligne politique collective. Chaque combattant doit être capable de porter lintégralité de la ligne stratégique et donc être capable, politiquement et militairement, de constituer ou de reconstituer une unité de lorganisation à partir de lui-même en toutes circonstances. Pour quil y ait véritablement maîtrise du processus révolutionnaire et que lorganisation combattante ne soit pas une sorte de bras armé du mouvement spontané des masses (qui ne sont pas menées par la spontanéité vers la révolution mais vers le « trade-unionisme », comme le remarquait Lénine) en ayant avec celui-ci une relation de suivisme et dopportunisme, il est nécessaire que le fonctionnement et laction de lorganisation expriment une ligne unique, autour de laquelle lunification de chaque partisan soit très complète. Il faut refuser lopportunisme et les alliances autour dun « plus petit dénominateur commun ». Il ne sagit donc pas dun rassemblement, où chacun apporte ce qui lui convient en se retrouvant sur la base politique qui a souvent été de règle ces dernières années et qui peut se résumer ainsi : « Faut faire quelque chose, faut quon sorganise pour faire des choses ensemble, avec les copains et les gens sympas qui veulent agir » ou autres absurdités qui sont dailleurs, dans les faits, parfaitement anti-démocratiques car le refus de toute rigueur politique et organisationnelle fait que la direction effective de ce genre de conglomérat est monopolisée par une « élite » composée de ceux qui par leur expérience personnelle ou par leur statut socio-professionnel ont davantage de capacités politiques et théoriques. Un fonctionnement véritablement communiste doit au contraire reposer sur le centralisme démocratique, sur une structuration précisément organisée de façon permettant à chacun de participer réellement et efficacement à lélaboration de la ligne politique, dans un fonctionnement collectif organisé se donnant une direction politico-militaire centrale comme organe assurant la collectivisation et lunification de la synthèse des pratiques politiques, militaires, théoriques, organisatives des diverses unités de combat et de chaque militant. Ces aspects structurés et centralisés dune organisation qui cherche ainsi à se donner les moyens dêtre objectivement à lavant-garde de la lutte des classes, font que lorganisation anticipe sur le Parti à venir, cest ainsi que celui-ci peut se constituer à travers le processus révolutionnaire. Ce concept d« anticipation » est extrêmement important car cest grâce à lui que peuvent séviter à la fois limmédiatisme aventuriste et la sclérose, le blocage par lincapacité de faire passer le combat dune étape à une autre. Cest ainsi que la lutte armée révolutionnaire nadopte pas une forme définitive quil sagirait de faire durer jusquà la victoire finale ; elle doit passer par une série de phases différenciées sarticulant les unes aux autres et correspondant chacune à une situation donnée du rapport de force politique et militaire. Ce qui constitue larticulation entre deux phases successives étant justement le fait quune phase donnée répond à une situation historique donnée mais quen même temps elle doit anticiper sur la phase suivante, en contenant donc les tendances qui en se développant se réaliseront totalement dans la phase suivante, qui elle-même anticipera en partie sur la phase lui succédant, et ainsi de suite.
3. La phase préparatoire à létape de la propagande armée. Cela signifie quen France nous en sommes à une phase préparatoire de la phase de la propagande armée, elle doit consister en trois étapes qui sont successives quant à leur ordre dimportance mais qui chronologiquement doivent connaître du moins le plus rapidement possible une certaine simultanéité : 1. Ce qui est le plus prioritaire est un intense travail délaboration théorique, danalyse de la réalité actuelle dans toutes ses composantes et de réinsertion de celles-ci dans une perspective historique, afin de dégager une stratégie révolutionnaire globale suffisamment précise et complète pour que, dans sa liaison avec la pratique qui en sera issue, elle sexprime par une ligne politique cohérente, totalisante, porteuse de continuité politique et de développement politico-militaire ainsi quorganisationnel. 