Le bouddhisme, inconciliable avec les problèmes actuels ?
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Réponse :Certains disent que le bouddhisme est une conception dépassée et ne répond pas aux problèmes de la société actuelle ... (Cf. la question)Texte complet de la questionJe vous remercie de votre question. En effet, ces affirmations parcourent le débat. Elles sont généralement formulées par des personnes qui réfutent au bouddhisme le moindre droit de citer dans le débat actuel (si tant est qu'il y ait un débat). Quoi de plus pratique et radical en effet, que d'opposer une fin de non recevoir à la philosophie bouddhiste plutôt que de débattre, comprendre, intégrer et analyser ses conceptions fondamentales. Quoi de plus absurde aussi ?
Au plan purement méthodologique, ces affirmations sont totalement irrecevables. Que leur répondre, dites-vous ? Que répondre à des personnes qui réfutent même la possibilité de débattre ? Rien !
Enfin, il faut savoir que ces affirmations ne sont pas nouvelles. En effet, dès la fin du XIXème siècle tout un ensemble d'auteurs déniaient déjà au bouddhisme la moindre spécificité, la moindre pertinence quant à l'analyse du monde et du sujet. Beaucoup d'auteurs considération le bouddhisme comme une démarche pessimiste, pire comme un nihilisme. Je suis sûr que certains considèrent encore le bouddhisme sous ce point de vue réducteur.
Il suffit également se promener sur le net pour voir toute cette littérature hostile voire franchement anti-bouddhiste et qui n'est rien d'autre qu'une pauvre propagande.
Cette introduction sur le XIXème siècle montre bien que ces personnes ne connaissent vraiment rien. En effet, il n'y a pas de système de pensé qui à plus influencé l'occident européen que la pensée indo-bouddhiste. En effet, Schopenhauer, le professeur de Nietzsche, avait connaissance des grands textes de l'Inde qui ont amplement influencé son ouvrage « Le monde comme volonté et comme représentation ». Ensuite, ce fut tous les philosophes de la phénoménologie et des mathématiciens qui furent largement influencés par ces textes. Enfin, la plupart des grands psychiatres et psychologues ont été influencés par les textes hindouistes ou bouddhistes.
L'influence n'est d'ailleurs par seulement nouvelle, on estime que même les Grecs anciens et d'autres ont pu connaître certaines conceptions indiennes. Dire, que le bouddhisme est dépassé n'est pas vraiment pas très sérieux. Pour revenir à votre question, il serait aussi intéressant de connaître le point de vue des personnes qui parlent. Ont-elles une réflexion sur cette problématique, ont-elles expérimenté le bouddhisme d'une manière ou d'une autre, sont-elles allées à la rencontre du bouddhisme auprès de bouddhistes, dans les pays bouddhistes, auprès de bouddhistes, suivent-elles un courant philosophique, voire plus ? Si le postulat est « le bouddhisme ne répond pas aux questions d'aujourd'hui », sans répondre à cette affirmation, on peut déjà dire qu'on ne voit pas bien ce qui répond aux problèmes d'aujourd'hui. Les grands courants religieux semblent complètement déconnectés des réalités sociales. On a vu depuis ces derniers mois en Europe, l'énoncé officiel de nombreux nouveaux interdits qui s'ajoutent, comme une liste interminable, aux anciens. On a vu encore récemment, tout un folklore totalement en dehors de la réalité la plus simple que l'on puisse imaginer. On voit dans le reste du monde la crise de certains courants de pensée entraînés vers des extrêmes et qui se sont traduits par une certaine radicalisation générale … Est-ce là des réponses aux problèmes d'aujourd'hui ? A l'évidence non.
Quant à la société civile, pour parler de notre propre pays, on a vu combien l'individualisme et l'égocentrisme avaient des conséquences monstrueuses, quand le thermomètre s'élève de quelques degrés au-dessus des moyennes saisonnières. Un rapide tour d'horizon de nos sociétés dites civilisées montre des personnes de plus en plus isolées, solitaires, incapables de construire des relations avec les autres, des couples qui se désunissent pour des raisons souvent futiles, un je-m'enfoutisme généralisé, un attachement de plus en plus prononcé aux intérêts purement catégoriels, etc., etc., etc. … Ainsi, est-ce que nos sociétés, dites évoluées, apportent des réponses aux problèmes ? Là encore, à l'évidence non.
Quant aux courants politiques, on a vu le fossé de plus en plus large que les séparent des citoyens et combien la désaffection pour le politique au sens le plus basique du terme avait conduit, à l'occasion d'une abstention massive, à une quasi-remise en cause des principes de notre démocratie. On peut dire aujourd'hui de nos sociétés, que non seulement elles n'apportent pas de réponses mais qu'elles posent de plus en plus de problèmes (surconsommation, pollutions de toutes natures, environnement dégradés, développement d'une urbanisation à dominante minérale, obésité et surpoids, consommation d'alcool, tabac, cannabis …). A l'échelle planétaire on rencontre des problèmes jamais connus auparavant (épuisement des ressources, déforestation, extinction des espèces animales et végétales, disparition de langues, de cultures et de traditions ...).
