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23�me anniversaire de l�assassinat de
Kamal Amzal
http://www.depechedekabylie.com/read.php?id=11539&ed=MTAzOQ==
Souvenirs avec
l�enfant de Tiferdoud
Amzal Kamal, que j�ai
connu en 1974 lors de notre passage en sixi�me au CEM Amar Ath Chikh de
A�n El Hammam, �tait de ceux qui, tr�s t�t, ont pris conscience de
l�importance de la culture et de la r�pression qui s�abattait sur la
langue et les symboles de la culture kabyle.";
C��tait au temps des premiers boutons de la
fi�vre berb�re pour des lyc�ens qu�on a oblig�s � aller ovationner, en
1977, le Pr�sident Boumediene lors de l�inauguration solennelle de
l�universit� Oued A�ssi de Tizi Ouzou. Nous f�mes le d�placement avec
les travailleurs de l�entreprise communale, Cotrah, et l�ensemble des
coll�giens de la da�ra de A�n El Hammam qui comprenait � l��poque
Iferhoun�ne, Tassaft (Yataf�ne) et Ouacifs.
C��tait au lyc�e Ben Boula�d de l�ex-Michelet- inaugur� par le m�me
Boumediene- que nous effectu�mes la classe de 4�me ann�e moyenne faute de
places au CEM Amar Ath Chikh o� nous avions pass� quand m�me les trois
premi�res ann�es de coll�ge. Le d�placement sur Oued A�ssi que la kasma et
la mandoubia du FLN, parti unique, voulaient transformer en f�te et en
pl�biscite- avec, en prime, casse-cro�te et journ�e ch�m�e-, se mua en un
r�quisitoire en r�gle contre le pouvoir et la dictature. Chants, cris,
hu�es, ��Imazihgen!���tous les mots d�ordre lib�rant le souffle et
l��nergie de la jeunesse kabyle pass�rent pour �accueillir un pr�sident
qui a pris la poudre d�escampette d�s sa descente de voiture pour se
fondre parmi les officiels qui l�attendaient depuis la matin�e dans la
cour de l�universit�. Amzal Kamal, que j�ai connu depuis 1974 lors de
notre passage en sixi�me au CEM Amar Ath Chikh de A�n El Hammam, �tait de
ceux qui, tr�s t�t, ont pris conscience de l�importance de la culture et
de la r�pression qui s�abattait sur la langue et les symboles de la
culture kabyle. Nous en discutions � longueur d�ann�e ; nous narguions nos
professeurs �gyptiens qui ne comprenaient rien � nos revendications, comme
ils ne comprenaient rien non plus � ce qui leur arrivait sur ces hauteurs
situ�es � plus de 1000 m d�altitude lorsqu�ils titubaient et faisaient des
chutes rocambolesques sur de la neige �paisse de 80 cm suscitant r�actions
hilarantes et moqueries de la part des coll�giens.
Nous recevions les �chos de nos a�n�s, lyc�ens et universitaires, qui
�taient en contact avec l�Acad�mie berb�re de Paris et son pr�sident
Bessaoud Mohand Arab. Nous baragouinions les quelques n�ologismes qui nous
parvenaient comme Idles, Awezghi, Teyri�et nous nous moquions de ceux qui
en ignoraient le sens.
Nous l�appelions Madjid, un surnom qu�il avait int�rioris� et qu�il aimait
bien. N� en 1962 � Tiferdoud, un village de la commune d�Abi Youcef juste
au-dessus de Taourirt-Amrane, mon village. C�est sur cette butte haute de
1200 m d�altitude que Madjid fit son cycle primaire. Je fis sa
connaissance en septembre 1974 lors de la rentr�e scolaire au CEM Amar Ath
Chikh.
