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concentration bouddhisme et aikido

question 47




La concentration dans le bouddhisme et dans l'aïkido sont-elles comparables ?

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Réponse :

Tout d'abord cette concentration, cette attention exclusive portée sur cette partie du bas ventre est issue d'une technique de yoga très ancienne. Dans certains recueils de yoga on parle même de technique de malaxage de l'estomac en vue d'exercices particuliers. Elle est aussi une illustration particulière de cette dimension corporelle qui est un retour au seul niveau de réalité auquel on peut se référer face au caractère illusoire des formations mentales. Dans la méditation le bas ventre est aussi le lieu de terminaison de l'inspiration profonde et le lieu de départ de l'expiration.

Le bas ventre est en outre une zone particulière du corps qui n'est pas zone émotionnelle. C'est une zone vitale, qui ressent et parfois d'une façon intense (ne dit-on pas, par exemple, avoir la peur au ventre), mais pas d'une façon émotionnelle. Assurer la tranquillité dans le bas ventre c'est prendre la mesure que l'équilibre n'est pas qu'une donnée mentale, même si c'est un acte volitionnel, mais que cette tranquillité repose aussi et presque principalement sur cette zone du corps, véritable centre de gravité du sujet. C'est un petit peu comme si la tranquillité devait s'établir sur les deux pieds, devait reposer sur deux bases, le bas ventre et la pensée *.

Dans la posture de la méditation, c'est aussi la volonté de ramener ce centre du bas ventre au plus près du sol afin de bien montrer (mais aussi développer et cultiver) ce centre sur lequel repose le sujet profond.

Non, il n'y a pas contradiction dans le fait de concentrer son esprit sur un objet. La technique de méditation est divisée en deux modes opérationnels. Le premier est comme vous l'avez écrit vous-même est le samatha, c'est à dire la concentration en vue de parvenir au calme. Le choix d'objet en vue de la concentration dans samatha n'est pas un attachement à l'objet en question. Ce choix d'objet vise seulement à éliminer le tumulte et l'agitation du flot des pensées pour ramener à un niveau de calme et de concentration tel que cet objet lui-même s'estompe. Ce choix d'objet est purement technique, c'est un outil, c'est un support, quand l'objectif est atteint, cet objet n'a plus lieu d'être.

Ces objets ne sont d'ailleurs pas n'importe lesquels, ils sont au nombre de quarante et doivent être choisis en fonction du caractère des inclinations de chacun : les dix éléments (la terre, l'eau, le feu, le vent, la couleur marron, la couleur jaune, la couleur rouge, la couleur blanche, le trou dans un mur, la lumière solaire ou lunaire reflétée sur un mur), les dix états des cadavres (enflé, marron, suintant, coupé en morceaux, mangé par des animaux, éparpillé, réduit en fragments, plein de sang, plein d'asticots, squelette), les dix contemplations (du bouddha, de l'enseignement, du sangha, de sa propre moralité, de sa propre générosité, de la confiance, de la paix du nibbana, de l'inéluctabilité de la mort, des 32 parties du corps, du souffle), les quatre états infinis (metta, karuna, mudita, upekkha), la contemplation de l'aspect non-appétissant de la nourriture, la contemplation des quatre éléments du corps (le solide, le fluide, la température, le mouvement) et les quatre états d'absorption (dans l'espace infini, dans la conscience infinie, dans le vide, dans ce qui est ni perception ni non-perception).

En principe le choix principal opéré et recommandé dans les ouvrages est la concentration sur le souffle (inspiration/expiration), mais il arrive que certains ne parviennent pas à des résultats, c'est pourquoi il existe tous ces objets afin de permettre une véritable adaptation du sujet à la concentration quelle que soit la modalité choisie.

L'autre mode opérationnel de la médiation bouddhique est le vipassana, cette technique laisse les pensées suivre leur cours jusqu'au détachement complet. Le vipassana vise à la compréhension parfaite ou vision claire et profonde.

Votre question sur la concentration dans l'aïkido est intéressante car ces techniques de méditation ne sont pas toutes des techniques statiques. Il y a la méditation en marchant qui montre bien que l'on peut réaliser la concertation tout en faisant autre chose. Bien sur dans le cas de la médiation, I l s'agit surtout de détendre le sujet afin qu'il améliore sa préparation à la méditation assise, mais il est déjà de question de coordination des mouvements au mental et à la concentration. L'idée posée ici, c'est qu'il n'y a pas le corps d'un coté, l'organe mental de l'autre et les actions volitionnelles ailleurs.

Le bouddhisme est pour une large part dans cette démarche particulière de concentration dans l'activité des arts martiaux. Ces formes de combats sont d'ailleurs très anciennes et se rencontrent aussi bien en Inde avec le kalaripayat, qu'en Chine avec le kung-fu, qu'au Japon avec le jiu-jitsu (pour n'en citer que quelques-uns uns). Ces techniques ont été élaborées pour faire face à la nécessité de se défendre durant des périodes de profonde instabilité politiques et de détérioration sociale. Les bonzes bouddhistes s'étant interdits le recours à toutes armes, la provocation de la violence, la réponse à la violence par la violence, ils durent mettre au point des techniques permettant de répondre à une attaque non sollicitée sans blesser l'attaquant.

Au passage, on remarque qu'on est loin de l'image passive et molle que certains voudraient donner de la notion de non violence.

Je trouve votre approche de cette question particulièrement pertinente et je pense que vous devriez certainement cultiver vos acquis en poursuivant votre apprentissage de l'aïkido. Pour ce qui concerne la méditation proprement dite, il existe différents centres où elle est enseignée selon la tradition dont vous vous sentez le plus proche.



J'espère avoir répondu à votre question.


(* = dans cette notion de pensée on inclut l'esprit, les formations mentales, la conscience, sachant que toutes ces activités doivent être ramenées à leur niveau latent).




Texte complet de la question

J'aimerais avoir un renseignement, surtout sur la pratique de la méditation juste...

On enseigne en aïkido que "pour ne faire qu'un avec l'univers" il faut se concentrer sur un centre d'énergie, dans cet art on utilise le centre d'inertie du corps humain, le hara en japonais, c'est à dire le bas de l'abdomen (enseigné notamment par maître Koichi Tohei pour la maîtrise du Ki).Or dans le bouddhisme on parle aussi de "concentration juste" mais aussi de détachement, ce qui peut paraître contradictoire. ; y a t il une erreur dans le fait de focaliser son esprit sur un point, (samatha) quel qu'il soit, pour atteindre la paix ? Est-ce un paradoxe normal ? (attention a la forme, puis passage au sans-forme avec de l'entraînement.) Bref, le "lacher-prise" que recommande bouddha est-il conciliable avec l'union avec un objet réel ou imaginaire ? J'ai un peu pratiqué l'aïkido, et ce type de concentration m'apporte un calme, qui disparaît parfois quand la visualisation et l'attention au hara cesse. Pouvez-vous me dire si je suis quand même dans la bonne voie ? Ou y a-t-il une autre méthode pour pratiquer ?

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