Yi King

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On ne peut pas définir un modèle «absolu», tel que le modèle sénaire (voir  présentation), sensé pouvoir rendre compte de la marche du Monde dans son intégralité, comme dans ses détails sans éprouver quelque curiosité pour les idéogrammes du Yi king, qui depuis 3000 ans guident la réflexion des chinois dans leur appréhension du Monde.

Cette page développe un rapprochement entre le modèle sénaire (la structure absolue de Raymond Abellio) et les hexagrammes, le résultat est assez étonnant !

Sommaire

1/ Introduction

2/ Figures à 2 traits

3/ Trigrammes

4/ Hexagrammes

5/ Conclusion

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1/ Introduction

Notre approche, si l’on y réfléchi bien est un peu marginal par rapport à la pensée «occidentale». En effet, il n’y est plus question d’expliquer, par des lois naturelles, le comportement des organisations et plus généralement des systèmes structurés (jusqu’à et y compris l’Homme), mais très prosaïquement d’en décrire le comportement le plus économiquement possible, par des représentations simples.

Démarche qui amène à rechercher les invariants dans les structures observées, pour précisément les monter en «systèmes».

Cette démarche, nous nous sommes efforcé d'en faire une approche scientifique, en proposant des résultats vérifiables, concernant pour l’essentiel la variation des fréquences de contacts entre dipôles en fonction de leur position hiérarchique dans le système étudié (voir thermodynamique des systèmes).

Des protocoles expérimentaux pourraient être définis, pour peu - et c’est là que le bât blesse - que ce type d’investigations entre dans le domaine d’intérêt d’un groupe de chercheurs. Voir à ce sujet notre analyse de la théorie de Khun concernant la structure des révolutions scientifiques.

Cependant, si l’on revient sur notre paradigme de départ (voir l'introduction), qui est de considérer notre doute (le doute cartésien) non pas comme un défaut duquel il faut s’affranchir (nécessitant, de ce fait un recours à la métaphysique) mais au contraire comme l’élément le plus stable de notre démarche et la base même de toute notre réflexion, nous nous sommes singulièrement éloigné d’une approche «occidentale» du Monde qui viserait à l’expliquer, à en rechercher la vérité ultime.

D’emblée, par ce doute introduit, propre à l’Observateur, ce dernier ne peut donc être évacué de sa compréhension du Monde, le couple (Observateur / Monde) forme un duo irréductible.

Si donc, nous cherchons à respecter les critères de recevabilité scientifique – au sens de la falsification de Karl Popper par exemple – notre point de vu reste néanmoins en marge de l’esprit scientifique dominant au sens où l’on n’explicite pas les ressorts cachés des choses, au sens où l’on ne recherche pas la vérité des choses, mais plutôt une représentation économique qui puisse servir de support à l’action.

En changeant de paradigme, nous nous sommes déjà, sans y prendre garde, rapprochés de l’attitude chinoise, qui ne recherche pas tant la «vérité du Monde», qu’à y adapter son comportement.

Or il se trouve qu’il n’est pas très difficile de passer d’un modèle Sénaire aux représentations du Yi King, comme nous allons le voir.

Nous sommes partis de la constatation très simple qui est la nécessité – pour parler d’une chose en particulier notée «s» - de créer au minimum une partition entre cette chose et le Tout noté «S».

La première de toutes ses partitions, étant celle qui différencie le Tout (S) de l’Observateur (A) et rend ainsi possible le discours de ce dernier.

Le Yi King fait une autre partition liminaire : le «Grand Commentaire» du Yi King, attribué à Confucius commence par :

«Le Ciel est élevé, la Terre est en bas

Ainsi sont déterminés l’Initiateur et le Réceptif

A travers cette disposition de bas en haut

Le plus et le moins de valeur sont en place»

Les chinois posent comme fondamentale la dualité entre le Ciel (qui est élevé) et la Terre (qui est en bas), quand nous avons pris comme élémentaire la partition entre le Tout (S) et la Partie (s).