Sur le chemin de Sidi Ali Uyahia
L�image qui me revient de ce temps lointain, temps de l�innocence, de
l�insouciance et des d�couvertes est celle de Madjid, gar�on jovial, au
sourire �ternel et � la taille l�g�rement inf�rieure � la moyenne. Nous
avions un tron�on de route � faire en commun quotidiennement pour nous
rendre au coll�ge. Les �l�ves de Tiferdoud et ceux de Taourirt-Amrane se
rencontraient chaque matin au col de Sidi ali Uyahia, appel� aussi Tizi
n�Boucha�b, un lieu d�sertique, faisant partie de la RN 15, � l��poque
craint pour ses rafales de vent et ses �paisseurs de neige qui pouvaient
facilement �touffer les jeunes enfants que nous �tions ou leur faire
�garer le chemin. Les sommets d�Ighil n�Sebt n�avaient pas encore l�image
��urbaine�� d�aujourd�hui : lyc�e, h�tel, brigade de gendarmerie,
b�timents, villas,�C��tait des maquis qui portaient encore les traces des
incendies de la guerre de Lib�ration nationale. Apr�s l�ind�pendance, nos
grands-m�res allaient ramasser des fagots de bois calcin�s sur ces
hauteurs. Elles furent nettoy�es en quelques ann�es et les pouvoirs
publics de l��poque y trac�rent des banquettes qui dispara�tront avec la
fi�vre de l�urbanisation anarchique de la fin des ann�es 1970.
Au retour du coll�ge, nous empruntions le m�me chemin avec nonchalance et
distraction, fatigu�s par le cours d�un prof �gyptien ou satur�s par des
cours de math�matiques et de sciences dispens�s par les brillants Koucha
et Hamel Abdelkrim. Ce dernier, enfant de Tizi Hibel, avait l�habitude de
nous d�crire Mouloud Feraoun, un �crivain de son village qu�il a connu
physiquement, emmitoufl� dans son burnous kabyle. C��taient les derni�res
images que notre professeur, alors jeune adolescent, gardait du grand
�crivain de son village avant son assassinat en 1962 par l�OAS.
En cours de route, outre les commentaires et observations que nous nous
permettions sur nos enseignants- Chikhi, Lefgoum, A�t Larbi, Labcheri,
Yahia, Abdelhamid, A�t Ouakli�-, on s�adonnait � nos ��jeux�� favoris, le
maraudage. C�est ainsi que nous cueillions des ch�taignes, parfois
compl�tement vertes, dans des propri�t�s priv�es attenantes au coll�ge.
Dans la pr�cipitation et la crainte d��tre surpris par le ma�tre des
champs, nous prenions les fruits avec leurs bogues piquantes dans nos
cartables. Nous nous arr�tions aussi sur quelques vignes, situ�es dans un
vallon, en bas de la route, pour les soulager de leurs fruits, Muscat ou
Hmar bou Ammar, lesquels, souvent n�ont pas encore atteint leur maturit�.
Nous rincions les grappes de raisin � la belle et fra�che source de
L�A�incer n�Sa�d Ouameur, aujourd�hui an�antie par les villas qui sont
�lev�es sur son emplacement. Sous un bel ormeau ou � l�ombre d�un fr�ne
aux denses ramures, nous d�gustions tranquillement le fruit de nos
efforts. Il arrivait qu�on nous d�non��t aux propri�taires des vergers ;
alors, nous �vitions cette route pendant quelques jours, histoire de nous
faire oublier. On prenait plut�t le chemin de la cr�te d�Ighil n�Sebt qui
passe par l�h�tel Djurdjura et redescend vers le CEM.
