A   C   A    O   H
Tiddukla Tadelsant Tamazight di Ottawa - Hull
Association Culturelle Amazighe � Ottawa-Hull
 Amazigh Cultural Association in Ottawa - Hull
  tidukla tadelsant tamazigt Di utawua hul

TAMAZIGHT 
Pour une conf�rence nationale sur la question linguistique(1re (...)

http://www.elwatan.com/2004-11-01/2004-11-01-7167

La revendication de tamazight comme langue nationale de l�Alg�rie et officielle dans les r�gions amazighophones est-elle un recul par rapport � la formulation standard de langue nationale et officielle ?

Est-elle une concession gratuite faite � un pouvoir incapable d��l�vation et de g�n�rosit� ou un approfondissement n�cessaire dans la formulation de la demande linguistique ? Pour pouvoir avancer correctement dans ce d�bat indispensable et vital � plus d�un titre, un bref aper�u sur l��volution de la formulation politique de la revendication amazighe � travers les moments forts et significatifs qui ont r�alis� sa maturation me semble n�cessaire. La premi�re tentative de formulation politique de la revendication amazighe a vu le jour lors du s�minaire d�Iaakouren au mois d�ao�t 1980. Pendant cette rencontre qui s�est d�roul�e dans des conditions difficiles, o� se conjuguaient conflits politiques et clandestinit�, r�pression polici�re et luttes id�ologiques, la demande de la � reconnaissance des langues populaires (tamazight et l�arabe alg�rien) � a �t� avanc�e. Il a fallu attendre neuf ans pour assister � une nouvelle rencontre du MCB. Le 2e s�minaire organis� durant le mois d�ao�t 1989 � la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, dans un contexte marqu� par l�ouverture d�mocratique impos�e par le sacrifice pr�cieux des enfants d�octobre 1988, a revendiqu� tamazight, dans le rapport de synth�se de ses travaux, comme � langue nationale et officielle � c�t� de la langue arabe �. Suite au boycott de l��cole entam� le mois de septembre 1994, et lors des n�gociations d�avril 1995 entre les diff�rentes tendances du MCB et une d�l�gation de la pr�sidence de la R�publique, compos�e de Mohamed Betchine et Ahmed Ouyahia, la d�l�gation du pouvoir proposa la formule de tamazight � langue de tous les Alg�riens �. En r�action aux �v�nements violents et sanglants qui ont suivi l�assassinat de Matoub Loun�s, le 25 juin 1998, un groupe de militants (es) et d�intellectuelles kabyles, bas�s essentiellement � l��tranger, a rendu publique une p�tition dans laquelle il a revendiqu� tamazight comme � langue propre de la Kabylie �. Une ann�e apr�s, et au moment de l��lection pr�sidentielle de 1999 et dans une intervention dans le journal Le Matin, j�ai soulign� l�imp�ratif de l�approfondissement de la formulation de la revendication amazighe, en avan�ant celle de tamazighte � langue nationale de l�Alg�rie et officielle des r�gions amazighophones �. Apr�s cet aper�u rapide des diff�rentes formulations, je vais m�exercer � pr�senter un petit expos� des deux processus contradictoires qui ont fait de la r�alit� amazighe un probl�me politique qui conditionne le passage du pays vers la modernit� : le processus de n�gation et celui de la r�sistance. Fait plusieurs fois mill�naire, tamazight, identit�, langue et culture, a v�cu avant et depuis l�ind�pendance du pays sans statut politique et juridique. Continuellement sujette � des agressions ou au d�nigrement, d�ni et n�gation, elle a pu r�sister avec un succ�s �tonnant, admirable et in�galable au temps et aux entreprises ininterrompues qui visaient son an�antissement d�finitif et total. Cette situation de violence qu�elle a subie des si�cles durant n�a pas connu sa fin avec le recouvrement de la souverainet� nationale. Pis, cette violence s�est prolong�e d�une mani�re sournoise sous le pouvoir national. En effet, les gestionnaires de l�ind�pendance, convaincus que seule la cr�ation d�un nouvel homme alg�rien, d�une nouvelle nation et d�une nouvelle soci�t� est une garantie pour la p�rennit� de l�Etat, ont fait de l�unicit� leur vision et leur strat�gie. M�prisant � le proprement national �, insignifiant et ridicule � leur regard, ils se sont tourn�s totalement vers l�ext�rieur pour donner au pays une identit� respectable et respect�e ! � Charm�s � par le mod�les de l�Etat colonial, ils ont opt� pour le jacobinisme qui devait, � leur sens, conduire in�vitablement � la construction d�un Etat fort et respect�. Exclue de la strat�gie de l��dification de l�Etat national, tamazight est rest�e un outil social de communication et d�identification par excellence, mais �voluant dans un univers qui commen�ait � s�organiser et � se structurer sans elle, et par cons�quent, contre elle. Absente des textes fondateurs de l�Etat, inexistante dans le syst�me de l�enseignement, r�duite dans la radio, objet de campagnes de d�valorisation subventionn�es et men�es par de grands sp�cialistes de la propagande, elle commen�ait � se r�duire comme une peau de chagrin. En effet, le choix politique exclusiviste qui l�a plac�e � la marge de l�Etat et des institutions publiques qui ont utilis� les attributs de la nation contre l�un de ses principaux fondements l�a amplement affaiblie. Que ce soit au niveau linguistique ou sociolinguistique, tamazight a connu une r�gression significative, d�autant plus qu�avec la colonisation fran�aise de larges aires linguistiques amazighes ont tour � tour disparu. La Kabylie de la � hadra � qui s��tend de Ziama � Collo est l�un des derniers champs amazighs � changer de nature linguistique. En r�ponse � cette situation dramatique, un processus multiforme de lutte a �t� entam� par les militants amazighs, qui a abouti, des g�n�rations apr�s Imache Amar, � l��mergence du mouvement culturel amazigh sur la sc�ne publique. A l��nonc� du nom de ce valeureux militant de la cause nationale, j�aimerais ouvrir une parenth�se et souligner que son effacement, sa d�faite politique devant le p�re du nationalisme alg�rien, Messali Hadj, n�est pas la cons�quence de la faiblesse de sa proposition de l�Alg�rie alg�rienne, mais celle de la fragilit� d�une Alg�rie colonis�e, d�sorganis�e, pauvre culturellement, incapable de vivre pour elle-m�me et de se doter d�une identit� structurante propre. Face � Messali Hadj qui puisait ses th�ses et ses id�es d�un mouvement ba�thiste qui travaillait � d�passer les conflits religieux traversant les soci�t�s arabes par la primaut� de l�appartenance linguistique, un mouvement pris en charge par l��lite intellectuelle et politique de l�Orient, Imache ne disposait d�aucune th�orie �labor�e, ni d�aucun mouvement politique ni intellectuel de soutien. L�Alg�rie alg�rienne �tait et reste un concept g�n�reux, authentique, incarnant totalement la situation qu�il veut porter ; mais celle-ci reste ambigu�, troubl�e, et dont la synth�se demeure toujours floue et inachev�e. D�ailleurs, un demi-si�cle apr�s l�ind�pendance du pays, et malgr� l��mergence d�une intelligentsia nationale, l�alg�rianit� reste encore un concept vague et mal ma�tris�. De Imache � la crise du PPA-MTLD en 1949, � la dissolution de l�association Tiwizi � Paris en novembre 1954 pour permettre � ses membres de rejoindre la guerre de lib�ration, au groupe d��tude amazigh autour de Mouloud Mammeri en 1962, au cours de tamazight � la Fac centrale, aux artistes chanteurs qui ont repouss� les assauts de l�oubli, au r�le rassembleur et lib�rateur de la JSK, le combat n�a jamais cess� de se renforcer et de se concr�tiser. Le MCB, produit de la prise de conscience pour soi, lieu de cristallisation et d�expression du besoin identitaire amazigh, est venu r�parer le tragique �garement du pouvoir qui consistait en l�effacement de la m�moire historique, sociale et linguistique du peuple alg�rien et son remplacement par une conception uniciste, se d�finissant par un arabo-islamisme n�gateur et agresseur de l�alg�rianit�. En effet, ni la dimension amazighe, ni la dimension m�diterran�enne, ni la dimension africain n�ont �chapp� � l�occultation. Face aux exigences d�une �poque mena�ante, face � la menace de disparition d�une langue, d�une culture, d�un comportement sp�cifique devant la nature et devant les hommes, le mouvement amazigh, prolongement des vibrations r�sistantes d�un peuple attach� � sa destin�e, s�est �lev� contre l�absurde �rig� en syst�me de gouvernance en se donnant comme objectif principal l��l�vation de tamazight au rang de langue d�Etat .