Sans reprendre la lecture qu’en fait François Jullien, nous pouvons remarquer tout d’abord que la dualité initiale est moins une dualité d'objets (Ciel/Terre) que de valeurs et s'attache surtout à leur relations (l'un est élevé quand l'autre est en bas). le Grand Commentaire porte même un jugement moral sur la qualité de cette relation.

Nous nous attachons plutôt en occident à des «objets», soit dans leur globalité A & S, soit dans leurs manifestations particulières : s & a. La relation d'inclusion de la Partie (s & a) au Tout (S & A) connote certainement une relation de dépendance, mais il n'y a pas  au-delà de cette constatation "de facto", de jugement moral associé.

Le Yi King est basé sur une opposition entre le yang (le Ciel, le mâle, le ferme etc.…) et le yin (La Terre, le féminin, le mou, …) et sur le perpétuel mouvement qui fait passer d’un état à l’autre. Il s’agit non plus d’une opposition entre objets, entre le Tout et la Partie, mais de l’évolution du lien qui les uni.

Les deux discours sont en fait dual: l’un se focalisant sur les objets, quand l’autre appréhende leurs mutations (ce que nous avons appelé «transactions» au sein du modèle sénaire).

Notre langage, reflet de notre culture porte en lui ses biais, dont il faut avoir conscience. La relecture de notre modèle sénaire à la lumière d’une autre culture est en cela salutaire.

Et, précisément, cette relecture met en évidence le fait que notre modèle sénaire porte en lui même les deux types d’approche :

 En effet, le modèle sénaire:

nomme les pôles en rapport,

définit les transactions dans lesquelles ces pôles sont effectivement engagés,

porte la trace des transactions potentielles qu’ils pourraient entretenir.

Pour faire court, on pourrait dire que le premier point est une approche «occidentale» et même plus particulièrement limitée au stade de la «taxinomie» selon les termes de Foucault (voir les Mots et les Choses), le premier et le second forment une approche structuraliste, le second et le troisième forment une approche plus proche du Yi King ; car les idéogrammes, comme nous le verrons, définissent non seulement une situation particulière, mais surtout, incèrent celle-ci dans un champ de potentialités.

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2/ Modèle Sénaire et figures à 2 traits

Pour s’affranchir de la représentation graphique de notre modèle, on peut caractériser chaque transaction unissant les 4 pôles A, S, a, s. par l’ensemble des 2 relations au sein des dipôles qui la compose : A ßà a et S ßà s

Dans chacun des 2 dipôles, l’initiative revient successivement à chacun des pôles.

Lorsque l’on a : A à a ouS à s, il y a une action volontaire de A (respectivement S) qui projette l’état particulier a (respectivement s).

A l’inverse, lorsque a (versus s) est activé de l’extérieur par le dipôle antagoniste, il réagit sur l’ensemble de A (versus S).

Autrement dit : A à a et S à s traduisent un état actif, tandis que a à A et s à S traduisent un état passif.

A à a et S à s sont yang    soit : ___

a à A et s à S sont yin        soit : _  _

Pour passer de la représentation graphique d’un modèle sénaire à sa représentation par deux traits, il nous faut encore convenir de la position respective des dipôles l’un sur l’autre.

Il nous faut pour ce faire assimiler les deux éléments de notre partition initiale aux deux termes chinois de «Ciel» et de «Terre», en conservant surtout les rapports qui les unissent et d’où découle tout le reste. 

Le statut initial de l’ «Acteur» A au sein du «Système» S est dual: en tant qu’élément physique, A Ì S; mais au plan du discours, A en est l’auteur et S l’objet. A ce niveau, A est premier: S Ì A (nous discutons longuement de cette dualité en introduction).

Toutefois S -le Monde pris dans son ensemble- reste l’initiateur, il détermine complètement A, d’autant plus que nous avons privilégié, comme attitude liminaire le doute, qui laisse initialement A en attente.

En conséquence, pour respecter le sens de lecteur des hexagrammes qui se lisent toujours du bas vers le haut, il nous faut placer Sßàs au dessus de Aßàa.