2. Un travail dunification politique autour de la base politico-théorique évoquée précédemment. Ce qui doit se traduire par un début de structuration de lorganisation révolutionnaire, présentant dès à présent les caractéristiques suivantes : une organisation structurée (en fonction des leçons que nous tirons des formes dorganisations traditionnelles du mouvement ouvrier ainsi que des diverses expériences de guérilla révolutionnaire passées ou actuelles), stratégiquement centralisée, communiste, clandestine et armée, anti-impérialiste donc internationaliste (ce qui ne signifie pour autant aucune fusion avec des organisations relevant dautres réalités nationales et qui ne serait envisageable que dans un stade de développement très élevé et donc ultérieur), prolétarienne par sa composition et sa position de classe. Elle doit lier le politique et le militaire sous une direction unique, ce qui est déjà lamorce du « parti combattant » dont Lénine parlait comme forme dorganisation de lavant-garde durant la période insurrectionnelle ; le politique ne devant pas être subordonné au militaire mais le militaire ne devant pas être non plus un simple « bras armé » du politique car, dans létat dintégration impérialiste actuel, la question militaire est avant tout une question politique et la question politique ne peut ni se résoudre ni saborder sans assumer la question militaire. Politique et militaire sont indissociables et dans le combat moderne de libération prolétaire, le Parti sera également le noyau central de larmée rouge. Les moyens de cette pratique de constitution et dunification politique sont la lutte politique au sein du mouvement révolutionnaire, le prosélytisme, la formation des cadres, lagitation et la propagande de masse sous toutes les formes et sur tous les terrains constituant des enjeux réels de la lutte des classes 5. 3. Une pratique militaire, visant à donner à lorganisation les moyens de sa politique et de son ultérieur développement politico-militaire dans la guérilla. Cette pratique de combat armée remplit donc trois fonctions : idéologique et politique, logistique, organisative. Limportance de laction militaire dans la phase actuelle nest pas immédiatement considérable et ne peut pas avoir de portée « stratégique » sur le plan politique et idéologique (encore moins sur le plan militaire, bien entendu), il est donc essentiel dy éviter toute abstraction, de ne pas la faire reposer sur des analyses abstraites telles que des considérations géopolitiques ou dautres concepts parfaitement abstraits tels que « combattre-la-restructuration-pour-la-préparation-à-la-guerre », auxquels personne ne comprend rien. Il sagit dêtre résolument concret, immédiatement lisible, une action politiquement juste est une action qui peut se passer de commentaire et dexplication. Limportance de cette pratique est surtout de préparer la phase réellement ouverte de la propagande armée, donc en présenter déjà certains aspects mais dune façon relativement dispersée et selon les formes dexpression les plus souples.
4. La phase de la propagande armée. Cette phase, que nous venons dévoquer, doit se fixer des objectifs politiques et organisationnels précis qui constituent des échéances à court terme, il sagit dune courte période. Par contre, il est difficile de fixer à lavance le cadre temporel de la phase proprement dite de la propagande armée, car ses résultats ne dépendent pas seulement de nous, contrairement à la première phase. En effet, létape de la propagande armée doit poursuivre toutes les tâches de la période précédente auxquelles sajoute une action de transformation de la réalité du pays en intervenant comme force politique constituée. La phase de propagande armée se caractérise alors par les aspects suivants, qui visent davantage au développement quà assumer directement le rapport de force : Il sagit de diffuser le plus largement possible les idées communistes révolutionnaires en se servant des actions de guérilla comme support ; les actions ont alors un rôle médiatique : si la bourgeoisie a peut-être la télévision comme le plus efficace de ses outils médiatiques, eh bien le nôtre est laction armée, dont lefficacité est dailleurs renforcée par les médias ennemis. Il ne sagit pas de faire des actions déclenchant lenthousiasme de la majorité des masses, car si cétait possible cela signifierait que la conscience de classe du prolétariat est développée au point que la Révolution devrait être faite depuis longtemps, non, il sagit simplement que les actions soient justes (pas justes en soi, cela ne veut rien dire, mais justes en fonction de leur efficacité politique), sattaquant à des cibles suffisamment sélectives pour que la majorité de la population ne puisse se sentir attaquée. Les actions armées doivent déclencher lapprobation des couches prolétariennes qui nous sont apparues comme les plus chargées de potentialités révolutionnaires. Ce qui est lié au caractère incontournable de la nécessité de lanalyse de classe, car, en effet, à chaque action armée comme à chaque expression écrite ou orale, de la bombe au simple tract, il faut obligatoirement déterminer avec la plus extrême précision à qui on sadresse ; les actions de la pratique révolutionnaire nont pas à chercher à être justes en soi selon la morale (fut-elle une morale « révolutionnaire ») ni selon de grandes analyses abstraites, mais doivent être entièrement