Pour une conf�rence nationale sur la question linguistique (2e (...)
http://www.elwatan.com/200

4-11-02/2004-11-02-7217

Les �v�nements d�avril 1980 sont arriv�s pour marquer la rupture avec une p�riode de l�histoire impr�gn�e par un volontarisme aveugle, une vision surr�aliste de la nation, l�autoritarisme absolu et la r�signation d�une soci�t� �puis�e par des ann�es de guerre, de mis�res et souffrances. Le 20 avril, moment de reprise de l�initiative historique par un peuple mal consid�r�, exclu par une caste r�volutionnaire pi�g�e dans des luttes de leadership, est l�expression d�un besoin de libert�, de justice et de citoyennet� qui traverse la soci�t� en profondeur. Port�e par un mouvement social et politique arriv� enfin � sa maturit�, tamazight est devenue le contenant des revendications et des col�res de la population. Par tamazight, devenue par la force des choses un outil de r�sistance, de lib�ration et d��mancipation, l�ensemble des douleurs et des espoirs de la population est exprim�. Conduit par l��lite intellectuelle d�une r�gion politiquement en alerte, le mouvement amazigh constitue de ce point de vue une rupture int�ressante avec la culture du fonctionnement politique du mouvement nationaliste qui a marginalis� les lettr�s et a fait d�eux de simples faire-valoir. A cet effet, le 20 avril 1980 est par excellence l�acte fondateur de l�Alg�rie d�mocratique et citoyenne. De ce moment historique capital, le combat pour tamazight a r�alis� des avanc�es qualitatives importantes :
-  D�un combat clandestin, il est devenu un combat public.
-  D�une lutte groupusculaire, il s�est transform� en une lutte populaire.
-  D�un combat sans ligne strat�gique, il s�est dot� d�une ligne fondamentalement d�mocratique et non violente.
-  D�une formulation d�brid�e de la revendication, il s�est donn� une formulation politique claire et structur�e. Ce mouvement d�tonateur qui a encourag� l��mergence de la revendication de la libert� d�expression, des droits de l�homme, des droits des femmes et des syndicats, a permis le passage du pays, huit ann�es apr�s, du syst�me ferm� du parti unique, vers un syst�me pluraliste, ouvert sur des possibilit�s d�une v�ritable d�mocratisation de l�Etat et de la soci�t�. Le rassemblement du 25 janvier 1990, en repla�ant le combat amazigh dans la p�riode du pluralisme naissant, en contrecarrant la mainmise totale de l�islamisme sur la rue alg�rienne, a r�alis� le premier acquis institutionnel en arrachant la cr�ation du d�partement de langue et de culture amazighs � l�universit� de Tizi Ouzou. C�est le d�but d�un processus de r�habilitation politique, institutionnel et constitutionnel qui, de l�int�gration de tamazight � la t�l�vision avec le flash d�information en 1990, � la cr�ation du HCA en 1995, � l�entr�e de l�enseignement de tamazight � l��cole, � son inscription comme composante de l�identit� nationale dans le pr�ambule de la Constitution de f�vrier 1996, a abouti � son introduction dans la Constitution comme langue nationale sous la pression des dizaines de martyrs du Printemps citoyen. Cons�quence de la volont� du peuple � reprendre le contr�le de son destin, r�sultat d�une lutte continue et sans rel�che, aboutissement du red�ploiement de l��lite et de son emprise sur le cours de l�histoire, la reconnaissance constitutionnelle de tamazight retentit comme une rupture qualitative avec le jacobinisme qui a �touff� les richesses inestimables de la soci�t� et de l��me alg�riennes. Ce statut constitutionnel qui rectifie par sa double valeur politique et juridique une injustice historique subie par tamazight, s�curise cette langue et lui permet enfin de b�n�ficier des moyens juridiques, mat�riels, financiers et moraux de l�Etat. L�enseignement obligatoire, la cr�ation d�un centre d�am�nagement et de normalisation linguistique, l�aide � l��dition et � la cr�ation, une place compl�te dans les m�dias sont, en vertu de l�article 03 bis de la loi fondamentale, des obligations de l�Etat envers tamazight. De ce fait, il faut pr�ciser que toute n�gligence dans l��laboration des textes d�application et dans l�allocation des moyens est une violation manifeste de la Constitution. Egalement, ce statut qui a provoqu� par sa promulgation une fissure dans l�unanimisme arabo-islamique, qui a asphyxi� la sp�cificit� nationale, impose une red�finition de la nation alg�rienne et son acceptation comme r�sultat de son processus historique de formation. Cependant, malgr� ces acquis et ses droits recouverts, il est imp�rieux de dire que cette reconnaissance reste insuffisante pour garantir un d�veloppement complet et achev� de tamazight. Loin de moi l�id�e de banaliser cette avanc�e extraordinaire qui est la reconnaissance de son caract�re de langue nationale, je ne cesserai pas d�affirmer que le statut de langue officielle est le seul � m�me d�assurer son �panouissement irr�versible. Il est temps, plus que jamais, que cette langue soit li�e d�finitivement au sort et � l�avenir de l�Etat. Il s�agit d�une n�cessit� historique av�r�e. Le statut de langue officielle pour tamazight est une revendication strat�gique qui rassemble les militants de l�amazighit�, mais aussi, l�ensemble de la classe politique alg�rienne. En effet, et m�me lorsqu�ils s�abritent derri�re � des conditions � pour sauver leurs �mes, les partis conservateurs et islamistes, qui ont fini par se rendre � l��vidence que rien ne sert de tenter de bloquer la marche de l�histoire, ont admis le principe de l�officialisation de tamazight. Aussi, et afin de permettre un aboutissement avantageux, la concr�tisation de cette officialisation est actuellement de sujet d�un d�bat b�n�fique qui traverse les milieux militants et les �lites. En effet, ce statut qui implique des cons�quences sur la langue elle-m�me, sur la langue dans sa relation avec l�Etat et sur l�Etat comme lieu et moyen de manifestation de la nation est diff�remment per�u.