Avec ces conventions, les 4 transactions possibles au sein  d'un modèle sénaire sont représentés par les 4 idéogrammes suivants :

Sàs

Aàa

___

___

 

“vieux yang”

sàS

aàA

_  _

_  _

 

“vieux yin”

sàS

Aàa

_  _

___

 

“jeune yang”

Sàs

aàA

___

_  _

 

jeune yin”

Nous devons maintenant vérifier, par l’étude de ces 4 cas, si un tel rapprochement enrichi notre modèle, ou s’il reste un jeu gratuit.

2.1/ Jeune yang

 

Dans cette situation l’acteur est à l’origine de l’action, avec un effet retour de la part du système. C’est ce type de transaction que nous avons privilégié dans notre modèle.

Prenons l'exemple suivant: « Je vois un arbre»

A = Je

a = Œil

S = Monde

s = Arbre

Il y a une initiative de A, qui active son oeil pour voir un arbre. Le reste du Monde est passif et reste ouvert aux initiatives de A (la transaction se boucle de S sur A, sans se focaliser sur un état particulier de A).

Dans cette figure, il est à noter que les traits yang et yin sont à leur place (lorsque l'on note la position des traits de bas en haut, les positions impaires sont dans places par essence yang, les positions paires sont par essence yin).

2.2/ Jeune yin

 

Dans cette situation le Système est l’initiateur, il surprend pour ainsi dire l’Acteur qui réagit au stimuli de son environnement.

Considérons l'exemple suivant: « une souche arbre me fait trébucher, j’avance le pied pour parer la chute. »

S = le Monde

s = la souche d’arbre

A = Je

a = le pied

Nous voyons que dans ce cas, l'initiative vient du Système, le retour de A se fera sur S tant qu'il n'aura pas retrouvé son équilibre. L'acteur pare au plus pressé, agit par réflexe, sans visée précise sur un état particulier de S, qu'il n'a pas le temps d'analyser, mais en se conformant à des sénarii pré-acquis (des arcs réflexes).

Ce n'est qu'une fois l'équilibre retrouvé que A pourra agir de nouveau et inverser la transaction.

Les deux cas précédents forment notre lot quotidien, l’Acteur peut avoir l’initiative et agir, ou être surpris par son environnement et réagir, mais sans qu’il y ait de part et d’autre d’interruption dans l'enchaînement des transactions : S et A sont accordés; il y a toujours au moins un état de l’un en réponse à l'état de l'autre.

Dans cette figure-ci, les 2 traits yin et yang ne sont pas dans leur position la plus stable (1er trait yang et 2ème trait yin) et effectivement, du point de vue de A, de celui qui fait le modèle, la situation est précaire, puisqu'il reste en état d'être "surpris".

Le basculement entre les deux situations (jeune yin et jeune yang) correspond à un basculement entre les deux trait yin et yang de la figure, ceux-ci apparaissent comme complémentaires.

La caractérisation des 2 traits (le premier d'"essence" yang, le second d'"essence" yin), conduit à privilégier la situation où l’Acteur a l’initiative, ce qui correspond effectivement à notre perspective occidentale d'appréhender les choses (l’Homme est la mesure de toute chose).

Au jeu d’échec on dit que l’initiative appartient à celui qui «a le trait», cette expression prend ici un relief tout particulier.

Les deux cas suivants sont plus éloignés de notre expérience quotidienne, et correspondent à des cas plus «limite».

2.3/ Vieux yang

 

Dans ce cas, chacun des deux antagonistes agit sur l’autre dans sa globalité, sans se préoccuper de l’état dans lequel il se trouve. Chacun ignore ou impose sa volonté à l’autre dans son essence propre. Il y a expression simultanée de la volonté des deux.

Il s’agit d’une situation de jeu ou de guerre où chacun «surprend» l’autre, sans toutefois arriver à la rupture, puisqu’il y a toujours une réponse : le cycle des transactions n’est pas interrompu.