conditionnées par une rigoureuse dialectique où se trouve déterminée la classe ou couche de classe ou même telle ou telle catégorie socio-professionnelle ou communauté socio-culturelle sur laquelle sappuie laction en question et à laquelle cette action sadresse. Mais ce qui détermine le choix et le niveau de laction nest cependant pas de « faire plaisir aux masses ». Les actions doivent en effet se situer toujours à un niveau au-dessus de ce qui pourrait être entièrement approuvé par la majorité, mais sans aventurisme politique donc juste à la limite exacte au-delà de laquelle laction entraînerait une réprobation de la part des prolétaires (étant donnée lactuelle domination idéologique de la bourgeoisie). En frôlant ainsi en permanence ce niveau dacceptation par la majorité prolétaire, la multiplication des actions verra les plus larges masses shabituer à considérer laction armée comme une forme de lutte politique légitime, normale et naturelle. La lutte armée acquera ainsi la légitimité et le sérieux qui y favoriseront linvestissement politique, idéologique, militaire dun nombre croissant de prolétaires. Si dans ces dernières phrases nous précisons « prolétaire » à chaque fois, cest parce que notre seule préoccupation concerne le prolétariat. Nous nattachons pas la plus minuscule importance aux criailleries hystériques « antiterroristes », aux gémissements et piaillements des gauchistes et des démocrates, cest-à-dire de tous les petits-bourgeois effrayés qui sopposent au développement de la lutte armée révolutionnaire parce que celle-ci ne les laisse plus jouir paisiblement de leurs angoisses existentielles et de leurs débats oiseux. La lutte armée dérange les pleurnicheurs professionnels se complaisant dans un répugnant sado-masochisme contre la «R»épression et craignant de subir également les effets de la répression contre le combat révolutionnaire, ce qui ne nous fait ni chaud ni froid, au contraire, sils subissent les contre-coups des légtimes réactions répressives dautodéfense de la bourgeoisie contre les attaques prolétariennes et révolutionnaires : bon débarras! Contre les gardiens, petits et grands, de la morale bourgeoise qui na été que justification séculaire de lesclavage, du meurtre massif, des pires oppressions et aliénations, nous dirons la vérité, parce quil faut dire ce qui est pour pouvoir le changer, nous le dirons par notre politique, par nos actions : non, tous les êtres humains ne sont pas frères, un homme ne vaut pas un homme, un mort na pas le même poids quun autre mort. Il est juste de répondre à la terreur blanche par la terreur rouge. Et si cela déplaît aux petits-bourgeois ce sera exactement le même prix, car si cette classe prétend obéir aux valeurs morales dune conscience humaniste, idéaliste et figée, les prolétaires, eux, ne se battent pas pour être à laise avec une conscience qui leur serait immanente mais pour leur vie, autant leur quotidien que leur devenir historique, leur vie qui est confisquée, laminée et aliénée. La nuance philosophique est de taille, du côté de la bourgeoisie il y a une conscience achevée, constituée, et il sagit alors de maintenir la réalité objective en conformité avec les valeurs morales de cette conscience, tandis que du côté des prolétaires, il ny a ni morale ni conscience achevées mais cheminement constitutif dune conscience à travers la transformation de la réalité objective, dynamique qui implique le surgissement de valeurs nouvelles. Dun côté il y a donc prétention à limmanence des faits et des valeurs, de lautre côté, du nôtre, il y a soumission consciente à une transcendance, entre autre la transcendance de lHistoire, celle qui parcourt la marche du monde. Différence radicale. Aussi, les partisans communistes nont à faire aucune démagogie, on na pas à se faire « bien voir » et la question de savoir si les actions révolutionnaires rencontrent accord ou désapprobation ne doit se poser que dans une perspective historique, stratégique, et surtout en termes de classe, cest-à-dire uniquement en fonction des couches sociales précises auxquelles sadresse la politique révolutionnaire et non en fonction des « gens » en général (ce terme ne voulant rien dire si ce nest pour les subjectivistes qui opposent « Société » et « État »). La lutte armée combat labdication, le découragement et la passivité, en montrant quil peut y avoir une véritable politique dopposition, une pratique de réelle rupture, que la peur peut changer de camp, que limpunité et la permanence des exploiteurs et oppresseurs nont rien de définitif, que pour les opprimés aussi lattaque est possible. En cela, la lutte armée tend à faire partager ce qui doit vraiment être une nouvelle mentalité : « oser lutter, oser vaincre ! », ce qui correspond à la fonction de conscientisation de la lutte armée en elle-même.