Semer les revers

A ce niveau, il est int�ressant d�observer que le statut formul� et r�clam� pour tamazight est indissociable du contexte politique et historique qui caract�rise son �manation. En effet, si la demande de la � reconnaissance des langues populaires � a �merg� durant la p�riode forte de la revendication du vrai socialisme par la frange gauchiste qui avait un ascendant sur le mouvement, celle de la � langue nationale et officielle � s�est articul�e copieusement avec la demande de la vraie d�mocratie des ann�es 1990. Si de son c�t�, l��nonc� de la � langue propre de la Kabylie � expose le sentiment de d�senchantement, de d�boire et de solitude politique des �lites de cette r�gion rebelle et l�urgence d�une prise en charge efficace et rapide de sa langue, la formulation de la langue officielle dans les r�gions amazighophones annonce, elle, l�exigence de la refondation de l�Etat alg�rien, centralis� et jacobin, pour le mettre au diapason des besoins r�els de la soci�t�, en rapprochant les centres de d�cision politique du contr�le citoyen. Le d�bat sur l�officialit� de tamazight, engag� d�une mani�re subtile, examine les meilleurs voies et moyens qui peuvent garantir l�avenir de tamazight. Il aspire � �clairer l�opinion publique sur la qualit� des propositions des uns et des autres des d�fenseurs de tamazight pour rendre rationnel, conscient et intelligent son engagement qui bute chaque fois sur des blocages mena�ants. Il illustre aussi, et d�une mani�re remarquable, l�avanc�e inestimable de la revendication et son arriv�e � l��tape de l�aboutissement. Donc, il est important d��viter de se tromper d��poque et d��tape. Aujourd�hui que la Constitution reconna�t tamazight comme une dimension essentielle de l�identit� nationale, que son article 03 bis stipule que tamazight est la langue nationale, il est na�f, d�raisonnable et incorrect de se ranger dans les ann�es de l�interdit et de la n�gation pour �viter d�affronter les questions les plus concr�tes et les plus urgentes. R�aliser l��tat d�avancement du combat identitaire et mettre en �vidence ses acquis et ses avanc�es ne comportent nullement des risques d�essoufflement et de d�mobilisation des masses ; bien au contraire, cet effort permettra de d�gager les raisons et les possibilit�s de nouveaux �lans. Accomplir cet effort de ma�trise de son action permet essentiellement de localiser ses lacunes et ses faiblesses. Cet effort est �vit�, et ces lacunes magistralement n�glig�es ! Sinon, comment accepter que les assembl�es de wilaya, dont le personnel est issu de la mouvance amazighe, n�allouent aucun budget pour la promotion de tamazight et n�engage aucune action d�envergure pour participer � d�gager une strat�gie de sa promotion digne de ce nom, sans dire un mot ? L�adversaire de tamazight n�est pas seulement celui qui la combat, mais c�est surtout celui qui l�exploite � ses propres fins, sans rien faire pour son d�veloppement ! En outre, il est temps de semer les r�ves et de mobiliser par l�espoir, au lieu d�enr�ler les populations par la simple exploitation de leurs douleurs et de leurs d�go�ts.