Les deux cas précédents pouvaient être assimilés à des situations de jeu d’échec, où la situation était lisible par chacun des joueurs. Ici, les attaques sont globales, les intentions cachées, les jeux par essence «non coopératifs».

C’est par exemple un marin A qui tente de suivre sa route dans la tempête S.

S impose sa puissance qui s’applique sur A, son état s s'impose à A sans possibilité pour se dernier d'influer sur le cours des choses.

A pourra tenter différentes actions a: se mettre à la cap ou réduire sa voile, ou changer de cap, ou se délester, le rendant ainsi plus ou moins sensible, soit à la houle, soit au vent, soit au courant et c…, mais en gardant toujours comme objectif d'avancer en exprimant une volonté à la démesure des éléments.

Dans un état de guerre entre S et A ; chacun cherche à dominer l’autre par des moyens imprévisibles par l’autre.

La situation est puissante et conflictuelle, mais elle demande visiblement à ce que l'un des traits s'accorde à l'autre en prenant une position yin, le trait yang pouvant alors s'exprimer plus efficacement.

2.4/ Vieux yin

 

 

Ce dernier cas est l’exact contraire du précédent: là où chacun se concentrait sur sa seule volonté, ignorant l’état de son antagoniste ou cherchant même à le surprendre, il y a empathie entre les deux protagonistes: S  s’accorde à a, comme A à s.

La relation peut s’approfondir, ou durer, car nous sommes dans une phase contemplative.

En reprenant, par exemple, une situation impliquant un Acteur face à un arbre:

S = le Monde

s = l’arbre

A = Je

a = Œil

Cela donne en partant de S: «Un arbre se donne à voir»  

Ou bien, en partant de A :«Je contemple un arbre»

Peut-être, au sens psychanalytique, le point de contact (,s) peut-il être vu comme le lieu de la jouissance de A.

Au sens de la théorie des jeux, nous sommes dans un cas de coopération parfaite: chacun des joueur mise en tenant compte du meilleur résultat pour l’ensemble des deux.

Par apprentissage, en évoluant successivement entre les deux premiers cas (jeune yin et jeune yang), deux joueurs peuvent, par essais et erreurs, apprendre à se connaître et arriver à la même solution de coopération, mais dans le cas présent, leur empathie mutuelle les font arriver d’emblée à la solution parfaite.

Mais cette empathie peu vite devenir stagnation, car il n’y a pas d’évolution, puisque les états s et a, faute de volonté de part ou d’autre ne changent pas.

2.5 En résumé

Nous avons présenté les 4 cas de notre modèle selon un ordre, pourrait-on dire «occidental», nous préoccupant plus de l’action (recherchée) ou de la réaction (subie), avant d’envisager les cas plus extrêmes de la force pure (perçue comme un affrontement à éviter) ou l’empathie pure (proche de la stagnation).

Pour les chinois, au contraire (et ceci sera encore plus vrai, concernant les commentaires sur les hexagrammes) les deux cas extrêmes (vieux yin et vieux yang) délimitent le champ du réel. Les autres cas (jeune yin et jeune yang) ne font que s’inscrire dans cet espace.

Pour résumer l’analyse que nous avons fait, il y a convergence entre les commentaires que l’on peut tirer des 4 cas du modèle sénaire et les 4 figures chinoises à 2 traits, en particulier sur les points suivants :

La position inférieure est par «essence» yang, la position supérieure par «essence» yin,

Les 2 traits sont en harmonie lorsqu’ils sont complémentaires (jeune yang ou jeune yin)

Vieux yang est une position instable qui a besoin du yin pour se stabiliser (s’incarner),

Dans Vieux yin, une accumulation de yin conduit à la sclérose et appelle le yang pour évoluer.

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3/ Les trigrammes

Par rapport aux figures à 2 traits précédents, où seuls étaient figurés le «Ciel» et la «Terre» ; l’ «Homme» vient s’intercaler entre ceux-ci pour occuper la place centrale dans les trigrammes.

Or, cette conception à 3 niveaux n’est pas proprement chinoise, mais d’une portée également indo-européenne.