5. La question de lorganisation dans la lutte armée. Cette fonction de propagande armée, accompagnée des autres multiples formes daction politique (en particulier de masse), doit, durant cette phase, trouver des modes dexpression organisationnelle. Cest quil ne suffit pas de mener des actions, même stratégiquement liées entre elles, il faut absolument quelles aient une continuité au sein du prolétariat. Dans cette préoccupation nous rencontrons la question des sympathisants, cest là une notion très confuse qui permet tous les opportunismes et toutes les irresponsabilités tant politiques que militaires (comme nous le montre la situation lamentable de fragilité et disolement, devant la répression, de ceux qui nhésitent pas à sappuyer dans leurs pratiques armées sur des individus apolitiques, des délinquants, des petits-bourgeois paumés, des anarchistes alors quils se prétendent « communistes », etc..., cela ferait rire si les conséquences humaines et idéologiques nen étaient pas si graves). Nous pensons que le cloisonnement des structures doit être absolu, que les partisans doivent maintenir une totale clandestinité de leur appartenance politique, que lorganisation doit être totalement hermétique. Alors, par rapport à cela, quappelle-t-on sympathisants ? Lorsque nous voyons lexemple de certains groupes nous pourrions penser quil y a des « sympathisants de la guérilla », des gens qui ont de la sympathie pour des formes de lutte armée, pour cela nimporte quelle vague idéologie suffit et le rôle des « militants » est alors de fournir aux dits sympathisants la sauce pour enrober le tout, cest-à-dire une phraséologie rituelle, confuse, mécanique, composée de néologismes imbéciles (en France ce sera tout particulièrement en ayant recours à quelques lieux-communs soixante-huitards reformulés dans une incompréhensible salade ditalianismes et de germanismes donnant une allure « sérieuse » à une pensée dune désespérante pauvreté). Le résultat cest que nous voyons dans ces groupes de paumés parfaitement apolitiques, des policiers, des indicateurs, des humanistes en dérive existentielle, participer à des actions armées, faire des hold-ups, soccuper de la logistique, se voir confier des responsabilités et autres incohérences. Nous disons pour notre part quune véritable organisation communiste ne peut pas avoir de sympathisants actifs qui soient des « sympathisants de la lutte armée ». La lutte armée devant correspondre au niveau dengagement le plus élevé, ce dernier ne peut reposer que sur un haut niveau de conscience politique, de fermeté idéologique, de formation théorique et dexpérience militante. Sans cela le fait de vouloir sengager comme combattant ou comme sympathisant actif ne peut révéler quun individu militariste, aventuriste, manipulable, dans le meilleur des cas. Or, les militaristes et les aventuristes nont aucune place à avoir dans une organisation communiste. La question est totalement différente pour les personnes qui ont une réelle insertion populaire, qui sont combatives, qui sont socialement et psychologiquement claires, qui sont proches des idées communistes combattantes par la totalité de leur conscience politique et non sur des aspects partiels. Il vaut mieux sappuyer sur des communistes sincères et solides, même nétant pas encore convaincus de la nécessité de la lutte armée, plutôt que sur des gens approuvant la lutte armée, voulant la soutenir, mais qui ne sont pas des militants communistes. Cest en comprenant cela que lon peut assurer la nécessaire formation de cadres politiques, dirigeants et cadres intermédiaires, de la guérilla et du mouvement de masse. Lexistence de cadres de masse, ne se confondant pas avec la guérilla, est une absolue nécessité dans nimporte quelle situation historique et partout dans le monde, cest la condition incontournable non seulement du développement qualitatif et quantitatif des forces révolutionnaires mais aussi de la simple survie de la guérilla face aux contre-attaques ennemies, en permettant la reconstitution permanente des structures lorsque celles-ci subissent des amputations au cours de laffrontement. La riposte militaire de la bourgeoisie accule les structures initiales à une position défensive totalement improductive et transforme le combat révolutionnaire en une simple lutte entre un groupe de rebelles armés et lÉtat (situation qui ne peut dailleurs guère séterniser à lavantage de la guérilla, étant donné la disproportion des forces en présence), sil nexiste pas au sein des masses populaires des partisans ayant les capacités politiques de poursuivre dans leur milieu le développement quantitatif, de reconstruire en permanence les unités combattantes détruites, de continuer lélaboration et le fonctionnement de la ligne politique. Le rôle de ces cadres de masse est dorganiser et de mener une pratique politique de masse dont les choix et orientations sarticulent à la ligne stratégique de lorganisation communiste combattante. Cela à lintérieur des organisations de masse déjà existantes ou par la création de toutes les multiples formes dorganisation de masse nécessaires à mener les luttes pour les besoins immédiats du prolétariat indépendamment des organisations de collaboration de classe. Cest à travers ce processus que se fait la croissance qualitative et quantitative de la guérilla, puisque cette pratique politique de masse est la seule capable de dégager lavant-garde prolétaire doù doivent provenir les combattants communistes organisés. Cela implique que lorganisation ne doit reculer devant aucun effort pour impulser les moyens politiques et structurels nécessaires à renforcer au sein du peuple laction conscientisante de la lutte armée révolutionnaire, car la conscience de classe se développe au fur et à mesure que le prolétariat sorganise politiquement, or le simple fait que se mènent des actions armées ne suffit évidemment pas à susciter lorganisation. Par conséquent, il faut des instruments daction politique non-armée, des moyens dagitation, de propagande, de popularisation de laction combattante, dorganisation des masses sur des terrains partiels, de formation théorique et politique à la fois des partisans clandestins et des cadres politiques de masse.