Vision rigide

En passant de la n�gation � la reconnaissance, la situation politico-juridique de tamazight a fondamentalement chang�. Il faut changer avec, pour rendre cette transition palpable, les mentalit�s, les attitudes et les pratiques ancr�es dans notre culture sociale et institutionnelle. Cette situation nous invite � explorer les avantages, les d�fauts et les limites que pr�sente chaque proposition de son officialisation, loin des blocages doctrinaux et des entraves politiciennes. Les forces hostiles � sa promotion sont en butte � l�engagement constitutionnel de l�Etat. C�est dans cette contradiction que vit le bloc id�ologique du pouvoir qu�il faut tirer le maximum de b�n�fices. Reprendre l�action concr�te dans la soci�t�, faire preuve de pragmatisme et d�opportunisme quant � la recherche des meilleures voies possibilit�s de faire de tamazight un outil de d�veloppement et d��mancipation sont un devoir citoyen. Je ne pr�tends pas aborder ce d�bat dans toutes ses facettes, mais je vais m��taler � mettre en �vidence quelques id�es et quelques remarques qui me semblent essentielles. La formulation standard de tamazight langue officielle au m�me pied que la langue arabe pr�sente, � mon avis, des inconv�nients certains. En effet, si la conjoncture de 1989 qui exigeait une formulation totale, en mesure de faire reculer le totalitarisme du pouvoir et les tentations h�g�moniques de l�islamisme politique, la justifie amplement, la reconnaissance du caract�re national de la langue et l�ouverture de la voie vers son officialisation appellent une r�adaptation qui se concentre sur la pr�dominance de son seul l�int�r�t. Cette formulation, si elle veille sur le principe de l��galit� de traitement entre les langues, installe, par son �nonc� d�j�, la question linguistique dans une dualit� improductive et sans int�r�t. En effet, elle ne propose pas un statut pour tamazight en tant que langue qui vit une r�alit� et qui conna�t des contraintes propres, mais un statut tout simplement comparable � celui de l�autre langue officielle qui est l�arabe. En effet, c�est partant d�une fausse analyse qui dit que la langue arabe a �t� impos�e par le pouvoir aux populations amazighophones, que la logique de l�imposition de tamazight � tous les niveaux de l�Etat et � tous les Alg�riens a �t� r�fl�chie. Cons�quence plus que cause, cette analyse a �t� inspir�e et conditionn�e par les tactiques sournoises du pouvoir qui ont travaill� � opposer la revendication amazighe � la langue arabe, � l�Islam, � la r�volution et � l�unit� nationale, et pr�senter ses d�fenseurs comme des serviteurs des forces �trang�res. Dans son effort de d�fense de ses int�r�ts, le pouvoir ne s�est pas d�fendu l�utilisation des moyens immoraux ; il s�est laiss� aller � des d�rives tristes et aux retomb�es dangereuses. En ce sens, la guerre id�ologique et psychologique qui a cibl� la cause amazighe a laiss� des blessurers difficilement gu�rissables. Par ailleurs, cette th�se qui se veut la plus radicale de toutes et consid�re tamazight non pas sous son aspect op�rationnel, dynamique et vivant, mais comme un legs historique