Nous retrouvons toujours peu ou prou cette structure ternaire: dans nos mythes (voir la structure des mythes indo-européens de Dumézil…) comme dans nos structures sociales. En Inde, d’abord avec une société séparée en 3 castes (Sage / Guerrier / Paysan) comme en France sous l’ancien régime (Clergé / Noblesse / Tiers Etat).

C’est pourquoi, il ne faut pas s’étonner d’avoir, comme nous l’avons déjà fait dans l’étude des organisations ou l’approche lacanienne (L'Imaginaire / le Symbolique / l'Inconscient), privilégié les structures à 3 niveaux.

Il est en effet toujours utile (et c’est souvent suffisant) de privilégier le niveau de l’Acteur, le niveau +1 qui le conditionne et le niveau –1 sur lequel il exerce son influence. L’effet du reste de la structure, bien souvent se dilue très vite pour le niveau étudié et peut être résumé dans les pôles extrêmes du modèle, pôles qui conservent au modèle son ouverture (voir également en introduction les notes sur les limites de la connaissance).

Mais plus encore : nous avons définit un axe négentropique du bas vers le haut (voir l'analyse diachronique). L’action prenant du sens en se synthétisant vers le haut, tandis qu’elle s’incarne et se diversifie vers le bas.

Cette démarche colle très précisément à la démarche chinoise qui considère que l’énergie yang doit circuler de haut en bas pour se développer en mode d’ampleur, pour «s’incarner», tandis que l’énergie yin doit s’élever, pour prendre du sens et s’unifier.  

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4/ Les hexagrammes

Les hexagrammes sont vu principalement comme un dédoublement des trigrammes précédents.

De façon assez évidente, on peut donc comparer les hexagrammes à un modèle à 3 niveaux où chaque niveau du modèle est représenté par une figure à 2 traits.

En positionnant le niveau de l’acteur au milieu, le niveau +1 au dessus et le niveau -1 au dessous, nous respectons la même disposition que celle prise pour construire les figures à 2 traits (le niveau de S ßà s au dessus de A ßà a).

Il nous faut maintenant vérifier qu’ainsi transposé, notre modèle sénaire respecte les sympathies qui s’établissent entre les différents traits d’un hexagramme, en fonction de leur position relative.

Pour cette analyse, je me baserai sur la lecture philosophique que fait François Jullien des hexagrammes.

Je ferai l’exercice sur le modèle d’une organisation à 3 niveaux. L’exemple sera peut être un peu trivial, la structure de la personnalité certainement d’un intérêt plus élevé, mais il se trouve que j’ai puisé ma propre expérience au sein des entreprises.

Nous centrons notre analyse des entreprises au niveau de leur direction générale (qui occupera donc le niveau central), devant répondre de ses actes aux actionnaires (niveau supérieur) et ayant à gérer des fonctions de production (au sens large de création de valeur), au niveau inférieur. Nous retrouvons le modèle déjà présenté (voir : modélisation de la bureaucratie).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La transcription complète est donc la suivante :

Marché  ßà Actionnaires 6ème trait

_  _

 

Conseil d’administration ßà Direction Générale 5ème trait

___

 

Direction Générale ßà Contrôle 4ème trait

_  _

 

Direction Opérationnelle ßà Production 3ème trait

___

 

Hiérarchie directe (autorité) ßà Hiérarchie directe (besoins de résultats) 2ème trait

_  _

 

Ouvriers ßà Employés 1er trait

___

 

4.1 Les traits 1 & 6

Dans ce schéma, l’ouverture supérieure peut se limiter au seul Marché (dans la mesure où la société est purement libérale, le Marché exprime les fluctuations du Monde. Ce n’est pas ici un jugement de valeurs, ou une prise de positions, mais une simple hypothèse: nous nous situons dans un cadre où l’horizon de la direction se limite au Marché). C’est, dans le présent schéma  l'ouverture vers le «Ciel» de l’hexagramme.