Kamal Amzal, dit Madjid, fait partie de ces �l�ves �lite de la classe et
du coll�ge. Il lisait des livres en arabe et fran�ais pris � la
biblioth�que de l��tablissement. Celle-ci �tait bien garnie par des
collections de Victor Hugo, Zola, Taha Hussein, Les Mille et une nuits,�Nous
�tions suspendus aux l�vres d�un professeur d�arabe qui nous lisait �
haute voix chaque samedi matin- c��tait le d�but de week-end � l��poque-
des extraits de ��Paul et Virginie��, un roman de Bernardin de
Saint-Pierre dans la traduction d�El Manfalouti. Nous en attendions la
suite avec une impatience et un enthousiasme d�mesur�s. La fin tragique
des h�ros de l�histoire nous fit plonger dans une tristesse et une
m�lancolie inou�e. Le d�sir de relire le livre et de l�avoir dans ma
biblioth�que fut si intense que j�ai fait tout pour obtenir le titre et
l�auteur de l�ouvrage aupr�s de notre professeur. Mon p�re me l�envoya
alors de France, et j�en ai fait profiter Madjid qui voulait le lire �
tout prix. A partir de la classe de 5e, nous partagions la lecture
d�Alg�rie Actualit�, et particuli�rement sa 24e page anim�e par Fazia
Hac�ne et les dessins de Slim. Un peu plus tard, nous dev�nmes les
inconditionnels du Monde et du Figaro, journaux qui se vendaient � trois
dinars. Madjid s�int�ressa tr�s t�t � Tifinagh. Il en ma�trisait la
g�om�trie et les contours malgr� la clandestinit� dont �tait frapp� tout
symbole de l�amazighit�. En effet, pour un signe Z en berb�re ou des
initiales de la JSK dans cette langue aper�us par les gendarmes, nous
�tions pers�cut�s et pourchass�s. Ironie du sort, l�ancien si�ge de la
gendarmerie nationale de A�n El Hammam s�est transform�, presque trente
ans apr�s, en centre culturel portant le nom de Matoub Loun�s !
La p�pini�re du lyc�e Ben Boula�d
Madjid lisait presque avec la m�me passion Taha Hussein, El Manfalouti,
Balzac et Stendhal. Il �tait un bon vivant, aimant les parties de
football, les blagues, les f�tes de village et particuli�rement le t�bel
qui �gaye cette partie de la Haute Kabylie pendant la f�te de l�Achoura.
A l�occasion de cette f�te religieuse, nous nous rendions aussi bien �
Cheikh Arab, un mausol�e de Taourirt-Amrane, qu�� Jeddi Menguellet, un
autre mausol�e de l�a�rch n�Ath Menguellat qui attirait des milliers de
p�lerins pendant trois � quatre jours. L�occasion de l�Achoura fait sortir
les filles kabyles de chez elles. Dans des robes traditionnelles, elles
emplissent les rues et venelles d�une ambiance et d�une joie flamboyantes.
Eclats de rires, marche gracieuse, v�tements bariol�s, elles ne peuvent
laisser indiff�rents les jeunes gar�ons qui font le guet sur un talus,
derri�re un arbre ou derri�re une foule compacte distraite par les rythmes
effr�n�s du tambour et les pas saccad�s des danseurs. Madjid me fit cette
remarque un jour : \" On dirait une parade nuptiale ! \". Loin d��tre un
dragueur trivial, il �tait plut�t un dandy, mieux, un artiste � sa fa�on.
Parvenus au cycle du lyc�e, notre amiti� ce renfor�ait par ce c�t� ��intellectuel��
qui fait que l�un r�sume � l�autre le livre qu�il a lu, l�article du
journal qui l�a frapp�,�Il faut dire que le lyc�e Mostefa Ben Boula�d de
A�n El Hammam, inaugur� par Boumediene en 1976, �tait un fleuron de
l�Education nationale, aussi bien par les enseignants qui y exer�aient (le
Tunisien Nefzaoui, les Fran�ais Kouty et Godasse, les Alg�riens Kamoum
Malek, Boukersi, Alil�che Md Ch�rif) que par les �l�ves qui ont acquis
d�j� une bonne base au coll�ge.
L�actualit� de l��poque tournait autour du pr�sident am�ricain,
l�ultra-r�publicain Ronald Reagan, l�invasion des �les Malouines par
l�arm�e britannique et la guerre anglo-argentine qui s�ensuivit, la gr�ve
de la faim des Ind�pendantistes irlandais et � leur t�te Boby Sands qui
succomba apr�s 64 jours d�inanition dans l�indiff�rence la plus cynique de
la Dame de fer, Margaret Tatcher, premier ministre � l��poque.
Apr�s la crise du Sahara Occidental, l�Alg�rie s�approchait de la fin de
r�gne de Boumediene avec la mont�e en puissance du courant panarabiste
(Mohamed Salah Yahiaoui) qui a pu imposer le week-end religieux (jeudi-vendredi).