partag� par l�ensemble des Alg�riens. Un legs fig�, momifi�, plac� comme patrimoine de tous et de chacun. Alors que la r�alit� de la langue amazighe veut que celle-ci soit consid�r�e comme une langue vivante et dynamique, une langue que des r�gions du pays utilisent toujours et dont d�autres ont perdu l�usage et emploient une autre langue, elle-m�me r�sultat de la rencontre entre tamazight et l�arabe coranique. � Langue de tous les Alg�riens �, cette formule avanc�e par le pouvoir en 1995, si elle est exacte d�un point de vue historique, elle constitue une aberration, une absurdit� �norme si nous examinons la pratique linguistique nationale. Par ailleurs, cette tendance qui veut imposer tamazight � tous les niveaux de l�Etat et � tous les Alg�riens puise sa vision d�une approximative appr�ciation de l�unit� du peuple alg�rien. Hant�e par le doute, inconfiante et incertaine, elle r�duit l�unit� de la nation au seul aspect linguistique, sous-estimant l�histoire, les douleurs partag�es, la culture et les coutumes communes, les int�r�ts mat�riaux, les liens subjectifs et la volont� de vivre et d��tre ensemble. L�unit�, confondue par certains avec l�unicit�, continue malgr� des ann�es de pluralisme de fa�onner les regards et les perceptions de la nation. Au lieu d�accepter nos diff�rences comme expression de notre richesse, comme des preuves manifestes de notre force, nous persistons � cultiver la m�fiance et la fragilisation de notre personnalit� de peuple. La volont� d�imposer tamazight � tous les niveaux de l�Etat � des populations qui ne la ma�trisent pas, d�coule, � tout dire, de l�absurde. Cette vision rigide et autoritaire risque de provoquer un mouvement d�incompr�hension pr�judiciable pour la coh�sion sociale, en plus du fait, qu�elle compliquera s�rieusement l�entreprise de son am�nagement et sa normalisation qui a besoin, non seulement de lois et de moyens mais aussi et surtout d�un environnement sociale favorable et enthousiaste. L�incompr�hension envisag�e n�est pas un signe d�une hostilit� inn�e, d�un refus de reconnaissance de l�autre, mais le produit d�une situation mal ma�tris�e, d�une �poque fa�onn�e par les semeurs de haine et d�ignorance. Rien et personne n�emp�chera les autres r�gions du pays, une fois qu�elles arriveront � ma�triser la langue amazighe � r�clamer son utilisation comme langue officielle. Revenons au vif du sujet, et poussons l�analyse plus loin. Nous allons nous rendre � l��vidence que la satisfaction de la revendication classique de la langue officielle au m�me titre que la langue arabe conna�tra dans les faits une application r�gionale. En mati�re de l�enseignement qui doit �tre obligatoire sur l�ensemble du territoire national, Boubekeur Ben Bouzid, ministre de l�Education nationale, a parl� dans un portrait qui lui �tait consacr� dans le journal El Watan du 13 mai dernier de l�obligation de l�enseignement de tamazight dans quelques wilayas du pays � partir de septembre prochain ! Que dire alors, lorsqu�il sera question de l�utilisation de la langue amazighe dans l�administration, la justice et autres institutions �conomiques et financi�res ?