L’ouverture inférieure est, comme déjà présenté le côté «employé» du personnel de l’Entreprise, qui regroupe les fonctions non productives de celui-ci et pour lesquelles, en définitif, il se trouve dans l’obligation de travailler. C’est l'ouverture vers la «Terre» de l’hexagramme.

4.2 Trigrammes "intérieur" et "extérieur"

Les deux premières positions au bas de la figure correspondent au niveau de la «Terre», il s’agit dans ce cas de figure du niveau du «Travail» les deux suivantes au niveau de l’ «Homme» correspondent au niveau où s’articule au jour le jour (niveau tactique), la vie de «l’Entreprise » et les deux suivantes au niveau du «Ciel» représentent les jeux du «Capital».

En même temps qu’il répond à cette tripartition des rôles, l’hexagramme se présente lui-même comme une dualité: les trois positions du bas composent le trigramme inférieur (intérieur) qui sert de base à la figure et constituent son «être déterminé», les 3 positions du haut composent le trigramme supérieur (extérieur) qui adapte la figure à l’ «évolution» et permet son «fonctionnement».

Un tel regroupement correspond, pour l’Entreprise à distinguer les fonctions du «siège» des fonctions de «production», cette distinction correspond souvent à une réalité physique : le siège, de par son besoin d'ouverture, de représentation et de contacts, est souvent situé dans un lieu plus visible que les ateliers de production, situés bien souvent en fonction de la disponibilité de la main d’œuvre (voir les problèmes liés à la délocalisation).

4.3 Complémentarité des traits adjacents

Nous avons déjà vérifié la complémentarité des 2 traits dans la figure à 2 traits, c'est à dire: complémentarité des traits 1 & 2, 3 & 4, 5 & 6.

Si nous considérons maintenant les deux trigrammes précédents, on peut également considérer que les traits 2 & 3 ainsi que les traits 4 & 5 doivent être complémentaires. En effet, si nous revenons à notre conception du fonctionnement d'un système, lorsqu'il y a interruption des transactions à un niveau (une "catastrophe"), il y a activation du niveau supérieur, et cette action est initié par le pôle qui transmet l'information. Par exemple:

S'il y a problème au niveau 2, l'information remonte, soit par les contrôleurs (rapports d'audit) vers les administrateurs, soit au niveau direction, en remontant d'un échelon hérarchique. La résolution de cette catastrophe implique des transactions entre les 4ème et 5ème traits, qui peuvent être traités comme s'articulant dans un modèle sénaire et donc ces deux traits offrent le même type de complémentarité que les traits 2 & 3.

De même, lorsqu'un problème survient au niveau 1 et ne peut s'y trouver résolu, la direction opérationnelle en est alertée au niveau 2. Ici aussi, nous pouvons constituer les traits 2 & 3 en modèle sénaire pour rendre compte de ce type de transaction (traitement d'une "catastrophe" de niveau 1); les traits 2 & 3 doivent donc être complémentaires.

Au total, nous retrouvons, dans le modèle sénaire à 3 niveaux, la complémentarité des traits adjacents des hexagrammes.

4.4 Les traits 2 & 5

Au sein de chacun des 2 trigrammes "intérieur" et "extérieur", la position centrale des 2ème et 5ème trait est considérée comme centrale et se répondant l’une l’autre. Il est à noter que le 5ème trait est par «essence» yang, quand le 2ème est yin.

Or, du point de vue de l’Entreprise, il est certain que son avenir se décide entre le Conseil d’Administration et la Direction Générale, tandis que la marche au jour le jour dépend de la hiérarchie directe, les 3ème et 4ème niveaux étant des courroies de transmission entre les deux, quant aux traits 1 & 6 ils sont plutôt considérés, à l'intérieur de l'Entreprise comme des facteurs extérieurs qu'il faut gérer ou auxquels il faut se plier...

4.5 Trigrammes "nucléaires"

Un tel regroupement par trois des positions ne concerne pas seulement le haut et le bas de la figure : il s’étend aussi aux trigrammes «nucléaires» qui le composent et peuvent s’y lire en filigrane (soit le 2ème, 3ème et 4ème traits, soit les 3ème, 4ème et 5ème traits), groupements qui tous deux gardent un sens.