6. La construction de lorganisation ne peut se confondre avec une politique de front. Cette action politique dorganisation et de formation des éléments les plus avancés des masses populaires accompagne un autre objectif stratégique propre à la phase de la propagande armée. Lorganisation combattante ne doit pas être une coordination de groupes, ni un front, ni une coordination de fronts, elle doit être homogène, monolithique, précisément structurée et centralisée quant à sa direction. Alors la phase de propagande armée poursuit ce processus de structuration et dunification/centralisation, mais elle doit également élargir cet objectif. La propagande armée étant la première forme dapparition concrète de la politique de lutte armée pour la Révolution communiste, elle est lexpression publique de la ligne politique de lorganisation communiste combattante. Cette pratique doit faire apparaître la justesse de la ligne suivie, en remportant des succès politiques et militaires, en se développant visiblement, en étant moins affectée que dautres par les coups de la défense ennemie. Cette phase doit alors comporter une politique anti-sectaire douverture politique, de dialogue, de confrontation politique et théorique qui doit favoriser les processus dunification entre révolutionnaires. Cependant nous ne partons pas du principe illusoire dune unité « naturelle », de lesprit « nous sommes tous frères malgré nos divergences de détail » qui légitimerait des rapprochements spontanés et des élans de convivialité, non, et ce ne sont certainement pas les formes de lutte qui pourraient constituer un critère de proximité politique. Une fois encore, nous sommes contre les politiques de front quand il sagit de questions stratégiques telles quelles sont posées par la lutte armée révolutionnaire, nous sommes contre le fait de se reconnaître dans des « mouvances » politiques. Les processus dunification entre organisations, courants, groupes, ne peuvent senvisager quà travers un cheminement très progressif, politiquement très prudent, au cours duquel se transforment objectivement les groupes concernés. Ce qui peut unifier nest en aucun cas le rassemblement ni les alliances mais la lutte politique, la confrontation, la lutte entre deux lignes, cest-à-dire le déroulement de la lutte de classe au sein même du mouvement révolutionnaire. Ce qui implique une intense pratique politique et théorique ouverte que les thèses, analyses, orientations (autres que tactiques, bien sûr) soient largement connues, critiquées et débattues par les révolutionnaires. Avec laction politique et idéologique de la lutte armée en soi et laction politique multiforme de lorganisation communiste au sein des masses prolétariennes, cette pratique de lutte politique ouverte au sein du mouvement révolutionnaire (et sur la scène politique en général) est la troisième fonction politique dont dispose lorganisation communiste pour se développer qualitativement et quantitativement.