Tous ces sujets �taient le pain quotidien de Kamal Amzal avec ses copains
et amis. Il en discutait avec force d�tails en comparant ce qu�en disaient
les diff�rents journaux et les stations de radio de l��poque. Aucun th�me
ne lui �tait �tranger.
C��tait aussi le sommet de la chanson kabyle. Nous fredonnions les
nouveaux airs de Ferhat Imazighen Imula, Ayagu d�A�t Menguellet, les
premi�res chansons de Malika Domrane et les explosives tirades de la
nouvelle �toile montante de la chanson kabyle, Matoub Loun�s.
L�actualit� nationale qui touchait de pr�s Madjid �tait l�orientation
scolaire dont il avait b�n�fici� en septembre 1978. en effet, il �tait
orient� vers le fili�re ��Lettres bilingues�� cr��e par le ministre de
l�Education de l��poque, Mostefa Lacheraf. C��tait une mini-r�volution qui
remplit de joie tous les �l�ves un tantinet enclins aux Belles Lettres.
C��tait aussi une premi�re tentative d�endiguer l�arabisation tous azimuts
instaur�e par le courant ba�thiste. Madjid se retrouvera ainsi dans son
�l�ment. Orient� vers la fili�re ��Sciences transitoires��, j�eus un
pincement au c�ur et un infini regret de ne pas pouvoir �tre dans la m�me
branche que Madjid d�autant que j�avais des pr�dispositions av�r�es pour
les lettres. J�en fis part au proviseur du lyc�e, Ahc�ne Kacher, un homme
pond�r� et avis�, qui me d�conseilla fortement de suivre les Lettres
bilingues, parce qu�il subodorait d�j� des coups fourr�s politiques qui
allaient faire capoter cette innovation.
Une ann�e apr�s, les appr�hensions de M. Kacher seront confirm�es. Les
Lettres bilingues furent supprim�es et les �l�ves de cette sp�cialit�s ont
�t� ��r�cup�r�s�� dans les Lettres arabis�es. Le ministre de l�Education,
Lacheraf, se retrouvera ambassadeur � Mexico. Malgr� ce revers impos� par
le courant ba�thiste, qui a vu �merger Kharroubi, Yahiaoui, Na�t Belkacem,
Madjid n�a pas perdu espoir. Pour lui, c�est l�occasion de redoubler
d�effort et d�imagination pour s�armer de savoir et de science quitte � le
faire en autodidacte, ph�nom�ne qui �tait tr�s r�pandu � l��poque.
On se procurait des livres interdits par la censure, on photocopiait des
sujets de bac fran�ais, y compris ceux de philosophie que Le Monde de
l�Education publiait chaque mois de juillet. De m�me les ABC du bac et les
manuels Vuibert �taient notre pain quotidien.
Puis vint le Printemps berb�re. Nous �tions trop jeunes pour faire les
meneurs d�hommes pendant ces longues semaines de gr�ves et de
manifestation.
Mais nous avions particip� � toutes les manifestations ; celle qui a
r�duit en bris le cin�ma de la ville de A�n el Hammam et en cendres le
si�ge de la da�ra, comme celle, pacifique, organis�e en direction de la
ville de Larba� Nath Irathen. Au bout de 16 km de marche, �reint�s, mais
oubliant la faim et la soif, nous f�mes accueillis par les forces anti-�meutes
et nous rebrouss�mes chemin dans la d�bandade.
Il faisait d�j� nuit quand, �puis�s et recherch�s par nos familles, nous
rentrions � Michelet.
J�ai perdu de vue Kamal Amzal depuis l�examen du bac (juin 1981) apr�s
sept ann�es de solide amiti�, de bonne compagnie et de complicit�
intellectuelle.
Un an et demi plus tard, le 3 novembre 1982, alors que j��tais �
Mostaganem pour des �tudes d�agronomie, j�appris par El Moudjahid la mort
d�un �tudiant � Ben Aknoun dont le nom �tait Amzal Kamal et cela ��suite �
des �chauffour�es�� ! Ddounit tezzi yissi ! (Paroles de Matoub).
Amar Na�t Messaoud
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