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VU A LA TV: "AUJOURD'HUI'
NOUS AVONS TOUT PREVU POUR NOS OBSEQUES"
Contribution à l' AG de Jussieu
Pour un journaliste, le chômage serait l'enfer et, par
conséquent, le travail serait une sorte de paradis. Mais
"le chômage n'est pas le contraire du travail, c'est
un moment du travail". Et c'est ce monde qui est un enfer (
depuis quelques mois, de nombreuses chansons et certains titres
de films disent cela). Et c'est la vie qui est un travail: avez-vous
vu dans QUOI on se traîne ? La réduction du temps de
travail serait donc l'abrègement de la vie et c'est bien
ce à quoi s'occupe le capitalisme sénile: abréger
nos souffrances, ces souffrances qu'il nous cause. On achève
bien les chevaux !
Vivre est devenu un travail à risques: la pollution et ses
cancers (alimentation et air empoisonnés), l'automobile et
ses carambolages, l'amour (?) et ses virus, les vacances et ses
catastrophes plus ou moins naturelles (avalanches, inondations,
guerres, prises d'otages. . .). Faut-il réclamer une "prime
de risques" quand on
vient au monde? Créer un syndicat des nouveaux-nés
(Sud-Bébé, CGT 1er âge...) ? S'inscrire à
Europe-Assistance en naissant, pour se faire rapatrier illico et
gratuitement ?
Il y a 30 ans, la trahison suprême était de "s'intégrer"
(l'intégration, à quoi ? disaient les situationnistes).
Aujourd'hui le malheur suprême est d'être exclu. L'exclusion,
de quoi ? d'une société décomposée,
d'un monde en voie de désintégration complète,
où le fil de la vie a été perdu. Quel travail
voulez-vous ?
Entraîneur de basket (un sport de patronage inventé
par des curés pour "tenir" lajeunesse), vigile,
surveillant de magasin, inspecteur RATP; représentant en
double vitrage, pour la télé par câble, pour
les téléphones mobiles; escroc par téléphone
(vendeur de multipropriété, de pseudo-meubles. . .)
; néo-artisan, dans une chaîne (multi)nationale (restauration
plus ou moins rapide, cordonnerie, coiffure, etc.). "On vous
fera aimer l'an 2000", menacent-ils. "Nous avons de l'avenir",
le GAN nous l'assure !
Certains voudraient faire croire que les chômeurs sont une
véritable catégorie sociale et pourraient donc avoir
des revendications catégorielles au même titre que
les cheminots, les enseignants... avec, pourquoi pas, un syndicat
pour les représenter. En fait, les chômeurs sont la
vérité de ce monde où l'homme est en trop :
d'un point de vue économique, l'homme est une aberration,
un archaïsme qui coûte cher, un luxe que l'économie
ne peut s'offrir. Les chômeurs savent qu'il n'y a rien à
espérer de ce monde qui les nie. Mais existe-t-il y un autre
monde ? y a-t-illa possibilité d'une société
où les hommes ne seraient pas de vulgaires surplus pro-américains,
juste bons à solder ? (Surplus américains: "stocks
dont la guerre elle-même n'avait plus voulu".)
De la civilisation, le capitalisme n'en connaît que les maux
(baptisés abusivement "maux de civilisation") :
mal de dos, anorexie mentale, obésité, dépression,
etc. Le capitalisme, en dé-naturant le monde, cherche à
atteindre l'âme humaine, à l'extirper et à la
détruire. Les hommes, ainsi transformés en zombies,
sont livrés, pieds et poings liés, à son bon
vouloir en général et à la marchandise en particulier.
C'est pourquoi la marchandise ultime va être l'âme,
puisque sa rareté en fera le prix.
Depuis quelque temps, les hommes-sandwichs sont de retour. "Homme-sandwich",
un joli nom! une jolie situation !
I'Nous avons tenu à régler dès maintenant
la question de nos obsèques.
Pessimisme ?
Non: PRÉVOYANCE Il
P.S. : Le travail qui contient tous les autres: faire le Mickey
à Disneyland. Comme le proclamait une publicité à
l'occasion du recrutement de personnel pour Eurodisney: "Pour
nous, tous les métiers sont des métiers du Spectacle".
Tous les métiers actuels sont l'apologie de la société
américaine, la société décomposée;
apologie d'un crime contre l'humanité.
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