On vient de voir à propos des traits 3 et 5 leur rôle en cas de "catastrophe an niveau 2. On peut donc considérer chaque trigramme comme représentant en fait 2 modèles sénaires imbriquées:

Les traits 2, 3, 4 représentent 2 sénaires, l'une formée de 2 & 3, l'autre de 3 & 4

Les traits 3, 4, 5 représentent 2 sénaires, l'une formée de 3 & 4, l'autre de 4 & 5

Le Trigramme 2, 3, 4 est centré sur les problèmes de production et plus particulièrement des changements, de leur évolution à moyen terme (implication du 3ème trait en cas de "catastrophe" de premier niveau au sens de notre analyse; ce dernier est également l'aboutissement du trigramme intérieur au sens du Yi King, son "Ciel").

Le Trigramme 3, 4, 5 est centré sur la politique de développement de l'Entreprise, de son évolution contrôlable (sans retournement du marché, sans intervention du 6ème trait), mais d'un niveau supérieur à la direction tactique du niveau 2 (implication du 4ème trait qui sert d'articulation entre les niveaux tactique et stratégique de l'Entreprise au sens de notre analyse, et qui est également le soubassement du trigramme extérieur, sa "Terre" au sens du Yi King.

4.6 Les traits 3 & 4

Bien entendu les traits 3 & 4 qui forment le niveau intermédiaire (la place de l'Homme dans la structure) sont au centre de la représentation, c'est autour d'eux qu'est construit le modèle (et l'hexagramme)

Ils sont complémentaires, car agissant liés dans le même cycle de transactions au sein d'une même sénaire centrale, se qui rend en même temps complémentaires les deux trigrammes  "nucléaires" desquels ils sont le centre.

Dans une autre perspective, le trait 3 est le "Ciel", l'aboutissement du trigramme inférieur, tandis que le trait 4 est la "Terre", le sous-bassement du trigramme supérieur ce qui ce comprend très bien. Ils sont au contact quotidien l'un et l'autre, mais dans une perspective tout à fait différente, pour ne pas dire un monde différent: les sous-officiers sont au sommet de leurs espérances, tandis qu'un lieutenant peut aspirer (un aspirant...) à devenir général.

D'un autre point de vue, ces deux traits ne sont que les courroies de transmission: l'histoire ne retiendra de tous ces mouvements que la masse des troupes (traits 2) et la stratégie des chefs (trait 5).

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5/ Conclusion

De tout ce qui précède, nous pouvons conclure qu’il y a une grande compatibilité entre notre approche systémique et les figures du Yi King et qu'avec cet éclairage notre système sénaire y gagne de la lisibilité et du sens.

Ce qui nous rend accessible un immense trésor de sagesse pour commenter le fonctionnement du modèle sénaire.

Cet apport n’est pas sans réciprocité: notre approche nos amène à prendre en compte la dimension temporelle, ce qui n’est pas présent dans les hexagrammes. En effet, dans un modèle sénaire à 3 niveaux, le rythme de chaque niveau est plus lent que le celui du niveau inférieur.

Nous avons même calculé l'étagement des rythmes de transactions entre niveaux (voir la thermodynamique des systèmes). Selon nos calculs, si les rythmes du 1er et du 3ème  niveau varient dans un rapport de 1 à 9, alors le rapport optimum des rythmes entre le 1er et 2ème niveau est de 1 à 3).

En supposant une corrélation entre le nombre de transactions à un niveau et la probabilité qu'il y ait une rupture dans leur flux (une catastrophe, avec intervention du niveau supérieur), cela induit que les transitions au sein d'un hexagramme n’ont pas toutes la même probabilité.

Le programme de tirage ci-joint permet de ce faire une idée du rythme des transformations d'un hexagramme qui en résulterait (on a pris l'hypothèse où cette corrélation serait parfaite): Tirage.