La société dite évoluée d'aujourd'hui n'est-elle pas en fait qu'une vaste tromperie qui ne profite à personne ?
L'affirmation est mal posée. Comment le bouddhisme aurait des réponses aux problèmes que posent la société ? Si on pose ce postulat, on devrait dire « qui à des réponses aux problèmes que pose la société ». C'est soit absurde, soit trivial.
Pour autant, nous tenterons de répondre, pour indiquer si le bouddhisme peut intervenir dans la vie de la société.
Il est évident que la société capitaliste d'aujourd'hui, avec un développement concentré sur la satisfaction égotique des besoins individuels est en contradiction totale avec les valeurs du bouddhisme. Faut-il pour autant rejeter le bouddhisme au profit d'un système de valeurs si pauvre, qu'il ne consiste qu'à la satisfaction matérielle, la plus souvent totalement inutile ? Si c'est la question qui est posée, on peut prédire, sans risque de se tromper, que le système capitaliste tel qu'il se développe aujourd'hui, à la fois pose problème (voir les courants alter mondialistes, les courants de l'intervention humanitaire, les courants environnementalistes …) et qu'il est en crise. On ne sait pas dire aujourd'hui comment cette crise sera résolue.
Ceux qui trouvent que le bouddhisme ne répond pas aux problèmes de la société devraient justement regarder combien cette philosophie est proche de tous ces courants. La protection du monde animal, la recherche de meilleurs équilibres dans la société, l'absence de toute ségrégation d'origine ethnique, de niveau social, pour l'acceptation dans le Sangha (en opposition au système des castes), le rejet des choses inutiles, futiles et du gaspillage, l'équité, la réflexion critique sur les problèmes posés, toutes démarches qui sont posées par tous ces courants en pointe et qui correspondent pleinement non seulement à la pensée bouddhique, mais à l'action bouddhique.
Poser cette affirmation (que vous évoquez dans votre question) c'est déjà montrer qu'on n'a rien compris du bouddhisme.
Au-delà, le bouddhisme n'est pas un système critique qui œuvre sur le social, ni sur le politique, ni sur l'économique. C'est sans doute dommage mais, on ne connaît pas de systèmes philosophiques qui aient une telle influence, à l'exception des systèmes dictatoriaux et totalitaires. Les exemples récents et actuels de tels systèmes ont tous conduit à un échec total et à d'impressionnantes régressions.
Le bouddhisme est un travail sur la personne, sur l'individu, sur le sujet. Ce travail est tellement ramené au sujet que certains le considèrent comme individualiste. C'est parce qu'ils ignorent le mécanisme qui est visé et qui consiste à dire que ce vous faites pour vous-même, rejailli forcément sur les autres. Ce que vous faite sur vous-même, profite aussi aux autres.
Que dit le bouddhisme ? Le bouddhisme dit, soyez lucides, regardez les réalités comme elles se présentent, maintenez-vous à distance sans vous faire prendre par le monde, comprenez ce qui est à l'œuvre dans la perception seulement un phénomène de sensation – perception - intellection et pas un moi qui est, qui existe, qui dure et qui perdure, considérez autant vos actes que les conséquences de vos actes et libérez-vous de tout attachement.
Enfin, le problème n'est nullement les problèmes posés par la société, mais les problèmes posés par le sujet. Prétendre que le bouddhisme ne répond pas aux problèmes d'aujourd'hui c'est nier l'analyse sur le sujet (sur soi) et c'est nier que quels que soient les problèmes posés, c'est le sujet qui arbitre.
C'est alors, attendre d'un système de valeurs externe, voire transcendant, les solutions aux problèmes que seul le sujet peut apporter par lui-même. Cela le bouddhisme le réfute totalement.
Je suis certain que si tout un chacun appliquait ne serait-ce qu'un seul de ces conseils, les choses iraient mieux pour lui-même et donc pour les autres.
Si vous souhaitez approfondir ce rapport entre vie moderne et bouddhisme vous pouvez lire les articles d'Ananda GURUGE : Le Bouddhisme dans la vie moderne (http://dhammasukha.free.fr/biblio/bouddhisme.htm).
J'espère avoir répondu à votre question.
J'ai déjà entendu plusieurs personnes dire que le bouddhisme véhicule des idées dépassées et qu'elles ne répondent pas au besoin de la société actuelle, que le bouddhisme est inconciliable avec les problèmes actuels. Qu'en pensez-vous ? Est-ce l'idée erronée qu'ils ont du bouddhisme qui fait qu'ils ont ces pensées ? Que leur répondre ?
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