VERS LA GUERRE CIVILE RÉVOLUTIONNAIRE
1. Durant la phase de la propagande armée se constituent les conditions de la guerre civile révolutionnaire. La phase de propagande armée prépare donc à tous les niveaux la phase qui lui succèdera, mais la fonction anticipatrice la plus apparente est sans doute dûe à laction objective de la lutte armée (même limitée à son stade propagandiste) sur les conditions du rapport de force. Bien quil ne sagisse pas encore dune pratique transformant directement le rapport de force, nous parlons des conditions de celui-ci. Cette fonction est évidente, le seul fait que se manifeste une dissidence armée 6 favorise le processus de militarisation du commandement capitaliste, lexacerbation des contradictions de la démocratie bourgeoise, la militarisation de la politique. Durant cette phase la guérilla ne cherche évidemment pas à vaincre militairement mais son harcèlement, la multiplication des actions, poussent lÉtat bourgeois à se mettre sur la défensive, cest cela quil faut chercher (il faut en arriver à ce quil y ait des sacs de sable devant chaque banque ; que chaque terrier du patronat, de la police, de larmée, de la justice, des politiciens soit obligé de sentourer do barbelés). La dialectique du processus révolutionnaire passe justement par cette réaction. Car actuellement la dictature bourgeoise sétend sur lensemble du social et jusque dans les têtes ; si elle se trouve obligée de se reconcentrer défensivement, en se militarisant encore davantage, alors elle fait apparaître une nouvelle distance subjective entre elle et les masses populaires. Le sentiment de la légitimité de la dictature impérialiste commence à vaciller à partir du moment où les fonctionnements de domination se concentrent et apparaissent en tant que tels au lieu dêtre dilués dans le tout social. Ce que disait dailleurs Marx : « Le progrès révolutionnaire se fait par la création dune contre-révolution puissante et unifiée, par la création dun ennemi qui amènera le parti de linsurrection à atteindre par la lutte la maturité qui fera de lui le véritable parti révolutionnaire. » La militarisation de la lutte des classes, favorisée par la guérilla, entraîne un rétrécissement de la base dappui de lÉtat impérialiste, donc une progressive déstabilïsation institutionnelle jusquà ce que le capitalisme nait plus que la force armée pour seule garantie. Ce processus se comprend sur le plan idéologique et politique dans la mesure où lattaque révolutionnaire armée provoque lexacerbation de certaines contradictions : là où se situent les rapports entre le pouvoir bourgeois et les prolétaires. Le consensus social repose sur le fonctionnement démocratique bourgeois, avec ce que cela nécessite comme libertés formelles dexpression, dassociation, etc., libertés que la bourgeoisie doit absolument restreindre ou abolir si se développe une politique armée. Or, si le système bourgeois perd les fondements démocratiques qui lui permettent de fonctionner, on assiste à un rétrécissement, affaiblissemont et fragilisation, du pouvoir bourgeois sur les plans politique, idéologique et même psychologique. Ce qui correspond également donc à cette fonction de la lutte armée qui est de creuser une profonde ligne de démarcation entre lennemi et nous. Tracer cette ligne de démarcation de façon irréconciliable, cest tendre à placer chacun devant une alternative unique et incontournable : Révolution ou contre-révolution. Et ce sera un progrès politique et idéologique considérable que de briser la confusion ambiante, subvertir le consensus en forçant chaque force politique à choisir son camp. Certains nous critiqueront (ultra-gauche, gauchistes divers, mouvementistes en tout genre et tous ceux qui par leurs statuts sociaux ont quelque chose à perdre dans le genre de ces fameuses « libertés » dont ils sont seuls à retirer un quelconque intérêt) en disant que cette stratégie resserre les rangs des forces politiques traditionnelles autour de lÉtat, cest exact et loin dêtre négatif, cest justement ce que nous cherchons. La question est de savoir si nous voulons la Révolution ou si nous souhaitons voir lÉtat bourgeois être géré par des forces plus « à gauche ». Si nous voulons la Révolution alors il faut que les forces révolutionnaires apparaissent comme la seule opposition réelle, la seule alternative véritablement différente. Et pour cela cest une excellente chose que les forces contre-révolutionnaires de toutes tendances, qui faisaient fonctionner le jeu institutionnel en se posant comme oppositionnelles, montrent leur véritable visage en se regroupant encore plus autour de loligarchie impérialiste, laissant ainsi le champ politique ouvert à lirruption dune opposition réelle autour de la lutte armée révolutionnaire.