Pour une conf�rence nationale sur la question linguistique?

http://www.elwatan.com/2004-11-03/2004-11-03-7260
Ce type de mise en �uvre de l�officialisation de tamazight provoquera in�vitablement une incoh�rence manifeste entre le texte constitutionnel et sa manifestation institutionnelle.
Cette incoh�rence aura comme cons�quence un double risque : celui de d�stabiliser le fonctionnement de l�Etat d�un c�t�, et celui d�offrir des possibilit�s de man�uvres aux adversaires de tamazight qui ne vont pas se d�sarmer d�un autre c�t�. N�est-ce pas dans les vides juridiques que baignent les esprits du mal et les semeurs de la faillite ! A ce propos, il est question de la culture de l�Etat, de la vision qu�ont les gouvernants de l�instrument avec lequel ils g�rent les int�r�ts de la nation. Un pouvoir qui tol�rera que la loi fondamentale d�cr�te tamazight langue officielle de l�Etat central et que les institutions la pratiquent comme langue officielle des wilayas de Kabylie et des Aur�s seulement, est un pouvoir irrationnel, d�sorganis�, incapable de puissance et de libert�. Au lieu de mettre en conformit� l�exercice institutionnel et la loi qui le r�git, on risque de continuer � baigner dans l�absurde et dans l�inconscient avec tous les risques que cela comportera sur l�avenir du pays. Il est plus honn�te et plus responsable de donner � cette r�gionalit� de fait un caract�re explicite, l�gal, r�glement�, au lieu de laisser les choses �voluer dans l�implicite et dans le non-dit. Les sp�cificit�s r�gionales ne sont ni des tares, ni des d�fauts, ni m�me une sp�cificit� alg�rienne. A ce propos, l�Alg�rie n�est pas condamn� � vivre ses sp�cificit�s comme des complexes, comme des d�viations, dans la clandestinit� et le refoulement qui produit tous les ravages et tous les maux. A la place du clanisme et du r�gionalisme sou-terrain, sournois et d�stabilisateur, il est salutaire d�instituer les r�gions et les doter d�assembl�es �lues avec des pr�rogatives claires et bien d�finies. En effet, l�Alg�rie doit ext�rioriser sa diversit� pour se r�concilier avec elle-m�me ; c�est par son acceptation qu�elle reprendra l�initiative historique enclench�e un certain 1er novembre 1954 et stopp�e par la rupture op�r�e avec les structures authentiques de la r�volution. L�Alg�rie est un pays riche par sa diversit�, une nation compos�e et complexe. Dans son effort de reconstruction, elle doit saisir la v�rit� que c�est sur le syst�me des r�gions que les pays les plus �volu�s avancent. Ce syst�me de gouvernement qui permet une meilleure relation entre l�Etat et le citoyen, est lui-m�me la source de la force des institutions et non pas le contraire comme il est per�u. En effet, on ne r�forme pas un Etat pour le plaisir de le faire, comme on ne r�forme pas un Etat fort, fonctionnant sans d�faillance, au risque de d�r�gler sa marche, mais on r�forme un Etat faible, d�sorganis�, qui fonctionne difficilement et mal, pour le rendre fort et cr�dible. Un petit tour, dans n�importe quelle administration publique, nous fera voir la douleur et la souffrance qui coulent comme une sueur sur le visage des citoyens. Dans leur regard vide, nous saisissons que plus aucun lien d�affection et d�estime ne les rattache � l�Etat qui les organise. La biofficialit� linguistique est un pas audacieux vers une r�forme ambitieuse de l�Etat. L�Afrique du Sud qui, quelques ann�es apr�s sa sortie de l�apartheid, est devenue le pays du continent le plus moderne et le plus d�velopp�, utilise onze langues officielles. Et pour bien g�rer cette situation, elle a adapt� son Etat � sa r�alit� sociologique en optant pour la forme compos�e de celui-ci qui est le f�d�ralisme. Cela ne l�emp�chera certainement pas de recevoir pour la premi�re fois dans l�histoire du continent africain, la Coupe du monde du football. Il est temps pour nous de cultiver l�intelligence dans notre fa�on de voir, de dire et de faire les choses, surtout, lorsque ses choses dites et faites engagent tout un pays et tout un peuple. Il y a lieu aussi de rappeler que la d�limitation de six r�gions historiques qui ont support� la guerre de Lib�ration nationale a �t� un motif de la victoire et du triomphe du peuple alg�rien, et non pas une raison de sa d�faite ! En adaptant les structures de la r�volution avec les r�alit�s sociologiques du pays, les artisans de l�Etat alg�rien ont permis aux masses d�agir