Kundun (un film de Martin Scorsese)
Il faut sans doute indiquer en préambule, afin de dédouaner M. Scorsese de critiques sur la construction et sur le message de son travail, que ce film a été fait dans des conditions délicates. En effet, pour ménager certains intérêts strictement commerciaux, il apparaît de manière assez évidente que le film a fait l'objet d'un "cadrage " serré et sage. On a parfois le sentiment que beaucoup d'idées et que plusieurs pistes ne sont pas conduites à leur terme.
Martin Scorsese nous invite à un film fait de fragments, de ruptures, de chocs et de blessures. Autant de traits qui caractérisent bien la situation du Tibet jusqu'à aujourd'hui. Inutile de rappeler l'histoire du film, tant la notoriété de la biographie de son héros est grande. C'est au niveau du récit et de l'image que les choses lentement apparaissent.
Dans un développement linéaire et suivant un point de vue strictement historique, le film montre les différents âges du Dalaï Lama au travers de quatre acteurs différents évoquant aussi autant de réincarnations de celui que la tradition tibétaine dit qu'il est la quatorzième réincarnation du bodhisattva Avalokitecvara.
Le film pose la question de cette manière fragmentaire, comme autant de tableaux qui s'effondrent les uns après les autres : Kundun, qui est-ce aujourd'hui ? Car, si le film s'achève sur le passage du poste frontière entre le Tibet et l'Inde en 1959, c'est bien sur le devenir d'un monde dont il ne reste plus rien dans le pays même, qu'est dédié ce véritable hymne au Tibet.
Au-delà des évocations historiques superbement mises en scènes, des costumes et des décors éblouissants, de l'intrigue générale, il y a ces grandes ruptures, ces tableaux picturaux, ces mandala en construction, ces éléments naturels plein champs (la houle sur l'océan, … ) qui sont admirables à la fois d'un point de vue cinématographique mais aussi par leur pertinence avec les contenus de l'enseignement bouddhique.
Christian PRUD'HOMME
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