2. La phase terminale de la guerre révolutionnaire pour la prise du pouvoir dÉtat. Ainsi, par la radicalisation objective quelle induit, la phase de propagande armée prépare la phase suivante en commençant à poser les termes politico-militaires dun affrontement qui sexprimera alors dans une guerre civile révolutionnaire dont la forme militaire sera la guérilla, étendue à lensemble du territoire considéré et du tissu social. Il sagira dune guerre de guérilla, sauf, sans doute, dans une phase terminale qui verrait se constituer de vastes territoires sous le pouvoir prolétaire (sans doute en premier lieu là où le combat révolutionnaire aura convergé avec une lutte populaire de libération nationale, par exemple en « France » : Euskadi, Bretagne, Corse, pour commencer...), cela dans le contexte compliqué dun processus de longue durée aux multiples implications internationales, militaires et diplomatiques, participant à des rapports de force politico-militaires autorisant alors la viabilité de tels territoires libérés, donc lultérieur écrasement des zones de pouvoir blanc par des offensives de guerre conventionnelle (classique et moderne). La phase de la guérilla étendue, contrairement à celle de la propagande armée, vise à remporter des victoires politico-militaires transformant effectivement le rapport de force. Cela par le harcèlement, la destruction des moyens ennemis, lobligeant à se fixer, à sisoler des populations, à se concentrer en certains endroits ou à disperser ses forces en se rendant vulnérable. Le but est alors de faire sembourber lennemi dans ce processus de militarisation et dautodéfense, en le contraignant à consacrer toujours plus defforts à une sécurité qui normalement ne doit pas reposer sur ses seules forces mais sur lensemble du fonctionnement social et de ses multiples réseaux institutionnels (doù la « doctrine de la sécurité » reprise en Europe de lOuest après lAmérique Latine, sous limpulsion nord-américaine, liant sécurité militaire extérieure, sécurité militaire intérieure, sécurité économique, sécurité politique et civile dans la « paix sociale »). LÉtat impérialiste entre alors en désagrégation pour pouvoir préserver son noyau de pouvoir politico-militaire central, ce qui favorise à son tour le mouvement révolutionnaire puisque le processus de dissolution institutionnelle et dincapacitation des mécanismes de pouvoir politique démocratique bourgeois contribue au développement des situations de pouvoir direct du prolétariat, à travers les organisations de masse, ponctuelles ou permanentes, comités révolutionnaires dentreprises, de quartiers, etc..., structures de lutte de masse qui doivent émerger sous des formes diverses dès la phase de la propagande armée et se consolider avec pour orientation directrice dêtre les organes du pouvoir direct des masses populaires. Sur le plan politico-militaire, la phase dextension de la guérilla a pour objectif datteindre progressivement léquilibre du rapport de force. Le développement des capacités offensives des forces communistes ainsi que son accompagnement dialectique par la désagrégation des fonctions institutionnelles du pouvoir bourgeois parviendront progressivement à ce niveau déquilibre des forces, puis à son basculement au cours dune phase finale qui verra le prolétariat sacheminer vers la totale destruction de lappareil dÉtat bourgeois, la généralisation et la stabilisation du pouvoir prolétaire qui aura commencé son émergence à travers la guerre révolutionnaire de classe. Phase ultime de renversement en notre faveur du rapport de force et qui comportera sans doute une plus grande diversité dos offensives dordre stratégique, de la poursuite/développement de la guérilla à des formes de guerre conventionnelle entre zones à pouvoirs différents, en passant par des prises du pouvoir insurrectionnelles locales ou régionales.
3. En conclusion, la stratégie révolutionnaire armée est la méthode moderne nécessaire à la révolution communiste dans lOccident impérialiste daujourdhui. Ce que nous voulons signifier avant tout dans ces lignes cest quil est temps que la lutte armée napparaisse plus comme une sorte de gadget, dinvention tombée du ciel, de nouvelle forme de lutte un peu désespérée et qui nous semblerait davantage correspondre à on ne sait quel purisme romantique. Ce nest ni une nouveauté qui surgirait coupée de lHistoire, ni la répétition de formes historiques passées donc dépassées ; mais il sagit de la forme moderne dun combat solidement ancré dans la continuité du mouvement de lHistoire. Cest uniquement dans ce cadre quil faut non seulement comprendre la nécessité de la lutte armée mais aussi lorganiser et la maîtriser stratégiquemont comme étant ce qui exprime ici, à la fin du XXe siècle, au cur des métropoles dominantes dun système impérialiste voyant parvenir à son achèvement le mode de production capitaliste, cette continuité historique qui passe par la Commune de 1871 et la Révolution dOctobre. Bien entendu, ces lignes ne prétendent à aucune exhaustivité, il ne sagit que dun schéma très général, dorientations stratégiques. Chaque point doit en être approfondi, détaillé, complété pour en revenir à chaque fois à la stratégie générale. Cest là la tâche fixée par