dans le sens de l�histoire. Il s�agit de croire une nouvelle fois en le g�nie du peuple alg�rien. Certes, les tenants du pouvoir actuel gardent un contentieux historique avec les animateurs du congr�s de la Soummam qui ont structur� la guerre de Lib�ration nationale, mais ce contentieux ne doit pas se placer comme une menace sur l�avenir de la nation. Abordant maintenant la question de la concession qui est l��cart par rapport � une conduite d�j� trac�, une r�vision � la baisse d�exigences avanc�es. Je ne crois pas que la revendication d�une langue nationale de l�Alg�rie et officielle des r�gions amazighophones soit un recul par rapport � la revendication classique d�j� cit�e. En effet, cette formulation, si elle approfondit la revendication initiale de la langue nationale et officielle, r�pond � un double souci : celui de mettre les moyens constitutionnels et institutionnels � la disposition de la langue d�un c�t� et celui d�assurer les conditions sociologiques et humaines de la r�ussite de sa revitalisation totale d�un autre c�t�. En effet, il n�y a de recul ni dans le principe de la reconnaissance, ni dans la qualit� du statut exig�, ni m�me dans l��galit� de l�estime et dans le traitement �quitable entre les langues officielles du pays. En tout, il s�agit d�une d�limitation claire, pens�e et ma�tris�e des territoires d�exercice de cette officialit�. Une d�limitation qui se repose sur une r�alit� sociolinguistique palpable, un regard sans complaisance sur l��tat de sant� de la langue, et qui est motiv�e, surtout, par le souci d�offrir � celle-ci toutes les chances de la r�ussite. Je conc�de qu�on peut parler d�un recul dans l��tendu territoriale de cette officialit�, mais dans l�absolu il faut le reconna�tre, car l�exercice linguistique amazigh couvre, comme il a �t� d�j� dit, les r�gions amzighophones sans les autres r�gions, et le besoin de son utilisation s�exprime dans ces r�gions sans les autres. Dans l�esprit de ce d�bat, il est imp�ratif � l�heure des tractations entre le mouvement des archs et le gouvernement de rappeler que le principe de la s�paration des pouvoirs implique la s�paration du politique et du scientifique. Ce dernier ne doit pas seulement mettre en �uvre les d�cisions du politique, mais surtout pr�parer et exposer les donn�es objectives qui rendent la prise de d�cision politique intelligente, rationnelle et rentable. Au m�pris de ce principe, il y a le risque de voir les pouvoirs publics recourir � l�officialisation de tamazight en tranchant la question des caract�res en faveur de Tifinagh. C�est pour eux, un moyen d�tourn� d��viter une pol�mique id�ologique sur le sujet de la transcription. Il est, en effet, � craindre que nous allons nous retrouver, encore une fois, face � ce comportement qui consiste � fuir les probl�mes au lieu de les affronter et de les solutionner. C�est une tradition bien ancr�e, avec laquelle il faut rompre sans tarder. La question de la rentabilit� et de l�efficacit� d�une solution ne doit pas �tre rel�gu�e au profit d�une sentimentalit� handicapante, d�une vision anachronique de l�Etat et de la nation. L�int�r�t de la langue amazighe en tant que moyen de d�veloppement et de lib�ration doit primer sur toute autre consid�ration subjective, et l�unique r�glement juridique qui permettra son �vacuation comme obstacle � la normalisation envisag�e peut compliquer davantage la situation. Il est capital pour les g�n�rations � venir que les acteurs d�aujourd�hui examinent leurs d�cisions avec �quit�. En conclusion, la mise en application des cons�quences qui d�coulent de la reconnaissance constitutionnelle de tamazight comme langue nationale, l�engagement politique et officiel de l�Etat quant au principe de son officialisation, l�organisation d�une conf�rence nationale sur la situation linguistique du pays, une conf�rence ouverte � la participation de toutes les comp�tences av�r�es, dont la mission est de se pencher sur l��laboration d�une charte nationale des langues qui sera pr�sent�e au pouvoir politique pour visa, et dont un conseil national des langues, observera et veillera sur l�application, peuvent, � mon humble avis, �tre des entreprises � m�me de permettre au pays le d�passement de la crise et le passage vers la modernit�.

(*) Animateur du MCB et auteur d�expression amazighe

Brahim Tazaghart

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