Mais ceci est une discussion qui nous amènerait beaucoup plus loin que cette rapide introduction. 

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note 1:
Pour la lecture philosophique du Yi King, voir «Figures de l’immanence» de François Jullien. Editions Grasset 1993. Nous nous servirons de cette approche dans la présente page.
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note 2
Rappelons ici que nous nous sommes approprié le modèle sénaire de Raymond Abellio, mais que nous ne reprenons pas sa quête transcendantale.

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note 3

Pour en revenir à cette remarque de Diderot dans le "discours de d'Alambert" (déjà évoquée en introduction):

"Tenez, mon ami, si vous y pensez bien, vous trouverez qu'en tout, notre véritable sentiment n'est pas celui dans lequel nous n'avons jamais vacillé, mais celui auquel nous sommes le plus souvent revenus."

On peut qualifier cette attitude de purement yin.

Celui qui doute et reste attentif à son doute, est à l’écoute la plus ouverte du Monde -attitude d’attente avant l’action- prêt à suivre les mouvements du Monde qui, dans cette relation, représente le pôle yang.

Pour le taoïste, il conviendrait donc que cette attitude de doute, cette absence de préjugé et cette ouverture au Monde soit maximale, pour que l’action à entreprendre suive ensuite la voie de moindre résistance et produise son maximum d’effet. Cette ouverture, n’est donc pas purement passive, elle préfigure l’action, le balancement éternel du yin et du yang, comme lorsque l’on arme un pistolet en reculant le percuteur de l’amorce.

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note 4

Pour une étude plus complète des transactions au sein d'une sénaire, se reporter à l'analyse diachronique.

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note 5

L'attitude de Diderot représente pour nous la sagesse et ce mot de sagesse mérite lui aussi que l'on s'y attarde.

Dans la tradition talmudique (que l'on me pardonne de ne pas donner ici les noms en hébreu) le mot de "sagesse", une fois casser en deux (et déjà, d'avoir à partager comme action liminaire nous renvoi à l'attitude chinoise), ce mot donc s'analyse comme "force" du "questionnement".

Accoler au "questionnement", que nous avons qualifié de yin, la notion de "force", purement yang, nous indique que les chemins de la sagesse sont nombreux et se recoupent plus que l'on ne saurait croire...

Et bien entendu, plus ils sont nombreux, plus la position atteinte est stable (voir nos développements sur le sujet).

Finir par un commentaire taoïste de la Kabbale me rempli de jubilation, mais combien d'entre vous irons jusqu'à cette note ?

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note 6

En résumant en 3 points les fonctions du modèle sénaire, je ne peux m'empêcher de considérer que ces trois étapes de la connaissance forment un trigramme en elles-même. La taxinomie, la première étape, fonde les autres (il faudrait relire Foucault), la dernière représente l'approche chinoise du Yi King, quant au structuralisme il se cale au centre du trigramme ainsi formé.

Ce trigramme (voir paragraphe 3) de la connaissance devrait alors être rapprochée de celui de la personnalité (L'Imaginaire ou contact avec le réel / le Symbolique ou niveau du langage / l'Inconscient ou contact avec l'autre). Voir l'approche lacanienne.

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note 7

Se reporter à la page d'introduction, pour une présentation complète, ou à l'analyse synchronique pour voir la définition théorique du "modèle Sénaire", qu'Abellio appelle encore la "Structure Absolue", ou encore l'analyse des dysfonctionnement des structures bureaucratiques pour une présentation globale de son fonctionnement.

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note 8

Ces notations A et S font référence à l'Acteur et au Système que présente Michel Crozier dans son livre "L'Acteur et le Système", éditions du Seuil 1977.

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note 9

Ce qui revient, en fait, à changer de point de vue: la modélisation d'un système ou d'une organisation est toujours relative au point de vue adopter. N'oublions pas que toute construction est relative à celui qui la réalise (c'est le sens même de notre démarche).

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Quelques mots sur l'auteur

page updated on 18/08/02
author : Alain SIMON
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