une nécessité, celle de la théorie révolutionnaire. Il ne sagit dailleurs pas de discuter publiquement les questions purement tactiques, cela ne servirait quà linformation de lennemi et non pas aux révolutionnaires qui doivent obéir au double principe de la plus grande rigueur stratégique et de la plus grande souplesse tactique (où limagination de chacun doit se donner le plus libre cours !). Théorie révolutionnaire où nous devons avancer à grands pas et dans tous les domaines (politiques et militaires mais aussi sociaux, économiques, philosophiques, culturels, etc...) parce quil faut se rentrer dans la tête, de façon absolue, intransigeante, répétitive, quaujourdhui comme il y a soixante ans et comme ce sera toujours le cas : « sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire ». Ne pas se fixer pour tâche impérative lélaboration dynamique et permanente de la stratégie révolutionnaire communiste, serait accepter de tourner en rond, accepter le désespoir, accepter la médiocrité des faciles ersatz de bonne conscience dans les petites résistances qui ne mènent à rien. « Combattre » lÉtat, le fascisme, le racisme, les divers symptômes de limpérialisme, contre la répression, contre tout un tas de choses, toujours « contre », peut être ponctuellement utile mais ne relève que dun militantisme existentiel, il nous faut avoir le courage de reconnaître que ce nest que du vent, pisser dans un violon. Que ce soit clair, brutal, si nous abdiquons dans limpuissance des petits aménagements de bonne conscience (même armée !), mieux vaut alors que chacun choisisse son île, les plages du Pacifique ou planter des carottes en Lozère. Ou alors oser, oser triompher, oser prendre lHistoire à bras le corps, la faire nôtre en la forgeant de nos volontés libératrices. Être des bâtisseurs et des conquérants, conscients quun autre monde est à portée de main pour peu quon veuille étendre cette main. Le développement de la civilisation a atteint le point crucial doù elle peut sélancer hors de la préhistoire et le possible est aujourdhui à la mesure de laliénation, de loppression, de ce trop-plein de déshumanisation dune société en pleine putréfaction. Aussi il est de la capacité de notre génération, pour la première fois depuis des millénaires, daccéder au communisme, douvrir en grand les portes de la libération de lindividu et de la satisfaction de tous les besoins humains, cela de notre vivant. Notre génération sera celle qui fera les premiers pas de lhumanité dans lère du communisme. Frédéric Oriach
Notes 1. Citer cet auteur ne signifie pas en adopter l'ensemble des thèses ! Et la métaphore de lusine ne doit pas être rapportée aux simplismes réducteurs des Autonomes sur l« usine sociale », le « prolétaire urbain » et autres « néo »-bouffoneries. 2. Extrême-droite tsariste. 3. Contrairement aux bases théoriques de certains groupes armés allemands et français actuellement présents sur la scène médiatique. 4. Même coordonnées ou alliées au sein dun front ; les formes de lutte ne peuvent constituer le critère délaboration dun front, la question actuelle est celle de lorganisation et celle du Parti, celle du développement du combat révolutionnaire et non celle dun « front », ni national, ni européen. 5. Enjeux réels, cest-à-dire reposant sur lanalyse objective de la réalité objective, en particulier sur lanalyse de la composition de classe, et non sur des facteurs subjectifs tels que lesprit dillégalisme et de révolte ou du degré de répression subi, etc... 6. Ce qui fait que si en France nous critiquons de façon radicale les groupes armés français actuellement publiquement existants, il nen reste pas moins que nous nous félicitons de toute manifestation politique armée se voulant révolutionnaire, tout ce qui peut accroître linsécurité de la démocratie nous est actuellement favorable.
______________________ « Les communistes ne s'abaissent pas à
dissimuler leurs opinions et leurs projets. Ils proclament ouvertement que leurs buts ne
peuvent être atteints que par le renversement violent de tout l'ordre social passé. Que
les classes dirigeantes tremblent à l'idée d'une révolution communiste ! Les
prolétaires n'y ont rien à perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à y gagner.
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » « Il est absolument naturel et
inévitable que l'insurrection prenne une forme plus haute et plus complète, celle d'une
guerre civile prolongée embrassant tout le pays, c'est-à-dire d'une lutte armée entre
deux parties du peuple. Cette guerre ne peut être conçue autrement que comme une série
de grands combats peu nombreux, séparés par des intervalles assez grands, et une masse
de petites escarmouches dans l'intervalle. S'il en est ainsi, et il en est bien ainsi, la
social-démocratie doit absolument se proposer de créer des organisations aussi aptes que
possible à conduire les masses à la fois dans ces grands combats et, si possible, dans
ces petites escarmouches. » « Les flics peuvent mettre les
révolutionnaires en taule, les torturer et les assassiner, mais ils ne peuvent jamais
tuer la révolution et la mémoire des communistes. » [ Page principale ] [ Plan du site ]
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