Quel
avenir pour tamazight ? Le tort qu�a caus� l��cole alg�rienne � la langue amazighe est incalculable. La t�l�vision et les organismes culturels de l�Etat ont fait le reste. Ils avaient sciemment pris le relais, parachevant une entreprise destructrice, politiquement programm�e.
C�est une situation incontestablement
dramatique dans la mesure o� le recul dans l�usage de tamazight, dans les
40 ans d�ind�pendance, d�passe de loin la cadence d�arabisation enclench�e
durant les 4 derniers si�cles. En 1844, les Alg�riens parlaient leur
langue maternelle dans une proportion de 65 � 70 %. En 2003, l�utilisation
de la langue amazighe dans l�Est alg�rien par exemple disparaissait des
rues de Batna et, plus grave, s�estompait aussi dans les foyers, alors que
juste en 1975, dans cette m�me ville, comme � Khenchela, A�n Be�da, A�n
M�lila et Biskra, l�usage de tamazight dans ces zones �tait compl�tement
pr�pond�rant. Cela dit, les Alg�riens ne se sont jamais lib�r�s du cycle
de la � d�samazighation � de leur pays, lequel avait redoubl� d�intensit�
d�s l�ind�pendance du pays. Pour rappel, le gouvernement de Ben Bella
�tait le premier � avoir ouvert le feu contre la langue originale des
Alg�riens, suivi ensuite par toute la caste qui h�rita, sur 40 ans... et
l�Etat et les symboles. Comme si les gouvernements successifs de l�Alg�rie
avaient voulu reprendre pour leur compte la � d�berb�risation � historique
apparue lors de la cr�ation des petites entit�s dites douailate el islamia,
une des premi�res causes du tron�onnage linguistique du pays. Il faut dire
par ailleurs que, globalement, l�antiamazighisme (au sens de l�anti-langue)
puise aussi ses sources dans tout ce qu�avaient engendr� comme
cons�quences les descriptions fantaisistes employ�es par l�Orient arabe �
l��gard de l��l�ment berb�re. Reste � souligner qu�aujourd�hui, et apr�s
une aventure tumultueuse de ce tout maternel, il n�est gu�re difficile
d�identifier l�autre grande source de la probl�matique qu�est la
t�l�vision nationale. En somme, le destin sarcastique qu�avait r�serv�
cette bo�te � l�amazighit� rel�ve du pur crime, d�un acte contre nature et
d�une perversion abominable. Ainsi, il n�est pas moins vrai d�affirmer que
la situation dans laquelle se trouve la mauvaise prise en charge de
tamazight a fait en sorte que cette langue utilis�e, il y a 600 ans, dans
un territoire de la taille d�un sous-continent, vient, h�las ! de
s�inscrire dans le r�tr�cissement du champ linguistique qui frappe le
monde actuellement. L�Unesco estime que toutes les deux semaines, il y a
mort d�une langue parl�e dans la plan�te. C�est un drame puisqu�il s�agit
d�une perte d�acquis de civilisation, une perte qui, selon les pr�visions,
portera sur la disparition de 5500 � 6000 langues parl�es, d�ici 2100,
exactement au m�me titre que le latin et le grec ancien. L�Unesco qualifie
la situation de � massacre � qui menace s�rieusement le devenir de
l�humanit�. Les langues peuvent r�v�ler des tr�sors culturels, historiques
et m�me biologiques dont leurs locuteurs ont seuls le secret. Mais les
partisans du mouvement assimilationniste mondial voient l�horizon d�une
autre mani�re. Pour eux, tout cela veut dire : plus de gens sur la plan�te
capables de se parler et de se comprendre. Un chroniqueur de la National
Review, John J. Miller, abonde dans le m�me sens en voyant mal comment les
820 langues parl�es de la Papouasie puissent consid�rer un mod�le auquel
les autres civilisations peuvent se plier. |